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Les prestations parentales influencent-elles les décisions en matière de fécondité?

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par Susan Crompton et Leslie-Anne Keown

L’écart entre les sexes
Ce qu’il faut savoir au sujet de la présente étude
Les facteurs sociodémographiques ont peu d’incidence sur l’importance perçue des prestations parentales
Les parents sont plus susceptibles de tenir compte de l’accès à des prestations parentales dans leurs décisions futures en matière de fécondité
Le revenu et le revenu futur déterminent grandement l’importance des prestations pour la planification familiale
Les prestations parentales jouent un rôle moins important au Québec
Les prestations parentales ont peu d’effet sur le planification familiale des immigrants
Les finances et l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie familiale sont d’importantes considérations dans la planification familiale
Sommaire

Abstraction faite de l’explosion démographique qui est survenue entre la fin des années 1940 et le milieu des années 1960, on observe une baisse de fécondité dans les pays occidentaux depuis les années 1870. Aux yeux de la plupart des démographes, c’est une conséquence naturelle du développement socioéconomique et de l’amélioration des conditions de vie1. Or, avec un indice synthétique de fécondité sous le seuil de renouvellement des générations, à savoir 2,1 enfants survivants par femme en âge de procréer2, les économistes craignent que la population d’âge actif ne trouve difficile de subvenir aux besoins de la population vieillissante. De ce fait, le soutien à la création de jeunes familles et à leur bien-être devient un important enjeu stratégique pour la plupart des gouvernements occidentaux.

En théorie, il ne devrait pas être difficile d’encourager les jeunes gens à fonder une famille puisque la plupart souhaitent encore avoir des enfants. Cependant, bien que les intentions de fécondité puissent être des indicateurs exacts du comportement au cours d’une vie3,4, à court terme, les gens prennent généralement leurs décisions en matière de fécondité une naissance à la fois5,6,7,8. Ainsi, même si des facteurs d’ordre personnel et des croyances peuvent inciter les gens à vouloir des enfants, des facteurs sociaux peuvent les décourager d’en avoir.

Par exemple, des chercheurs font valoir que, même quand les gens sont financièrement à l’aise, élever des enfants dans les sociétés occidentales modernes est devenu si coûteux en termes de perspectives de carrière perdues qu’il n’est peut-être pas souhaitable d’avoir plus de deux enfants, surtout pour les couples très scolarisés où les deux conjoints travaillent9,10,11,12.

Néanmoins, il y a des indications selon lesquelles les jeunes couples peuvent être persuadés de réaliser leurs ambitions de fonder une famille. Quoique certaines études canadiennes sur la fécondité démontrent que les politiques natalistes n’ont de prise que sur les personnes encore hésitantes par rapport à leur décision d’avoir des enfants13,14, de récentes études internationales présentent d’importantes preuves à l’appui des effets positifs qu’ont sur la fécondité les politiques de soutien aux parents qui travaillent15,16.

Au moyen de l’Enquête sociale générale de 2006 sur les transitions familiales, nous cherchons à savoir si l’accès à des prestations parentales influence la décision d’un couple d’avoir un enfant. Nous déterminons les caractéristiques des personnes qui pourraient être les plus susceptibles de voir leurs intentions transformées en comportement sous l’effet d’une politique de ce genre. La population observée comprend les personnes de 18 à 45 ans qui sont mariées ou qui vivent en union libre et qui ont l’intention d’avoir un jour un enfant (un premier ou un autre enfant). (Pour connaître les concepts et les définitions, voir l’encadré « Ce qu’il faut savoir au sujet de la présente étude ».)

