1 Introduction

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Le capital public investi dans les routes, la navigation aérienne, les canaux et les réseaux de distribution d'eau et d'égouts accroît la capacité productive d'une économie. Il permet de plus fortes concentrations géographiques des ressources économiques et facilite le mouvement des biens et des personnes. Il rend possible l'accès à un plus grand marché et à un plus vaste choix d'employeurs et d'employés. Il influe sur les marchés des facteurs de production et des produits, contribue à la détermination de modèles de développement spatial et offre un grand réseau à faible coût aux utilisateurs individuels. Bref, le capital public est la fondation sur laquelle est érigée l'économie.

Une abondante littérature s'appuyant sur ces idées donne à penser que le capital public joue un rôle important, dont il est souvent omis de tenir compte, dans la production privée (voir par exemple, Aschaeur, 1989; Munnel, 1990a, 1990b; Shah, 1992; Berndt et Hanson, 1992; Lynde et Richmond, 1992; Nadiri et Mamuneas, 1994; Conrad et Seitz, 1994; Morrison et Schwartz, 1996; Fernald, 1999; Pereira, 2000; et Ramirez, 2004).

Ces études se fondent sur les fonctions de production et de coût pour estimer l'élasticité de la production par rapport au capital public ou l'épargne marginale que produit pour le secteur privé une unité supplémentaire de capital public, respectivement. Leurs auteurs soutiennent que l'effet du capital est appréciable, qu'il varie en fonction du temps et que l'évolution de l'investissement public en infrastructure a un effet qui diffère selon la branche d'activité.

Nous examinons ces arguments en nous servant de données canadiennes publiées dans Harchaoui (1997), Harchaoui et Tarkhani (2003), ainsi que Brox et Fader (2005). Les auteurs de ces trois études emploient les fonctions de coût pour l'estimation. Leurs modèles reposent sur l'hypothèse que le niveau réel de capital public intervient dans la fonction de coût en tant que facteur de production non rémunéré. Les entreprises procèdent à la minimisation des coûts sur le capital privé et le travail, qui représentent la fonction de coût variable de l'entreprise, mais considèrent le capital public comme une constante dans la fonction de coût total. Ils supposent que les variations du capital public modifient la hauteur de la courbe du coût variable. Si le capital public donne lieu à des économies, l'élasticité du coût total par rapport au capital public sera négative. Autrement dit, un accroissement du niveau de capital public réduit le coût total de la production privée.

Harchaoui (1997) utilise une fonction de coût translogarithmique et des données de panel sur les branches d'activité canadiennes pour la période de 1961 à 1997. Il constate que l'effet du capital public est significatif, représentant environ 12 % de la croissance globale du secteur des entreprises. Harchaoui et Tarkhani (2003) réexaminent la relation en utilisant un panel élargi de branches d'activité canadiennes pendant la période de 1961 à 2000. Ils concluent qu'en moyenne, un accroissement du capital public réduit les coûts de production dans le secteur privé. Brox et Fader (2005) procèdent à un exercice comparable et soutiennent que le capital public est un facteur de production important pour les entreprises. Regroupées, les études axées sur la fonction de coût indiquent que les entreprises utilisent le capital public et que la fourniture de ce capital peut avoir une incidence sur les structures de coût.

S'il est généralement reconnu que le capital public intervient dans la fonction de production ou de coût du secteur privé, les chercheurs sont loin d'être d'accord sur le taux de rendement de l'investissement public qui serait raisonnable. Qui plus est, la robustesse des estimations à diverses formules et méthodes employées en vue de résoudre des problèmes économétriques particuliers a fait l'objet de fort peu de discussions.

Les études susmentionnées fournissent un ensemble varié d'estimations du taux de rendement fondées sur des agrégations différentes de séries chronologiques économiques, de techniques d'estimation, de portée d'échantillon et d'approches de modélisation. Étant donné la gamme d'estimations, il est difficile de déterminer quel taux de rendement est le plus plausible ou quelle méthode est relativement robuste.

