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La maladie de la vache folle et le commerce du bœuf

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par Denis Poulin et Attah K. Boame

Le 20 mai 2003, l’industrie du bœuf au Canada a été ébranlée après qu’on a annoncé qu’une vache reproductrice du Nord de l’Alberta avait contracté l’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB), mieux connue sous le nom de maladie de la vache folle.

Avant l’interdiction mondiale touchant les produits canadiens du bœuf, le Canada était le troisième exportateur de bœuf au monde. En 2002, ce marché d’exportation valait environ 4,1 milliards de dollars. Par suite de l’interdiction, la valeur des exportations canadiennes de bœuf est pratiquement tombée à zéro en juin, juillet et août.

Les marchés d’exportation représentent généralement une source de revenus importante pour les éleveurs de bovins. Avant l’interdiction, près de la moitié des bovins vendus au Canada étaient exportés vivants ou sous forme de viande de boucherie.

Le Canada exporte la majorité de ses produits du bœuf vers les États-Unis qui est le plus grand importateur de bœuf au monde. Au Canada, en 2002, on exportait environ 90 % du bœuf vers les États-Unis.

Avant de dégringoler en juillet et en août, les importations canadiennes de bœuf avaient dépassé en juin les niveaux atteints par le passé. Ces importations n’étaient pas sans importance (environ 900 millions de dollars en 2002) et représentaient une proportion considérable de l’approvisionnement en viande au Canada (près de 30 % au cours des trois dernières années).

Avant l’interdiction mondiale, le Canada exportait beaucoup plus de produits du bœuf qu’il n’en importait. Ainsi, l’excédent commercial de l’industrie du bœuf s’est chiffré à environ 3,2 milliards de dollars en 2002.

Par contre, aux États-Unis, l’approvisionnement en bœuf était restreint, ce qui a entraîné une hausse sans précédent des prix de détail.

Dans le présent document, on dresse un tableau des exportations et des importations canadiennes de bœuf dans les débuts de l’interdiction, en mettant l’accent sur le marché américain.

Le Canada est le troisième exportateur de produits du bœuf au monde

En 2001, le Canada détenait environ 15 % du marché mondial d’exportation de produits du bœuf, se situant au troisième rang1. Les États-Unis, dont la part du marché s’élevait à 16 %, occupaient le deuxième rang et l’Australie, qui détenait 23 % de ce marché, se trouvait au premier rang.

Champ d’observation

Dans le présent document, les produits du bœuf désignent les bovins vivants, les produits du bœuf frais et réfrigérés ou les produits de viande congelés — lesquels ont représenté environ 45 %, 45 % et 5 % respectivement de l’ensemble des exportations de produits du bœuf en 2002 — ainsi que d’autres produits, tels que la viande transformée et les abats (représentant seulement 5 % de l’ensemble des exportations). Le veau et le bison font partie des produits du bœuf.

Sources de données

Les données de cette analyse sont principalement des données sur le commerce d’exportation et d’importation au Canada et aux États-Unis; elles proviennent de la Division du commerce international de Statistique Canada et de la Foreign Trade Division du U.S. Census Bureau. Les données sur les recettes monétaires agricoles proviennent de la Division de l’agriculture de Statistique Canada. Sauf indication contraire, tous les montants sont en dollars canadiens. Les conversions sont fondées sur la moyenne des taux de change mensuels et annuels de la Banque du Canada. De même, toutes les sources de données, sauf indication contraire, sont établies à partir des valeurs en douane. Les données ne sont pas corrigées en fonction des variations saisonnières.

Les éleveurs de bovins de boucherie sont tributaires des marchés d’exportation

Avant le 20 mai 2003, près de la moitié des bovins vendus au Canada étaient exportés vivants ou sous forme de viande de boucherie.

En 2002, la valeur sur le marché agricole des animaux vendus pour l’abattage et exportés sous forme de viande de boucherie a atteint 1,8 milliard de dollars. Les exportations correspondantes — d’une valeur d’environ 2,2 milliards de dollars — comprennent tous les autres frais tels que la transformation et le transport.

