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L’accession des jeunes adultes à la propriété résidentielle

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par Martin Turcotte

Ce qu’il faut savoir au sujet de la présente étude
Les jeunes adultes qui sont propriétaires de leur logement
Le revenu, un facteur très déterminant
L’emploi temporaire : un frein à l’accession à la propriété
Avoir vécu avec ses deux parents jusqu’à l’âge de 15 ans fait une différence
Autres résultats
Les jeunes adultes des milieux ruraux sont plus susceptibles d’être propriétaires
Avoir de faibles revenus et vivre dans une grande RMR
Les immigrants récents sont peu nombreux à posséder leur logement
Les personnes mariées sont plus susceptibles d’être propriétaires de leur logement que celles vivant en union libre
Être plus âgé a une incidence indépendante de tous les autres facteurs
Résumé

Posséder son propre chez soi est une valeur importante pour la grande majorité des Canadiens. Plus des deux tiers des ménages sont d’ailleurs propriétaires de leur logement et parmi ceux qui sont locataires, bon nombre aspirent à la propriété. Les jeunes adultes ne sont pas différents de la population en général à cet égard, même s’ils sont beaucoup moins susceptibles d’être propriétaires de leur logement.

Il est relativement facile de comprendre pourquoi les jeunes adultes sont moins susceptibles d’être propriétaires de leur logement que leurs aînés : ils ont des ressources financières plus limitées, leur situation sur le marché du travail est plus instable, ou encore, leur relation de couple n’est pas établie. Certains ne sont tout simplement pas prêts ou intéressés à devenir propriétaires de leur logement. Malgré cela, en 2006, 76 % des jeunes adultes de 25 à 39 ans ne vivant plus chez leurs parents ont déclaré que de posséder leur logement était très important pour eux.

Dans quelle mesure les jeunes adultes parviennent-ils à concrétiser leur désir de devenir propriétaires? Quelles sont les caractéristiques de ceux qui possèdent leur logement et quelles sont les barrières à l'accession à la propriété? Dans le présent article, on répond à ces questions en identifiant les différents facteurs liés à l'accession à la propriété chez les jeunes adultes âgés de 25 à 39 ans et qui ne vivent plus chez leurs parents (ci-après appelés « personnes » ou simplement « jeunes adultes »). Pour ce faire, on utilise les données de l’Enquête sociale générale (ESG) de 2006 portant sur les transitions familiales.

Ce qu’il faut savoir au sujet de la présente étude

La présente étude est basée sur les données de l’Enquête sociale générale (ESG) de 2006 sur les transitions familiales. Lors de cette enquête, on a recueilli des informations auprès de 23 600 Canadiens, dont 5 256 étaient âgés entre 25 et 39 ans et ne vivaient pas avec leurs parents. C’est à ce groupe, représentant une population de 5,9 millions de jeunes adultes, que l’on s’intéresse. Dans un but comparatif, les taux d’accession à la propriété de toute la population des jeunes adultes sont présentés au tableau 1, bien qu’on n’en fasse pas mention dans le texte. Les jeunes adultes âgés entre 18 et 24 ans ont été exclus de l’étude parce que très peu d’entre eux étaient propriétaires de leur logement (et parce que beaucoup demeuraient encore avec leurs parents). (Voir le tableau A.1 des détails sur les caractéristiques de la population des jeunes adultes de la présente étude.)

Dans l’ESG de 2006, on demandait aux répondants de déclarer si le logement qu’ils occupaient était la propriété d’un des membres du ménage. Si oui, on leur demandait s’ils étaient eux-mêmes propriétaires du logement. Dans le présent article, on compare les caractéristiques des jeunes adultes qui ont répondu oui à cette dernière question aux jeunes adultes qui ne sont pas propriétaires. Notons que la présente étude ne tient pas compte de la qualité des logements que possèdent les jeunes adultes. Il faut donc conserver cette réalité à l’esprit en interprétant les résultats.

Il s’agit de la première fois que Statistique Canada recueillait, dans le cadre de l’ESG, des informations sur la propriété résidentielle au niveau des répondants. Dans le Recensement et dans les enquêtes antérieures, on a recueilli et on recueille toujours cette information au niveau du ménage.

