Personnes âgées de retour au Canada

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Par Kristyn Frank et Feng Hou

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Bien que l'émigration soit généralement considérée comme un « exode des cerveaux » par lequel le Canada perd de façon définitive du capital humain, de récentes études laissent entendre que la nature de la migration internationale change. En particulier, le phénomène est jugé plus circulaire que par le passé, du fait que de nombreuses personnes qui quittent leur pays d'origine ont l'intention d'y revenir un jour (Aydemir et Robinson, 2006; Michalowski et Tran, 2008; Zhang, 2009a)1.

Les caractéristiques des émigrants qui reviennent au Canada, en particulier l'âge auquel ils le font, peuvent avoir des incidences sociales et économiques. Le retour des jeunes émigrants est généralement considéré comme un revirement de l'« exode des cerveaux », puisque bon nombre d'entre eux « proviennent de secteurs considérés importants à l'économie et à la société canadiennes » (Zhao et coll., 2000, p. 48). Des études font ressortir à quel point l'expérience et les réseaux internationaux améliorent les résultats sur le marché du travail des jeunes émigrants à leur retour dans leur pays d'origine (Fondation Asie-Pacifique du Canada, 2011; Finnie, 2007; Fangmeng et Zhongdong, 2006; Cervantes et Guellec, 2002). Dans l'ensemble, les jeunes émigrants de retour au Canada représentent pour le pays un afflux de travailleurs qui en sont à leurs années d'activité maximale et qui possèdent dans bien des cas une expérience et des compétences utiles.

Le retour des émigrants âgés soulève des questions différentes. Selon une étude, les impôts sur le revenu que paient les personnes âgées de retour d'un séjour de longue durée à l'étranger ne suffisent peut-être pas à couvrir les coûts des soins de santé qu'elles exigent (Fondation Asie-Pacifique du Canada, 2011). En outre, si les personnes âgées sont plus nombreuses à revenir au Canada qu'à quitter le pays, cela risque d'exercer des pressions supplémentaires sur certains programmes publics, comme ceux qui viennent en aide aux aînés à faible revenu. Néanmoins, le retour des émigrants âgés peut aussi se révéler avantageux pour la société canadienne (voir Sources des données et définitions). À l'instar de leurs jeunes homologues, les émigrants âgés de retour au pays peuvent apporter une expérience et des réseaux internationaux prisés sur le marché du travail, quoique leur degré d'utilisation dépende des taux d'emploi des aînés. Le retour des émigrants âgés peut également apporter des bienfaits sociaux liés aux soins des membres de la famille ou aux activités bénévoles, par exemple.

Étant donné l'éventail des incidences de la migration de retour chez les personnes âgées, il y a lieu d'examiner le nombre et les caractéristiques des émigrants qui reviennent au Canada à la fin de leur vie. Plusieurs questions sont abordées dans le présent article : Les personnes âgées représentent-elles une proportion importante des émigrants de retour? En provenance d'où les émigrants âgés rentrent-ils? Les caractéristiques des émigrants âgés de retour diffèrent-elles de celles des Canadiens âgés qui n'ont pas vécu à l'étranger? Les montants de revenu reçus à la vieillesse et leurs sources diffèrent-ils entre ces groupes?

Les émigrants de retour au Canada se composent de deux groupes distincts : les personnes nées au pays et les personnes qui ont immigré au Canada avant d'en émigrer. Le retour des immigrants au Canada revêt un intérêt particulier étant donné les niveaux accrus d'immigration au cours des années 1990 et 2000 par rapport aux décennies précédentes et étant donné la nature de plus en plus fluide de la migration.

En raison du lien migratoire bien établi et tout à fait particulier qui existe entre le Canada et les États-Unis, les émigrants qui rentrent des États-Unis revêtent aussi un intérêt particulier. C'est particulièrement le cas dans le contexte de l'instauration des visas en application de l'Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) dans les années 1990. Ces visas permettent aux Canadiens de travailler pendant de nombreuses années aux États-Unis sans devoir acquérir le statut de résident permanent (Zhao et coll., 2000).

