31 juillet 2017

Jack Jedwab, président de l'Association d'études canadiennes (AEC) et de l'Institut canadien des identités et des migrations (ICIM), paraissait destiné à une carrière en économétrie, jusqu'à ce qu'un cours d'histoire économique fasse naître chez lui un intérêt pour un sujet qu'il n'avait encore jamais exploré, intérêt qui l'animera pour le reste de sa vie. M. Jedwab a rapidement constaté que son aptitude à visualiser et à comprendre la plupart des choses sous la forme de chiffres pouvait également être appliquée à l'étude de l'histoire.

« Mon intérêt pour l'histoire est né d'un désir d'en apprendre davantage sur mes ancêtres et d'une fascination à l'égard des identités et des origines. Cela dit, ma passion de jeunesse pour les chiffres demeure bien vivante dans le cadre de mon travail; j'écris ce que j'appelle de la mathémathistoire. »

Ayant décidé de changer de domaine principal d'études, M. Jedwab a finalement obtenu un doctorat en histoire canadienne à l'Université Concordia. Il est actuellement président du Congrès national Metropolis, soit la plus importante conférence du pays sur l'immigration et l'intégration, et est le rédacteur en chef fondateur et l'éditeur de la revue Diversité canadienne. Depuis 1983, M. Jedwab a donné des cours aux départements de sociologie et de sciences politiques de l'Université McGill, de l'Université du Québec à Montréal et de l'Université Concordia, de même qu'à l'Institut d'études canadiennes. Il est l'un des chercheurs en sciences sociales les plus cités par les médias nationaux ainsi qu'un intellectuel accompli sur la scène publique.

Aujourd'hui président de l'AEC et de l'ICIM, M. Jedwab s'efforce depuis près de 20 ans d'accroître les connaissances des Canadiens sur leur histoire et leurs réalités actuelles au moyen de divers programmes, activités et publications, ayant notamment été conseiller au sein du comité de l'Enquête sur la diversité ethnique de 2001 de Statistique Canada. Bien connue pour ses recherches sociales sur des sujets tels que la santé, la religion, la langue, les enjeux socioéconomiques et les sports, l'AEC étudie, applique et analyse une large gamme de données de Statistique Canada dans nombre de ses publications et rapports.

« Il est extrêmement important que nos travaux de recherche soient fondés sur des données probantes, et cela nécessite un bon soutien empirique. Pour comprendre adéquatement des sujets tels que l'histoire ou la migration et les identités, il faut de bonnes données démographiques, de bonnes données sur les attitudes et une bonne capacité de suivi, et l'on a aussi avantage à connaître l'histoire de la migration. Il n'est pas possible de quantifier toute l'expérience humaine, mais ces données enrichissent énormément nos recherches. »

La quadrature du cercle

L'AEC lance et soutient des projets, activités et programmes de recherche multidisciplinaires sur le Canada. Elle s'intéresse tout particulièrement aux conséquences des événements historiques clés sur la composition de la population et sur les perceptions à l'égard du Canada. Ces dernières années, l'organisme a également élargi ses activités à plusieurs autres domaines de connaissances, dont l'identité et la migration, la diversité ainsi que les langues officielles, et a réalisé des enquêtes pour déterminer l'étendue des connaissances des Canadiens sur les institutions de leur pays. L'AEC emploie à la fois des données qualitatives et quantitatives, telles que des données d'ordre général fournies par le Programme du recensement, des recherches sociales réalisées dans le cadre de l'Enquête sociale générale et des données sur l'opinion publique recueillies sur le Web.

En combinant des données descriptives et subjectives avec des statistiques, des pourcentages et d'autres éléments de recherche empirique, M. Jedwab affirme que l'AEC « résout la quadrature du cercle », permettant de ce fait une compréhension plus riche et plus approfondie de ses recherches.