Le modèle d’analyse statistique
Dans l’analyse statistique, on utilise des rapports de cotes pour déterminer diverses caractéristiques associées à la probabilité qu’un jeune adulte soit propriétaire de son propre logement. Les résultats indiquent s’il y a une relation statistiquement significative entre les diverses caractéristiques du modèle, tout en maintenant constantes les autres variables. Les variables incluent le revenu du ménage, le plus haut niveau de scolarité atteint, l’activité principale au cours des 12 derniers mois, si le jeune adulte a vécu avec ses deux parents jusqu’à l’âge de 15 ans, le lieu de résidence, le temps écoulé depuis l’immigration, la situation dans le ménage, le groupe d’âge et le sexe.

Les jeunes adultes qui sont propriétaires de leur logement

L’accession à la propriété des jeunes adultes revêt un intérêt particulier dans le contexte économique et social actuel. En effet, les dernières années ont été marquées par plusieurs facteurs pouvant avoir eu des effets négatifs sur l’accession à la propriété : hausse des prix des logements (en particulier dans les grands centres urbains), prolongement des études, délais des diverses transitions à l’âge adulte, comme le mariage ou la cohabitation.

En contrepartie, plusieurs facteurs pouvant avoir facilité l’achat d’un logement étaient aussi réunis ces dernières années : taux hypothécaires relativement bas (malgré la légère augmentation des deux dernières années), marché du travail vigoureux et taux de chômage à un creux historique en 30 ans.

À cela, on peut ajouter certains programmes gouvernementaux visant à faciliter l’achat d’une première maison pour les jeunes familles, comme des rabais sur les taxes de vente des maisons neuves, un accès à des prêts hypothécaires pouvant aller jusqu’à 100 % de la valeur de la propriété, des crédits et des subventions pour les premiers acheteurs et les jeunes familles, et ainsi de suite.

Il est difficile de déterminer à quel point chacun de ces éléments ont contribué à ce que les jeunes adultes deviennent propriétaires de leur logement ou non. Il est néanmoins possible de fournir des informations à propos des différents sous-groupes de la population qui étaient les plus et les moins susceptibles d’être propriétaires de leur logement en 2006.

Premièrement et de façon assez peu surprenante, le taux de propriété augmente avec l’âge (tableau 1). Alors que seulement 38 % des jeunes âgés entre 25 et 27 ans et ne vivant plus chez leurs parents étaient propriétaires de leur logement en 2006, c’était le cas de 63 % des 31 à 33 ans et de 73 % des 37 à 39 ans. Ces clivages sont encore plus importants si l’on considère la situation de tous les jeunes adultes, qu’ils habitent chez leurs parents ou non1.

Tableau 1 La stabilité financière et le fait d'être marié avec enfants contribuent à l'accession à la propriété des jeunes adultes. Une nouvelle fenêtre s'ouvrira

Tableau 1
La stabilité financière et le fait d'être marié avec enfants contribuent à l'accession à la propriété des jeunes adultes

On peut difficilement être étonné du fait que le revenu du ménage ait lui aussi un impact très marqué sur les chances d’être propriétaire de son logement. Alors que seulement 22 % des jeunes adultes vivant dans un ménage dont le revenu était de moins de 30 000 $ par année étaient propriétaires de leur logement, c’était le cas de 68 % de ceux dont le revenu du ménage se situait entre 50 000 $ et moins de 80 000 $ et de 82 % de ceux dont le revenu était de 100 000 $ ou plus.

Finalement, la situation des personnes au sein de leur ménage et leur état matrimonial sont fortement associés à la propriété. En 2006, 79 % des jeunes adultes qui étaient mariés et qui avaient des enfants étaient propriétaires de leur logement. En comparaison, cette proportion n’était que de 40 % chez les personnes vivant seules et de 33 % chez les parents seuls.