En outre, la valeur sur le marché agricole des animaux vivants exportés a également atteint 1,8 milliard de dollars. Combinées, ces ventes totalisaient 3,6 milliards de dollars de recettes monétaires agricoles et représentaient presque la moitié (48 %) de l’ensemble des recettes monétaires agricoles (7,5 milliards de dollars) générées par l’élevage du boeuf en 2002.

Enfin, il a fallu environ 1,7 million de bovins pour produire les 612 000 tonnes de viande exportées en 2002, soit environ le même nombre d’animaux vivants que le Canada a exportés.

Le Canada est le plus grand exportateur de bœuf vers les États-Unis

Pour ce qui est du marché américain, la proximité géographique et le libre échange contribuent grandement au succès des exportations canadiennes. Après tout, les États Unis constituent le plus important partenaire commercial du Canada et son économie est la plus importante au monde.

La proximité du Canada et son intégration au marché américain du bœuf expliquent en partie le succès des exportateurs canadiens de produits du bœuf. En 2002, les exportations canadiennes de bœuf vers les États-Unis s’élevaient à 3,7 milliards de dollars.

Au Canada, en 2002, on exportait environ 90 % du bœuf vers les États-Unis. La même année, presque tous les bovins vivants du Canada destinés à l’exportation (99,6 %) ont été expédiés aux États-Unis. La valeur relativement faible des exportations vers d’autres pays illustre l’importance du marché américain pour les éleveurs de bétail au Canada.

En 2002, les exportations canadiennes de produits du bœuf, telles que définies dans le présent article, représentaient 55 % des importations américaines de bœuf. La même année, les exportations canadiennes de bovins vivants (bovins laitiers, bovins de boucherie et bisons) constituaient environ 80 % des importations de bovins des États-Unis et 85 % de leurs importations de produits du bœuf frais ou réfrigérés. Par contre, le Canada n’a fourni qu’une très faible proportion des importations américaines de produits du bœuf congelés (3,5 %).

Le fait que les Américains soient les plus grands importateurs de bœuf au monde2 (32 % des importations mondiales, suivis des Japonais avec 14 %) a contribué au succès des exportateurs canadiens de bœuf.

Les Américains sont aussi parmi les plus grands consommateurs de viande : ils consomment 44,6 kilogrammes de bœuf et de veau par habitant, alors que les Canadiens en consomment 31,9 kilogrammes3 . La combinaison de tous ces facteurs crée des conditions favorables à l’exportation et assure un marché important pour les exportateurs canadiens de bovins.

Les importations américaines de bœuf en provenance d’autres pays n’ont pas augmenté

De toute évidence, l’interdiction a eu un effet sur les importations américaines de bœuf en provenance du Canada, lesquelles ont pratiquement cessé en juin, juillet et août. En avril, c’est-à-dire le dernier mois à ne pas avoir été touché, elles se situaient à 288 millions de dollars.

Les importateurs américains ne se sont pas tournés vers d’autres pays pour compenser le manque créé par l’interdiction de produits canadiens du bœuf. En fait, au total, les importations américaines de bœuf étaient légèrement plus faibles en août qu’en juin.

Graphique
Les importations américaines de bœuf sont demeurées faibles à la suite de l’interdiction

Graphique : Les importations américaines de boeuf sont demeurées faibles à la suite de l’interdiction

Un marché américain perturbé

Aux États-Unis, les prix de détail du bœuf se situaient à des niveaux records en février 2003, avant la confirmation d’un cas d’ESB au Canada. Les prix ont continué à grimper jusqu’en août, atteignant 3,74 dollars américains la livre, c’est-à-dire le prix de détail le plus élevé depuis juin 2001, où les prix avaient atteint 3,48 dollars américains la livre4 .

