Cibler les dépenses en matière de protection de l'environnement dans le secteur de la fabrication

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Michael Bordt, Division des comptes et de la statistique de l'environnement, Statistique Canada; Markus Biehl, Schulich School of Business, Université York; et Robert D. Klassen, Ivey Business School, University of Western Ontario

Note : Cet article est fondé sur le rapport intitulé Building the Business Case for Sustainable Manufacturing: Linking Lean and Green Management to Performance que Markus Biehl et Robert Klassen ont rédigé pour le compte d'Industrie Canada.

L'industrie canadienne engage des sommes importantes pour diminuer son empreinte écologique. En 2004, les manufacturiers canadiens ont dépensé environ 6,8 milliards de dollars pour se conformer à la réglementation environnementale1. Les gains en terme de rendement que les entreprises ont pu réaliser grâce à ces investissements ont varié en fonction de la répartition des dépenses.

Il est possible d'investir dans le contrôle de la pollution, la prévention de la pollution ou les pratiques de gestion environnementale (pour plus de détails, voir l'encadré « Catégories détaillées des dépenses »).

  • Le contrôle de la pollution comprend les installations « en bout de chaîne » qui ne font pas partie intégrante de la production, ainsi que l'assainissement et le déclassement de sites.
  • La prévention de la pollution englobe les technologies, l'équipement et les procédés qui réduisent ou éliminent la pollution à la source. Cela peut inclure la reconception ou la recomposition de matériaux, de composantes ou de produits.
  • Les pratiques de gestion environnementale comprennent la surveillance, les évaluations et les vérifications, l'administration des programmes environnementaux, la formation en environnement et les programmes d'information.

Même si ces investissements pouvaient, de façon générale, être faits pour diverses raisons, y compris la conformité à la réglementation, des changements dans les prix ou la politique organisationnelle, l'Enquête sur les dépenses de protection de l'environnement (EDPE) comprend uniquement les dépenses engagées afin de se conformer à une réglementation, des conventions ou des accords volontaires, ou afin de les anticiper.

Ce que vous devriez savoir au sujet de la présente étude

Notre étude combine les données de deux enquêtes de Statistique Canada et celles d'une base de données d'Environnement Canada. Les données sur les dépenses environnementales pour 2004 sont tirées de l'Enquête (biennale) sur les dépenses de protection de l'environnement (EDPE). Cette enquête utilise un plan de sondage pondéré par rapport aux établissements de grande taille. Un questionnaire détaillé a été envoyé à 10 sociétés de fabrication (au niveau à 3 chiffres du SCIAN). Il est seulement question ici des sommes engagées dans la protection de l'environnement qui visent à assurer ou anticiper la conformité aux réglementations, conventions ou ententes volontaires canadiennes et internationales.

Les données sur le rendement des affaires ont été appariées au niveau des établissements à partir des données de l'Enquête annuelle sur les manufactures et l'exploitation forestière (EAMEF) de 2003 à 2005 pour les niveaux des recettes de fabrication, des coûts, de la rentabilité et des stocks. Les données sur les coûts dans des domaines précis ont été ajustées en fonction des coûts de fabrication directs totaux, définis comme la somme des coûts des matières premières, de l'emballage, de la main-d'œuvre et de l'énergie.

Parallèlement, la performance environnementale a été extraite de l'Inventaire national des rejets de polluants (INRP). La base de données de l'INRP couvre plus de 300 polluants toxiques rejetés, recyclés ou mis en dépôt par les usines de fabrication individuelles. Ces données sont aussi appariées selon les établissements de l'enquête.

Qualité des données

L'EAMEF produit deux types de données : les données autodéclarées et les données imputées. Comme les données imputées sont élaborées à partir des ratios du secteur et de divers autres moyens qui peuvent masquer des écarts individuels importants entre les établissements, seules les données autodéclarées ont servi aux modèles de régression pour estimer le rendement des affaires. Cet ensemble de données final couvre environ 450 établissements qui ont déclaré des données détaillées sur leurs dépenses environnementales et le rendement de leurs affaires.

L'ensemble de données de l'INRP présente des défis plus complexes, car la qualité des déclarations soumises par les entreprises à Environnement Canada semble varier considérablement selon les entreprises.

Méthodologie

Les modèles de régression ont servi à analyser les relations entre les variables de dépenses environnementales (niveau et affectation) et le rendement des affaires et la performance environnementale. En ce qui concerne le rendement des affaires, d'autres variables ont été incluses pour tenir compte du rendement antérieur, du secteur, de la taille de l'entreprise, de la croissance du revenu, des dépenses en recherche et développement, ainsi que de l'amortissement.

Les modèles de régression utilisant des variables de l'INRP ont affiché de graves niveaux de non­normalité. Cette non­normalité a exigé l'utilisation de méthodes d'estimation très prudentes. Ces méthodes détectent uniquement les relations les plus statistiquement significatives.

Le présent article présente les points de vue des auteurs et ne reflète pas forcément les opinions de Statistique Canada.