Le revenu, un facteur très déterminant

Évidemment, plusieurs de ces facteurs sont fortement corrélés. Par exemple, les jeunes adultes plus âgés sont plus susceptibles de vivre avec un conjoint et des enfants, d'avoir des revenus plus élevés et d'avoir complété leurs études. Afin de départager l’incidence de ces différents facteurs, on a réalisé une régression logistique. Celle-ci permet d’estimer la possibilité ou la chance qu’une personne ayant une caractéristique donnée (par exemple une personne mariée par rapport à un parent seul) soit propriétaire de son logement, en maintenant constants les autres facteurs ayant aussi une incidence sur le fait d'être propriétaire. (Consulter « Ce qu’il faut savoir au sujet de la présente étude » pour obtenir plus de détails).

Le modèle statistique démontre que le revenu du ménage est un des facteurs, sinon le facteur, ayant l’incidence la plus déterminante sur la probabilité d’être propriétaire de son logement. En maintenant les autres facteurs constants, la cote exprimant la possibilité d’être propriétaire de son logement était 1,7 fois plus élevée pour les jeunes adultes dont le revenu du ménage était de 100 000 $ ou plus que pour ceux dont le revenu se situait entre 50 000 $ et moins de 80 000 $. Cette association est peu surprenante et conforme aux résultats de nombreuses études antérieures2. De toute évidence, un revenu insuffisant constitue l’obstacle majeur quand vient le temps d’accéder à la propriété (tableau 2).

Cette barrière peut être encore plus difficile à surmonter si les revenus anticipés pour les années à venir sont incertains. Les personnes ayant atteint un niveau de scolarité plus élevé peuvent généralement anticiper des revenus supérieurs et une stabilité financière dans les années à venir. Cela joue certainement un rôle important dans la décision de faire l’achat d’une propriété, puisque celle-ci a des répercussions financières importantes, qui s’étalent sur plusieurs années.

Ces liens entre scolarisation, stabilité des revenus et accession à la propriété se vérifient indirectement dans le modèle statistique par le fait que la cote exprimant la possibilité d’être propriétaire de son logement était 40 % moins élevée chez les personnes n’ayant pas complété leurs études secondaires que chez celles ayant obtenu un diplôme universitaire. Les personnes dont le plus haut niveau de scolarité était un diplôme d’études secondaires étaient, elles aussi, à revenu, situation dans le ménage et autres facteurs constants, un peu moins susceptibles de posséder leur logement.

Ce résultat reliant le niveau de scolarité à l’accession à la propriété prend un sens particulier étant donné l’augmentation de l’homogamie éducationnelle des couples, c.-à-d. la plus grande tendance des deux conjoints à avoir un niveau de scolarité similaire ou identiques3. S’il existe une inégalité de plus en plus grande entre les couples très scolarisés et peu scolarisés du point de vue des revenus4, il est possible qu’il y ait aussi une inégalité croissante des chances d’accession à la propriété.

Tableau 2 La probabilité d'être propriétaire était plus grande chez les jeunes adultes ayant plus de 33 ans, ayant des revenus supérieurs à 80 000 $, ou vivant dans une région rurale ou une petite ville. Une nouvelle fenêtre s'ouvrira

Tableau 2
La probabilité d'être propriétaire était plus grande chez les jeunes adultes ayant plus de 33 ans, ayant des revenus supérieurs à 80 000 $, ou vivant dans une région rurale ou une petite ville

L’emploi temporaire : un frein à l’accession à la propriété

Depuis plusieurs années, on discute beaucoup de l’augmentation des emplois précaires5. Bon nombre de ces travailleurs nouvellement embauchés sont des jeunes adultes et il est possible que l’accession à la propriété résidentielle soit plus difficile pour certains d’entre eux. Les personnes qui ont des emplois temporaires ou saisonniers sont souvent à plus haut risque en ce qui a trait à la fluctuation de leurs revenus d’une année à l’autre. Or, les banques évaluent l’accès au crédit hypothécaire en fonction de la stabilité, présente et future, des revenus des emprunteurs.

L’analyse des données de l’ESG illustre que les personnes qui avaient un emploi saisonnier, occasionnel, ou avec une date déterminée de fin étaient nettement moins susceptibles de posséder leur logement (42 %) que celles ayant un emploi permanent (65 %) (tableau 1). Même en maintenant l’effet du revenu du ménage et des autres facteurs constants, la cote exprimant la possibilité d’être propriétaire était 40 % plus faible pour les personnes qui occupaient un emploi temporaire que pour les employés permanents6 (tableau 2). Notons toutefois que malgré l’augmentation de l’emploi temporaire dans les dernières années, les jeunes adultes dans cette situation demeurent minoritaires au sein de la population des jeunes adultes (tableau A.1).