L’écart entre les sexes

Comme on s’y attendrait, il y a un écart systématique entre les sexes quel que soit le facteur de prise de décision ou la caractéristique démographique ou socioéconomique à l’étude. Ainsi, les femmes étaient plus susceptibles que les hommes de dire que l’accès à des prestations de maternité/paternité était « très important » dans leurs décisions en matière de fécondité, sans égard aux autres facteurs. Qui plus est, cet écart demeurait d’une ampleur constante et variait généralement entre 14 et 18 points de pourcentage. Les tableaux et les graphiques contiennent les résultats pour les femmes et pour les hommes et pour les deux sexes combinés. Dans le texte, toutefois, à moins que d’importantes différences ne le justifient, nous limitons la discussion des résultats aux deux sexes combinés, et ce, par souci de brièveté.

 

Ce qu’il faut savoir au sujet de la présente étude

Le présent article est fondé sur les données provenant de l’Enquête sociale générale (ESG) de 2006 sur les transitions familiales. Cette enquête permet de suivre les changements qui surviennent au sein de la structure familiale en ce qui a trait aux mariages, aux unions libres, aux enfants et aux intentions de fécondité. L’ESG a recueilli des renseignements auprès de 23 600 personnes de 15 ans ou plus vivant dans les dix provinces.

La présente étude est axée sur les personnes âgées de 18 à 45 ans qui étaient mariées ou qui vivaient en union libre et qui avaient l’intention d’avoir un premier enfant ou un deuxième enfant. La restriction quant à l’état matrimonial s’explique par le fait que, selon des études, les réponses des personnes en couple sont généralement des prédicteurs plus exacts du comportement à court ou à moyen terme comparativement aux réponses d’autres répondants1. Cette limitation de la population observée produit un échantillon d’environ 1 480 répondants qui représente quelque 2,0 millions de Canadiens, à savoir environ 31 % de la population de 18 à 45 ans mariée ou vivant en union libre.

L’analyse est fondée sur la réponse à la question que voici du module du questionnaire qui est consacré aux intentions de fécondité :

Les questions suivantes portent sur vos intentions d’engendrer/de donner naissance à des (d’autres) enfants. Quelle est l’importance de ces facteurs sur votre décision d’avoir un enfant/un autre enfant? Quelle est l’importance de :

… l’accès à des prestations de maternité/paternité?

Est‑ce :

  1. Très important
  2. Quelque peu important
  3. Pas très important
  4. Pas important du tout

Le présent article ne traite que des caractéristiques des répondants qui ont répondu par « très important », puisque cette réponse est plus susceptible de faire ressortir un aspect qui pourrait faire obstacle au comportement de fécondité. En examinant seulement les répondants qui ont répondu à cette question par « très important », nous adoptons une approche prudente vis‑à-vis de l’analyse.

Définitions

Accès à des prestations parentales (de maternité/paternité) : Les prestations parentales sont versées aux personnes qui sont enceintes, qui ont récemment accouché, qui adoptent un enfant ou qui prennent soin d’un nouveau‑né. Les prestations peuvent être versées par des employeurs privés et par des programmes gouvernementaux dans la mesure où les conditions d’admissibilité sont réunies. Dans le cadre du régime fédéral d’assurance-emploi, les prestations de maternité peuvent être versées pendant un maximum de 15 semaines et les prestations parentales, pendant un maximum de 35 semaines. Les employeurs peuvent « compléter » ces prestations par leur propre régime de façon à prolonger la durée du congé parental, à accroître le montant des prestations versées, ou les deux. En outre, les régimes de prestations parentales au Canada offrent une protection de l’emploi des personnes qui utilisent un congé parental ou de maternité payé ou non payé au cours des 52 premières semaines suivant la naissance d’un enfant. Des données qui permettraient de déterminer si le répondant était/serait admissible à des prestations parentales n’ont pas été recueillies.

Très important : Le répondant considérait l’accès à des prestations de maternité/paternité comme « très important » dans sa décision d’avoir un enfant ou un autre enfant.

Moins important : Le répondant considérait l’accès à des prestations de maternité/paternité comme « quelque peu important », « pas très important » ou « pas important du tout » dans sa décision d’avoir un enfant ou un autre enfant.

