L'évolution des populations de langue maternelle au Canada, de 1901 à 2016

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Mégatendances canadiennes
Date de diffusion : 21 février 2018

Au début du XXe siècle, la langue maternelle de la plupart des Canadiens était soit le français, soit l'anglais. En 1901, environ un dixième de la population avait une langue autochtone ou une langue immigrante comme langue maternelle. Bien que le concept de langue maternelle n'ait pas été défini avant 1941 dans le recensement canadien, il a depuis été défini comme la langue apprise en premier lieu à la maison dans l'enfance et encore comprise.

Au cours des 115 années qui ont suivi, le profil linguistique du Canada s'est considérablement diversifié. La proportion de Canadiens dont la langue maternelle est le français s'est amenuisée au sein de la population, tandis que la proportion de Canadiens dont la langue maternelle est une langue autre que le français ou l'anglais (langue tierce) s'est accrue au rythme des diverses vagues d'immigration au fil du temps.

Le présent numéro de Mégatendances canadiennes dresse un portrait de l'évolution de la population canadienne selon sa composition par langue maternelle de 1901 à 2016.

Évolution des trois grands groupes de langue au Canada

Le pourcentage que représente la population de langue maternelle anglaise n'a varié que légèrement de 1901 à 2016. Il est demeuré autour de 60 % tout au long de la période, atteignant sa valeur maximale en 1911, soit 62,3 %, et sa valeur minimale en 1941, soit 56,5 %.Toutefois, depuis 1986, ce pourcentage a diminué de façon régulière. En 2016, les personnes de langue maternelle anglaise représentaient 57,0 % de la population totale du Canada, contre 62,2 % en 1986.

La part de la population de langue maternelle anglaise a évolué en sens inverse à celle de l'ensemble de la population de langue maternelle tierce : quand la première a augmenté, la seconde a décru, et vice versa.

De 1901 à 1986, le poids de la population de langue maternelle tierce a ainsi oscillé entre 8 % et 13 % au gré des courants migratoires internationaux. Sans un apport migratoire soutenu, cette population tend à décroître. C'est ce qu'on a observé de 1931 à 1951 et durant les années 1970 et la première moitié des années 1980.

Mais, depuis le début des années 1990, le nombre d'immigrants admis au Canada s'est maintenu à un niveau élevé et soutenu, se chiffrant entre environ 200 000 et 250 000 annuellement. Par conséquent, en 2016, la part de la population de langue maternelle tierce au sein de l'ensemble de la population canadienne était de 22,0 %. Cette population forme un groupe extrêmement hétérogène en terme linguistique. Lors du Recensement de 2016, on dénombrait plus de 130 langues immigrantes au pays.

Lors du Recensement de 2016, 213 225 personnes ont déclaré une langue autochtone comme langue maternelle, soit 0,6 % de la population. Bien que leur dénombrement ait été sans doute incomplet, le Recensement de 1901 avait dénombré près de 77 000 personnes dont la langue maternelle est une langue autochtone, représentant 1,4 % de la population.

Les langues autochtones au Canada ont évolué au fil des générations. De nombreuses langues autochtones sont propres au Canada; elles ne sont parlées nulle part ailleurs dans le monde. Plusieurs langues autochtones sont maintenant « menacées », en raison du nombre plus restreint de locuteurs, bien que quelques autres soient considérées comme « viables » à long terme. Les événements passés ont nui considérablement à la vitalité des langues autochtones au Canada. C'est notamment le cas de la mise en œuvre du système des pensionnats, dans lesquels on a interdit à des générations d'enfants autochtones de parler leur langue maternelle autochtone.

La part relative de la population de langue maternelle française au Canada a également évolué en fonction de celle de la population de langue tierce. Les deux grandes poussées de l'immigration au début du XXe siècle et après la Deuxième Guerre mondiale se sont traduites par une baisse du poids démographique de la population de langue française. Grâce à sa forte fécondité, la population de langue maternelle française a pu se maintenir jusque dans les années 1950, malgré un contexte où l'immigration ne lui était pas favorable. Toutefois, depuis le Recensement de 1951, le pourcentage que représente cette population au sein du Canada est en baisse constante.

En 1941, 29,3 % de la population du Canada était de langue maternelle française. C'est le pourcentage enregistré le plus élevé depuis 1901. En 2016, ce pourcentage passait à 21,0 %, ce qui représente une baisse de plus de huit points de pourcentage en 75 ans.