Si l’on ne tient pas compte de la baisse des importations de bœuf en provenance du Canada, les raisons qui expliquent la pénurie en approvisionnement de bœuf aux États-Unis sont la forte demande des consommateurs et la dévaluation du dollar américain qui favorise l’exportation de viande. En outre, l’industrie américaine du bœuf commence à ressentir les effets de sept années de liquidation des cheptels. Les prix des bovins engraissés et des bovins de reproduction sont tellement élevés que les éleveurs procèdent à la reconstitution de leur cheptel. La première partie du processus de reconstitution du cheptel signifie qu’un plus grand nombre de génisses sont retenues pour l’accouplement et qu’un nombre moins élevé est envoyé dans les parcs d’engraissement.

Les exportations américaines de bœuf vers les autres pays ont grimpé de 17 % après l’interdiction touchant les produits canadiens du bœuf. Cette augmentation a plus que comblé le manque sur les marchés mondiaux résultant de l’interdiction. Une grande partie de l’augmentation a été dirigée vers des pays où les exportateurs de bœuf du Canada et des États-Unis se font habituellement concurrence, c’est-à-dire le Mexique, le Japon et la Corée du Sud.

La moyenne mensuelle des exportations américaines de bœuf est passée de 460 millions de dollars au cours des quatre premiers mois de 2003 à 540 millions de dollars en juin, juillet et août. Cette augmentation de 80 millions de dollars était bien plus importante que la baisse de 34 millions de dollars (moyenne mensuelle en 2002) des exportations canadiennes de bœuf vers d’autres pays que les États-Unis.

L’Alberta est la province la plus affectée

L’interdiction des États-Unis et d’autres pays touchant les produits canadiens du bœuf a eu un impact direct sur l’industrie du bœuf, l’industrie laitière et l’élevage de bétail. En outre, l’interdiction affecte l’emploi dans plusieurs secteurs connexes, y compris le conditionnement des viandes, la transformation des aliments et l’industrie des transports.

De toutes les provinces canadiennes, l’Alberta est la plus affectée. La moyenne des exportations de bœuf de cette province de janvier à avril se chiffrait à environ 160 millions de dollars par mois. L’Alberta est suivie de l’Ontario (où la moyenne des exportations se situait à 62 millions de dollars par mois), de la Saskatchewan (23 millions de dollars) et du Québec (11 millions de dollars).

Pour le Canada, le bœuf importé est une source importante d’approvisionnement

Les importations de bœuf représentent une proportion considérable de l’approvisionnement en viande du Canada. Au cours des trois dernières années, les importations de viande de bovins constituaient près de 30 % du bœuf consommé au pays. Les importations sont en grande partie des morceaux de choix de bœuf et de veau désossés ou des produits en emballage-portion pour les hôtels et les restaurants.

Malgré l’interdiction touchant l’exportation de bœuf, le Canada a dû, en vertu de règlements internationaux, permettre les importations de viande rouge et de bétail. Cela signifie que le Canada a été dans l’impossibilité d’adopter une politique d’interdiction d’importation pour alléger l’offre excédentaire de ses produits au pays.

En vertu de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), il n’y a pas de restriction sur l’importation de la viande rouge et du bétail en provenance des États-Unis, du Mexique et du Chili. En tant que membre de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), le Canada est également obligé d’accepter des quantités négociées de bœuf de pays faisant partie de l’OMC.

En vertu de l’OMC, le Canada a un contingent tarifaire annuel de 76 409 tonnes de bœuf frais, réfrigéré ou congelé non réglementé par l’ALENA. Les importations canadiennes qui ne dépassent pas ce contingent tarifaire sont exemptes de droits de douane, tandis que les importations qui dépassent ce contingent sont assujetties aux droits de douane. Les tarifs sont punitifs de telle sorte qu’on importe très peu de bœuf au pays qui ne soit pas exempt de droits de douane. Le ministre des Affaires étrangères et du Commerce international peut toutefois autoriser des importations supplémentaires (dépassant le contingent tarifaire) en franchise de droits pour le bœuf (frais, réfrigéré ou congelé) non réglementé par L’ALENA.