Le modèle

Pour isoler différents facteurs influençant les intentions de fécondité, nous avons utilisé un modèle de régression logistique. Cela nous a permis d’estimer la probabilité selon laquelle les prestations étaient très importantes ou moins importantes pour les répondants ayant une caractéristique donnée, en éliminant l’effet d’autres facteurs. Des modèles ont été exécutés pour les deux sexes combinés, ainsi que pour les hommes et pour les femmes séparément.

Les rapports de cotes ont été estimés au moyen d’une régression pondérée d’après les coefficients de pondération de l’ESG, tandis que la méthode bootstrap a été utilisée pour l’estimation de la variance. La signification statistique a été établie à p < 0,05. Les variables des modèles comprennent les caractéristiques sociodémographiques et économiques des particuliers, ainsi qu’un ensemble de facteurs de prise de décision en matière de fécondité.

Limites des données

Il importe que les lecteurs sachent que la façon dont les données ont été recueillies dans le cadre de l’ESG impose certaines limites à l’analyse. Avant tout, les questions ont uniquement été posées aux personnes qui ont dit avoir l’intention d’avoir des enfants. Par conséquent, nous ne savons pas comment l’accès à des prestations parentales pourrait influencer les personnes qui disent ne pas avoir l’intention d’avoir des enfants, ou encore les personnes qui ne savent pas si elles auront ou pas d’enfants (ou d’autres enfants), ni même comment l’accès à des prestations aurait pu influencer les personnes dont la famille est complète.

Ensuite, il n’existe pas de renseignements sur le moment de la naissance prévue. Ainsi, nous ne savons pas si le répondant a l’intention d’avoir un enfant ou un autre enfant dans un délai donné ou simplement « un jour ». Toutefois, une étude démontre que, même si les données sur le moment de la naissance prévue sont le meilleur prédicteur des naissances réelles, l’intention d’avoir un enfant est également un indicateur très exact2.

  1. Voir, par exemple, Toulemon, L., et Testa, M. R. (2005). Fertility intentions and actual fertility: A complex relationship. Population and Societies, 415 (septembre), 1‑4.
  2. Miller, W. B., et Pasta, D. J.  (1995). Behavioral intentions: Which ones predict fertility behavior in married couples? Journal of Applied Social Psychology, 25(6), 530‑555.

Les facteurs sociodémographiques ont peu d’incidence sur l’importance perçue des prestations parentales

En 2006, 46 % des membres de la population observée ont dit que l’accès à des prestations parentales serait un facteur « très important » dans leur décision d’avoir un enfant (graphique 1, tableau 1). Les femmes étaient beaucoup plus susceptibles que les hommes (54 % comparativement à 38 %) d’indiquer que ces prestations joueraient un rôle dans leur prise de décision.

Graphique 1 L'accès à des prestations parentales est une considération importante dans la décision d'avoir un enfant, surtout chez les femmesGraphique 1  L'accès à des prestations parentales est une considération importante dans la décision d'avoir un enfant, surtout chez les femmes

Tableau 1 Pourcentage de personnes répondant que l'accès à des prestations parentales est « très important » dans la décision d'avoir un enfantTableau 1  Pourcentage de personnes répondant que l'accès à des prestations parentales est « très important » dans la décision d'avoir un enfant

Cet écart entre les sexes pourrait traduire non seulement les plus grands risques liés à l’emploi que les femmes acceptent lorsqu’elles élèvent des enfants17,18, mais également les taux d’admissibilité et de participation aux prestations. En termes simples, un régime de prestations pourrait être moins pertinent pour les hommes s’ils n’y sont pas admissibles ou s’ils jugent peu utile d’y participer. Par exemple, bien que les modifications apportées en 2000 aux prestations parentales du régime d’assurance-emploi aient bel et bien fait augmenté le pourcentage de nouveaux pères qui demandaient des prestations, la grande majorité des hommes ne s’absentaient toujours pas de leur emploi à la naissance de leurs enfants19.

