1 Introduction

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Les transferts de fonds — l'argent que les immigrants envoient aux membres de leur famille dans leur pays d'origine — font partie du processus d'immigration depuis longtemps. Or, étant donné les réseaux mondiaux des institutions financières et les technologies de télécommunication maintenant en place, les transferts de fonds partout dans le monde s'effectuent maintenant à un rythme et à un volume inimaginables par les générations précédentes. Dans ce contexte, les transferts sont une composante essentielle des déplacements des personnes dans le monde, de l'information et des ressources et sont au cœur des recherches sur l'immigration et le développement.

Malgré cet intérêt, les recherches sur les caractéristiques des résidents du Canada qui transfèrent des fonds à l'étranger demeurent très limitées, surtout en raison de l'absence de données d'enquêtes-ménages. À plus grande échelle, les études sur les résidents du Canada et d'autres pays qui transfèrent des fonds à l'étranger s'intéressent souvent aux immigrants d'un ou deux pays d'origine seulement et n'offrent donc pas une perspective internationale large sur la question. La présente étude comble ces lacunes en utilisant l'Enquête longitudinale auprès des immigrants du Canada (ELIC) pour documenter l'incidence des transferts et les montants envoyés par les immigrants de divers pays. Au moyen d'un ensemble uniformisé de concepts et de méthodes, nous constatons que l'incidence des transferts de fonds dans la cohorte d'immigrants arrivés en 2000-2001 varie de moins de 10 % à 60 % parmi les immigrants de différents pays, tandis que les montants annuels moyens envoyés varient d'environ 500 $ à près de 3 000 $. Lorsque l'on examine les facteurs associés aux transferts de fonds, les caractéristiques financières et familiales sont toujours importantes chez les immigrants de toutes les régions du monde. En revanche, d'autres facteurs, comme le sexe et le niveau de scolarité, sont associés aux transferts de fonds chez les immigrants de certaines régions seulement.

1.1 Contexte

Des travaux d'envergure sont en cours aussi bien à l'échelle nationale qu'internationale en vue de mesurer les flux de transferts (Haug 2007). La Banque mondiale (2006, p. 87), qui définit les transferts comme « …la somme des transferts des travailleurs, des rémunérations des employés et des transferts des migrants » [TRADUCTION] enregistrée dans les estimations nationales de la balance des paiements, estime les flux de transferts enregistrés à destination des pays en développement à 167 milliards de dollars américains en 2005. Ce montant est probablement sous-estimé, puisque l'on omet souvent d'enregistrer dans les estimations officielles certains transferts acheminés par des moyens formels, notamment par les bureaux de poste ou les bureaux de change, ainsi que les transferts inférieurs à un seuil donné. De plus, on néglige souvent d'enregistrer les transferts effectués par des moyens informels, comme ceux remis par des parents ou amis. La Banque mondiale estime que les transferts non enregistrés pourraient ajouter 50 % ou plus au total.

Les transferts représentent une source importante de revenus étrangers pour les pays en développement. En termes absolus, l'Inde (21,7 milliards de dollars américains), la Chine (21,4 milliards de dollars américains) et le Mexique (18,1 milliards de dollars américains) figurent en tête de liste parmi les pays qui reçoivent le plus de transferts (Banque mondiale, 2006). En termes proportionnels, l'importance des transferts pour bon nombre de petits pays est manifeste. Par exemple, les transferts représentent de 20 % à 30 % environ du produit intérieur brut (PIB) aux Tonga, en Moldova, au Lesotho, en Haïti, en Bosnie-Herzégovine et en Jordanie, et de 10 % à 19 % approximativement du PIB dans plusieurs autres pays, notamment la Jamaïque, l'El Salvador, les Philippines, la République dominicaine, le Liban et le Népal.

L'importance des transferts peut également être documentée par rapport aux industries nationales. Par exemple, la Banque interaméricaine de développement (BID, 2004a, p. 11) indique que les transferts au Mexique « …représentent davantage que les revenus totaux du tourisme du pays, les deux tiers de la valeur des exportations de pétrole, et environ 180 % des exportations agricoles du pays » [TRADUCTION]. Dans une perspective plus large, la Banque mondiale (2006, p. 88) révèle que dans 28 pays, les transferts « …dépassent les revenus générés par l'exportation des principaux produits de base » [TRADUCTION]. Les transferts dépassent également l'aide au développement à l'étranger et les investissements directs étrangers dans bien des pays.