Avoir vécu avec ses deux parents jusqu’à l’âge de 15 ans fait une différence

La cote exprimant la possibilité d’être propriétaire de son logement était 1,4 fois plus élevée chez les jeunes adultes ayant vécu avec leurs deux parents jusqu’à l’âge de 15 ans que chez ceux dont ce n’était pas le cas. Bien qu’il soit difficile de fournir l’explication exacte de cette différence, on peut penser que les jeunes adultes issus de familles plus stables peuvent avoir eu accès à plus de ressources, notamment financières, au moment d’acheter leur logement. Par exemple, les parents peuvent s’être portés garants du prêt hypothécaire de leur enfant ou encore lui avoir fait des dons en argent ou des prêts sans intérêt pour l’aider à payer la mise de fonds. Il est aussi possible que les parents qui sont demeurés ensemble aient été eux-mêmes propriétaires de leur logement et que ce soit moins le cas de ceux qui se sont séparés. Une étude néerlandaise a, par exemple, démontré que le fait que leurs parents soient eux-mêmes propriétaires de leur logement avait une influence positive sur la possibilité que les jeunes couples deviennent propriétaires7.

Autres résultats

Les jeunes adultes qui ont déjà possédé un logement
Dans la présente étude, on compare les caractéristiques des jeunes adultes qui sont propriétaires de leur logement à ceux qui ne le sont pas. On doit cependant mentionner que 15 % des personnes de 25 à 39 ans ne vivant pas avec leurs parents et qui n’étaient pas propriétaires de leur logement au moment de l’enquête l’avaient été au moins une fois auparavant. Ces jeunes adultes étaient en moyenne un peu plus âgés que ceux n’ayant jamais possédé leur logement (34 ans contre 31 ans). Mis à part leur âge, les anciens propriétaires ne se distinguaient pas beaucoup de ceux qui n’avaient jamais possédé de maison du point de vue de leurs caractéristiques socioéconomiques.

Être un jeune adulte copropriétaire
L’accession à la propriété résidentielle peut se faire de bien des façons : seul, avec un conjoint, avec un membre de la parenté, avec des amis. Cependant, la très grande majorité des jeunes adultes optent pour les deux premiers choix. En 2006, 22 % des jeunes adultes qui étaient propriétaires de leur logement avaient décidé d’acheter leur logement seuls, alors que 76 % étaient devenus propriétaires avec leur conjoint de fait ou leur époux. Un très petit nombre, soit environ 2 %, étaient devenus propriétaires en compagnie de leurs parents, de leurs beaux-parents, d’autres membres de leur famille ou de leurs amis.

Les jeunes adultes des milieux ruraux sont plus susceptibles d’être propriétaires

Le lieu de résidence est lui aussi associé au taux de propriété chez les jeunes adultes ne vivant plus chez leurs parents. En 2006, environ 71 % des personnes âgées de 25 à 39 ans et vivant en milieu rural ou dans des petites villes étaient propriétaires de leur logement. Comparativement, dans les RMR, c’était le cas de 53 % de ceux résidant à Toronto, de 48 % de ceux résidant à Montréal et de 54 % de ceux résidant à Vancouver8.

Même en maintenant les autres facteurs constants dans le modèle statistique, les jeunes adultes des trois plus grandes régions métropolitaines de recensement (RMR) — Toronto, Montréal et Vancouver — ont une possibilité moitié moindre d’être propriétaires de leur logement que les jeunes adultes des milieux ruraux et des plus petites régions urbaines (tableau 2). Ces clivages dans l’accession à la propriété peuvent s’expliquer en grande partie par le coût des logements, qui est beaucoup plus élevé dans les grandes villes. La rareté de logements locatifs dans les milieux plus ruraux et les petites villes peut aussi expliquer les taux de propriété plus élevés qu’on y retrouve.

Notons le cas des jeunes adultes de Calgary, qui est particulier. En effet, ceux-ci se montrent tout aussi susceptibles d’être propriétaires de leur logement que ceux des milieux plus ruraux, et ce, même lorsque l’on tient compte des autres facteurs dans le modèle statistique9.

