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  1. Introduction
  2. Modèle repère
  3. Étalonnage
  4. Actifs de retraite dans l’Enquête sur la sécurité financière
  5. Résultats de la simulation
  6. Analyse de sensibilité
  7. Discussion
  8. Conclusion
  9. Annexe

1   Introduction

Le vieillissement de la population et la récente crise financière mondiale font ressortir l’importance des discussions concernant le caractère adéquat de la préparation à la retraite au Canada et la fiabilité du système de revenu de retraite canadien. Si les Canadiens ne sont pas bien préparés financièrement, leur niveau de vie pourrait diminuer de façon significative à la retraite. Toutefois, l’évaluation du caractère adéquat de la préparation à la retraite n’est pas une tâche facile. Les questions clés liées à l’évaluation du caractère adéquat ont trait à la définition de la signification de ce terme et à la façon dont l’évaluation est faite.

Parmi les approches adoptées dans les ouvrages publiés figure l’évaluation du caractère adéquat du revenu de retraite en mettant l’accent sur la proportion du revenu avant la retraite qui doit être remplacée à la retraite pour maintenir le niveau de vie d’avant la retraite 1 . En règle générale, le revenu reçu après la retraite devrait remplacer au moins 70 % du revenu reçu avant la retraite. Toutefois, il existe une hétérogénéité considérable parmi les ménages du point de vue de la composition de la famille, du nombre d’enfants, de la propriété du logement et de l’état de santé des membres du ménage; par conséquent, les différents ménages auront des besoins financiers différents à la retraite. Il se peut qu’une règle générale ne soit pas optimale pour des ménages qui ont des cheminements de gains différents toute la vie durant, même si leurs préférences sont similaires. Il est probable qu’un taux de remplacement « unique » constitue un indicateur trompeur du bien-être de nombreux retraités.

Une autre approche consiste à procéder à des inférences concernant le caractère adéquat de préparation à la retraite, grâce à un examen des changements dans la consommation, avant et après l’âge de la retraite. Selon le modèle de consommation type pendant le cycle de vie, les agents ayant des attentes rationnelles lisseront leurs utilités marginales de consommation au fil du temps. Par conséquent, les changements de revenu prévisibles, comme la retraite, ne devraient pas donner lieu à des changements importants au chapitre de la consommation. Des preuves empiriques accumulées au cours des deux dernières décennies montrent toutefois que les dépenses des ménages diminuent après la retraite et que la baisse des dépenses de consommation dépasse les dépenses liées au travail. Cela est habituellement appelé « casse-tête de la consommation après la retraite » et est souvent interprété comme une preuve que de nombreux ménages n’épargnent pas de façon adéquate pour la retraite 2 . Diverses études récentes ont présenté d’autres explications du casse-tête (voir Hurst [2008] pour un recensement des ouvrages publiés). Tout d’abord, la consommation réelle ne se reflète peut-être pas entièrement dans les dépenses de consommation. Dans le premier cas, on inclut non seulement le flux de consommation généré par les biens et services achetés au cours de la période courante, mais aussi le flux de consommation généré par les biens durables achetés au cours des périodes précédentes. Lorsque ceux-ci sont inclus, les dépenses de consommation des ménages canadiens changent très peu à la retraite (Lafrance et LaRochelle-Côté, 2011). En deuxième lieu, les baisses observées dans les dépenses après la retraite sont attribuables principalement à la baisse des dépenses alimentaires. Il a toutefois été démontré que, pour la plupart des ménages à la retraite, l’apport alimentaire réel change peu comparativement au niveau avant la retraite, même si leurs dépenses en aliments diminuent (Aguiar et Hurst, 2005, 2007; Brzozowski et Lu, 2010). Cela vient du fait que les ménages à la retraite consacrent habituellement plus de temps aux achats des aliments et à leur préparation à la maison. En troisième lieu, il existe une hétérogénéité substantielle du point de vue des changements dans les dépenses de consommation avant et après l’âge de la retraite. De nombreuses familles ne connaissent que des changements minimes dans leurs dépenses de consommation. Les baisses plus importantes des dépenses sont associées à une retraite non prévue, qui est habituellement liée à des chocs de santé ou au chômage à long terme (Haider et Stephens, 2007; Smith, 2006). Cette évolution dans les ouvrages publiés sur la consommation souligne la difficulté de procéder à des inférences concernant le caractère approprié ou optimal de l’épargne, à partir des changements dans les modèles de consommation avant et après l’âge de la retraite.

Contrairement à l’approche suivie dans les études mentionnées précédemment, le présent document évalue le caractère adéquat de la préparation à la retraite grâce à un examen du caractère approprié de l’épargne privée ou de l’accumulation de richesse des ménages canadiens, au moyen d’un modèle de cycle de vie stochastique 3 . L’accent est mis sur l’épargne privée ou les actifs autres que de pension, c’est-à-dire la richesse totale moins les actifs de retraite (tant de régimes généraux que privés). Il s’agit du montant de l’épargne privée d’un ménage, compte tenu de ses attentes au chapitre de l’admissibilité future à des régimes de retraite généraux et privés, le cas échéant. La définition du caractère adéquat de l’épargne dans la présente étude est fondée sur le caractère optimal de l’épargne sous-entendue par des modèles de consommation pendant le cycle de vie. Selon les modèles de consommation, les personnes rationnelles prennent des décisions en matière d’épargne pour lisser leurs utilités marginales de consommation toute la vie durant, en fonction des contraintes budgétaires auxquelles elles sont soumises toute la vie durant. L’épargne optimale pendant le cycle de vie sous-entendue par de tels modèles fournit un niveau repère normatif de ressources financières requises pour maintenir un niveau de vie similaire avant et après la retraite. Un ménage est considéré comme ayant épargné adéquatement s’il accumule suffisamment de richesse pour pouvoir lisser ses utilités marginales de consommation au fil du temps 4 .

La présente étude est la première qui vise à évaluer le caractère adéquat de l’épargne en vue de la retraite des ménages canadiens au moyen d’un modèle de cycle de vie stochastique 5 . Plusieurs études américaines ont utilisé une approche similaire pour évaluer le caractère adéquat de l’épargne des ménages en vue de la retraite (Engen et coll. 1999; Scholz et coll. 2006; Gale et coll., 2009). Le présent document diffère parce qu’il accorde une attention spéciale au rôle des régimes de retraite privés en ce qui a trait au caractère adéquat de l’épargne en vue de la retraite, compte tenu de la présence de régimes de retraite généraux importants. Les actifs des régimes de retraite privés représentent une part importante de la richesse des ménages 6 . Ils ont aussi des répercussions importantes sur l’accumulation des actifs autres que de pension, par suite de l’effet d’« évincement » ou de « compensation » (Engelhardt et Kumar, 2011; MacGee et Zhou, 2010). Par ailleurs, la couverture par les régimes de retraite privés est incomplète, étant donné que ce ne sont pas tous les employeurs qui offrent de tels régimes. La couverture des régimes de pensions peut aussi changer au cours de la vie du titulaire du régime, par suite d’un congédiement ou d’un changement d’emploi. Tous ces facteurs laissent supposer qu’une modélisation souple et réaliste des régimes de retraite privés est importante pour évaluer le caractère adéquat de l’épargne en vue de la retraite. Le présent document traite la couverture par un régime de retraite privé comme un processus stochastique étalonné pour correspondre au profil d’âge de la couverture des régimes de retraite privés observé dans les données. Cela produit une source d’incertitude supplémentaire pendant le cycle de vie et permet d’aligner le modèle avec des versions plus réalistes du modèle de cycle de vie standard. En intégrant la couverture stochastique des régimes de pensions dans le modèle, on peut mieux évaluer la différence dans le caractère adéquat de l’épargne en vue de la retraite des ménages qui ont un régime de retraite privé et ceux qui n’en ont pas.

Dans la pratique, le présent document élabore un modèle de cycle de vie étalonné de façon réaliste, qui intègre les caractéristiques démographiques du ménage, le risque de mortalité, l’incertitude concernant les gains futurs et la couverture par un régime de retraite privé, les variations temporelles du système fiscal et de transfert canadien (tant fédéral que provincial), et le système des pensions au Canada. Les données sur la réalisation des gains tirées de dossiers administratifs à accès restreint, à savoir la Banque de données administratives longitudinales (DAL), constituent un élément essentiel de ce modèle. La banque DAL est un fichier longitudinal composé d’un échantillon aléatoire de 20 % de tous les contribuables canadiens. Elle est un outil conçu pour la recherche. Dans la présente étude, on utilise les données pour une période de 26 ans (1982 à 2007). Elle comprend des données détaillées sur les gains, les revenus, les impôts et les transferts, la couverture par un régime de pension agréé (RPA) et la cotisation à un tel régime (les RPA sont des régimes de retraite privés parrainés par l’employeur au Canada), etc. Ces données nous permettent d’estimer plusieurs profils importants, par exemple, des profils des gains et des équations des impôts et des transferts, qui sont essentiels dans le modèle de cycle de vie.

Il est important de souligner que l’objectif du présent document n’est pas d’expliquer les profils d’épargne observés au moyen d’un modèle de cycle de vie. Le présent document utilise plutôt un modèle théorique pour calculer l’épargne optimale, uniquement comme « objectif de caractère adéquat » normatif, qui peut être utilisé comme repère pour déterminer de combien de ressources une personne a besoin pour maintenir son niveau de vie à la retraite. Les prédictions du modèle sont par la suite comparées avec les comportements d’épargne observés et tout déficit (par rapport au repère) dans la richesse observée est interprété comme une preuve d’« insuffisance de l’épargne ». Selon cette approche, un ménage est considéré comme ayant épargné adéquatement pour la retraite s’il accumule davantage de richesse à la retraite que l’objectif repère simulé fondé sur les caractéristiques du ménage.

Étant donné que les antécédents de gains et les données sur la richesse ne sont pas disponibles pour les mêmes personnes dans un seul ensemble de données canadien, le présent document comporte une évaluation globale du caractère adéquat de l’épargne, plutôt qu’une évaluation du nombre exact de ménages qui épargnent adéquatement. C’est donc dire que les médianes simulées de la richesse sont utilisées dans les objectifs de caractère adéquat et que les fractions de ménages de l’Enquête sur la sécurité financière (ESF) dont la richesse dépasse ces objectifs sont calculées. Les répartitions de la richesse observées sont aussi comparées avec les répartitions de la richesse simulées pour les ménages qui comportent les mêmes caractéristiques, afin de déterminer le risque possible d’insuffisance de l’épargne.

