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De nombreuses comparaisons historiques de la productivité internationale sont fondées sur des mesures de la productivité du travail (la production par travailleur). Les différences de productivité du travail peuvent tenir à des différences d'efficacité technique ou d'intensité capitalistique. L'adoption de mesures de la productivité totale des facteurs permet de faire des comparaisons internationales afin de déterminer si les différences de productivité du travail tiennent à des différences d'efficacité ou à des différences entre les facteurs utilisés dans le processus de production.

Dans le présent document, nous examinons l'évolution historique du secteur canadien de la fabrication et calculons les différences de productivité entre le secteur de la fabrication au Canada et celui aux États-Unis en 1929 ainsi que la mesure dans laquelle ces différences tiennent à des différences d'efficacité. Nous examinons tout d'abord les mesures de la productivité du travail, puis nous apportons des corrections pour tenir compte des différences d'intensité de capital et d'utilisation de matières par travailleur afin d'obtenir une mesure de la productivité totale des facteurs (mesure qui saisit les différences d'efficacité technique au Canada par rapport aux États-Unis), en nous appuyant sur des données détaillées sur les industries en 1929.

Nous posons plusieurs questions dans le présent document, à savoir :

1) Quelle était la perception traditionnelle de l'efficacité du secteur canadien de la fabrication au début du XXe siècle?

Selon la perception traditionnelle du secteur de la fabrication, celui-ci était un maillon faible de la chaîne de développement économique au Canada. La croissance du secteur de la fabrication a été favorisée par une politique de développement visant à promouvoir la colonisation de l'Ouest, l'expansion du réseau ferroviaire est-ouest et l'imposition de tarifs pour protéger le tout nouveau secteur canadien de la fabrication.

Dans l'une des études du Canada et des États-Unis les mieux connues portant sur la période d'avant 1945, Dales (1966) soutient que le tarif canadien a favorisé le développement d'une grande partie du secteur de la fabrication, soit la fabrication secondaire, qui était comparativement désavantagée par rapport aux normes américaines1. Selon les estimations de Dales, la productivité moyenne pour la fabrication secondaire au Canada a varié entre 75 % et 85 % de celle de l'ensemble du secteur de la fabrication aux États-Unis entre 1926 et 1939.

2) Comment le secteur de la fabrication s'est–il développé au début du XXe siècle?

La croissance dans le secteur de la fabrication au cours des trois premières décennies du XXe siècle a suivi celle de l'économie dans son ensemble. Le PIB manufacturier est demeuré autour de 22 % du PIB total durant toute la période de 1900 à 1926 (Green et Urquhart, 1987). La production manufacturière s'est accrue à peu près au même taux que l'ensemble de l'économie, qui a augmenté rapidement avec la colonisation de l'Ouest. L'expansion spectaculaire de la production agricole, associée à l'ouverture de l'Ouest, s'est accompagnée d'une croissance également rapide de la production manufacturière.

En 1929, les exportations importantes de pâtes et papiers, de produits du caoutchouc, de métaux non ferreux, de minéraux non métalliques et de produits du bois laissent supposer des industries vigoureuses capables de soutenir la concurrence sur les marchés mondiaux. Mesurées selon le pourcentage de l'emploi, ces industries, sauf dans le cas des produits du bois, augmentaient aussi en importance. En revanche, les importations étaient importantes et les exportations, moins importantes dans les industries du fer et de l'acier, du textile, du pétrole, de l'édition et du vêtement. Toutefois, seule cette dernière industrie a affiché une baisse de sa part de l'emploi total durant la période étudiée. Dans quatre industries, soit celles des aliments et boissons, du cuir, du transport et des produits chimiques, les échanges commerciaux étaient moins nombreux et bidirectionnels. Dans ce groupe, seule l'industrie du cuir a connu une diminution de son pourcentage de l'emploi au cours de cette période.

3) Comment la croissance dans le secteur canadien de la fabrication se compare-t-elle à celle aux États-Unis durant cette période?

Les premières décennies du XXe siècle étaient marquées par des augmentations également rapides de l'emploi dans le secteur de la fabrication au Canada et aux États-Unis. En 1900, les travailleurs de la production employés dans le secteur canadien de la fabrication représentaient 6,7 % de ceux dénombrés dans le recensement de 1899 des États-Unis (lorsque les industries manuelles sont exclues du côté des États-Unis). Ce ratio est passé à 7,3 % pour les recensements respectifs de 1910 au Canada et de 1909 aux États-Unis, puis a diminué pour s'établir à 5,9 % en 1919 et a augmenté ensuite pour se fixer à 6,9 % en 1929.