Avoir de faibles revenus et vivre dans une grande RMR

Si, de façon générale, les personnes qui demeurent dans une RMR sont moins susceptibles de posséder leur logement que celles qui vivent dans de plus petites collectivités, cela est d’autant plus vrai pour les jeunes adultes ayant les revenus les plus faibles. Par exemple, une proportion aussi élevée que 40 % des jeunes adultes qui avaient des revenus de moins de 30 000 $ par année mais qui vivaient en milieu rural possédaient leur logement comparativement à seulement 16 % chez ceux vivant dans l’une des six plus grandes RMR canadiennes. Les ménages à faible revenu, en plus de ne pouvoir accéder à la propriété, font aussi souvent face à une situation particulièrement difficile sur le marché locatif. Ils doivent consacrer une grande part de leurs revenus au logement et leurs conditions de vie sont souvent inadéquates10.

Même chez ceux disposant du revenu du ménage le plus élevé (80 000 $ ou plus par année), il existait une différence, mais elle était moindre (78 % de propriétaires chez les citadins contre 85 % chez les jeunes adultes vivant en milieu rural). Bien sûr, à partir d’un certain niveau de revenus, l’achat d’une propriété peut d’abord et avant tout devenir une question de choix et de préférence, quel que soit le lieu de résidence. Il n’en demeure pas moins que les prix des logements plus faibles dans les plus petites localités favorisent certainement une accession plus démocratique à la propriété résidentielle.

Les immigrants récents sont peu nombreux à posséder leur logement

Selon les données du Recensement de 2001, les ménages dont le soutien principal est un immigrant sont moins susceptibles d’être propriétaires de leur logement que ceux dont le soutien principal est né au Canada11. Il s’agit d’ailleurs d’un changement important puisqu’en 1981, on observait exactement le contraire12.

Les données de l’ESG  de 2006 démontrent clairement que le nombre d’années passées au Canada depuis l’immigration est associé à la probabilité d’être propriétaire de son logement ou non. Près des deux tiers (64 %) des jeunes adultes nés au Canada et ne vivant plus chez leurs parents étaient propriétaires de leur logement, mais c’était le cas de moins de la moitié (48 %) de ceux ayant immigré depuis cinq à neuf ans, et de seulement 20 % des immigrants venus vivre au Canada de façon permanente depuis moins de cinq ans. Ces différences entre jeunes adultes ayant immigré récemment et ceux nés au Canada demeuraient significatives lorsque l’effet de tous les autres facteurs était pris en compte dans le modèle statistique.

D’autres facteurs qui sont propres aux personnes arrivées plus récemment au Canada, comme par exemple le pays de naissance et un lieu de résidence dans les quartiers centraux des grandes villes par rapport à la périphérie peuvent avoir une incidence sur les taux de propriété. L’étude de ces facteurs dépasse cependant l’étendue de la présente étude.

Les personnes mariées sont plus susceptibles d’être propriétaires de leur logement que celles vivant en union libre

La situation financière et les barrières économiques ne sont pas les seuls facteurs liés à la propriété de son logement chez les jeunes adultes. En effet, les différentes étapes du cycle familial, et du cycle de vie en général, sont elles aussi associées à des taux de propriété très différents. Les personnes en couple sont beaucoup plus susceptibles de posséder leur logement que celles qui vivent seules. Par exemple, la cote exprimant la possibilité que les jeunes adultes mariés et ayant des enfants soient propriétaires de leur logement était 5 fois plus élevée que chez une personne vivant seule, toujours en maintenant les autres facteurs (dont le revenu) constants.

Une distinction intéressante apparaît entre les individus mariés et ceux qui sont conjoints de fait. Alors que 79 % des jeunes adultes légalement mariés et ayant des enfants étaient propriétaires de leur logement, c’était le cas de seulement 63 % des jeunes adultes ayant des enfants mais vivant en union libre. Ces différences demeuraient statistiquement significatives lorsque l’on tenait compte des autres facteurs qui pouvaient différencier ces familles dans l’analyse statistique.