Dans l’ensemble, on estime que les ménages canadiens âgés de 60 à 64 ans en 2005 ont épargné adéquatement pour la retraite : environ 62 % des ménages ont accumulé davantage de richesse que la richesse médiane simulée. Le risque global d’insuffisance de l’épargne est faible : seuls les ménages se situant en dessous du 23e centile de la répartition de la richesse ont épargné moins que les objectifs simulés sous-entendus par le modèle. Les ménages qui sont couverts par un régime de retraite privé obtiennent de meilleurs résultats que ceux sans couverture : 70 % des ménages couverts par un régime de retraite privé dépassaient la médiane simulée. On estime aussi que les couples ont une épargne de retraite adéquate. Le risque d’insuffisance de l’épargne est faible pour ces groupes, les déficits se produisant probablement au 5e centile inférieur. Les ménages sans couverture d’un régime de retraite privé ou les ménages de personnes seules sont considérés comme des groupes ayant un risque élevé d’insuffisance de l’épargne. Des déficits au chapitre de l’épargne sont susceptibles de se produire entre le 25e et le 50e centiles inférieurs de la répartition de la richesse pour les ménages non couverts par un régime de retraite privé, et entre le 50e et le 75e centiles de la répartition de la richesse pour les personnes seules. Les résultats sont largement robustes à une série d’analyses de sensibilité.

Le reste du document est organisé de la façon suivante. La section 2 explique le modèle de cycle de vie utilisé pour l’analyse. La section 3 explique sa paramétrisation. La section 4 documente des preuves empiriques de l’accumulation de la richesse par les ménages canadiens. La section 5 présente les résultats de la simulation du modèle repère et les compare avec la richesse observée. La section 6 comprend une série de vérifications de robustesse dans le contexte d’autres spécifications et choix de paramètres de modèle. Certaines limites du présent document sont aussi abordées dans cette section. La section 7 est réservée aux conclusions.

2   Modèle repère

La présente section expose brièvement le modèle de cycle de vie utilisé pour calculer l’accumulation de richesse optimale toute la vie durant. Dans le modèle, les ménages ont une durée de vie finie et un risque de mortalité positif dans chaque période. En outre, ils font face à des gains de travail et à une couverture par un régime de retraite privé incertains dans chaque période. Compte tenu de ces incertitudes, ils doivent décider combien ils doivent consommer aujourd’hui et combien ils doivent épargner pour leur consommation future, afin de lisser leur consommation toute la vie durant. Les économies optimales accumulées résultant du modèle servent alors d’« objectif de caractère adéquat », en vue de la comparaison avec les économies réelles, afin d’évaluer le caractère adéquat de l’épargne globalement.

2.1  Ménages

Dans le modèle, les ménages vivent pendant J périodes et maximisent leur utilité actualisée de consommation toute la vie durant. Les ménages font face à des chocs idiosyncrasiques au chapitre des gains de travail, de la longévité et de la couverture par un régime de retraite privé. La version repère du modèle repose sur l’absence d’emprunt 7 .

Les ménages maximisent leur utilité actualisée attendue toute la vie durant représentée par

où :  bêta inférieur à un est un facteur d’actualisation; s indice j correspond à la probabilité qu’un ménage soit vivant à la période j; Cette équation définit la probabilité qu'un ménage soit vivant à la période j.Description de l'image(4) (où p indice t désigne la probabilité de survie conditionnelle qu’un ménage soit vivant à la période t conditionnelle au fait d’être vivant à la période t moins 1); n indice j sert à rajuster la consommation en fonction du nombre d’adultes et d’enfants dans le ménage pour la période j; sigma correspond au coefficient de l’aversion relative au risque; et c indice j désigne la consommation pour la période j 8 .

Les ménages travaillent dans les premières périodes R<J. Après R, les ménages prennent leur retraite et reçoivent un revenu de retraite. R et J sont considérés comme exogènes et déterministes. La contrainte budgétaire pendant les périodes de travail est la suivante : 

Pendant les périodes de travail, les ménages offrent leur travail au marché et reçoivent un revenu du travail, y, dont une fraction va à des régimes de retraite privés (s’ils sont couverts par de tels régimes), cotrpa. Parallèlement, les ménages tirent un rendement brut de leurs actifs financiers reportés de la période précédente, Ouvrir la parenthèse, 1 plus r, fermer la parenthèse, multiplié par k, où désigne un taux d'intérêt exempt de risque désigne un taux d’intérêt exempt de risque. Les ménages reçoivent aussi des paiements de transfert du gouvernement (tant fédéral que provincial). En ce qui a trait aux dépenses, les ménages ont des dépenses de consommation, c, cotisent au Régime de pension du Canada (RPC/RRQ) 9 , cotrpc, cette cotisation étant proportionnelle à leurs gains de travail, et paient de l’impôt sur le revenu (tant au fédéral qu’au provincial).

On présume que chaque ménage commence sa vie avec une richesse initiale de zéro. Pour chaque période de travail 1 inférieur ou égal à j et j inférieur ou égal à R , les gains de travail sont déterminés selon l’âge du ménage et un choc de productivité persistant :  Ces trois équations définissent comment les gains du ménage changent au fil du temps.Description de l'image(11) où :  logarithme, ouvrir la parenthèse, y indice j, fermer la parenthèse. correspond au logarithme des gains du ménage; h indice j est le profil déterministe âge-gains; e indice j est le choc de productivité persistant, régi par un processus autorégressif (AR) (1); rhô correspond au paramètre de persistance du choc; et epsilon est un terme d’erreur suivant une loi normale indépendante et identique de moyenne zéro.

Pendant les périodes de retraite, les ménages ne touchent plus de gains de travail. Ils continuent plutôt à tirer un rendement de leurs actifs financiers accumulés. Ils touchent des prestations des régimes de retraite généraux non contributifs : Sécurité de la vieillesse (SV) et Supplément de revenu garanti (SRG), les deux étant financés grâce aux revenus fiscaux généraux, en vue de verser des prestations aux ménages de personnes âgées à faible et à moyen revenus. Les ménages touchent aussi des prestations de régimes de retraite généraux par répartition (RPC/RRQ) et des prestations de régimes de retraite privés (s’ils sont couverts par de tels régimes). Par conséquent, la contrainte budgétaire périodique des périodes de retraite est donnée par

RPA correspond aux prestations de régimes de pension agréés (régimes de retraite privés parrainés par un employeur au Canada).

Supposons que V indice j est la fonction de valeur de la période j pour un ménage, qui est équivalente à l’utilité attendue actualisée maximisée à partir de la période j. Ainsi, le problème du ménage peut être résolu de la façon récursive suivante : 

sous réserve des contraintes budgétaires comprises dans les équations (2) ou (3), selon que le ménage travaille ou est à la retraite. Il existe cinq variables d'état pour l'équation (4).Description de l'image(19) sont cinq variables d’état, où :  e indice j est l’état des gains pour la période j; y barre indice rpc correspond aux gains moyens (jusqu’à concurrence du maximum des gains annuels ouvrant droit à pension [MGAP]) avant la période j; pen indice j correspond à l’état de la couverture par un régime de retraite privé à j; et n indice rpa et exposant j correspond au nombre d’années de couverture par un régime de retraite privé avant j. Ces cinq variables d’état regroupées caractérisent tous les résultats financiers possibles (y compris les actifs financiers, les gains et les prestations futures de régimes de retraite généraux et privés) que les ménages peuvent obtenir à chaque période et au sujet desquels ils doivent prendre des décisions de consommation optimales.

L’équation (4) est résolue numériquement rétroactivement à partir de la période J (voir l’annexe, section 9.1) pour les détails techniques. Supposons que Une séquence de flux de consommation optimaleDescription de l'image(23) corresponde au cycle de consommation optimale obtenu après résolution de l’équation (4). Ainsi, l’épargne ou la richesse optimale accumulée Une séquence de flux d'épargne optimaleDescription de l'image(24) peut être calculée à partir des équations (2) et (3). Elles sont par la suite utilisées comme « objectif de caractère adéquat » pour procéder à une comparaison avec l’épargne réelle. Parallèlement, une des répercussions importantes des modèles de cycle de vie stochastiques comme celui utilisé dans le présent document est que les ménages ayant le même âge et parfois les mêmes gains courants épargneront différemment par suite d’une réalisation différente du risque de gains et de la couverture par un régime de retraite privé. Ainsi, il y a une répartition de la richesse accumulée optimale pour les ménages ayant les mêmes caractéristiques. Cela fait contraste avec les modèles de cycle de vie non stochastiques, dans lesquels les ménages ayant les mêmes caractéristiques épargnent exactement la même somme.

3   Étalonnage

La présente section aborde de façon détaillée l’approche empirique relative à l’étalonnage des gains toute la vie durant, au système fiscal et de transfert et aux régimes de retraite privés et généraux.

3.1  Données démographiques et préférences

Dans le modèle, on suppose que les ménages commencent à travailler à l’âge de 22 ans, travaillent jusqu’à l’âge de 64 ans et prennent leur retraite à l’âge de 65 ans. Les ménages peuvent vivre jusqu’à un maximum de 95 ans, sous réserve du risque de mortalité, pendant chaque période pour laquelle les taux de mortalité des femmes tirés des tables de mortalité de 2000 à 2002 sont utilisés. Le coefficient d’aversion relative au risque sigma représente la tolérance des ménages au risque. Plus sigma est élevé, moins les ménages sont tolérants au risque et plus ils épargnent par précaution. La valeur de sigma est établie à 2,0. Le taux d’intérêt réel exempt de risque r est établi à 4 %. Le facteur d’actualisation annuel bêta, qui est établi comme étant égal à un divisé par ouvrir la parenthèse, 1 plus r, fermer la parenthèse, équivaut donc à 0,96 10 . Le facteur d’actualisation indique le niveau de patience des ménages en ce qui a trait au report de leur consommation à l’avenir. Plus le facteur d’actualisation est élevé, plus les ménages sont patients et plus ils épargnent en vue de leur consommation future.