Vers la fin de juillet 2003, les importations de bœuf non réglementé par l’ALENA exemptes de droits avaient déjà dépassé le contingent annuel de presque 30 %. Les sources principales de ces importations élevées étaient les produits du bœuf de l’Union européenne, de l’Uruguay, de l’Argentine et du Brésil — des pays tous sujets au contingent tarifaire. Vers la fin de juillet 2003, le gouvernement canadien a annoncé qu’il n’autoriserait plus d’importations supplémentaires en franchise de droits pour le bœuf non réglementé par l’ALENA à partir de cette date.

Les importations canadiennes de bœuf ont augmenté en juin et ont baissé en juillet et en août

En juin, les importations canadiennes de bœuf ont dépassé les niveaux atteints par le passé avant de chuter en juillet et en août.

Graphique
Les importations canadiennes de bœuf ont augmenté en juin avant de chuter en juillet et en août

Graphique : Les importations canadiennes de boeuf ont augmenté en juin avant de chuter en juillet et en août

Par rapport à mai, le bond de 10 % en juin pourrait refléter le fait que les produits du bœuf n’arrivent pas au Canada sans négociations préalables et préparatifs. Les importateurs signent des contrats et coordonnent les expéditions quelque temps avant la date à laquelle ils ont besoin de ces biens. Par conséquent, il est fort probable que les importations enregistrées en juin aient été en grande partie négociées avant l’interdiction touchant les exportations canadiennes de bœuf.

La hausse observée en juin pourrait aussi refléter les efforts des importateurs de prévoir si les consommateurs pourraient préférer substituer la viande produite au Canada par du bœuf importé, un peu comme l’ont fait les consommateurs du Japon et du Royaume-Uni à la suite de la découverte de cas de ESB dans ces pays. Si tel a été le cas, il était inutile de prendre ces précautions puisque la demande des consommateurs canadiens pour le bœuf produit au Canada est demeurée ferme.

L’offre excédentaire de bœuf généralisée et la faiblesse des prix du bétail expliquent probablement la baisse des importations de bœuf en juillet et en août.

Les États-Unis continuent d’être la principale source d’importations de produits du bœuf pour le Canada. En 2002, les importations de bœuf en provenance des États-Unis représentaient environ la moitié de l’ensemble des importations de bœuf, suivis des importations en provenance de l’Australie (32 %) et de la Nouvelle-Zélande (18 %). Les importations de bœuf d’autres pays étaient vraiment minimes.

Vers un redressement des exportations canadiennes de bœuf

Les États-Unis et le Mexique ont procédé à la réouverture de leur frontière pour les morceaux de choix de bœuf du Canada. Le Canada est le premier pays au monde à réintégrer ses produits du bœuf sur le marché américain à la suite de la découverte d’un cas d’ESB.

Depuis la mi-septembre, le Canada a pu exporter du bœuf désossé d’animaux de moins de 30 mois vers les États-Unis, et ce, en vertu d’un processus d’émission de permis. Le 16 octobre, le ministre de l’Agriculture a déclaré que les entreprises canadiennes avaient expédié 28 000 tonnes de produits du bœuf frais, réfrigéré ou congelé aux États-Unis entre la mi-septembre et le 15 octobre. Ces exportations représentent environ la moitié des exportations d’un mois de septembre type au cours des années précédentes.

Le Canada a également réalisé des progrès dans un certain nombre de marchés d’exportation plus petits. Récemment, l’Antigua-et-Barbuda, la Barbade, la Jamaïque, les Philippines, la Russie et Trinidad et Tobago ont partiellement levé leur interdiction touchant les produits canadiens du bœuf.

Notes en fin de document

  1. Selon la Fédération canadienne pour l’exportation de bœuf; données extraites de la section sur les statistiques du site Web de CANFAX Research Services (http://www.canfax.ca), publié en février 2003 (consulté le 14 juillet 2003). Les données les plus récentes sont celles de 2001.
  2. Données extraites de la section sur les statistiques du site Web de CANFAX Research Services (http://www.canfax.ca) (consulté le 14 juillet 2003).
  3. Ibid.
  4. U.S. Department of Agriculture (USDA), Economic Research Service, Livestock, Dairy and Poultry Outlook, produit no LDP-M-108 au catalogue, 17 juin 2003, p. 1.