Les personnes âgées émigrantes représentent une faible part des émigrants de retour

En 2006, légèrement moins de 156 000 personnes de 20 ans ou plus sont rentrées au Canada après avoir vécu à l'étranger cinq ans auparavant (tableau 1). Ce groupe représentait 0,7 % de l'ensemble des Canadiens de 20 ans ou plus. En 1991 et en 1996, de 100 000 à 110 000 personnes sont revenues au Canada après avoir vécu à l'étranger cinq ans auparavant, soit de 0,5 % à 0,6 % de la population. Parmi les émigrants de retour relevés en 2006, environ les deux tiers (63 %) étaient nés au Canada et environ le tiers d'entre eux étaient des immigrants. La proportion des émigrants de retour qui étaient des Canadiens de souche variait entre 58 % et 67 % dans les années de recensement précédentes, sans qu'une tendance claire se dégage au fil des ans.

En 2006, comme lors des années de recensement précédentes, la plupart des émigrants de retour étaient jeunes : environ la moitié d'entre eux avaient de 20 à 39 ans et les trois quarts, de 20 à 49 ans. Par contraste, 13 % ou environ 19 000 des émigrants de retour étaient âgés de 60 ans ou plus. À cet égard, il y avait une différence observable entre les personnes nées au Canada et les immigrants. Alors que 9 % des Canadiens de souche rentrés au pays avaient 60 ans ou plus, c'était le cas de 18 % des immigrants de retour au Canada. En termes absolus, environ 9 000 Canadiens de souche rentrés au pays et à peu près 10 000 immigrants de retour au Canada appartenaient à ce groupe d'âge en 2006.

Dans les différents groupes d'âge, les Canadiens de souche et les immigrants de retour au Canada forment une faible proportion de la population canadienne. En 2006, les émigrants de retour représentaient respectivement 0,9 % et 1,1 % de la population âgée de 20 à 29 ans et de 30 à 39 ans (graphique A). Ces proportions étaient plus élevées qu'elles ne l'étaient dans les groupes plus âgés. Cette observation s'explique peut-être par le fait que les personnes plus jeunes quittent en plus grand nombre et que le taux de retour est à son maximum dans les premières années suivant l'émigration (Finnie, 2007). Le taux élevé de mobilité parmi les groupes plus jeunes est généralement attribuable aux possibilités d'emploi ou de formation scolaire qui leur sont offertes à l'étranger et au fait qu'ils ont moins de contraintes, telles que l'emploi du conjoint ou la propriété d'une maison. En 2006, les émigrants de retour représentaient respectivement 0,4 % et 0,2 % de la population de 60 à 69 ans et de 70 ans ou plus.

Les émigrants âgés de retour sont plus scolarisés que les aînés restés au pays

Les personnes âgées qui reviennent au pays diffèrent à plusieurs égards de leurs homologues qui n'ont pas émigré. Comme les émigrants canadiens sont plus scolarisés que la population générale, on s'attendrait également à ce que ceux qui rentrent au pays aient des niveaux de scolarité relativement élevés (DeVoretz, 2009a; Michalowski et Tran, 2008; Zhao et coll., 2000). C'est en effet le cas. En 2006, environ le tiers des Canadiens de souche et des immigrants de 60 ans ou plus qui étaient de retour au Canada avaient un grade universitaire, comparativement à 10 % et à 14 % de leurs homologues restés au pays (tableau 2).

Dans tous les groupes d'âge, les profils de migration diffèrent entre les Canadiennes et les Canadiens, puisque ces derniers sont plus susceptibles d'émigrer du Canada et plus susceptibles d'y revenir après leur départ (DeVoretz, 2009b; Finnie, 2006). Parmi les personnes âgées en 2006, les femmes représentaient de 49 % à 50 % des émigrants de retour, mais de 53 % à 55 % des résidents canadiens restés au pays.