Toutefois, les résultats du modèle de régression démontrent que l’écart entre les sexes finit par disparaître une fois que nous neutralisons l’effet d’autres facteurs. Les femmes ne sont pas plus susceptibles que les hommes de dire que les prestations parentales sont un facteur très important dans leur décision d’avoir un enfant (tableau 2).

Tableau 2 Chances qu'il y a de répondre que l'accès à des prestations parentales est « très important » dans la décision d'avoir un enfantTableau 2  Chances qu'il y a de répondre que l'accès à des prestations parentales est « très important » dans la décision d'avoir un enfant

On pourrait s’attendre à ce que d’autres caractéristiques sociodémographiques — l’âge, l’état matrimonial, la croyance religieuse — jouent un rôle lorsque les couples décident d’avoir un enfant ou pas. Par exemple, de nombreux jeunes adultes ont de la difficulté à se débrouiller financièrement20, et un régime de prestations qui aide à gérer le risque de quitter le marché du travail pour avoir des enfants pourrait être très attrayant21. Toutefois, les jeunes adultes de moins de 30 ans ne sont en fait pas plus susceptibles que la moyenne de dire que des prestations seraient très importantes pour eux. L’âge n’était pas un facteur important non plus une fois les autres variables prises en compte (tableau 2).

Il en est de même pour l’état matrimonial. Les personnes vivant en union libre et les personnes mariées n’étaient pas plus susceptibles que la moyenne de considérer les prestations comme « très importantes » dans leurs intentions d’avoir un enfant.

Des études antérieures22,23,24 ont fait ressortir l’effet positif de la religion sur la fécondité. Toutefois, une fois que les autres facteurs sont pris en compte, l’appartenance religieuse d’une personne ou la fréquence de sa présence aux services religieux ne détermine pas si elle considère l’accès à des prestations parentales comme un critère essentiel de toute décision en matière de fécondité.

Les parents sont plus susceptibles de tenir compte de l’accès à des prestations parentales dans leurs décisions futures en matière de fécondité

Les adultes qui avaient déjà un enfant accordaient plus d’importance aux prestations parentales comparativement à ceux qui n’avaient pas encore fondé une famille. Une proportion supérieure à la moyenne, soit 55 %, de nouveaux parents reconnaissaient que les prestations parentales joueraient un rôle important dans leur décision d’avoir un deuxième enfant. Une fois neutralisé l’effet des autres variables, le nombre d’enfants biologiques est demeuré un facteur significatif dans cette décision.

Par contre, alors que les personnes ayant un enfant d’âge préscolaire à la maison étaient plus susceptibles que la moyenne de décrire les prestations parentales comme « très importantes » (50 %), cet effet n’était plus important une fois que les autres variables étaient prises en compte.

Par ailleurs, les régimes de prestations parentales réduisent le risque que pose la procréation sur les perspectives sur le marché du travail en accordant des prestations financières aux personnes admissibles tout en assurant la protection de l’emploi des personnes qui prennent un congé parental ou de maternité payé ou non payé. Plus de la moitié (56 %) des personnes qui avaient pris un congé parental à la naissance de leur enfant ont dit que l’accès à des prestations aurait beaucoup de poids dans toute décision subséquente en matière de fécondité. Toutefois, cet effet n’est pas important lorsque les autres facteurs sont pris en compte.

Le revenu et le revenu futur déterminent grandement l’importance des prestations pour la planification familiale

De nombreuses études menées dans les pays occidentaux font état du lien qui existe entre le chômage ou l’incertitude économique et la décision de reporter le moment d’avoir des enfants25,26,27, surtout en ce qui a trait à la probabilité d’avoir un premier enfant28. Comme on pourrait s’y attendre, les personnes dont le revenu est le plus faible sont les plus susceptibles de dire qu’un régime de prestations serait un facteur très important dans leurs décisions en matière de fécondité.