Le premier facteur expliquant cette différence de taux de propriété est le fait que le mariage implique qu’un logement qui appartient à un conjoint devient automatiquement la propriété des deux conjoints après le mariage, ce qui n’est pas nécessairement le cas dans les unions libres. D’autres éléments sont cependant aussi possiblement en jeu. Les unions libres sont généralement moins stables que les mariages13 et il est possible que certaines personnes attendent que leur union soit officiellement consacrée avant d’acheter une maison. Il est également possible que les personnes qui choisissent de demeurer en union libre plutôt que de se marier aient des goûts et des préférences qui diffèrent dans divers domaines, dont le logement.

Être plus âgé a une incidence indépendante de tous les autres facteurs

La corrélation entre l’âge et la possibilité d’être propriétaire de son logement est très forte. Même lorsque l’on maintient constants tous les facteurs qui ont une incidence sur l’accession à la propriété, l’incidence de l’âge demeure statistiquement significative. Par exemple, la cote exprimant la possibilité d’être propriétaire de son logement pour les personnes de 37 à 39 ans était 2,2 fois plus élevée que celle des personnes de 25 à 27 ans.

Ce résultat suggère qu’au-delà de l’incidence qu’ont ces différents événements de la vie et ces différents états sur l’accession à la propriété — terminer sa scolarité, se marier, voir ses revenus augmenter — les jeunes adultes ne deviennent prêts ou intéressés à acheter un logement qu’à partir d’un certain stade, possiblement lorsque la décision de s’établir de façon plus permanente dans un lieu précis a été prise14.

Résumé

Que ce soit parce que l’achat d’une maison est perçu comme un bon investissement, une forme d’épargne forcée ou une source de satisfaction d’être vraiment « chez soi », devenir propriétaire de son logement est important pour la grande majorité des jeunes adultes. Avec le départ du domicile familial, le mariage ou l’union libre, l’obtention d’un « véritable » emploi, et la venue d’un premier enfant, devenir propriétaire constitue l’une des grandes transitions à l’âge adulte. La présente étude a permis d’identifier les facteurs qui sont associés à une plus ou moins grande probabilité d’être propriétaire de son logement chez les jeunes adultes de 25 à 39 ans ne vivant plus chez leurs parents.

L’activité principale sur le marché du travail d’un jeune adulte, son nombre d’années passées au Canada, son âge et son lieu de résidence sont les quatre caractéristiques ayant le plus d’incidence sur la possibilité qu'il soit propriétaire de son logement. Les jeunes adultes nés au Canada, ayant occupé un emploi permanent dans les 12 derniers mois et vivant en milieu rural étaient les plus susceptibles de posséder leur logement.

Par contre, les personnes ayant immigré récemment au Canada et vivant dans une RMR comme Toronto, Montréal et Vancouver étaient beaucoup moins susceptibles d’être propriétaires de leur logement. Si ces jeunes adultes, en plus de posséder ces caractéristiques, ne possédaient pas d’emploi permanent et étaient plus jeunes, leur probabilité d’être propriétaires de leur logement devenait presque inexistante.

Malgré l’incidence des facteurs individuels, ce sont les caractéristiques du ménage qui importent le plus dans la possibilité d’être propriétaire de son logement. Les jeunes adultes les plus susceptibles de posséder leur logement étaient ceux qui étaient mariés et qui avaient des enfants, ainsi que ceux dont les revenus du ménage étaient les plus élevés.

Martin Turcotte est chercheur en sciences sociales à la Division de la statistique sociale et autochtone de Statistique Canada.

Tableau A.1 Répartition des jeunes adultes de 25 à 39 ans ne vivant plus chez leurs parents, selon différentes catégories socioéconomiques, 2006. Une nouvelle fenêtre s'ouvrira

Tableau A.1
Répartition des jeunes adultes de 25 à 39 ans ne vivant plus chez leurs parents, selon différentes catégories socioéconomiques, 2006