L'étude de la robustesse des estimations économétriques et de leurs taux de rendement implicites est importante, parce que les estimations de ces coûts sont un guide nécessaire pour les décideurs qui doivent évaluer le besoin d'infrastructure supplémentaire ou pour les comptables nationaux qui essayent d'intégrer l'infrastructure publique dans les comptes nationaux. Les uns et les autres ont besoin d'estimations du taux de rendement du capital public. Or, en dehors des exercices économétriques, ces estimations ne sont pas disponibles.

Les comptables nationaux doivent estimer la valeur du capital public qui est intégrée dans la production du secteur public. Cependant, des marchés sont rarement disponibles pour les produits du secteur public, si bien que les comptables nationaux ne peuvent pas recourir aux approches des dépenses en produits finaux et de la somme des valeurs ajoutées pour calculer le produit intérieur brut (PIB) du secteur public dans les comptes nationaux. Ils se fondent plutôt sur la rémunération des facteurs de production pour estimer ce PIB.

En utilisant cette approche, il est possible de calculer la rémunération du travail d'après les renseignements sur la paye; toutefois, en l'absence d'une estimation robuste du taux de rendement du capital public, il est difficile de calculer la rémunération du capital financé par les deniers publics qui devrait être ajoutée à la production du secteur public. Comme, jusqu'à présent, les chercheurs n'ont pas réussi à se mettre d'accord sur le taux de rendement du capital public, il est supposé dans le Système de comptabilité nationale (SCN) qu'il est seulement égal au taux de dépréciation de ce capital. Aucun rendement économique du capital public n'est inclus dans les estimations courantes du PIB du secteur public. Par conséquent, la production d'estimations robustes du taux de rendement du capital public est nécessaire si l'on veut tenir compte du rendement économique des administrations publiques dans le calcul du PIB du secteur public.

L'estimation robuste d'un taux de rendement est plus compliquée qu'il ne paraît. Même si le secteur public possède les bâtiments, ainsi que les machines et l'équipement, la majorité du capital public est constituée de routes, de ponts et de réseaux de distribution d'eau et d'égouts (Baldwin et Dixon, 2008). Ces actifs n'ont aucun prix marchand et, dans la plupart des cas, manquent de proches équivalents parmi les biens d'équipement du secteur privé au Canada. Ce manque d'information empêche non seulement de calculer directement le rendement brut du capital public, mais aussi d'utiliser les rendements des actifs du secteur privé comme approximation au Canada. Le manque de substituts oblige les économistes à s'appuyer sur des méthodes économétriques pour inférer le rendement du capital public, ce qui attise le débat quant au taux de rendement qu'il serait raisonnable d'adopter, étant donné les multiples méthodes d'estimation proposées et la disparité des réponses.

L'objectif principal du présent document est de déterminer le degré de robustesse des estimations de l'effet du capital public aux diverses méthodes d'estimation et d'établir l'intervalle de taux de rendement du capital public. Nous utilisons divers estimateurs et examinons explicitement les propriétés de série chronologique des données. À l'aide d'une forme fonctionnelle simple, nous estimons la relation entre la production réelle et le capital public, ainsi que la relation entre les coûts unitaires et le capital public, et nous utilisons ces relations pour inférer le taux de rendement du capital public. Puis, nous essayons de déterminer si l'information provenant des diverses méthodes peut être combinée de manière à cerner par « triangulation » une estimation privilégiée du taux de rendement du capital public.

Le plan de l'étude est le suivant. À la section 2, nous examinons la covariance du PIB réel agrégé et du capital public au fil du temps et montrons à quel point il est difficile d'isoler les effets du capital public et ceux de la croissance de la productivité mutifactorielle. À la section 3, nous décrivons les ensembles de données de panel utilisés pour estimer l'élasticité du capital public. À la section 4, nous examinons les estimations de l'élasticité du capital public fondée sur la fonction de production, tandis qu'à la section 5, nous examinons ces mêmes estimations fondées sur la fonction de coût. À la section 6, nous présentons nos conclusions.