Plus de la moitié (56 %) des personnes dont le revenu du ménage est inférieur à 30 000 $ considèrent les prestations parentales comme « très importantes », comparativement au tiers seulement (32 %) des personnes dont le revenu du ménage est supérieur à 100 000 $. Les résultats de la régression démontrent que, comparativement aux personnes de la tranche de revenu supérieure, la probabilité de considérer les prestations parentales comme « très importantes » est près de deux à trois fois plus élevée chez les personnes dont le revenu du ménage est inférieur à 100 000 $ (selon leur revenu réel).

Un niveau de scolarité élevé est associé à un revenu supérieur, à un taux de chômage inférieur et à de meilleurs avantages sociaux. En effet, 41 % des diplômés de l’université disent que l’accès à des prestations parentales influencerait fortement leur décision d’avoir un enfant, comparativement à près de la moitié des personnes sans grade universitaire. Une fois les autres variables prises en compte, la probabilité que les diplômés de l’université considèrent les prestations comme « très importantes » demeure significativement moindre que celles des personnes moins scolarisées.

Bien des couples peuvent être d’avis que les prestations parentales aident à protéger la participation de la famille au marché du travail pendant qu’un des conjoints s’absente de la population active. C’est peut-être particulièrement le cas des couples où les deux conjoints travaillent, bien que presque autant de personnes appartenant à des familles à deux soutiens que de personnes appartenant à des familles à un soutien (respectivement 47 % et 42 %) indiquent que les prestations jouent un rôle « très important » dans leurs décisions en matière de fécondité. Par contraste, les résultats de la régression révèlent une tendance différente. Les personnes appartenant à des familles à deux soutiens sont plus de deux fois plus susceptibles d’accorder une grande importance aux prestations parentales dans leur prise de décisions en matière de fécondité que ne le sont les personnes appartenant à d’autres types de familles.

Les prestations parentales jouent un rôle moins important au Québec

Seulement 39 % des Québécois ont indiqué que les prestations parentales joueraient un rôle de premier plan dans leurs décisions en matière de fécondité, une proportion nettement inférieure à la moyenne canadienne. L’écart demeure significatif, même après la neutralisation de l’effet de tous les autres facteurs : la probabilité de dire que les prestations sont « très importantes » est moitié moins grande chez les résidents du Québec qui veulent avoir un enfant, comparativement aux Canadiens vivant dans les autres provinces.

Cette différence pourrait être attribuable en partie à la disparité des valeurs socioculturelles souvent observée entre le Québec et le reste du Canada. Toutefois, il faudrait également reconnaître le rôle que jouent le système des garderies tout à fait particulier du Québec et ses autres programmes pro-famille29, que de nombreux Québécois peuvent considérer comme des options complémentaires ou de rechange aux prestations parentales provenant d’autres sources.

Les prestations parentales ont peu d’effet sur la planification familiale des immigrants

Aux yeux des personnes qui sont arrivées au Canada depuis relativement peu de temps, les prestations parentales pourraient être jugées particulièrement utiles. En assurant un revenu régulier, ou en offrant une garantie de maintien d’emploi (et souvent les deux), les prestations parentales peuvent aider à gérer le risque de fonder une nouvelle famille dans un nouveau pays. Parmi les personnes qui ont immigré comme adultes, une proportion supérieure à la moyenne, soit 55 %, ont indiqué que l’accès à des prestations était très important dans leurs décisions en matière de fécondité. Toutefois, le statut d'immigrant n’a pas une incidence importante une fois que l’effet de toutes les autres variables est neutralisé.

Les finances et l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie familiale sont d’importantes considérations dans la planification familiale

D’autres facteurs que les caractéristiques démographiques et socioéconomiques d’une personne jouent un rôle dans la planification familiale. Des questions portant sur les finances du ménage, l’équilibre travail-famille, la santé et l’âge (le leur et celui de leur conjoint) sont prises en considération par la majorité des couples avant de mettre un enfant au monde.