Les estimations enregistrées des flux de transfert à destination des pays en développement indiquent une augmentation marquée au cours des dernières années, en hausse de 73 % de 2001 à 2005. Cette tendance est manifeste dans de nombreux pays (Banque mondiale, 2006). Plusieurs facteurs jouent probablement un rôle, notamment les améliorations apportées à la collecte des données, le passage des transferts des réseaux informels aux réseaux formels, ainsi que l'évolution de l'industrie des transferts (Banque mondiale, 2006; Orozco, 2006).

1.2 Objectif et fondement

L'objectif du présent document est de s'appuyer sur les données récemment diffusées de l'ELIC pour examiner les activités de transfert de fonds des immigrants provenant de divers pays d'origine et déterminer les caractéristiques socioéconomiques associées à de telles activités.

Jusqu'à maintenant, les données recueillies auprès des ménages canadiens sur les transferts étaient très limitées, et seules quelques études avaient été réalisées (par exemple, voir Hernández- Coss, 2006; Simmons, Plaza et Piché, 2005; Hamza, 2006; CIC, 2004). La situation est tout à fait différente aux États-Unis, où le corridor bien développé des transferts entre les États-Unis et l'Amérique latine a fait l'objet de beaucoup de recherches au fil des ans. De même, les recherches sur les activités de transfert en Australie et en Nouvelle-Zélande remontent à plus de deux décennies. Bien qu'une grande partie des recherches effectuées au Canada s'intéressent encore au marché du travail et aux caractéristiques des nouveaux immigrants, 1 on ne s'attarde guère à leurs dépenses, dont les transferts de fonds sont une composante. Les préférences et/ou les obligations des nouveaux immigrants de transférer des fonds à des membres de leur famille à l'étranger peuvent avoir une incidence sur d'autres aspects de l'établissement, comme les décisions en matière de logement ou d'emploi. De plus, même si les taux élevés de faible revenu chez les nouveaux immigrants reflètent les contraintes financières que doivent souvent surmonter les nouveaux Canadiens, ces chiffres ne tiennent pas compte du fait que le revenu des ménages peut être utilisé pour soutenir les membres de la famille à l'étranger.

D'une perspective macroéconomique, les données des ménages sur les transferts nous permettent de mieux comprendre les flux financiers et jouent un rôle dans l'élaboration de concepts et de mesures pour les systèmes de comptabilité nationale et de balance des paiements (Haug, 2007). Sur la scène internationale, les organismes tels que le Fonds monétaire international, la Banque mondiale et la Banque interaméricaine de développement (BID) s'intéressent aux caractéristiques institutionnelles des corridors de transferts bilatéraux. Par exemple, Hernández-Coss (2005, p. 2) indique que « …l'on s'efforce actuellement d'amener les utilisateurs [les expéditeurs d'argent] de passer des systèmes informels aux systèmes formels, de manière à accroître la transparence des flux de transferts et à améliorer leur contribution au développement du pays récipiendaire » [TRADUCTION]. Le Fonds multilatéral d'investissement de la BID cite l'amélioration de la documentation sur l'importance des transferts, la réduction des coûts des transactions et l'amélioration de l'effet des transferts sur le développement comme objectifs clés. Les renseignements sur le processus de transfert, du « premier kilomètre », où les décisions sont entre les mains des expéditeurs de transferts de fonds, au « dernier kilomètre » où les fonds sont entre les mains des récipiendaires, sont nécessaires pour brosser un tableau exhaustif de ce phénomène complexe. La perspective internationale élargie des habitudes de transfert de fonds offertes par l'ELIC est un outil précieux dans ce contexte.

Le présent document est divisé en plusieurs sections. Dans la section 2, un examen de la documentation est présenté au moyen d'une approche semblable à celle utilisée par Menjivar et coll. (1998). Les facteurs qui pourraient être associés aux habitudes de transfert sont soulevés dans la perspective des caractéristiques démographiques, de la capacité financière, des obligations envers la famille, des caractéristiques de la migration, de la participation organisationnelle et du pays d'origine. Dans la section 3, on aborde la source des données, la méthodologie et les variables utilisées dans l'étude. La section 4 présente les résultats de l'analyse. Une série de statistiques descriptives est présentée en premier lieu, suivie des résultats de plusieurs modèles multivariés. Dans la section 5, les principales conclusions et conséquences de notre analyse sont soulevées.

 

1 . On a accordé beaucoup d'importance à leurs trajectoires de revenus après leur arrivée, au rendement économique de leurs titres et de leur expérience acquis à l'étranger, à leur capacité de se trouver un emploi dans leur domaine de spécialisation et à leur incidence de faible revenu. Pour une révision, voir Picot (2004).