L'approche de la « mathémathistoire »

Quand M. Jedwab s'est joint à l'AEC en 1998, il a appris que les gouvernements fédéral et provinciaux souhaitaient vivement remédier à ce qu'ils percevaient comme un manque de connaissances des jeunes Canadiens sur l'histoire de leur pays. Or, apprendre l'histoire ne se limite pas à comprendre des événements selon une perspective chronologique et thématique. De nos jours, on espère également pouvoir appliquer les connaissances historiques de manière pratique, en dehors de la salle de classe. À cette fin, M. Jedwab enseigne l'utilisation de SPSS Statistics, un ensemble de logiciels servant couramment à l'analyse statistique. En outre, un autre cours de sciences sociales donnera cet automne l'occasion aux étudiants de gérer une ONG factice, ce qui leur permettra d'étudier comment examiner, établir et hiérarchiser le budget d'une entreprise.

« Lorsque j'enseigne “trop” de statistiques dans mes cours — et je suis tout à fait disposé à admettre que c'est le cas — c'est en vue de doter mes étudiants d'un ensemble de compétences précis qui leur donnera une longueur d'avance. Il ne suffit pas de savoir en quelle année a eu lieu la guerre de 1812; il faut aussi posséder de bonnes compétences empiriques. L'enseignement de l'histoire offre de multiples occasions d'atteindre ce but. »

Malgré ces efforts, il reste plusieurs défis à surmonter en ce qui concerne la communication de l'histoire, y compris la manière dont les Canadiens obtiennent, digèrent et conservent leurs connaissances. « Aujourd'hui, notre société préfère “consommer” l'information en petits morceaux et voir les choses sous une forme visuelle, par exemple dans un gazouillis. Il est très difficile de résumer des histoires souvent complexes et détaillées en seulement 140 caractères. Par conséquent, on doit se pencher davantage sur la manière dont les gens se souviennent de ce qu'ils ont appris. »

Une révolution démographique

L'AEC tente de relever ces défis uniques en publiant des documents, en diffusant régulièrement des données sur l'opinion publique et en tenant des conférences aux fins de discussion et de réseautage.

En 2017, l'ICIM organise une série de conférences un peu partout en Amérique du Nord, dont une intitulée Mesurer l'identité, la diversité, et l'inclusion au Canada @ 150 et au-delà, qui aura lieu du 30 novembre au 1er décembre 2017 à Gatineau, au Québec. Aux yeux de M. Jedwab, la conférence à venir représente une suite logique à l'événement de la série de conférences de Statistique Canada sur L'histoire de la diversité ethnoculturelle du Canada en chiffres, dont il a été l'un des cinq experts invités. « J'estimais qu'il était fondamental de poursuivre la conversation et je voulais trouver un moyen de le faire ensemble, » dit-il.

La discussion portera surtout sur la composition démographique très changeante du Canada et sur l'évolution de la recherche relative aux identités. « Ces 50 dernières années, nous avons connu une révolution démographique. Certes, le changement est inévitable, mais il peut s'avérer très positif si l'on sait comment le canaliser. La diversité a toujours été l'une des grandes forces du Canada, et je crois que nous avons encore beaucoup à gagner à tenir d'importants débats sur notre identité. »

M. Jedwab, qui jouit de plus de 20 ans d'expérience en formulation de questions, verra la mesure de la diversité revêtir un rôle crucial dans son travail à venir. « Nous ne pouvons pas combattre efficacement les inégalités dans la société sans les quantifier, ni faire un suivi adéquat des progrès réalisés si nous n'avons pas de bonnes statistiques. J'ai eu le privilège de travailler avec l'équipe du recensement dans plusieurs autres pays, et nous faisons partie des rares chanceux disposant d'un répertoire de données aussi riche. Le Canada possède un avantage qu'il ne faut pas tenir pour acquis. »

Pour obtenir de plus amples renseignements sur le programme d'activités de Statistique Canada visant à souligner Canada 150, consultez la page L'histoire du Canada racontée en chiffres.

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