4) Quelles étaient les différences entre les caractéristiques des usines du secteur de la fabrication au Canada et aux États-Unis?

En termes de production totale ou d'emploi en 1929, les industries canadiennes, dans l'ensemble, étaient plus petites que celles aux États-Unis. Le nombre total d'employés de l'industrie manufacturière moyenne au Canada correspondait à 10,9 % seulement du nombre d'employés dans l'industrie moyenne aux États-Unis (la médiane était de 6,5 % seulement).

La taille moyenne des usines était plus petite au Canada qu'aux États-Unis. La taille moyenne des usines canadiennes mesurées par le nombre d'employés par établissement correspondait à 92 % seulement de la taille moyenne des usines aux États-Unis. Le ratio de la taille médiane des usines dans les deux pays est légèrement inférieur, soit de 84 %.

Les salaires et traitements par employé dans le secteur canadien de la fabrication étaient de 20 % inférieurs à ceux aux États-Unis. Les salaires plus faibles auraient par eux-mêmes incité les fabricants canadiens à utiliser relativement plus de travail comparativement au capital. Cependant, les coûts du capital étaient également plus élevés au Canada.

5) Les différences de prix des facteurs se sont-elles reflétées dans les proportions des facteurs?

Étant donné le coût plus faible du travail et le coût plus élevé du capital, les fabricants au Canada ont utilisé plus de travail par rapport au capital que ceux aux États-Unis. Les estimations médianes des ratios puissance–travail, combustible–travail et matières–travail au Canada et aux États-Unis sont à peu près les mêmes, soit autour de 77 %.

La différence entre les mesures relatives du travail et du capital indique que le Canada utilisait plus de travail par rapport à la puissance (ou le cheval-vapeur, une mesure du facteur capital) que les États-Unis. Par conséquent, les processus de production au Canada étaient relativement plus exigeants en main-d'oeuvre que ceux aux États-Unis.

6) Quelle était la différence entre l'efficacité relative des usines de fabrication au Canada et celle des usines aux États-Unis?

Nous examinons dans le présent document les différences de production par travailleur dans le secteur de la fabrication au Canada et aux États-Unis et la mesure dans laquelle ces différences tiennent à des différences d'efficacité. Nous apportons des corrections pour tenir compte des différences d'intensité de capital et d'utilisation de matières par travailleur, afin d'obtenir une mesure de l'efficacité totale des facteurs au Canada par rapport aux États-Unis, à partir de données détaillées sur les industries en 1929. Nous en arrivons à la conclusion que, même si la production par travailleur au Canada représentait seulement environ 75 % de celle aux États-Unis, la mesure de la productivité totale des facteurs au Canada était à peu près la même que celle aux États-Unis; autrement dit, la différence d'efficacité technique entre les deux pays était très faible.

7) Que nous disent les différences en matière de productivité du travail et de productivité totale des facteurs entre le Canada et les États-Unis?

En fait, nous devons nous pencher sur la raison d'être des différences entre les pays sur le plan de la productivité du travail. Une frontière de production basse au Canada (inefficacité technique) ou la combinaison des facteurs en proportions différentes en raison de coûts des facteurs différents pourraient donner de plus faibles ratios de production par travailleur.

Nous en arrivons à la conclusion que, même si la production par travailleur au Canada représentait seulement 75 % environ de celle aux États-Unis, la mesure de la productivité totale des facteurs au Canada était à peu près la même que celle aux États-Unis; autrement dit, il y avait très peu de différence d'efficacité technique entre les deux pays. La plus faible production par travailleur au Canada était attribuable à l'utilisation d'une plus faible quantité de capital et de matières par travailleur qu'aux États-Unis. Le fait que le Canada utilisait plus de travail en combinaison avec tous les autres facteurs de production n'est pas surprenant, étant donné les prix des facteurs (le travail par rapport au capital).

Les études classiques fondées sur des mesures partielles de la productivité du travail donnent l'impression fausse que le secteur canadien de la fabrication a toujours été nettement inefficace. En 1929, du moins, ce n'était pas le cas.

 

1. Dales s'est concentré sur l'efficience allocative plutôt que sur l'efficacité technique en utilisant des ratios de la productivité du travail aux taux de salaire relatifs au Canada et aux États-Unis pour inférer l'inefficacité.