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11-010-XIB
L'Observateur économique canadien
Octobre 2007

Étude spéciale

La nouvelle économie souterraine des ressources du sous-sol : scieurs de bois et porteurs d’eau, la fin d’une époque

par Philip Cross*

L’essor que connaît le dollar canadien depuis cinq ans et qui lui a fait atteindre la parité avec la devise américaine découle, entre autres, du prix élevé des produits de base. La renaissance récente du secteur des ressources au Canada évoque d’emblée l’image fruste des Canadiens comme scieurs de bois et porteurs d’eau, une image négative qui tire son origine des temps bibliques1. Nous verrons dans cet exposé que cette locution appliquée à notre secteur des ressources est dépassée et n’a peut-être jamais traduit la réalité.

Un certain nombre de facteurs structurels et cycliques ont réduit l’importance des produits forestiers dans notre économie. On observe plutôt depuis 2002 que le secteur des ressources a largement délaissé le bois pour s’intéresser à des produits que l’on retrouve surtout dans le sous-sol, notamment les hydrocarbures et les métaux. Nous ne sommes pas « scieurs et porteurs », mais plus précisément (et plus sobrement) « extracteurs de pétrole et fournisseurs de métaux ».

Dans le sens même de cette évolution du secteur des ressources, les prix des produits de base n’auront jamais monté aussi longtemps et aussi amplement depuis que des données sont recueillies. Le mouvement s’est amorcé en 2003 dans le secteur de l’énergie où les prix ont doublé avant de plafonner en 2005. À ce moment, le même mouvement s’était engagé pour les métaux dont les prix ont triplé. L’an dernier, cet essor gagnait les denrées agricoles; les cours des céréales et des oléagineux doublaient et les prix agricoles étaient majorés de moitié. Les détails varient selon les produits, mais le thème commun est que l’économie mondiale traverse sa période quinquennale de croissance la plus rapide depuis 19702. La croissance manufacturière de la Chine et sa demande concomitante de ressources naturelles comme apports en fabrication ont été particulièrement importantes.

Nous verrons plus en détail comment les secteurs de l’énergie, des mines et de l’agriculture ont profité chacun de ce qu’on appelle le « supercycle » des produits de base, en le comparant à la léthargie de nos industries du bois et de l’eau. Notre analyse portera principalement sur les revenus et les prix à l’exportation3, qui décrivent mieux l’ascension de la demande de produits de base que le volume de la production ou l’emploi. Nous conclurons en regardant si le secteur des ressources (agriculture, forêts, pêche et mines) et celui des services publics s’exposent plus que le reste de l’économie à une alternance expansion-contraction.

Figure 1

Énergie

Les cours des produits de base ont pris leur envol dans le secteur de l’énergie en 2003. À l’aube de cette année, le groupe de l’énergie était seulement quatrième en importance à l’exportation au Canada. Les revenus trimestriels tirés du pétrole brut et du gaz naturel étaient à peu près à égalité en 2002 avec un peu plus de 4 milliards de dollars. Dans les trois années qui ont suivi, le gaz naturel l’a emporté en croissance sur le pétrole brut en grande partie à cause de la plus grande fermeté de ses prix. Vers la fin de 2005, les produits énergétiques étaient les plus lucratifs à l’exportation au Canada.

Depuis 2005, ces deux sous-secteurs énergétiques ont toutefois pris des directions passablement différentes. Les livraisons de pétrole brut ont fait un bond de plus de 50 % avec des prix records qui ont pu s’appuyer sur de nouveaux projets de mise en valeur. Le renchérissement de l’essence a aussi fait monter les exportations de produits pétroliers raffinés depuis 2002, mais à un rythme qui n’était qu’un peu plus de la moitié du taux de progression des exportations de pétrole brut (63 % contre 107 %). Il faut y voir l’effet de l’expansion de la production de pétrole lourd tiré des sables bitumineux et de la pénurie de raffineries et d’usines de traitement pour en assurer la transformation au pays.

Figure 2

Pendant ce temps, les prix et la production de gaz naturel étaient en chute libre depuis l’hiver clément de 2006 qui avait provoqué en Amérique du Nord une surabondance des stocks qui perdure à ce jour. Le revers essuyé par cette industrie a été d’autant plus cuisant qu’il se produisait à la suite de hauts prix records imputables aux ouragans Katrina et Hugo à l’automne de 2005.