3.2  Banque de données administratives longitudinales

Le principal ensemble de données utilisé pour étalonner le modèle est la banque DAL. Cette banque représente un échantillon aléatoire de 20 % du fichier sur la famille T1, un fichier transversal annuel de tous les déclarants d’impôt sur le revenu 11 . Les personnes sélectionnées dans la banque DAL peuvent être couplées d’une année à l’autre. Par conséquent, il est possible de créer un profil longitudinal de chaque personne. La banque DAL comprend des renseignements démographiques de base (année de naissance, sexe et état matrimonial) et des données détaillées sur le revenu et l’impôt pour la période de 1982 à 2007 (au moment de la rédaction du présent document). L’échantillon de la banque DAL comprend uniquement les personnes qui vivaient dans les 10 provinces canadiennes; il exclut celles qui vivaient dans les territoires et dans des réserves indiennes. L’échantillon se limite aussi aux personnes qui ont produit des déclarations de revenus pour toutes les années à partir de 1992 et qui avaient entre 22 à 64 ans toutes ces années. La restriction concernant la production de déclarations de revenus pour les années précédant 1992 n’a pas été imposée. Cela vient principalement du fait qu’avant l’avènement du remboursement de la taxe sur les produits et services (en 1986) et, plus particulièrement, avant l’avènement de la Prestation fiscale canadienne pour enfants (en 1992), les familles à faible revenu étaient peu incitées à produire des déclarations de revenus. Le sous-échantillon des familles à faible revenu peut être conservé en allégeant la restriction concernant la production de déclarations de revenus avant 1992 12 .

3.3  Processus de gains pendant le cycle de vie

L’échantillon de la banque DAL est divisé en trois catégories, selon l’état matrimonial et le nombre de soutiens économiques : personnes seules et parents seuls (ci-après, S); couples comptant un soutien économique (mariés ou en union libre) (1SE); et couples comptant deux soutiens économiques (2SE) 13 .

Les profils âge-gains et les chocs persistants de productivité sont estimés pour chacune des trois catégories de ménages définies ci-dessus. Les gains des ménages correspondent aux gains totaux des ménages avant impôt, qui comprennent les gains du chef du ménage et du conjoint (le cas échéant) tirés des feuillets T4, les autres revenus d’emploi et le revenu net d’un emploi autonome (revenu net d’entreprise, revenu professionnel net, revenu net de commission, revenu agricole net et revenu net de pêche). Tous les gains des ménages sont convertis en dollars de 2005 au moyen de l’Indice des prix à la consommation (IPC).

Tous les ménages de la même catégorie sont regroupés toutes les années, et le logarithme des gains des ménages de la même catégorie est régressé sur l’âge du ménage, l’âge du ménage au carré et des variables fictives annuelles, comme

où :  tau correspond à l’indice de la catégorie de ménage; i est la personne; t est l’année; âge indice i et t est l’âge du ménage (âge du mari dans le cas des couples); et année indice k moins 1982 correspond aux variables fictives d’année pour les années de 1983 à 2007. Les résidus de la régression des gains (5) sont alors utilisés pour estimer le paramètre de persistance du choc rhô pour chaque catégorie : 

Pour être conforme à l’hypothèse du modèle selon laquelle toutes les personnes prennent leur retraite à 65 ans, l’échantillon des gains comprend uniquement les ménages âgés de 22 à 64 ans ayant des gains positifs. Le tableau 1 montre les estimations de coefficients pour les équations (5) et (6). La section A du tableau 1 comprend une liste des profils âge-gains estimés pour les trois catégories de ménages 14 . Les profils sous-entendus des gains des personnes toute la vie durant, dans le cas des personnes seules et des parents seuls (S), se situent en dessous des profils des gains des couples (1SE ou 2SE) 15 . Les couples comptant un soutien économique ont aussi un profil de gains toute la vie durant inférieur à celui des couples comptant deux soutiens économiques.

La section B du tableau 1 comprend une liste des estimations pour la partie stochastique du processus de revenu du travail, régies par un processus AR (1). Les estimations du paramètre de persistance rhô vont de 0,74 pour les personnes seules et les parents seuls à 0,86 pour les couples comptant deux soutiens économiques. Le paramètre de persistance rhô mesure la persistance des chocs des gains. Par exemple, l’estimation de rhô pour les personnes seules est de 0,74, ce qui sous-entend que, pour les ménages de personnes seules, moins de 10 % d’un choc de gains donné (bon ou mauvais) subsisteront après huit ans 16 . En général, les chocs de gains sont plus persistants pour les couples que pour les personnes seules. On a déterminé un rapport similaire dans d’autres études, comme Scholz et coll. (2006). L’écart-type des chocs de gains, sigma indice epsilon, va de 0,55 pour les couples comptant deux soutiens économiques à 0,94 pour les couples comptant un soutien économique. Ces estimations sont beaucoup plus élevées que celles se trouvant dans d’autres études, par exemple, Scholz et coll. (2006). Cette différence peut être attribuée aux facteurs suivants : 1) on utilise des cohortes simples dans Scholz et coll. (2006), tandis qu’on utilise des cohortes multiples dans l’étude actuelle; et 2) la scolarité est contrôlée dans la régression des gains de Scholz et coll., tandis que dans l’étude actuelle, elle entre dans les termes d’erreur des régressions de gains parce que la banque DAL ne comprend pas de renseignements sur la scolarité des ménages.

Les paramètres qui restent du processus de gains sont les gains moyens et l’écart-type, sigma indice e et 1, pour les ménages de la première période (âgés de 22 ans). Les ménages tirent leur potentiel de travail d’une distribution normale comportant des gains moyens et un écart-type sigma indice e et 1. Les estimations de sigma indice e et 1 sont fondées sur les gains des ménages âgés de 22 ans en 1982 (voir le tableau 117 . Enfin, le processus AR (1) est discrétisé comme un processus markovien à sept stades selon la méthode de Tauchen (Tauchen, 1986).

3.4  Enfants

La présence d’enfants joue un rôle important dans la détermination des actifs de retraite optimaux d’un ménage (Scholz et Seshadri, 2009). Les ménages ayant des enfants ont des dépenses de consommation plus élevées et accumulent par conséquent moins de richesse que les ménages sans enfants, toutes choses étant égales par ailleurs. Les enfants ont une incidence aussi sur les profils de gains des ménages, les impôts payés par les ménages et les revenus de transfert reçus par les ménages.

Les enfants sont intégrés dans le modèle et sont définis comme des personnes à charge de moins de 18 ans 18 . Ils ne contribuent pas au revenu du ménage, mais influent sur sa consommation par l’entremise de la taille du ménage dans la fonction d’utilité du ménage (échelle d’équivalence n indice j dans l’équation (1)). Le nombre d’enfants dans chacune des trois catégories de ménages peut varier selon l’âge, mais de façon exogène. À cette fin, les ménages de la même catégorie (des différentes années) dans la banque DAL sont regroupés pour calculer le nombre moyen d’enfants de chaque catégorie de ménages pour plusieurs fourchettes d’âge. Le graphique 1 trace le nombre d’enfants des divers groupes d’âge pour les trois catégories de ménages. Le nombre d’enfants prend la forme d’une bosse, augmentant jusqu’à l’âge moyen puis diminuant à zéro. Les personnes seules (ou les parents seuls) ont le nombre le plus faible d’enfants toute la vie durant, tandis que les couples comptant un soutien ont le nombre le plus élevé d’enfants toute la vie durant. On suppose que le nombre d’enfants est de zéro dans le modèle pour les personnes de 65 ans et plus, dans les trois catégories de ménages.

3.5  Système fiscal et système de transfert

Comme le revenu disponible est particulièrement important en ce qui a trait aux décisions de consommation et d’épargne des ménages, il est important d’intégrer les effets du système fiscal et du système de transfert dans le modèle. Suivant une approche de Frenette et coll. (2007), on utilise la banque DAL pour estimer les équations fiscales et de transfert pour chaque province et chaque année, de 1982 à 2007. Le total de l’impôt payé par un ménage est régressé sur un nombre de fourchettes de revenu des ménages, les termes d’interaction entre le revenu du ménage et les fourchettes de revenu, le nombre d’enfants de moins de 18 ans, une variable fictive de personne âgée (65 ans et plus), des variables fictives de catégorie de ménage et des variables fictives de province (aux fins de l’estimation de l’impôt fédéral seulement).

où :  impôt indice i et t correspond à l’impôt total versé par chaque ménage (impôt fédéral ou provincial); IR indice i, m et t correspond à 10 variables fictives de fourchettes de revenu (inférieur ou égal à 5 000 $ [omise]; de 5 000 $ à 10 000 $; de 10 000 $ à 20 000 $; de 20 000 $ à 30 000 $; de 30 000 $ à 40 000 $; de 40 000 $ à 50 000 $; de 50 000 $ à 60 000 $; de 60 000 $ à 100 000 $; de 100 000 $ à 150 000 $; de 150 000 $ à 250 000 $; 250 000 $ ou plus); m est l’indice de fourchette; et I indice i et t est le revenu imposable du ménage, qui comprend à la fois les revenus d’emploi et d’investissement, moins les cotisations à un régime de retraite privé et les autres déductions similaires. Les fourchettes de revenu et les termes d’interaction avec les revenus des ménages rendent compte de la nature progressive du système d’impôt sur le revenu des particuliers. Deux variables fictives de catégorie de ménage, type indice i, q et t, sont aussi incluses (les « personnes seules » étant la catégorie de référence), q représentant l’indice de catégorie. Les variables fictives de catégorie de ménage, le nombre d’enfants, enfant indice i et t, la variable de personne âgée (65 ans et plus), aîné indice i et t et les variables fictives de province prov indice i, s et t rendent compte des différences dans les montants d’exemption d’impôt, de crédit pour l’âge, de crédits d’impôt provinciaux et d’autres crédits d’impôt non remboursables. Les régressions sont effectuées pour tous les ménages âgés de 22 ans et plus, les impôts fédéraux et provinciaux séparément. Les régressions fiscales montrent un très bon ajustement avec R au carré au-dessus de 0,8 ou 0,9 pour toutes les années et toutes les provinces.

Les revenus de transfert sont définis comme les transferts totaux, sauf le RPC/RRQ, les prestations d’assurance-chômage / assurance-emploi (a.-c./a.-e.) et les prestations de la SV / du SRG 19 . Ainsi, les revenus de transfert comprennent les prestations familiales, les indemnités de garde d’enfants, les crédits de taxe sur les produits et services / taxe de vente fédérale (TPS/TVF), l’aide sociale et l’indemnisation des travailleurs. Les revenus totaux de transfert des ménages sont régressés sur le même ensemble de variables explicatives que celles de l’impôt provincial, pour tous les ménages âgés de 22 ans et plus ayant des revenus de transfert positifs, selon la province et l’année. Les régressions des transferts fonctionnent aussi bien : le revenu de transfert moyen estimé reçu par un ménage est identique à la moyenne observée dans l’échantillon de la banque DAL : 1 860 $. La médiane estimée est légèrement supérieure au revenu de transfert médian observé : 1 170 $, comparativement à 830 $ dans la banque DAL. Par ailleurs, la régression des transferts prédit une fraction légèrement plus élevée de ménages ayant des revenus de transfert positifs, soit 68 %, comparativement à 63 % dans la banque DAL.