Lors d’un sondage mené en 2004 par l’Institut Vanier de la famille, la plupart des Canadiens ont dit qu’avoir les moyens d’avoir des enfants et avoir « suffisamment de temps » sont des facteurs clés dans la décision de devenir parent30. Les données de l’ESG de 2006 confirment que les personnes en couple qui songent à avoir des enfants tendent à être d’accord là‑dessus (graphique 2). La probabilité selon laquelle les prestations parentales seraient « très importantes » dans leurs décisions en matière de fécondité était près de deux fois plus élevée chez les personnes qui ont également indiqué que l’état de préparation financière jouait un rôle important dans leur planification familiale (tableau 2).

Graphique 2 Les femmes considèrent les finances du ménage et les hommes, l’âge, comme les facteurs le plus importants dans la décision d’avoir un enfantGraphique 2  Les femmes considèrent les finances du ménage et les hommes, l’âge, comme les facteurs le plus importants dans la décision d’avoir un enfant

Le besoin de maintenir un équilibre acceptable entre les responsabilités familiales et les responsabilités professionnelles a des incidences encore plus grandes. La probabilité selon laquelle les prestations parentales seraient très importantes était plus de trois fois plus élevée chez les personnes qui considéraient que l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie familiale serait également un facteur clé dans leur décision d’avoir un enfant. Ces résultats semblent indiquer que, dans une société où les familles à deux soutiens sont maintenant la norme, il est primordial pour les couples de protéger le bien-être de la famille tant sur le marché du travail qu’à la maison.

Bien entendu, les réalités biologiques de la procréation constituent également un élément critique des décisions d’un couple en matière de fécondité. Sans surprise, c’est là où les constatations pour les femmes et pour les hommes divergent : la santé et l’âge sont les deux seuls facteurs dont les résultats du modèle diffèrent selon le sexe. Une fois l’effet des autres variables neutralisé, les femmes dont la santé était un facteur clé dans leur prise de décision avaient 2,7 fois plus de chances de considérer que les prestations parentales y jouaient aussi un rôle principal. La santé n’avait toutefois aucune incidence sur l’opinion des hommes.

Par ailleurs, les hommes qui jugeaient que l’âge était un facteur important avaient beaucoup plus de chances que les femmes de dire que les prestations étaient importantes dans la décision d’avoir des enfants.

Sommaire

Bien que la plupart des Canadiens rêvent d’avoir une famille, l'indice synthétique de fécondité demeure inférieur au seuil de renouvellement de 2,1 enfants par femme. Bon nombre de démographes et de sociologues s’entendent pour dire que les jeunes gens ne seraient encouragés à avoir plus d’enfants que si les risques auxquels ils s’exposaient en élevant des enfants étaient partagés par la société qui bénéficie d’une population jeune, dynamique et productive. Accorder des prestations parentales aux nouveaux parents qui quittent temporairement leur emploi pendant qu’ils prennent soin de leur nouveau‑né est une façon de leur offrir du soutien.

Les constatations découlant de l’Enquête sociale générale de 2006 démontrent que les personnes en couple qui veulent avoir des enfants sont beaucoup plus susceptibles de considérer l’accès à des prestations parentales comme « très important » dans leurs décisions en matière de fécondité si elles ont déjà un enfant; si elles font partie d’un couple où les deux conjoints travaillent, et si elles ont un revenu du ménage inférieur à 100 000 $ par an. Quand vient le temps de choisir ou pas d’avoir un enfant (ou un autre enfant), les prestations jouent un rôle prépondérant chez les personnes qui accordent également une grande importance à l’état de préparation financière de leur ménage, à l’équilibre entre leur vie professionnelle et leur vie familiale, ainsi qu’à leur santé.

Susan Crompton et Leslie-Anne Keown sont analystes principales à la revue Tendances sociales canadiennes de la Division de la statistique sociale et autochtone de Statistique Canada.