Graphique 1. L'évolution de la population selon la langue maternelle en pourcentage de la population totale, 1901 à 2016, Canada
Description de Graphique 1. L'évolution de la population selon la langue maternelle en pourcentage de la population totale, 1901 à 2016, Canada
Graphique 1. L'évolution de la population selon la langue maternelle en pourcentage de la population totale, 1901 à 2016, Canada
  Anglais Français Langues tierces
1901 61,0 30,5 8,4
1911 62,3 27,7 10,1
1921 60,0 27,0 13,1
1931 57,5 27,6 14,9
1941 56,5 29,2 14,3
1951 59,1 29,0 11,8
1961 58,5 28,1 13,5
1971 60,2 26,8 13,0
1981 61,2 25,6 13,1
1986 62,2 25,1 12,7
1991 60,4 24,3 15,3
1996 59,8 23,5 16,6
2001 59,1 22,9 18,0
2006 57,8 22,1 20,1
2011 57,8 21,7 20,6
2016 57,2 20,9 21,9
Source : Statistique Canada, Recensement de la population.

La dualité linguistique

Le Canada se caractérise par sa dualité linguistique, le français et l'anglais y ayant le statut de langue officielle. Dans la province du Nouveau-Brunswick, le français et l'anglais sont également les deux langues officielles, alors qu'au Québec, le français est la seule langue officielle et la langue majoritaire de la province, bien que l'anglais y soit assez présent dans la région de Montréal. Dans le reste du pays, les provinces et territoires ont adopté des politiques et des lois visant à protéger les langues. Les Territoires du Nord-Ouest reconnaissent neuf langues autochtones, en plus du français et de l'anglais, dans leur Loi sur les langues officielles, alors que les langues inuites (Inuktitut et Inuinnaqtun), le français et l'anglais sont les langues officielles du Nunavut.

Les niveaux et l'évolution des populations selon la langue maternelle au Québec et dans le reste du Canada présentent des similitudes. Leurs populations majoritaires (français au Québec, anglais dans le reste du Canada) ont maintenu un poids démographique relativement stable tout de 1901 à 2016.

Au Québec, le poids de la population de langue maternelle française est demeuré aux environs de 80 % de 1901 à 2001. Il a diminué depuis pour se situer à 78,0 % en 2016. Dans le reste du Canada, la part de la population de langue maternelle anglaise a davantage varié au fil du temps. Elle a fluctué entre 74 % et 80 % avant 1986, mais a depuis connu une baisse continue. En 2016, elle se situait à 71,8 %.

Les populations de langue officielle en situation minoritaire ont évolué de façon différente de celles des populations majoritaires. Tant les populations de langue maternelle anglaise au Québec que française dans le reste du Canada ont enregistré une baisse de leur part relative dans la population totale depuis 1901.

Le pourcentage que représente la population de langue anglaise au Québec a diminué de plus de moitié de 1901 à 2016, passant de 17,4 % à 8,1 % de la population du Québec. En 1901, la minorité de langue française au Canada hors Québec y représentait 8,2 % de la population totale contre 3,8 % en 2016. Il s'agit également d'une réduction de moitié de son poids sur 115 ans.

Graphique 2. Évolution de la population selon la langue maternelle en pourcentage de la population totale, 1901 à 2016, Québec et Canada hors Québec
Description de Graphique 2. Évolution de la population selon la langue maternelle en pourcentage de la population totale, 1901 à 2016, Québec et Canada hors Québec
Graphique 2. Évolution de la population selon la langue maternelle en pourcentage de la population totale, 1901 à 2016, Québec et Canada hors Québec
  Anglais Français Langues tierces
Québec
1901 17,4 80,6 1,9
1911 16,5 80,6 2,8
1921 15,6 80,5 3,9
1931 15,1 80,7 4,1
1941 14,1 81,8 4,1
1951 13,8 82,5 3,7
1961 13,3 81,2 5,6
1971 13,1 80,6 6,2
1981 10,9 82,4 6,7
1986 10,3 82,8 6,9
1991 9,2 82,0 8,8
1996 8,8 81,5 9,7
2001 8,3 81,4 10,3
2006 8,2 79,6 12,3
2011 8,3 78,9 12,8
2016 8,8 77,4 13,7
Canada hors Québec
1901 80,4 8,2 11,3
1911 80,1 7,0 12,9
1921 76,2 7,4 16,4
1931 73,7 7,3 19,0
1941 73,8 7,8 18,4
1951 77,6 7,3 15,2
1961 76,8 6,6 16,7
1971 78,5 5,9 15,6
1981 79,3 5,2 15,4
1986 80,2 5,0 14,8
1991 77,7 4,8 17,5
1996 76,6 4,5 18,9
2001 75,2 4,4 20,4
2006 73,3 4,1 22,6
2011 73,1 4,0 23,0
2016 71,8 3,8 24,4
Source : Statistique Canada, Recensement de la population.