3.6  Régimes de pension agréé

Les RPA sont des régimes de retraite privés parrainés par l’employeur enregistrés auprès de l’Agence du revenu du Canada. Les actifs détenus dans les RPA figurent parmi les actifs les plus importants détenus par les Canadiens. Selon l’ESF de 2005, les actifs détenus dans des RPA représentaient 19 % des actifs totaux des familles, venant juste après la résidence principale. Des études récentes montrent aussi que les régimes de retraite privés jouent un rôle important dans l’accumulation de la richesse. Par exemple, MacGee et Zhou (2010) ont déterminé qu’un modèle de cycle de vie tenant compte des régimes de retraite privés peut mener à une plus grande dispersion de la richesse pour des ménages ayant des gains similaires toute la vie durant, la dispersion de la richesse obtenue étant plus près de celle observée dans les données. Ainsi, il est important d’intégrer les régimes de retraite privés dans le modèle de cycle de vie.

Il existe deux types de RPA au Canada : à prestations déterminées (PD) et à cotisations déterminées (CD). En vertu des régimes de pension à PD, les prestations sont généralement déterminées selon une formule fondée sur les antécédents de gains et les années de couverture. Les régimes de pensions à PD sont gérés par les employeurs, et les employés ne prennent généralement pas de décisions actives d’investissement dans ce type de régimes. Par contre, la participation à des régimes de pensions à CD nécessite souvent des décisions actives de la part des employés admissibles, à qui on offre des options d’investissement et qui peuvent choisir le montant de leurs cotisations (sous réserve des dispositions du régime et des dispositions législatives). Dans le cadre des régimes de pensions à CD, les employeurs versent souvent un montant de cotisations équivalent à celui des employés. Même si la participation à des régimes de pensions à PD est en baisse constante depuis le début des années 1980, environ 75 % de tous les cotisants à des RPA en 2008 cotisaient à un régime à PD. Malheureusement, il n’est pas possible de faire de distinction entre les régimes de pensions à PD et les régimes de pensions à CD dans la banque DAL. Comme les régimes de pensions à PD continuent de représenter la majorité des cotisations à des RPA, on présume que tous les cotisants à un RPA dans l’échantillon cotisent à des régimes de pensions à PD.

Couverture

Ce ne sont pas tous les Canadiens qui sont couverts par un RPA. Selon le document Régimes de pensions au Canada 20 , environ 38 % de tous les travailleurs occupés étaient couverts par un RPA en 2008 21 . Par ailleurs, la participation à un RPA change avec l’âge. Les taux de participation à un RPA sont généralement plus faibles pour les jeunes travailleurs et augmentent avec l’âge. Il existe aussi beaucoup d’incertitude en ce qui a trait à la couverture par un RPA au fil du temps. Des personnes, particulièrement celles qui ont des régimes de pensions à PD, peuvent perdre leur couverture par suite d’un congédiement, d’une démission ou de la fermeture d’une entreprise. Pour tenir compte de cette incertitude, la couverture par un RPA est modélisée comme un processus stochastique qui correspond au taux de couverture par un RPA toute la vie durant dans les données. Cette approche de la modélisation de la couverture d’un régime de pension toute la vie durant comme un processus stochastique constitue l’une des principales différences entre la présente étude et des études similaires aux États-Unis sur le caractère adéquat de l’épargne (Engen et coll., 1999; Scholz et coll., 2006; et Gale et coll., 2009) 22 .

La banque DAL comprend une variable mesurant les cotisations annuelles des employés à un RPA (depuis 1986) et une variable mesurant les cotisations annuelles totales à des RPA des employeurs et des employés, c’est-à-dire le rajustement de pension. La première rend compte uniquement des régimes contributifs et peut entraîner une sous-estimation du taux de couverture total des RPA. La dernière rend compte à la fois des régimes contributifs et non contributifs (nécessitant uniquement les cotisations de l’employeur), même si elle englobe aussi les crédits des régimes de retraite à participation différée aux bénéfices, qui ne représentent qu’une petite portion du rajustement de pension. La variable du « rajustement de pension » dans la banque DAL sert par la suite à donner une approximation de la couverture par un RPA 23 . Un ménage est considéré comme étant couvert par un RPA s’il déclare un montant positif de rajustement de pension 24 .

Le taux de couverture initiale d’un ménage par un RPA et des matrices de transition qui sont conditionnelles à la couverture initiale sont nécessaires pour produire un processus stochastique de couverture par un RPA toute la vie durant. La couverture initiale par un RPA dans le modèle est établie à 13 %, soit le taux de couverture moyen par un RPA des ménages âgés de 22 ans dans la banque DAL. La couverture initiale par un RPA peut aussi varier selon le niveau de gains du ménage et la catégorie de ménage. En général, les personnes qui gagnent davantage ont un taux de couverture par un RPA plus élevé que celles qui gagnent peu, et les couples comptant deux soutiens économiques ont un taux de couverture plus élevé que les autres catégories de ménages. Compte tenu du taux de couverture initiale, les matrices de transition comprenant les probabilités d’avoir ou de ne pas avoir un RPA conditionnelles à la couverture antérieure par un RPA sont par la suite étalonnées pour correspondre au taux de couverture par un régime de pension toute la vie durant observé dans l’ESF, qui était de 57,9 % pour les ménages âgés de 60 à 64 ans en 2005. Les matrices de transition qui comprennent les probabilités d’avoir ou de ne pas avoir de couverture par un RPA conditionnelles à la couverture antérieure peuvent aussi différer selon la catégorie de ménage et le niveau de gains. Avec la couverture initiale par un RPA, les matrices de transition prédisent un taux de couverture par un régime de retraite privé toute la vie durant de 56,5 %, comparativement à 57,9 % dans l’ESF de 2005 25 .

Cotisations

Les cotisations des employés à un RPA doivent être calculées pour obtenir une mesure du revenu imposable dans le modèle, les cotisations étant déductibles d’impôt 26 . À cette fin, les répartitions des cotisations à un RPA en pourcentages des gains des ménages sont examinées pour tous les ménages de moins de 64 ans couverts par un RPA dans la banque DAL. Les répartitions sont assez similaires selon les différentes catégories de ménages. Par conséquent, dans le modèle repère, le taux de cotisation à un RPA est fixé à 3,5 % des gains du ménage, ce qui correspond au taux de cotisation médian en pourcentage des gains du ménage pour tous les ménages ayant des cotisations positives à un RPA dans la banque DAL.

Prestations

Les régimes de pensions à PD sont déterminés au moyen de diverses formules qui sont généralement liées aux gains des employés et à la durée du service ouvrant droit à pension. Dans certains cas, les prestations sont calculées selon les gains moyens au cours des dernières années de travail, souvent les cinq dernières. Dans d’autres cas, les prestations sont calculées sur la base des gains moyens pendant l’ensemble de la carrière. Dans le cas des régimes à rente uniforme, chaque année ouvrant droit à pension permet d’accumuler un montant fixe de prestations de retraite. Dans le présent document, on utilise la formule suivante pour calculer le montant des prestations des régimes de retraite privés d’un ménage 27  : 

alpha correspond à un taux de constitution des droits de pension qui dépend du nombre d’années de service ouvrant droit à pension, n indice rpa. Supposons que alpha égal à zéro si n indice rpa inférieur à cinq, la période d’acquisition de droits de pension dans le modèle repère, et alpha égal à 1,5 % si n indice rpa supérieur ou égal à cinq28 . n indice rpa correspond au nombre d’années de service ouvrant droit à pension toute la vie durant. Autrement dit, des incidences multiples de couverture par un RPA toute la vie durant sont traitées comme une couverture continue en additionnant le nombre d’années de service ouvrant droit à pension. Les gains corrigés de la dernière année de travail, y tilde indice R, sont utilisés pour calculer les prestations de retraite 29 . La définition des gains corrigés est y tilde indice inférieur R est égal au max de y indice inférieur R et y barre indice inférieur rpc.. C’est donc dire que si les gains de la dernière année, y indice R, sont supérieurs à y barre indice rpc, les gains moyens toute la vie durant jusqu’au MGAP utilisé pour calculer les prestations du RPC/RRQ, les gains corrigés de la dernière année, y tilde indice R, sont égaux à y indice R. Autrement, y tilde indice R égal à y barre indice rpc.

3.7  Régimes de retraite généraux

Le RPC/RRQ représente le deuxième des deux piliers (RPC/RRQ et SV/SRG) du système des pensions au Canada. Les personnes occupées de 18 ans et plus doivent verser des cotisations au RPC/RRQ, jusqu’à concurrence du MGAP, jusqu’à ce qu’elles prennent leur retraite. Dans le modèle, les ménages versent des cotisations au RPC/RRQ de l’âge de 22 ans à l’âge de 64 ans, selon le taux de cotisation historique au RPC/RRQ de 1966 à 2005. Le MGAP historique est aussi converti en dollars de 2005. Les prestations du RPC/RRQ sont calculées comme représentant 25 % du ratio moyen des gains au MGAP (plafonné à 1) au cours des 35 dernières années de travail, corrigées selon le MGAP moyen les cinq dernières années avant la retraite (qui a lieu à 65 ans dans le modèle). À l’heure actuelle, les règlements du RPC/RRQ prévoient aussi l’application de facteurs actuariels aux prestataires qui ne demandent pas de prestations à l’âge de 65 ans, ce qui entraîne une réduction (augmentation) des prestations réelles pour ceux qui prennent leur retraite avant (après) l’âge de 65 ans. Les facteurs actuariels ne s’appliquent pas dans le modèle, étant donné que chaque ménage est supposé prendre sa retraite à 65 ans et est donc admissible aux prestations complètes. Les prestations du RPC/RRQ sont pleinement indexées à l’IPC et sont assujetties à l’impôt sur le revenu.

La SV est une prestation mensuelle versée à la plupart des Canadiens de 65 ans et plus qui respectent les exigences de résidence et celles prévues par la loi 30 . La prestation mensuelle maximum de la SV était de 471,76 $ en 2005. Les prestations de la SV étaient pleinement imposables et assujetties à une récupération de 15 % pour un revenu net supérieur à 60 806 $ en 2005. Le SRG est une prestation mensuelle versée aux résidents canadiens admissibles qui touchent des prestations de la SV dont les revenus sont faibles ou inexistants 31 . Les prestations mensuelles maximum étaient de 561 $ en 2005 pour les personnes âgées seules, et de 365 $ pour les personnes âgées mariées. Les prestations du SRG ne sont pas imposables; toutefois, pour chaque dollar de revenu familial net (en excluant la SV), les prestations du SRG sont réduites de 50 cents pour les personnes âgées seules et de 25 cents pour les personnes âgées mariées. Les prestations de la SV et du SRG sont indexées en fonction de l’IPC, mais les premières sont pleinement imposables, tandis que les deuxièmes ne le sont pas.