Notes

  1. Hirschman, C. (2005). Population and society: Historical trends and future prospects. Dans l’ouvrage publié sous la direction de C. Calhoun, C. Rojek et B. Turner, The Sage Handbook of Sociology, (p. 381‑402). Thousand Oaks, CA: Sage Publications.
  2. Statistique Canada (2008, 26 septembre). Naissances. Le Quotidien. No 11-001-XIF au catalogue de Statistique Canada. En 2006, l’indice synthétique de fécondité canadien était de 1,59 enfants survivants par femme en âge de procréer.
  3. Wu, Z., et Wang, H. (1998). Third birth intentions and uncertainty in Canada. Social Biology, 45(1‑2), 96‑112.
  4. Miller, W. B., et Pasta, D. J. (1995). Behavioral intentions: Which ones predict fertility behavior in married couples Journal of Applied Social Psychology, 25(6), 530-555.
  5. Toulemon, L., et Testa, M. R.  (2005). Fertility intentions and actual fertility: A complex relationship. Population and Societies, (415), 1‑4.
  6. Schreck, L. (1999). Men and women gave similar fertility intentions. Family Planning Perspectives, 31(5), 254‑255.
  7. Schoen, R., et al. (1999). Do fertility intentions affect fertility behaviour? Journal of marriage and the family, 61(août), 790‑799.
  8. Udry, J. (1983). Do couples make fertility plans one birth at a time? Demography, 20(2), 117‑128.
  9. Hirschman. (2005).
  10. Wu et Wang. (1998).
  11. Gauthier, A. H. (2007). The impact of family policies on fertility in industrialized countries: A review of the literature. Population Research and Policy Review, 26, 323‑346.
  12. Zhang, X. (2009). Gains des femmes ayant des enfants et des femmes sans enfant. L’emploi et le revenu en perspective, 10(3), 5‑14. Statistique Canada, no 75-001X au catalogue. Ottawa : ministre de l’Industrie.
  13. Hyatt, D. E., et Milne, W. J.  (1991). Can public policy affect fertility? Canadian Public Policy / Analyse de politiques, 17(1), 77‑85.
  14. Phipps, S .A. (2000). Maternity and parental benefits in Canada: Are there behavioural implications? Canadian Public Policy/Analyse de politiques, 26(4), 415‑436.
  15. Sleebos, J. E. (2003). Low Fertility Rates in OECD Countries: Facts and Policy Responses. OECD Labour Market and Social Policy Occasional Papers, No. 15. Paris: Éditions OCDE.
  16. D’Addio, A. C., et Mira D’Ercole, M.  (2005). Politiques, institutions et taux de fécondité : Une analyse sur données de panel appliquée aux pays de l’OCDE. Paris: Organisation de coopération et de développement économiques.
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  21. Clark. (2007).
  22. Corijn, M., Liefbroer, A. C., et de Jong Gierveld, J.  (1996). It takes two to tango, doesn’t it? The influence of couple characteristics on the timing of the birth of the first child. Journal of Marriage and the Family, 58(1), 117‑126.
  23. Wu et Wang. (1998).
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  26. D’Addio et Mira d’Ercole. (2005).
  27. Grant, J., Hoorens, S., Sivadasan, S. van het Loo, M., DaVanzo, J., Hale, L., Gibson S., et Butz, W. (2004). Low Fertility and Population Ageing: Causes, Consequences and Policy Options. A European Commission Report, MG­206­EC. Santa Monica, CA: Rand Corporation.
  28. Toulemon et Testa. (2005).
  29. Gauthier, A. H. (2007). The impact of family policies on fertility in industrialized countries: A review of the literature. Population Research and Policy Review, 26, 323‑346.
  30. Bibby, R. (2004). Projet familles de demain : Un sondage sur les espoirs et les rêves des Canadiens. Ottawa: Institut Vanier de la famille.