Pour aggraver les problèmes de l’industrie gazière au Canada, il y a eu l’affirmation soudaine du gaz naturel liquéfié (GNL) comme produit de rechange pour le marché américain. Les importations de GNL aux États-Unis devaient augmenter de 58 % pendant les sept premiers mois de 2007 par rapport à la même période en 2006. Ce gain de 1,6 milliard de dollars rend compte exactement de la chute des exportations de gaz naturel canadien aux États-Unis au cours des 12 derniers mois4. Cette progression du GNL à l’exportation s’explique par l’amélioration de ses conditions de transport et l’aménagement de terminaux de conversion gaz-liquide et de reconversion liquide-gaz aux États-Unis et dans les pays fournisseurs. Des terminaux pour les GNL en construction dans les provinces Maritimes feront augmenter davantage l’approvisionnement vers les États-Unis.

Dans l’ensemble, les exportations des autres produits énergétiques n’ont guère changé depuis 2002. Les exportations d’électricité (qui rappellent le plus la condition de « porteur d’eau » à l’exportation) ont culminé en 2001 pendant la crise de l’électricité en Californie. Depuis, elles sont tombées de 4,2 milliards de dollars à 2,5 milliards (en partie parce que les sociétés d’électricité aux États-Unis font de plus en plus usage de turbines à gaz). Pour faire contrepoids au recul des exportations d’électricité, il y a eu une reprise des exportations de charbon grâce à la demande asiatique.

Métaux et minéraux

Les cours des métaux ont rapidement imité l’envol des cours de l’énergie après 2002, bien que leur essor ait été « plus fort et pour plus longtemps » que même le prix de l’énergie. Les prix de toutes sortes de métaux ont battu des records, notamment ceux du nickel, du cuivre, du zinc et du minerai de fer. Les cours des minéraux non métalliques ont également monté en flèche (notamment la potasse, l’uranium et le diamant). Ensemble, métaux et minéraux forment le gros (66 %) des exportations de produits industriels.

Figure 3

À la faveur du mouvement de renchérissement, les biens industriels sont devenus la première exportation canadienne. Le mouvement a été des plus prononcés dans le cas des minerais et des alliages métalliques dont les exportations ont doublé en quatre ans après une décennie de léthargie5. Les perspectives de profit dans le secteur des métaux ont attiré les capitaux étrangers en abondance au cours de la dernière année.

Figure 4

On déclare fréquemment que le Canada exporte une trop grande partie de ses minerais métalliques sans autre transformation. Il ne s’agit cependant pas d’une bonne description du fonctionnement de l’industrie minière au Canada. Le Canada exporte pour 40 milliards de dollars d’alliages métalliques (c’est-à-dire des minerais affinés qui les portent à l’état de produits finis ou semi-finis) comparativement à seulement 11 milliards de dollars de minerais destinés à la fonte et à l’affinage. Les alliages ont aussi été stimulés par la croissance rapide des métaux précieux découlant de l’augmentation des exportations de diamant de 2002 à 2004 et de la montée du cours de l’or par la suite.

Ce qu’on sait moins bien, c’est combien de minéraux métalliques le Canada importe pour transformation ultérieure. Le Canada importe dans l’ensemble pour près de 10 milliards de dollars de minerais métalliques. Le tiers environ est de l’or. Depuis 2004, de l’or est importé de l’Amérique latine pour être affiné au Canada puis exporté vers le Royaume-Uni. Auparavant, cet or était directement exporté pour être affiné au Royaume-Uni. L’an dernier, les importations d’or du Canada se sont établies à 3,4 milliards de dollars, une hausse comparativement à 0,8 milliard en 2003. Au cours de la même période, les exportations ont doublé pour atteindre 5,4 milliards de dollars. Un autre 15 % des importations (1,5 milliard de dollars) est de l’alumine, qui sert à la fabrication de l’aluminium, produit qui va surtout à l’exportation (à 9,5 milliards de dollars, l’aluminium est la première exportation métallique du Canada). Une autre tranche de 1,5 milliard est du minerai de cuivre en provenance surtout de l’Amérique latine et à destination des établissements canadiens de fonte-affinage pour la réexportation.

Il est sûr qu’une partie de nos minerais est exportée pour transformation ultérieure. Par exemple, le Canada exporte du minerai de cuivre en Asie, du minerai de fer en Europe et en Asie et du minerai de nickel en Norvège. La leçon à en tirer est que les minerais métalliques, peu importe d’où ils sont extraits, sont transformés au Canada si des raisons économiques le justifient.