La diversité linguistique au Canada

La composition linguistique de la population dont la langue maternelle est une autre langue que le français, l'anglais ou une langue autochtone a changé profondément au Canada au cours des 115 dernières années. En 1901, cette population était constituée essentiellement de deux groupes de langues  les langues celtiques (principalement le gaélique irlandais et écossais) et l'allemand. La population de langues celtiques a reculé rapidement au cours des décennies suivantes, un déclin qui s'exprimait tant en effectif qu'en pourcentage de la population.

La population de langue allemande était de loin la plus nombreuse parmi les populations de langues immigrantes en 1901 et l'est demeurée jusqu'en 1941. De 1901 à 1981, les langues d'origine européennes ont constitué la majorité des langues tierces au Canada. L'ukrainien, le russe et le polonais ont crû principalement durant les premières décennies du XXe siècle à la suite de l'ouverture des prairies à la colonisation, tandis que les autres langues européennes (l'allemand, l'italien, le grec et le néerlandais, entre autres) ont connu une progression rapide après la Deuxième Guerre mondiale.

Graphique 3. Évolution de la population totale selon certaines langues immigrantes d'implantation ancienne, 1901 à 2016, Canada
Description de Graphique 3
Graphique 3. Évolution de la population totale selon certaines langues immigrantes d'implantation ancienne, 1901 à 2016, Canada
  Néerlandais Allemand Grec Italien Polonais Russe Ukrainien
1901 F 152 455 F 6 245 5 700 15 240 7 460
1911 5 455 222 370 F 40 925 40 110 42 185 57 520
1921 34 005 275 375 F 53 410 59 000 57 720 131 120
1931 44 580 368 850 7 350 85 520 118 600 50 760 252 800
1941 67 770 331 660 8 745 80 260 128 710 52 435 313 275
1951 100 560 329 305 8 035 92 240 129 235 39 225 352 325
1961 184 480 563 710 40 455 339 625 161 720 42 900 361 500
1971 171 275 558 965 103 730 538 765 136 540 31 955 309 890
1981 158 470 515 510 123 230 531 290 127 400 31 355 285 115
1991 139 035 466 245 126 205 510 995 189 815 35 305 187 015
1996 139 475 470 500 128 085 514 415 222 355 59 630 174 830
2001 133 040 455 545 126 370 493 990 215 010 96 910 157 385
2006 133 240 466 655 123 575 476 905 217 605 136 230 141 805
2011 116 285 430 055 117 890 437 725 201 240 169 950 120 265
2016 107 204 412 257 117 787 413 766 194 102 196 813 113 229

F trop peu fiable pour être publié

Note : Les données de 1901 sur la population dont la langue maternelle est le néerlandais sont trop peu fiables pour être publiées. Les données de 1901, de 1911 et de 1921 sur la population dont la langue maternelle est le grec sont trop peu fiables pour être publiées.

Source : Statistique Canada, Recensement de la population.

À partir des années 1970 et 1980, le changement dans la composition des langues immigrantes a été profond. Quelques langues non européennes (chinois, japonais, arabe) étaient déjà parlées par une partie de la population avant la Deuxième Guerre mondiale, mais les modifications apportées à la loi et aux règlements sur l'immigration au Canada durant les années 1960 ont contribué à l'accroissement rapide du nombre d'immigrants en provenance de l'Asie, du Moyen-Orient, de l'Amérique latine, des Antilles et de l'Afrique.

La diversité linguistique s'est accrue en conséquence. Ainsi, la population de langue maternelle chinoise, qui était de moins de 100 000 en 1971, a bondi pour se situer à 1,3 million en 2016. La population de plusieurs autres langues a suivi une évolution similaire depuis le milieu des années 1980. L'évolution de ces populations a été marquée par une croissance soutenue découlant des tendances de l'immigration observée durant cette période.