3.8  Enquête sur la sécurité financière

Pour évaluer la mesure dans laquelle les Canadiens épargnent adéquatement, il faut comparer leur richesse réelle avec les prédictions du modèle de cycle de vie. On utilise l’ESF de 2005 pour documenter l’accumulation de richesse des ménages canadiens, étant donné qu’on ne dispose pas d’information sur la richesse dans la banque DAL. L’ESF englobe la population des 10 provinces; elle exclut les territoires. Elle fournit un aperçu exhaustif de l’avoir net des Canadiens. Des données concernant la valeur de tous les actifs et passifs financiers et non financiers majeurs des ménages ont été recueillies pour plus de 5 200 familles au Canada. L’ESF de 2005 est aussi utilisée pour étalonner la composition de la catégorie de ménage et la répartition des héritages dans le modèle.

Composition des ménages

Comme l’objectif principal est le caractère adéquat de l’épargne des ménages en vue de la retraite, l’échantillon de l’ESF se limite aux ménages qui ont à leur tête des personnes âgées de 60 à 64 ans en 2005, qui approchaient de la retraite ou qui avaient pris leur retraite récemment 32 . Cette sélection d’un échantillon qui, apparemment, ne concorde pas avec le modèle dans lequel les personnes travaillent jusqu’à l’âge de 65 ans découle de plusieurs considérations. Tout d’abord, l’ESF de 2005 a un échantillon de taille relativement petite. La section actuelle de l’échantillon produit uniquement 393 observations 33 . Si on sélectionnait uniquement les ménages non retraités, le modèle produirait un nombre encore moins grand d’observations. En deuxième lieu, le modèle tient déjà compte du choix de l’offre de main-d’oeuvre, même si cela est de façon ponctuelle dans une certaine mesure, en multipliant les profils âge-gains de chaque catégorie de ménage par le taux d’activité sur le marché du travail. Ainsi, les gains du modèle représentent une moyenne pondérée des personnes qui appartiennent toujours à la population active et des personnes qui ont pris leur retraite.

Par ailleurs, l’échantillon de l’ESF est aussi réparti en plusieurs sous-groupes, selon l’état matrimonial et le nombre de soutiens économiques, comme dans l’échantillon de la banque DAL 34 . Le tableau 2 montre la composition des ménages de l’ESF de 2005 qui sont aussi utilisés dans le modèle repère. La composition dans les différentes provinces varie peu dans l’ESF de 2005. Ainsi, on présume que la composition est la même dans toutes les provinces dans la simulation. L’annexe comporte plus de détails sur la façon dont la simulation est effectuée.

Héritages

Dans le cadre de l’ESF de 2005, on recueille aussi des données sur la date et la valeur des héritages (jusqu’à concurrence de cinq) reçus par les membres du ménage 35 . La proportion des ménages ayant à leur tête des personnes de 55 à 64 ans en 2005 qui ont indiqué avoir reçu un héritage se situe à environ 30 %. L’âge moyen et l’âge médian au moment de toucher le premier héritage parmi ces ménages sont de 47 ans. La valeur médiane de tous les héritages reçus par ces ménages se situe à environ 42 000 $ en dollars de 2005 36 . Les héritages sont intégrés dans le modèle et sont considérés comme non prévus, aléatoires et non liés aux gains du ménage. Dans le modèle, 30 % des ménages reçoivent un héritage de façon aléatoire à l’âge de 47 ans. La valeur des héritages est fondée sur la répartition correspondante qui a été observée dans l’ESF de 2005.

4   Actifs de retraite dans l’Enquête sur la sécurité financière

L’épargne privée des ménages dans le modèle est définie comme le total des actifs autres que de pension 37 . Dans l’ESF, cela correspond à l’avoir net moins les actifs d’un régime de retraite privé. L’avoir net dans l’ESF est égal au total des actifs, qui excluent les régimes de retraite généraux, mais incluent les régimes de retraite privés, moins le total des dettes 38 . Les actifs de retraite privés qui ont été soustraits de l’avoir net comprennent la valeur de la pension de retraite (terminaison) et des autres fonds de retraite (régimes de retraite à participation différée aux bénéfices, régimes de retraite de la haute direction, régimes de pensions étrangers et rentes) 39 .

Le tableau 3 résume les principales statistiques de l’échantillon selon l’état matrimonial, les personnes seules et les couples (1SE et 2SE), et la couverture par un RPA. En moyenne, les personnes seules ont des gains annuels moyens beaucoup plus faibles que ceux des couples : 11 600 $ comparativement à 45 400 $, respectivement. La fraction de retraités est aussi plus élevée pour les personnes seules que pour les couples : 60 % comparativement à 39 %, respectivement. Non seulement les personnes seules ont-elles un taux de couverture par un RPA plus faible que les couples, 42 % comparativement à 67 %, mais elles accumulent aussi moins d’actifs dans un RPA 40 . Dans l’ensemble, le montant total de l’épargne privée (actifs autres que de pension) des personnes seules, qui se situe à environ 215 300 $, est beaucoup plus faible que celui des couples (585 700 $). Les ménages qui sont couverts par un RPA ont des gains plus élevés que ceux qui ne sont pas couverts. La fraction des ménages retraités est aussi plus élevée pour les ménages couverts par un RPA que pour ceux qui ne le sont pas. Dans l’ensemble, les ménages qui sont couverts par un RPA accumulent aussi davantage d’actifs autres que de pension, tant au niveau médian qu’au niveau moyen.

Le tableau 4 illustre les répartitions des actifs autres que de pension pour les ménages ayant à leur tête des personnes de 60 à 64 ans, selon la catégorie de ménage 41 . Dans l’ensemble, les ménages ayant à leur tête une personne de 60 à 64 ans avaient accumulé des actifs médians de 231 000 $ et des actifs moyens de 450 300 $ en 2005. Les couples sont plus riches que les personnes seules dans l’ensemble de la répartition de la richesse, et leurs actifs médians sont plus de deux fois plus élevés que les actifs médians des personnes seules. Les ménages couverts par un RPA ont accumulé davantage de richesse dans presque toute la répartition de la richesse que les ménages non couverts.

5   Résultats de la simulation

Le modèle est simulé après avoir été étalonné et résolu pour produire les actifs de retraite pour 20 000 ménages. Les résultats simulés sont utilisés comme repères pour évaluer la richesse réelle des ménages dans l’ESF. L’annexe (section 9.1) fournit des détails techniques sur la simulation. Les profils de consommation et de richesse optimales pendant le cycle de vie prédits dans le modèle repère sont conformes à ceux des ouvrages publiés sur le modèle de cycle de vie stochastique. Ils sont abordés dans la section 9.2 de l’annexe.

5.1  Caractère adéquat de l’épargne

Selon la définition du caractère adéquat dans le présent document, un ménage est considéré comme ayant épargné adéquatement s’il accumule davantage de richesse que la richesse optimale sous-entendue dans le modèle repère. Toutefois, par suite des limites des données, cette comparaison ne peut pas être effectuée pour chaque ménage de l’échantillon, afin de déterminer quels ménages particuliers épargnent adéquatement et à combien se chiffrent ces ménages. On compare plutôt la médiane de la richesse observée avec la médiane de la richesse simulée pour les ménages comportant des caractéristiques similaires, afin d’évaluer le caractère adéquat de l’épargne globalement 42 . Si la médiane de la richesse observée est plus élevée que la médiane de la richesse simulée pour les ménages comportant les mêmes caractéristiques, on conclut que, globalement, ces ménages épargnent adéquatement. Selon la même logique, la part des ménages dans l’ESF dont la richesse dépasse la richesse médiane simulée pour les ménages ayant les mêmes caractéristiques est aussi calculée. Si la richesse accumulée par plus de 50 % des ménages de l’ESF est supérieure à la richesse médiane simulée à partir du modèle repère, on conclut que les ménages de l’échantillon épargnent adéquatement.

Le tableau 5 rend compte du caractère adéquat de l’épargne, défini précédemment pour tous les ménages de l’échantillon de l’ESF et pour des sous-groupes, selon l’état matrimonial et la couverture par un RPA. Dans l’ensemble, au niveau médian, les ménages de 60 à 64 ans ont un excédent d’épargne d’environ 73 000 $ (une différence positive entre la richesse médiane observée et la richesse médiane simulée), et 62 % d’entre eux ont accumulé davantage de richesse que la médiane simulée. Cela laisse supposer que, globalement, les ménages de 60 à 64 ans épargnent adéquatement. Toutefois, il est important de noter qu’il est possible que certains ménages parmi les 62 % des ménages dont la richesse dépasse la richesse médiane simulée n’épargnent pas suffisamment par rapport à leurs objectifs de richesse optimale. De même, certains des 38 % dont la richesse se situe en dessous de la richesse médiane simulée peuvent en fait épargner suffisamment par rapport à leurs objectifs de richesse optimale.

La richesse médiane de tous les sous-groupes de l’ESF, sauf celle des personnes seules, dépasse la médiane de la richesse simulée à partir du modèle repère pour la même catégorie. Les excédents d’épargne pour les ménages couverts par un RPA et les couples sont les plus importants, soit environ 158 000 $ et 172 000 $, respectivement 43 . L’excédent d’épargne pour les ménages non couverts par un RPA est le plus faible, à environ 22 000 $. Les ménages de personnes seules constituent le seul groupe qui a un déficit au chapitre de l’épargne (une différence négative entre la richesse médiane observée et la richesse médiane simulée) 44 . Toutefois, le déficit n’est pas important, soit environ 30 000 $. Il en va de même pour les parts de ménage dont la richesse dépasse la richesse médiane simulée. Le pourcentage de ménages dont la richesse est plus grande que la richesse médiane simulée est le plus élevé pour les ménages couverts par un RPA et les couples, à 70 % et 72 %, respectivement. It est aussi légèrement supérieur à 50 % pour les ménages non couverts par un RPA et légèrement inférieur pour les personnes seules. Globalement, une majorité de ménages de 60 à 64 ans de l’ESF semblent épargner adéquatement, selon la définition adoptée ici.