Les exportations d’autres produits miniers ont aussi grimpé plus rapidement que les métaux en 2007. Il s’agit surtout d’une conséquence de la hausse marquée du prix de l’uranium et de la forte demande pour la potasse.

Agriculture et pêche

L’agriculture et la pêche ont longtemps été des principales industries de ressources au Canada et demeurent de loin les premiers employeurs dans ce secteur6. Il reste que la faiblesse des prix et les perturbations de l’offre (et plus particulièrement le moratoire décrété sur la pêche à la morue et l’épidémie de la vache folle) ont enfoncé les revenus pendant le plus clair des deux dernières décennies, faisant des exportations agricoles les plus modestes de tout le secteur des ressources.

Les conditions agricoles se sont cependant nettement améliorées. Les exportations de céréales et d’oléagineux ont fait un bond de près de 50 % depuis le milieu de 2006. Depuis le creux provoqué par des conditions de sécheresse en 2005, les exportations de céréales et d’oléagineux ont presque doublé de valeur en deux ans seulement. Presque tout le gain est attribuable au blé dont le prix a atteint un sommet de 9 $ le boisseau. Pourtant, à près de 4 milliards de dollars, les exportations de blé sont bien inférieures à leur point culminant de 5 milliards de dollars atteint dans les années 1990.

Figure 5

Le canola est l’une des exportations céréalières qui croît le plus rapidement. Depuis 2002 seulement, ces exportations ont presque doublé pour atteindre un record de 1,8 milliard de dollars l’an dernier et elles sont en voie de dépasser ce sommet en 2007. La demande est alimentée par la tendance à l’encontre des gras trans qui fait délaisser les huiles hydrogénées en faveur du canola. Comme pour les métaux, le Canada a remonté la chaîne de valeur, en exportant pour 900 millions de dollars d’huile de canola l’an dernier. Les exportations totales de tous les produits du canola rivalisent maintenant avec le blé pour constituer le plus grand produit agricole d’exportation.

La fraîche prospérité de l’agri­culture ne vient pas seulement des exportations. Les recettes monétaires agricoles tirées du maïs ont aussi augmenté de 51 % dans la première moitié de 2007, comparativement à 2006, à cause de la demande intérieure qui s’attache à cette céréale comme biocarburant (le Canada n’exporte à peu près pas de maïs).

De même, les exportations de poisson sont passées presque du simple au double depuis 1990 malgré l’effondrement de la pêche à la morue au début de la décennie 1990. Le moratoire décrété sur cette pêche s’est traduit par une diminution de 22 % des exportations de poisson à l’état frais ou congelé de 1990 à 1994. L’industrie halieutique a su pourtant s’adapter de plusieurs manières. Plus particulièrement, elle a entrepris sa conversion du poisson de fond aux crustacés (comme le crabe, le homard et la crevette) et aux mollusques qui demeurent très abondants. Les exportations de crabe des neiges se portent notamment bien, dépassant brièvement le homard en tête des exportations en 2004 avant son repli.

Figure 6

Les exportations en 2002 de crustacés et de mollusques étaient déjà supérieures à 2 milliards de dollars avec bien plus de la moitié de toutes les exportations de poisson et quatre fois leur niveau de 1991. Il y a eu d’autres adaptations de l’industrie comme l’aquaculture d’autres espèces, notamment du saumon7. Cela devait aider les exportations de poisson (sans les crustacés et mollusques) à revenir l’an dernier à un niveau de 1,6 milliard de dollars correspondant presque à leur valeur de culmination en 1990, avant le moratoire.

Produits forestiers et hydroélectricité

Les exportations de produits forestiers ont culminé à 42,8 milliards de dollars en l’an 2000 pour ensuite évoluer constamment en baisse à un taux annuel de 30,9 milliards au premier semestre de 2007. Cette faiblesse tient à une double baisse des prix (mouvement aggravé par la valorisation du dollar canadien) et des volumes pour les trois principaux produits de la forêt, à savoir le bois d’œuvre, la pâte de bois et le papier. Pour chacun, les exportations restent à court à près d’un tiers de leur maximum récent, bien qu’elles aient pris des voies différentes pour y parvenir.

Figure 7

De toutes les exportations forestières, ce sont les livrai­sons de produits du papier qui ont invariablement été les plus faibles. Les reculs du bois d’œuvre et de la pâte de bois à l’exportation ont eu lieu sur de courtes périodes (laissant l’espoir d’une reprise), mais la demande de papier décroît chaque année depuis 2001, et ce, surtout à cause d’une consommation américaine de papier journal qui s’amenuise sans cesse (elle est en baisse de 47 % depuis les premiers mois de 2001); le nombre de lecteurs diminue et la taille des journaux rapetisse. La conversion en cours des supports médiatiques à la technologie Web ne montre aucun signe de ralentissement.