Catégories détaillées des dépenses dans l'Enquête sur les dépenses de protection de l'environnement

  1. Contrôle de la pollution
    • Parmi ces types d'équipement ou de procédés, mentionnons les épurateurs installés sur les cheminées qui rejettent des polluants dans l'atmosphère, les systèmes biologiques et chimiques de traitement de l'eau (une station de traitement de l'eau par exemple), les systèmes de filtration, les cyclones et autres dispositifs antipollution.
  2. Prévention de la pollution
    • Conception ou recomposition d'un produit
    • Modification de l'équipement ou du procédé (changement intégré)
    • Recirculation, recyclage, réutilisation ou récupération de matériaux ou de substances sur place
    • Substitution de matériaux ou de matières premières, réduction, élimination ou substitution de solvants
    • Prévention des fuites et déversements
    • Autre
  3. Pratiques de gestion environnementale
    • Système de gestion environnementale
    • Gestion du cycle de vie, évaluation du cycle de vie ou conception écologique lors de la prise de décisions
    • Homologation ISO 14000
    • Plan en vue d'obtenir une homologation ISO 14064
    • Plan de prévention de la pollution
    • Bonnes pratiques d'exploitation ou formation sur la prévention de la pollution2
    • Accord volontaire ou programme volontaire de nature environnementale (par exemple, Accords en matière de performance environnementale, Registre canadien des réductions de GES© ou Programme d'économie d'énergie dans l'industrie canadienne)
    • Amélioration des techniques de gestion ou d'acquisition de produits, y compris une politique d'achat « écologique »2
    • Biens certifiés par un programme d'éco­étiquetage, par exemple le programme « Choix environnemental » et Écologo
    • Rapports annuels ou autres rapports sur la performance environnementale ou le développement durable

Le contrôle de la pollution a compté pour 58 % des dépenses de protection de l'environnement. Les autres dépenses ont été consacrées à la prévention de la pollution (21 %) et aux pratiques de gestion environnementale (21 %).

L'étude a révélé que les investissements en pratiques de gestion environnementale étaient plus rentables pour les entreprises que les dépenses engagées au chapitre de la prévention ou du contrôle de la pollution. Les avantages pour les entreprises ont été mesurés à la fois sur le plan de la performance environnementale et sur le plan du rendement financier.

Aucun rapport significatif n'a été trouvé entre le rendement des entreprises et les dépenses en matière de prévention ou de contrôle de la pollution.  C'était aussi le cas avec la réduction de la pollution. Le domaine de l'efficacité énergétique a fait figure d'exception ici, puisque les dépenses en matière de prévention de la pollution ont réduit la consommation d'énergie. Toutefois, pour un large éventail d'établissements de toutes tailles, répartis sur un vaste territoire et diversifiés sur le plan sectoriel, les dépenses en pratiques de gestion environnementale ont suscité des améliorations considérables de la performance environnementale et du rendement financier.

L'analyse présente les résultats de l'effet de la réaffectation d'un budget fixe de protection de l'environnement entre les trois catégories de dépenses. Par exemple, un dollar qui est réaffecté à des pratiques de gestion environnementale pourrait provenir de la prévention ou du contrôle.

Pour ce qui est de la performance environnementale, la réaffectation de 1 % des dépenses environnementales d'une entreprise de la prévention et du contrôle de la pollution vers des pratiques de gestion environnementale s'est traduite par une réduction sur deux ans de 1,3 tonne de rejets de polluants toxiques. Par ailleurs, l'affectation de 1 $ de plus aux pratiques de gestion a entraîné une réduction de 0,34 tonne de rejets. De façon générale, les résultats pour la prévention et le contrôle de la pollution suivaient une même tendance, mais ils n'étaient pas aussi évidents et n'étaient pas non plus significatifs.

En ce qui concerne les résultats des entreprises, pour chaque dollar de plus investi dans les pratiques de gestion, les coûts des matières premières ont diminué de plus de 3 $ par période de deux ans. En outre, une réaffectation de 1 $ vers des pratiques de gestion environnementale (à partir de la prévention et du contrôle de la pollution) s'est traduite par une réduction sur deux ans de plus de 1 $ du total des coûts de maintien des stocks et de plus de 2 $ des coûts de main-d'œuvre. Dans le cas des petits établissements, l'affectation de 1 $ de plus des dépenses environnementales aux pratiques de gestion a aussi entraîné une réduction de près de 3 $ des coûts de l'énergie.

Il se peut qu'une gestion environnementale efficace contribue à mettre en lumière des possibilités de prévention de la pollution. Toutefois, un message fondamental se dégage de ces faits : les pratiques de gestion environnementale produisent un rendement des investissements qui est très intéressant.


Notes :

  1. Statistique Canada, 2007, Dépenses de protection de l'environnement dans le secteur des entreprises, 2004, 16F0006X au catalogue. L'analyse était fondée sur les données de 2004. Un rapport sur les données de 2006 a été diffusé en 2008.
  2. Ces deux catégories apparaissent sur le questionnaire comme des pratiques de prévention de la pollution, mais elles ont été reclassifiées par l'étude comme des pratiques de gestion.
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