5.2  Risque d’insuffisance de l’épargne

Même s’il n’est pas possible d’évaluer le caractère adéquat de l’épargne pour chaque ménage de l’ESF, compte tenu des contraintes des données, il est possible de comparer les répartitions observées et simulées de la richesse côte à côte, afin de déterminer s’il y a un risque possible d’insuffisance de l’épargne à certains points de la répartition de la richesse.

Dans le tableau 6, on compare la répartition de la richesse simulée et réelle à divers centiles, pour tous les ménages de 60 à 64 ans de l’échantillon. Le modèle repère sous-estime la richesse à l’extrémité supérieure de la répartition. Il est probable qu’une somme importante de richesse soit accumulée par les ménages de cette catégorie, dont le modèle ne tient pas compte 45 . Pour tous les ménages de 60 à 64 ans se situant au 10e centile et en dessous, la richesse réelle est uniformément plus faible que la richesse simulée, tandis qu’au 25e centile et au-dessus, la richesse réelle est uniformément plus élevée que la richesse prévue. Le seuil de caractère adéquat est défini comme un point dans la répartition de la richesse au-dessus duquel la richesse réelle dépasse l’objectif simulé et en dessous duquel l’épargne est inférieure à l’objectif simulé. Ce seuil semble se situer au 23e centile de la répartition de la richesse pour tous les ménages de 60 à 64 ans de l’ESF. Cela peut laisser supposer que le déficit global au chapitre de l’épargne est faible et que l’insuffisance de l’épargne se produit probablement uniquement à l’extrémité inférieure de la répartition de la richesse. Le seuil de caractère adéquat pour les personnes seules est considérablement plus élevé, au 60e centile. Cela laisse supposer un risque plus élevé d’insuffisance de l’épargne. Les couples obtiennent de meilleurs résultats que les personnes seules, dépassant les objectifs simulés, même au 5e centile.

Une comparaison similaire selon la couverture par un RPA figure dans le tableau 7. Les ménages ayant une couverture par un RPA toute la vie durant semblent épargner adéquatement selon les critères utilisés dans la présente étude. Tous les ménages se situant au-dessus du 10e centile de la répartition de la richesse accumulent davantage de richesse que ne le laisse supposer le modèle repère. Même au 5e centile, le déficit n’est que de 1 400 $ environ. Les ménages ayant une couverture par un RPA toute la vie durant accumulent davantage de richesse que ne le laisse supposer le modèle repère au niveau médian. Toutefois, le seuil de caractère adéquat pour les ménages sans couverture par un RPA se situe autour du 40e centile. Cela laisse aussi supposer un risque plus élevé d’insuffisance de l’épargne.

5.3  Comparaison avec d’autres études

Dans la présente section, on compare les résultats repères avec ceux de plusieurs autres études similaires qui utilisent l’accumulation de richesse optimale comme repère pour le caractère adéquat de l’épargne. À peu de choses près, les résultats de la présente étude sont conformes aux résultats de ces études, même si certaines différences doivent être constatées.

Engen et coll. (1999) ont examiné le caractère adéquat de l’épargne des ménages en comparant la médiane de la richesse observée et celle de la richesse simulée. Leur étude était fondée sur un échantillon de couples mariés de 51 à 61 ans visés par la Health and Retirement Study (HRS) de 1992, soit un échantillon légèrement plus jeune que celui utilisé dans la présente étude. Ils ont déterminé que l’épargne d’environ 60 % des ménages de leur échantillon dépassait la médiane simulée des actifs autres que de pension. Il convient de souligner qu’Engen et coll. établissent leur paramètre de facteur d’actualisation, bêta, à 0,97 et le paramètre d’aversion relative au risque, sigma, à 3, les deux étant plus élevés que les paramètres correspondants dans le modèle repère. Un facteur d’actualisation plus élevé entraîne un montant d’épargne plus élevé parce que les agents évaluent l’utilité future à un taux plus élevé. Plus l’aversion relative au risque est grande, c’est-à-dire plus les agents sont réfractaires au risque, plus une épargne de précaution est accumulée. Par conséquent, leur modèle laisse supposer des objectifs d’épargne plus élevés que le modèle utilisé dans la présente étude, toutes choses étant égales par ailleurs. En supposant une répartition de la richesse similaire dans les deux échantillons, on peut s’attendre à ce qu’un moins grand nombre de ménages épargnent adéquatement selon le modèle d’Engen et coll., étant donné que les exigences sont plus rigoureuses que dans la présente étude.

Scholz et coll. (2006) ont aussi utilisé un échantillon de l’HRS de 1992, mais celui-ci comprenait à la fois les couples mariés et les personnes seules. Contrairement à Engen et coll. (1999), Scholz et coll. ont calculé des objectifs d’épargne optimale pour chaque ménage de leur échantillon et ont déterminé qu’environ 84 % des ménages de leur échantillon avaient accumulé davantage de richesse que leurs objectifs optimaux. L’aversion relative au risque est aussi établie à 3 dans leur document. Cela signifie que les exigences au chapitre du caractère adéquat de l’épargne appliquées par Scholz et coll. sont plus rigoureuses. Une étude plus récente, de Gale et coll. (2009), présente une version mise à jour de l’étude de Scholz et coll. (2006), à partir d’un échantillon de l’HRS de 2004. Gale et coll. ont déterminé que 74 % des ménages de leur échantillon dépassaient les objectifs d’actifs de retraite optimaux, un taux plus faible de caractère adéquat de l’épargne que dans Scholz et coll. (2006). Il convient de se rappeler, toutefois, que les résultats du présent document se rapportent uniquement au caractère adéquat de l’épargne des ménages globalement, et non pas au caractère adéquat de l’épargne des ménages pour des ménages particuliers de l’échantillon. Il est possible que certains ménages parmi les 62 % des ménages dont la richesse dépasse la richesse médiane simulée n’épargnent pas suffisamment par rapport à leurs objectifs optimaux particuliers.

Horner (2009) est l’auteur de la seule autre étude canadienne portant sur le caractère adéquat de l’épargne fondée sur la théorie de consommation pendant le cycle de vie. Toutefois, il existe plusieurs différences fondamentales entre les travaux d’Horner et le présent document. Par exemple, le modèle de cycle de vie utilisé dans son document comporte uniquement deux périodes et aucune incertitude. Dans son modèle, on présume que l’épargne est constante au fil du temps. Toutefois, certains de ses résultats se rapprochent beaucoup de ceux de la présente étude. Par exemple, Horner a déterminé que, globalement, 69 % des familles de 30 à 64 ans en 2006 atteignaient leurs objectifs d’épargne, afin d’égaliser leur consommation avant et après la retraite. Environ 60 % des familles ayant des revenus modestes et 63 % des familles ayant des revenus moyens respectaient l’objectif d’épargne pour la continuité de la consommation. La part des familles qui respectaient l’objectif d’épargne était la plus faible pour les personnes seules parmi les différentes catégories de familles situées au milieu de la répartition des gains. Les personnes titulaires d’un RPA sont plus susceptibles que celles sans RPA d’obtenir une continuité de consommation.

Toutefois, cette similitude devrait être interprétée avec précaution. Un modèle de cycle de vie avec certitude, comme celui utilisé par Horner, sous-entend que tous les ménages ayant les mêmes caractéristiques (âge, gains, situation de retraite) épargnent également. Ainsi, Horner constate que 69 % des ménages de 30 à 64 ans en 2006 respectaient leurs objectifs d’épargne, ce qui signifierait aussi que l’épargne d’exactement 31 % des ménages de ce groupe est insuffisante. Cela supposerait (de façon erronée) qu’une proportion importante de la population n’épargne pas suffisamment. Par contre, dans un modèle de cycle de vie stochastique, des ménages ayant les mêmes caractéristiques peuvent avoir une épargne différente par suite d’une réalisation différente des chocs. Ainsi, dans le présent document, on obtient une répartition des objectifs d’épargne optimale plutôt qu’un objectif unique. Par conséquent, la constatation selon laquelle la richesse observée de 62 % des ménages de l’échantillon dépasse la médiane simulée ne sous-entend pas nécessairement que les autres 38 % n’épargnent pas suffisamment par rapport à leurs objectifs optimaux. Elle laisse plutôt supposer une accumulation de richesse appropriée par rapport à la médiane de la richesse simulée.

6   Analyse de sensibilité

La présente section comprend un certain nombre d’analyses de sensibilité pour vérifier la robustesse des hypothèses découlant du modèle repère. Le tableau 8 présente le principal ensemble de résultats des analyses de sensibilité.

Échantillon regroupé de l’Enquête sur la sécurité financière

L’échantillon de l’ESF de 2005 comprend seulement 393 observations. Le nombre d’observations diminue encore lorsque l’échantillon est ventilé selon l’état matrimonial et la couverture par un RPA. Il est possible que certains des résultats soient le fait de la taille relativement petite de l’échantillon. Pour examiner cette possibilité, les ménages de 60 à 64 ans de l’ESF de 1999 sont regroupés avec ceux de l’ESF de 2005, afin d’obtenir un échantillon plus large. L’échantillon qui en découle comporte 1 397 observations, soit plus de trois fois le nombre de l’échantillon original. Le nouvel échantillon, toutefois, peut présenter des incohérences par suite de différences dans la situation économique entre 1999 et 2005. Par exemple, l’essor du marché du logement au début des années 2000 peut avoir eu un effet sur la richesse des ménages dans l’ESF de 2005, mais pas sur celle des ménages de l’ESF de 1999. Pour contrôler ce type d’effet de l’année, les actifs autres que de pension des ménages de l’échantillon regroupé sont régressés sur l’âge, l’âge au carré, la scolarité et une variable fictive pour l’année 1999, ce qui donne de nouveaux actifs des ménages dans lesquels l’effet de l’année est supprimé. La richesse découlant de ces nouveaux actifs dans l’échantillon regroupé est alors comparée avec la richesse simulée à partir du modèle repère, et les résultats sont présentés dans la colonne 2 du tableau 8.