Notes

  1. Étant donné l’impact du revenu du ménage et de la situation dans le ménage sur l’accession à la propriété, il aurait été très difficile de bien analyser toutes les associations statistiques si on avait inclus dans l’analyse les jeunes adultes qui vivent encore chez leurs parents. De façon peu surprenante, les taux de propriété sont plus élevés lorsqu’on ne s’intéresse qu'aux personnes ne vivant plus chez leurs parents.
  2. Lefebvre, S. 2002. « Le logement, une question de revenu », L’emploi et le revenu en perspective, vol. 14, no 3, produit no 75-001-XPF au catalogue de Statistique Canada; SCHL. 2006. L’observateur du logement au Canada 2006.
  3. Hou, Feng et John Myles. 2007. L'évolution du rôle de l'éducation dans le choix du conjoint : homogamie éducationnelle au Canada et aux États-Unis depuis les années 1970, no 299, produit no 11F0019MIF au catalogue de Statistique Canada. Série de documents de recherche de la Direction des études analytiques.
  4. Morissette, René et Anick Johnson. 2004. Gains des couples peu scolarisés et très scolarisés sur le marché du travail au Canada, 1980 à 2000, no 230, produit no 11F0019MIF au catalogue de Statistique Canada. Série de documents de recherche de la Direction des études analytiques.
  5. Une étude récente de Statistique Canada a d’ailleurs démontré que « l’importance relative des emplois temporaires est nettement en hausse chez les salariés nouvellement embauchés ». Dans cette étude, on a montré que la proportion d’emplois temporaires chez les travailleurs nouvellement embauchés était passée de 11  en 1989 à 21  en 2004. Pour plus de détails, voir : Morissette, René et Anick Johnson. 2005. Les bons emplois disparaissent-ils au Canada?, no 239, no 11F0019MIF au catalogue de Statistique Canada. Série de documents de recherche de la Direction des études analytiques.
  6. Lorsque l’on utilisait le revenu personnel plutôt que le revenu du ménage dans l’analyse, la différence était du même ordre et elle était aussi statistiquement significative.
  7. Mulder, Clara H. et Jeroen Smits. 1999. « First-Time Home-Ownership of Couples – The Effect of Inter-Generational Transmission », European Sociological Review, vol. 5, no 3, p. 323 à 337.
  8. Cependant, les jeunes adultes qui vivent dans les grandes villes sont aussi plus susceptibles de continuer à vivre chez leurs parents plus longtemps. Conséquemment, les différences entre les jeunes adultes résidant dans les grandes villes et ceux vivant dans les milieux plus ruraux, du point de vue de l’accession à la propriété, sont encore plus importantes lorsque l’on s’intéresse à tous les jeunes adultes, sans égard au fait qu’ils vivent avec leurs parents ou non.
  9. Ce clivage ne peut pas s’expliquer par le fait que la proportion de jeunes adultes qui demeurent chez leurs parents est plus élevée dans les grands centres urbains. Lorsque l’on considère tous les jeunes adultes dans l’analyse, peu importe qu’ils demeurent chez leurs parents ou non, les résidents de Calgary demeurent tout aussi susceptibles de posséder leur logement que ceux vivant dans des régions rurales.
  10. SCHL. 2004. « Série sur le logement selon les données du Recensement de 2001 : numéro 4 révisé – régions métropolitaines de recensement », Le point de recherche / Série socio-économique 04-042.
  11. SCHL. 2004. « Série sur le logement selon les données du Recensement de 2001 : numéro 7 révisé – ménages immigrants », Le point en recherche / Série socio-économique 04-042.
  12. Haan, Michael. 2005. Diminution de l’avantage des immigrants en matière de propriété : analyse de cycle de vie de la baisse de fortunes et de l’évolution de l’accession à la propriété chez les immigrants de Montréal, Toronto et Vancouver, 1981-2001, no 238, no 11F0019MIF au catalogue de Statistique Canada. Série de documents de recherche de la Direction des études analytiques.
  13. Statistique Canada. 2002. La diversification de la vie conjugale au Canada, no 89-576-XIF au catalogue.
  14. Il est aussi possible que d’autres facteurs associés avec l’avancement en âge des jeunes adultes n’aient pas été pris en compte dans l’analyse ou n'aient pas été relevés. On ne peut tenir pour acquis que les jeunes adultes aujourd’hui âgés de 18 ans auront les mêmes comportements lorsqu’ils auront 39 ans que ceux qui sont de cet âge aujourd’hui.