Les exportations de bois sont les plus variables, parce que l’imposition de divers droits et contingents dans l’interminable conflit canado-américain du bois de construction de résineux a agi négativement sur les cycles de la demande du marché de l’habitation aux États-Unis. Malgré toutes ces perturbations, les exportations de bois ont été bonnes dans l’ensemble, oscillant autour des 20 milliards de dollars en 2005. Depuis, une demande en net recul chez notre voisin du sud les a fait constamment baisser. Pour accentuer cette faiblesse de l’habitation aux États-Unis, il y a eu la montée du dollar canadien et un déficit de l’offre (qui tient à la réduction des quotas d’abattage au Québec et à l’infestation de dendroctone du pin en Colombie-Britannique).

Que les exportations forestières aient régressé en valeur absolue alors que toutes les autres exportations demeuraient en croissance a largement diminué l’importance des produits de la forêt. En 1978, ces mêmes produits figuraient pour 18 % dans nos exportations. En 1998 encore, c’était la première exportation du secteur des ressources, et ce, devant les métaux, l’énergie et les denrées agricoles. Au premier semestre de 2007, les produits forestiers étaient déjà à la traîne de ces trois composantes : l’énergie a été la première à les devancer en 2001, suivie des mines en 2006 et de l’agriculture en 2007 (pour la première fois dans l’histoire). C’est ainsi que la part des produits de la forêt a évolué en baisse dans la masse des exportations de marchandises, passant de 10,8 % en 1998 à 6,5 % seulement jusqu’ici en 2007.

Depuis l’an 2000, les services publics sont distancés dans leur croissance par les autres industries primaires. C’est en grande partie que la demande d’hydroélectricité croît lentement; de 2000 à 2004, elle n’a pas varié du tout. Comme nous l’avons indiqué, les exportations d’électricité ont culminé en 2001 pour ensuite entamer une descente rapide. La distribution intérieure de gaz naturel par les services publics a également fléchi depuis 2000.

Production et emploi

Les hausses de prix ont été dans une large mesure le moteur de la croissance récente des revenus tirés des ressources. L’essor du secteur des ressources a aussi apporté à celui‑ci des hausses de la production réelle et de l’emploi. Dans cette section, nous examinerons plus attentivement la production de ressources. Particulièrement, nous verrons pourquoi la production dans certains secteurs a été plus sensible à la hausse des prix que dans d’autres.  Nous conclurons en regardant si le secteur des ressources s’expose plus que le reste de l’économie à une alternance expansion-contraction.

En volume, le rythme de croissance de la production primaire est inférieur à celui de toute l’économie depuis 2002 (taux de 11,8 % contre 13,7 %). Le tableau est un peu meilleur pour l’emploi, puisque le secteur primaire a eu un régime de croissance légèrement supérieur à celui de l’économie (taux de 11 % contre 9,8 %). Une constatation implicite dans ces comparaisons est que la production par salarié est faible dans le secteur des ressources, phénomène que nous avons analysé dans tous ses détails plus tôt cette année8.

Depuis 2002, la production a le plus augmenté dans le secteur de l’extraction minière (sans l’extraction pétrolière ni gazière). Dans ce cas, les minéraux non métalliques ont été le moteur avec une augmentation de 27 %. L’événement initial avait été la mise en valeur de gisements diamantifères dans le nord du pays. Plus récemment, il y a eu une progression de la production de potasse en réaction à des prix élevés.

Ce redressement des métaux suivait une décennie de décroissance, à la différence du mouvement répété en dents de scie des prix de l’énergie. Peut-être par rappel de toutes ces années de recul, l’investissement et la production dans les métaux et autres minéraux ont réagi plus lentement que dans le domaine de l’énergie.

La production des mines métalliques n’a pas été en prise avec les hausses de prix. Si la production métallique manque de fermeté, c’est à cause de l’épuisement des gisements et de la longueur des travaux d’exploration et de mise en valeur. Les gisements aurifères offrent le meilleur exemple de cet épuisement avec une production qui, en volume, a été amputée de moitié depuis le début de la décennie, quoique les prix aient atteint cet été un sommet en 28 ans9. La production de zinc a aussi constamment décru, tandis que la production de cuivre évoluait légèrement en baisse. Une vague de nouveaux investissements (notamment au Québec et en Colombie-Britannique) pourrait encore servir d’aiguillon à la production de ces métaux.