Graphique 4. Évolution de la population totale dont la langue maternelle est une langue chinoise, 1901 à 2016, Canada
Description de Graphique 4. Évolution de la population totale dont la langue maternelle est une langue chinoise, 1901 à 2016, Canada
Graphique 4. Évolution de la population totale dont la langue maternelle est une langue chinoise, 1901 à 2016, Canada
  Chinois
1901 16 470
1911 28 410
1921 38 450
1931 46 110
1941 33 500
1951 28 285
1961 49 100
1971 95 915
1981 224 135
1986 308 515
1991 498 845
1996 736 010
2001 872400
2006 1 015 230
2011 1 112 610
2016 1 312 859

Note : Les langues chinoises comportent le cantonais, le hakka, le mandarin, le min dong, le min nan (le chaochow, le teochow, le fou-kien et le taïwanais), le wu (shanghaïen), et le chinois non déterminé ou indiqué ailleurs.

Source : Statistique Canada, Recensement de la population.

Graphique 5. Évolution de la population totale selon certaines langues immigrantes d'implantation récente, 1971 à 2016, Canada
Description de Graphique 5. Évolution de la population totale selon certaines langues immigrantes d'implantation récente, 1971 à 2016, Canada
Graphique 5. Évolution de la population totale selon certaines langues immigrantes d'implantation récente, 1971 à 2016, Canada
  Perse Pendjabi Ourdou Vietnamien Tagalog Espagnol Arabe Portugais
1971 .. .. .. .. .. 23 945 28 520 85 840
1981 .. 53 770 11 925 28 380 .. 70 150 49 645 164 615
1986 13 820 80 630 17 770 51 795 68 670 104 150 57 045 180 760
1991 40 625 136 460 24 900 78 565 99 715 177 425 107 750 212 090
1996 62 380 214 535 43 725 111 910 158 205 228 575 166 155 222 875
2001 96 510 284 750 86 805 126 760 199 770 260 785 220 535 222 855
2006 138 075 382 590 156 415 146 410 266 445 362 120 286 790 229 285
2011 177 010 459 990 194 100 153 355 384 055 439 110 374 415 225 530
2016 225 792 544 761 243 431 167 785 512 167 497 496 488 189 239 030

.. indisponible pour une période de référence précise

Note : Les données de 1971 pour le perse, le pendjabi, l'ourdou, le vietnamien et le tagalog ne sont pas disponibles. Les données de 1981 ne sont pas disponibles pour le perse et le tagalog.

Source : Statistique Canada, Recensement de la population.

Définitions

Langue maternelle
Langue apprise en premier lieu à la maison dans l'enfance et encore comprise au recensement. Pour la définition de la langue maternelle dans les recensements du début du XXe siècle, voir Houle et Cambron-Prémont (2015).
Langues autochtones
Langues originaires du continent nord-américain. Comprend, entre autres, les langues cries, l'inuktitut et le déné.
Langues immigrantes
Langues autres que le français, l'anglais et les langues autochtones dont la présence au Canada est initialement due à l'immigration. Comprend, par exemple, l'allemand, le chinois, l'ukrainien, l'espagnol, l'italien et le pendjabi.
Langues tierces
Ensemble des langues autochtones et immigrantes.

Références

Houle, René et Amélie Cambron-Prémont. 2015. « Les concepts et les questions posées sur les langues aux recensements canadiens de 1901 à 1961 ». Cahiers québécois de démographie, Vol. 44, no 2, pp. 291-310 (en français seulement).

Houle, René. 2012. « Les langues immigrantes au Canada », Recensement en bref, no 2, Statistique Canada, no au catalogue 98-314-X.

Lachapelle, Réjean et Jacques Henripin. 1980. La situation démolinguistique au Canada. Évolution passée et prospective. Montréal, Institut de recherches politiques.

Lachapelle, Réjean et Jean-François Lepage. 2010. Les langues au Canada. Recensement de 2006. Ottawa, Patrimoine canadien et Statistique Canada.

Personne-ressource

Pour obtenir plus de renseignements ou pour en savoir davantage sur les concepts, les méthodes et la qualité des données, communiquez avec René Houle au 613-854-8473 (rene.houle@canada.ca), Programme de la statistique ethnoculturelle, langue et immigration.

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