Les résultats sont similaires dans une large mesure à ceux fondés sur l’échantillon de l’ESF de 2005 (colonne 1 dans le tableau 8). La principale raison semble être la similitude entre les répartitions de la richesse dans l’échantillon regroupé et dans l’échantillon de 2005. Par exemple, une fois contrôlés les effets de l’année, la médiane des actifs autres que de pension de tous les ménages âgés entre 60 et 64 ans dans l’échantillon regroupé est d’environ 237 000 $, comparativement à 231 000 $ dans l’échantillon de 2005 seulement. La richesse moyenne se situe à environ 432 000 $ dans l’échantillon regroupé, comparativement à 450 000 $ dans l’échantillon de 2005. Par conséquent, environ 63 % des ménages de l’échantillon regroupé ont accumulé plus de richesse que la médiane simulée, comparativement à 62 % dans l’échantillon de 2005. Le pourcentage est de 74 % pour les ménages couverts par un RPA dans l’échantillon regroupé, comparativement à 70 % dans l’échantillon de 2005, et de 50 % pour les ménages qui ne sont pas couverts par un RPA dans l’échantillon regroupé, comparativement à 54 % dans l’échantillon de 2005. Les chiffres pour les personnes seules et les couples sont très près de ceux pour leurs homologues dans l’échantillon de 2005.

Valeur nette du logement

Le modèle repère inclut l’ensemble de la valeur nette du logement dans la mesure de l’épargne privée de l’ESF de 2005. Dans les ouvrages publiés, on a débattu de la mesure dans laquelle les personnes souhaitent réduire la valeur nette du logement, afin de maintenir leur consommation à la retraite. Pour explorer les répercussions de la modification du traitement du logement dans l’analyse, seulement la moitié de la valeur nette du logement est incluse dans les ressources mises à la disposition des ménages de l’échantillon de l’ESF de 2005 pour cette analyse de sensibilité. Les résultats (colonne 3 du tableau 8) montrent que le pourcentage de ménages dont la richesse dépasse la richesse médiane simulée passe à environ 51 % de tous les ménages lorsque la moitié de la valeur nette du logement est exclue. Les proportions sont de plus de 10 points de pourcentage plus faibles pour tous les sous-groupes, comparativement à celles du modèle repère. Cela laisse supposer que la valeur nette du logement joue un rôle significatif dans la mesure du caractère adéquat de l’épargne en vue de la retraite.

Aversion au risque

Les répercussions de l’aversion relative au risque sur le caractère adéquat de l’épargne sont vérifiées à partir d’un paramètre plus faible d’aversion au risque de 1,5 et d’un paramètre plus élevé d’aversion au risque de 3,0 46 . Les résultats figurent dans les colonnes 4 et 5 du tableau 8. Comme il fallait s’y attendre, les ménages du modèle épargnent moins (davantage) pour se mettre à l’abri des risques futurs lorsqu’ils sont moins (plus) réfractaires au risque. Par conséquent, les indicateurs du caractère adéquat de l’épargne sont beaucoup plus élevés (plus faibles) que ceux du modèle repère lorsque le paramètre d’aversion au risque est plus faible (élevé). La part de tous les ménages de 60 à 64 ans dont la richesse dépasse la médiane simulée passe à 66 % lorsque le coefficient d’aversion au risque est plus faible (1,5), mais diminue pour s’établir à 55 % lorsque l’aversion au risque est plus élevée (3,0). Des modèles similaires s’appliquent aux autres sous-groupes.

Taux d’accumulation des régimes de pension agréés

La générosité des régimes de retraite privés influence aussi les décisions en matière d’épargne. Les ménages qui ont des régimes de retraite privés plus généreux réduiront le reste de leur épargne privée. Dans la prochaine analyse, le taux d’accumulation des régimes de retraite privés passe à 2 %, comparativement à 1,5 % dans le modèle repère. Cela donne lieu à une proportion légèrement plus élevée de ménages dont la richesse dépasse l’objectif simulé que dans le modèle repère, soit 64 % comparativement à 62 % dans le modèle repère (colonne 6 du tableau 8). Cela vient de ce que les régimes de retraite privés plus généreux entraînent une réduction des actifs médians autres que de pension, ce qui permet à un plus grand nombre de ménages de dépasser les objectifs d’épargne simulés sous-entendus dans le modèle. Environ 72 % des ménages couverts par un RPA accumulent davantage de richesse que la médiane simulée, comparativement à 70 % dans le modèle repère. Les personnes seules et les couples connaissent aussi de légères augmentations des chiffres concernant le caractère adéquat de l’épargne. Il n’est pas surprenant de constater que la générosité des régimes de retraite privés n’a pas de répercussions sur le caractère adéquat de l’épargne des ménages qui ne sont pas couverts par un RPA.

Facteur d’actualisation

Les décisions en matière d’épargne sont aussi influencées par les valeurs du facteur d’actualisation, bêta. Un facteur d’actualisation plus élevé augmente les incitatifs à épargner, les agents accordant davantage de valeur à l’avenir. Cela fait augmenter le niveau optimal de richesse dans les modèles de cycle de vie. Il est possible que les ménages aient des facteurs d’actualisation différents (c.-à-d. qu’ils actualisent l’avenir à des taux différents). La prochaine analyse de sensibilité examine l’effet de l’hétérogénéité du facteur d’actualisation. bêta est égal à 0,96 est attribué de façon aléatoire à 60 % de la population, un bêta plus faible (0,94) étant attribué à 20 % de la population, et un bêta plus élevé (0,98) aux 20 % qui reste. Les résultats figurent dans la colonne 7 du tableau 8. Les chiffres globaux en ce qui a trait au caractère adéquat de l’épargne sont presque les mêmes que ceux du modèle repère. Cela vient du fait que les répercussions d’un niveau d’épargne plus élevé avec un bêta plus élevé sont presque annulées par suite des répercussions d’un niveau d’épargne moins élevé lorsque bêta est plus faible. En fait, lorsque tous les ménages du modèle ont un facteur d’actualisation plus faible (0,94), l’objectif est beaucoup plus faible et 71 % de tous les ménages de l’échantillon respectent l’objectif de richesse médiane; lorsque tous les ménages du modèle ont un facteur d’actualisation plus élevé (0,98), seulement 49 % atteignent l’objectif médian.

Taux de rendement

Un autre paramètre qui joue un rôle important dans les décisions en matière d’épargne est le taux de rendement des investissements. Dans les modèles de cycle de vie, les agents rationnels prennent des décisions de consommation en comparant l’utilité marginale de consommation aujourd’hui et l’utilité marginale de consommation demain. Un taux plus élevé de rendement facilite l’épargne pour l’avenir et rend le report de la consommation plus avantageux. Cela mène à une plus grande accumulation de richesse dans le modèle et, ainsi, la fraction des ménages qui atteignent les objectifs d’épargne simulés est moins grande. En outre, les taux de rendement sont probablement différents pour les différents ménages pour un certain nombre de raisons, y compris des différences dans les avoirs de portefeuille et dans les institutions financières locales. L’analyse qui suit introduit une forme simple d’hétérogénéité en ce qui a trait au taux de rendement 47 . Chaque ménage tire de façon aléatoire un taux de rendement de l’épargne au cours de la première période et le conserve pendant l’ensemble du cycle de vie. De façon plus particulière, 60 % des ménages reçoivent un rendement de 4 %, 20 % des ménages reçoivent un rendement de 2 % et 20 % des ménages reçoivent un rendement de 6 % pour leur épargne. Les résultats figurent dans la colonne 8 du tableau 8. Les résultats sont très similaires à ceux du modèle repère. Cela est dû pour une large mesure au fait que la même proportion de ménages a un taux élevé de rendement et un faible taux de rendement, et cela annule les répercussions des différents taux de rendement de l’épargne. Toutefois, lorsque tous les ménages du modèle ont un taux de rendement plus faible (2 %), 71 % de tous les ménages de l’échantillon respectent l’objectif de richesse médian; lorsque tous les ménages du modèle ont un taux de rendement plus élevé (6 %), seulement 53 % atteignent l’objectif médian.

En résumé, le caractère adéquat de l’épargne globalement est très robuste aux autres valeurs de paramètre et choix de l’échantillon, même si la modification du nombre d’hypothèses peut modifier les résultats. La fraction des ménages dont la richesse dépasse la richesse médiane simulée est toujours supérieure à 50 % selon les divers scénarios, allant de 51 % lorsque seulement la moitié de la valeur nette du logement est incluse dans la mesure de l’épargne, à 66 % lorsqu’un coefficient plus faible d’aversion au risque est utilisé dans le modèle. Parallèlement, la constatation selon laquelle les couples et les ménages couverts par un RPA obtiennent des résultats bien meilleurs que les personnes seules et les ménages non couverts par un RPA est aussi robuste.

7   Discussion

Dans la présente section, on aborde certaines limites de l’analyse et leurs répercussions sur les résultats.

Tout d’abord, le modèle repère ne tient pas compte de l’intégration du RPC/RRQ et des RPA. Depuis l’avènement du RPC/RRQ, de nombreux RPA se sont coordonnés au chapitre des cotisations et des prestations. Par suite de l’intégration, les prestations des RPA à l’âge de 65 ans sont réduites d’environ le même montant qu’une personne s’attendrait à recevoir du RPC/RRQ à l’âge de 65 ans 48 . Par conséquent, le modèle repère surestimera les prestations de RPA pour les ménages couverts par ce type de régimes. Cela donnera lieu à un objectif d’épargne plus faible dans le modèle pour les ménages couverts par un RPA, ce qui surestimera le caractère adéquat de leur épargne 49 .

En deuxième lieu, le modèle repère produit un effet de compensation des actifs autres que de pension plus important pour les ménages couverts par un RPA que celui observé dans les données. Cela est peut-être dû en partie au fait que les attentes au chapitre de l’inflation ne sont pas prises en compte dans le modèle 50 . Les prestations de retraite privées prennent souvent la forme de rentes nominales fixes (c.-à-d. qu’elles ne sont pas protégées contre l’inflation par une indexation en bonne et due forme). Selon Statistique Canada 51 , au début de 2000, seulement 33 % de tous les régimes de pensions à PD prévoyaient une indexation automatique des prestations. Ces régimes englobaient environ la moitié des titulaires de régimes de pensions à PD, la majorité d’entre eux travaillant dans le secteur public. Il est probable que le modèle repère exempt d’inflation sous-estime l’accumulation de la richesse qui serait possible si ces attentes étaient intégrées pour les ménages couverts par un RPA. Cela vient du fait que les ménages dans l’économie modèle ne se préoccupent pas de l’inflation, tandis que les ménages dans la vie réelle peuvent s’en préoccuper et décider d’épargner davantage, afin de se garantir contre la perte de prestations de retraite privées découlant de l’inflation. Il est aussi reconnu que le niveau d’épargne plus élevé des ménages couverts par un RPA dans l’ESF est peut-être attribuable à certaines caractéristiques non observées associées à la couverture par un RPA (p. ex., la préférence pour l’épargne), qui ne sont pas prises en compte dans le modèle.