Certaines productions métal­liques se sont relevées après le redressement des prix. Le nickel en est la meilleure illustration, sa production étant parvenue à un sommet en 30 ans après la mise en exploitation du gisement de Voisey’s Bay. Malgré plusieurs conflits de travail, la production de minerai de fer a également gagné 15 % en gros depuis deux ans, car la forte demande des aciéries chinoises a porté les prix à des niveaux records après trois décennies de décroissance qui devaient laisser cette industrie à la moitié seulement de sa taille maximale de 1979.

L’essor récent des cours des métaux a causé une montée de l’investissement. Depuis son minimum de 1,5 milliard de dollars en 2002 et 2003, celui‑ci a atteint les 2 milliards. Malgré cette hausse, la production diminue sans cesse, contrairement à ce qui s’était passé dans les années 1990 où la production avait suivi la progression de l’investissement après deux ans environ. Il y a peut-être là un phénomène de rendements décroissants, les entreprises ayant à extraire plus profondément ou dans des régions plus éloignées et moins productives.

Figure 8

L’extraction pétrolière et gazière a elle aussi été lente au départ à réagir à des prix records. La production n’a pas changé pour l’essentiel en 2003 et 2004, ni même au premier semestre de 2005. Depuis, elle a cependant fait un bond de près de 8 %. Toutes les hausses viennent du pétrole, qui a progressé de 13 % depuis 2002, tandis que le gaz naturel a plafonné.

Cette évolution de la production pétrolière et gazière s’explique par divers facteurs. D’abord, la production de gaz naturel est descendue de son sommet record de 2002. Il y a eu perte de productivité dans les bassins d’exploitation de l’Ouest canadien et de l’île de Sable. L’effondrement des cours gaziers en 2006 a précipité cette chute et la production a baissé de 40 % du printemps 2006 à 2007.

Figure 9

Ensuite, si la production pétrolière s’est constamment élevée après 2002, c’est entièrement du fait de la mise en valeur des sables bitumineux, puisque la production des puits classiques a reculé. Ainsi, la part qu’occupent les sables bitumineux dans l’ensemble de la production pétrolière a crû de 34 % en 2002 à 46 % cette année. Cette croissance a été alimentée en grande partie par la production de bitume brut dont le prix est moins élevé que le brut de synthèse ou le brut léger, puisqu’il doit être traité davantage. Cette différence de prix s’amenuise cependant depuis 2002, à mesure que plus d’usines de valorisation et de raffineries peuvent traiter du bitume à teneur plus faible. Par conséquent, la production pétrolière en nombre de barils et la valeur en dollars constants augmentent de pair depuis 2002.

Les ressources sont-elles plus cycliques?

On affirme souvent qu’un des inconvénients d’une dépendance croissante à l’égard des industries primaires est leur évolution économique en dents de scie (alternance expansion-contraction). Si on examine cependant la production et les revenus à l’exportation, on en tire une impression générale de stabilité, en toute comparabilité avec le reste de l’économie.

Dans une comparaison des écarts-types (mesure de variabilité) de la croissance annuelle de l’industrie pour le PIB réel depuis 1991, on constate que le secteur des ressources a un indice de variabilité de la croissance légèrement supérieur (2,1 contre 1,6 du PIB de l’ensemble des entreprises). Ce sont l’agriculture et les services publics qui, subissant l’influence des conditions météorologiques, projettent leurs écarts-types standards à 5,4 et 2,7 respectivement. Les mines ne s’écartent guère des services non gouvernementaux  (1,6 contre 1,5). Il est intéressant de remarquer que tant la construction que la fabrication montrent plus de variabilité que les ressources non agricoles.

Bien sûr, la production réelle peut ne pas refléter la variabilité des prix, mais les données montrent cependant que les revenus tirés de l’exportation de la plupart des ressources diminuent rarement en valeur annuelle. Dans les 35 ans compris entre 1971 et 2006, les exportations ont baissé seulement cinq ans dans le cas des produits énergétiques et six dans le cas des produits agricoles et industriels (et certaines de ces diminutions étaient très faibles). Pour l’absence de pertes annuelles, ces produits sont à égalité avec les machines et le matériel et les autres biens de consommation ayant quatre ans de recul à l’exportation dans chaque cas. Les industries de l’automobile et des produits forestiers s’exposent le plus aux baisses annuelles avec des valeurs de 9 et 11 respectivement. Même là, près de la moitié des pertes ont été subies après l’an 2000, et on peut donc penser que les facteurs qui entrent en jeu sont plus structurels que cycliques.