Enfin, le présent document est axé sur la préparation à la retraite des retraités actuels, particulièrement les ménages âgés entre 60 et 64 ans en 2005. Le présent document ne porte pas sur les perspectives de retraite des retraités futurs. Cela nécessiterait la modélisation des processus de gains futurs et l’établissement d’hypothèses concernant la situation économique future. Dans une étude récente (Moore et coll., 2010) qui portait sur les perspectives des futurs retraités, on faisait valoir que les Canadiens pourraient trouver plus difficile de maintenir leur niveau de consommation pendant les années de travail lorsqu’ils sont à la retraite, compte tenu de la baisse de la couverture par des RPA, notamment 52 .

8   Conclusion

Le présent document vise à évaluer le caractère adéquat de l’épargne en vue de la retraite au Canada en comparant les actifs de retraite observés avec un repère simulé calculé à partir d’un modèle de cycle de vie stochastique. Dans ce modèle, les agents obtiennent des cheminements optimaux d’accumulation de richesse et d’épargne pour la retraite toute la vie durant en lissant leurs utilités marginales de consommation toute la vie durant, en fonction des contraintes budgétaires auxquelles ils sont soumis et compte tenu des incertitudes auxquelles ils font face. Les ménages sont considérés comme épargnant adéquatement lorsqu’ils accumulent davantage de richesse que l’objectif d’épargne optimale sous-entendu par le modèle.

La richesse observée des ménages de 60 à 64 ans dans l’échantillon de l’ESF de 2005 est comparée à la richesse simulée sous-entendue par le modèle de cycle de vie pour les ménages comportant les mêmes caractéristiques. L’objectif est d’examiner le caractère adéquat de l’épargne globalement au Canada, plutôt que de déterminer exactement combien de ménages épargnent adéquatement, compte tenu des limites des données. À partir d’une définition du caractère adéquat, on conclut qu’une majorité de ménages canadiens épargnent adéquatement en vue de la retraite : environ 62 % de tous les ménages accumulent davantage de richesse que la médiane de richesse simulée. Les ménages couverts par un RPA toute la vie durant et les couples semblent être en meilleure situation financière pour la retraite que les autres ménages : 70 % des premiers et 72 % des derniers ont accumulé davantage de richesse que les médianes de richesse simulées. Le risque estimé d’insuffisance de l’épargne est aussi faible pour ces groupes. Les ménages qui ne sont pas couverts par un RPA et les personnes seules se débrouillent raisonnablement bien à la médiane : environ 54 % des ménages sans RPA et 45 % des personnes seules ont accumulé davantage de richesse que la médiane de richesse simulée. Toutefois, le risque estimé d’insuffisance de l’épargne de ces groupes est important, compte tenu du fait que le seuil de caractère adéquat se situe aux 40e et 60e centiles de la répartition de la richesse pour les ménages sans RPA et pour les personnes seules, respectivement. Ces constatations sont aussi largement robustes aux diverses autres spécifications de paramètre et au choix de l’échantillon.

L’évaluation de l’état actuel du caractère adéquat de l’épargne au Canada correspond dans une large mesure aux résultats d’autres études canadiennes qui évaluent le caractère adéquat de l’épargne en vue de la retraite en mettant l’accent sur le revenu de retraite et la consommation. Les résultats compris dans le présent document sont aussi largement conformes aux résultats des études américaines qui utilisent une approche similaire. Toutefois, le présent document fait aussi ressortir la nécessité de mieux comprendre les groupes plus vulnérables, comme les ménages non couverts par un RPA et les personnes seules, qui sont beaucoup plus susceptibles que les autres groupes d’accumuler moins d’actifs de retraite que les objectifs d’épargne simulés. Il est aussi reconnu que la principale analyse est fondée sur des dossiers sur la richesse en 2005, une année caractérisée par une croissance rapide des marchés financiers et du logement, qui a entraîné un niveau élevé d’avoir net chez les ménages. Les conclusions auraient peut-être été différentes si on avait examiné les données sur la richesse après 2008. Cela souligne l’importance de réexaminer la question lorsque des données plus récentes sur la richesse deviendront disponibles.

9   Annexe

9.1  Solution numérique

On utilise des techniques de programmation dynamiques numériques pour obtenir une approximation des règles de décision, ainsi que de la fonction de valeur. Le programme dynamique comporte cinq variables d’état outre la période j : actifs autres que de pension k; état des gains e; ratio moyen des gains et du MGAP jusqu’à la période courante y barre indice rpc; couverture par un RPA pen; et années de couverture par un RPA jusqu’à la période courante n indice rpa.

L’état-espace selon deux variables d’état continues, k et y barre indice rpc est discrétisé. Le modèle est résolu au moyen d’une induction rétrospective. Au cours de la dernière période ( j égal à J majuscule), les fonctions de police sont simples. Dans les périodes précédant J, des règles de décision optimale sont calculées pour chaque combinaison possible de noeuds, à partir des données disponibles concernant les règles de décision et la fonction de valeur de la période subséquente. L’approche de Tauchen (1986) est utilisée pour obtenir une approximation des distributions des innovations du processus des gains de travail. Dans le cas des points qui ne sont pas compris dans les grilles état-espace, les fonctions de valeur sont évaluées au moyen d’une interpolation par spline bicubique selon deux dimensions. Après avoir calculé les valeurs de toutes les options, on choisit le maximum, et on obtient les règles de décision pour la période courante.

Une fois les règles de décision optimale déterminées pour tous les noeuds possibles de chaque période, l’accumulation de la richesse est simulée pour 20 000 ménages. À cette fin, on attribue d’abord ces ménages à chacune des 10 provinces selon la répartition géographique des ménages de 60 à 64 ans obtenue à partir de l’échantillon de l’ESF 53 . Dans chaque province, les ménages sont triés entre les différentes catégories selon leur composition, comme le montre le tableau 2, en supposant la même composition des ménages dans chaque province 54 . La simulation commence à l’âge de 22 ans. Les gains initiaux sont d’abord simulés sur la base de la régression du logarithme des gains (équation (5)) et d’un tirage aléatoire à partir de la distribution initiale des gains résiduels, dont on présume qu’elle suit une loi normale, Suit une loi normale de moyenne 0 et d'écart type sigma indice e et 1., pour chaque ménage. Parallèlement à un tirage aléatoire de la couverture initiale par un RPA, l’épargne optimale est calculée pour chaque ménage selon la solution du modèle. Puis, les gains et la couverture par un RPA sont mis à jour pour chaque période selon les équations (5) et (6) et la matrice de transition pour la couverture par un RPA. L’épargne optimale pour chaque ménage est alors mise à jour selon les gains et la couverture par un RPA mis à jour à chaque période. À la fin, l’épargne accumulée ou la richesse des ménages âgés entre 60 et 64 ans des différentes catégories est utilisée comme repère et pour une comparaison avec le niveau de richesse de l’ESF pour les ménages ayant des caractéristiques similaires. Tous les programmes sont mis en parallèle et exécutés au moyen de SHARCNET 55 .

9.2  Profils de consommation et de richesse optimales pendant le cycle de vie

Les profils de consommation et de richesse optimales pendant le cycle de vie prédits par le modèle repère sont tracés dans le graphique 2 et le graphique 3, respectivement. Ils correspondent très bien à ceux prédits au moyen d’autres modèles utilisés dans les ouvrages publiés 56 .

Dans le graphique 2, la consommation a trait à la consommation médiane optimale par équivalent adulte au cours du cycle de vie, selon l’état matrimonial et la couverture par un régime de retraite privé. Elle est aussi normalisée, afin qu’une unité soit égale à 20 000 $ en dollars de 2005. La consommation est en forme de bosse pendant le cycle de vie, peu importe la catégorie de ménage. Lorsque les ménages sont jeunes, la consommation est faible en raison des faibles revenus et du souhait des ménages d’accumuler de l’épargne par précaution. Au fur et à mesure que les ménages avancent en âge, le revenu et l’épargne augmentent et les motifs de l’éparque par précaution diminuent légèrement. Cela entraîne une augmentation de la consommation pendant les années de travail et un sommet avant la retraite. Puis la consommation diminue tout au long de la vieillesse, un risque plus élevé de mortalité rendant les ménages moins patients et moins disposés à reporter la consommation à l’avenir. Le profil de consommation diffère aussi selon la catégorie de ménage. Les personnes seules ont un niveau de consommation plus élevé par équivalent adulte que les couples avant l’âge de 52 ans, et un niveau de consommation plus faible que les couples après 52 ans. Cela est dû principalement au fait que les couples ont davantage d’enfants en moyenne que les personnes seules (y compris les parents seuls — voir le graphique 1), ce qui entraîne une diminution de la consommation par équivalent adulte pour les couples. Les ménages ayant un régime de retraite privé ont un niveau de consommation beaucoup plus élevé que ceux qui n’ont pas de régime de retraite privé tout au long du cycle de vie 57 . Cela est dû à la corrélation positive entre la couverture par un RPA et les gains. Les ménages ayant un RPA sont plus susceptibles d’avoir des gains plus élevés et, ainsi, un niveau de consommation plus élevé.

Dans le graphique 3, la richesse a trait à la richesse médiane totale optimale du ménage (actifs autres que de pension) et est aussi normalisée de la même façon que la consommation. La richesse est aussi en forme de bosse pendant le cycle de vie, peu importe l’état matrimonial du ménage et la couverture par un régime de retraite privé. La richesse augmente et atteint un sommet avant la retraite, ce qui rend compte d’une période d’épargne pour la retraite et de motifs de précaution. Elle diminue ensuite pendant la vieillesse, une période de désépargne. Les couples ont un profil d’actifs autres que de pension beaucoup plus élevé que les personnes seules tout au long du cycle de vie, par suite d’un profil de gains plus élevé tout au long du cycle de vie et de chocs de gains plus persistants (voir le tableau 1). Les ménages couverts par un RPA ont des actifs autres que de pension beaucoup plus élevés que les ménages non couverts par un RPA avant leur retraite et un profil plus faible par la suite. Cela vient du fait que les premiers sont plus susceptibles d’avoir un profil de gains plus élevé que les derniers, ce qui encourage davantage l’épargne chez les ménages ayant un RPA. Ce niveau d’épargne plus élevé domine l’effet de compensation selon lequel les premiers ont tendance à épargner moins que les derniers, conditionnellement au même niveau de gains. Toutefois, à la retraite, les ménages ayant un RPA épuisent leurs actifs autres que de pension plus rapidement que les ménages sans RPA, parce que les premiers ont accès à des actifs additionnels, à savoir, des actifs de RPA, mais pas les derniers.

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