Plus précisément encore, une comparaison des écarts-types de la croissance annuelle des exportations révèle que les ressources sont en réalité plus stables que les produits fabriqués. Depuis 1991, l’écart-type est de 7,0 pour les ressources comparativement à 9,2 pour les produits fabriqués. Il est en fait le plus bas pour les denrées agricoles (6,2) et les biens industriels (7,1). À 11,6, les produits forestiers ne devancent que légèrement les produits fabriqués avec des valeurs qui varient de 10,8 pour les automobiles, à 10,3 pour les machines et le matériel et à 9,2 pour les biens de consommation. Les produits énergétiques ont été les plus enclins à une variation, avec un écart-type de 20 points, ce qui s’explique en gros par la croissance rapide de ce secteur depuis l’an 200010.

La capacité qu’ont la plupart des grandes industries de ressources d’éviter les baisses témoigne de la façon dont les diverses composantes s’arrangent pour compenser la faiblesse qui se manifeste dans certains secteurs. Ainsi, le marasme récent des exportations de gaz naturel a été laissé dans l’ombre par la vigueur du pétrole brut dans les exportations d’énergie. De même, nous avons pu voir comment le moratoire décrété sur la pêche à la morue en 1992 a donné lieu à une diversification au profit d’autres types de produits de la mer.

Conclusion

Propulsée par l’essor historique du prix des produits de base, l’économie canadienne redécouvre son secteur des ressources depuis les cinq dernières années. Toutefois, la croissance de ce secteur n’est certainement pas ordinaire. La production d’hydrocarbures est passée des gisements classiques de pétrole et de gaz à l’exploitation des sables bitumineux. Les métaux précieux reposent davantage sur le diamant en raison de l’épuisement des mines d’or. L’industrie de la pêche a abandonné le poisson de fond en faveur des crustacés et des mollusques à cause de l’épuisement presque total de certaines espèces traditionnelles. Les producteurs de céréales délaissent le blé pour cultiver le canola et s’adapter aux goûts des consommateurs.

Dans le présent article, plusieurs mythes concernant le secteur des ressources au Canada ont été confrontés. Les métaux et les produits énergétiques du sous-sol stimulent maintenant la croissance des ressources plutôt que le bois et l’eau. Des industries comme celles des métaux et du canola sont les chefs de file pour ce qui est de la valeur ajoutée ici au Canada, plutôt que de l’exportation de ressources brutes qui seront traitées à l’étranger. Enfin, les revenus des exportations du secteur des ressources semblent ne pas être plus susceptibles à des cycles d’expansion-contraction que le reste de nos exportations.

Études spéciales récemment parues


Notes

* Groupe d’analyse de conjoncture 613-951-9162.
1 Les Gabaonites qui ont voulu tromper Josué ont été condamnés à être « scieurs de bois et porteurs d’eau au service de toute la communauté » (Josué 9, 21 à 23). En général, on voyait dans ce travail une activité servile.  
2 Fonds monétaire international, « World Economic Outlook », avril 2007.
3 La plupart des données sur les exportations du présent article sont selon la balance des paiements, bien que les données de certains produits de base ne soient disponibles que sur une base douanière.
4

U.S. International Trade Commission Trade Dataweb.

5 Les exportations de minerais métalliques et d’alliages représentaient 25,3 milliards de dollars en 1995 et 25,9 milliards de dollars en 2003.
6

L’agriculture dominait avec 346 000 des 677 000 emplois du secteur des ressources en 2006, selon l’Enquête sur la population active.

7

Voir Seafood Industry Year in Review 2006, ministère des Pêches et de l’Agriculture de Terre-Neuve‑et-Labrador, mars 2007.

8

P. Cross,  « Tendances récentes de la production et de l’emploi », L’observateur économique canadien, Statistique Canada, no 11-010-XPB au catalogue, Vol. 20, no 3.

9

Les données sur la production des mines métalliques sont selon les entités physiques produites tirées de Ressources naturelles Canada (tableau Cansim no 152).

10

Si on exclut un bond de 77 % en 2000, on ramène à 12,2 l’écart-type des exportations d’énergie, ce qui les aligne sur la plupart des autres exportations.



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Date de modification : 2008-11-21 Avis importants
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