La double citoyenneté réduit les obstacles qui empêchent les gens de vivre à l'étranger, tels que le droit d'exercer un emploi ailleurs, et elle est associée à l'émigration de retour (DeVoretz, 2009a). En 2006, près de 10 % des Canadiens de souche âgés rentrés au pays détenaient une double citoyenneté, comparativement à moins de 1 % de leurs homologues qui n'ont pas émigré. Les immigrants de retour au Canada affichaient le taux le plus élevé de double citoyenneté, soit légèrement plus de 20 %, ce qui est presque le double de la proportion corres- pondante pour les immigrants restés au pays.

En raison du temps qu'ils ont passé à l'étranger, il se peut que les émigrants âgés rentrés au Canada soient moins susceptibles d'être propriétaires de leur logement après leur retour au pays. Même si la majorité des Canadiens de souche et des immigrants de retour au Canada vivaient dans une maison dont ils étaient propriétaires en 2006, la propriété d'une maison était plus répandue chez les personnes restées au pays.

La plupart des émigrants âgés de retour nés au Canada vivaient avec leur conjoint seulement (52 %), une proportion semblable à celle des aînés de souche canadienne restés au pays. Un pourcentage moins élevé d'immigrants de retour au Canada vivaient avec leur conjoint seulement, tandis qu'environ le cinquième d'entre eux vivaient seuls. Les données indiquent également que les émigrants âgés revenus au Canada sont plus susceptibles que les aînés restés au pays de résider avec leur famille élargie, alors que 17 % vivent avec d'autres seulement.

Enfin, les immigrants au Canada s'établissent principalement dans les plus grands centres de population, alors que les personnes nées au pays sont réparties de façon plus égale parmi les grandes et les petites collectivités (Bernard, 2008). La même tendance s'observe chez les émigrants de retour. Tout comme les Canadiens de souche qui n'ont pas émigré, les personnes âgées nées au Canada qui rentrent au pays se répartissent de façon relativement égale du point de vue de la taille de la collectivité où elles vivent. Les immigrants âgés de retour au Canada sont deux fois plus susceptibles que les aînés de souche canadienne rentrés au pays de vivre dans une des régions métropolitaines de recensement de Montréal, Toronto ou Vancouver et trois fois moins susceptibles de vivre dans des régions non urbaines.

Les émigrants âgés vivent principalement aux États-Unis avant de revenir au Canada

Les États-Unis sont depuis longtemps la principale destination des émigrants canadiens (Easton et coll., 2005; Michalowski et Tran, 2008). DeVoretz (2009a) estime qu'environ 40 % de tous les Canadiens vivant à l'étranger résident aux États-Unis. Bien que les États-Unis soient considérés comme une destination « tradi- tionnelle » des émigrants canadiens, il y a des indications selon lesquelles ces derniers sont propor- tionnellement de plus en plus nombreux à s'établir dans des pays non traditionnels, particulièrement en Asie (Dion et Vézina, 2010). Même si les pays sources des émigrants âgés de retour étaient plus variés en 2006 qu'en 1991, les deux principaux pays demeuraient les États-Unis et le Royaume-Uni (graphique B). En effet, la majorité des personnes âgées nées au Canada qui sont rentrées au pays résidaient aux États-Unis cinq ans avant le Recensement de 2006.

La migration vers les États-Unis s'explique par sa proximité géographique par rapport au Canada, ainsi que par les importants liens économiques et les grandes similarités culturelles et linguistiques entre les deux pays (Michalowski et Tran, 2008; Mueller, 2006). Parmi les autres principaux pays sources des personnes nées au Canada qui rentrent au bercail, il y en a aussi qui sont situés à proximité du Canada (p. ex., le Mexique) ou qui lui sont semblables sur le plan culturel et économique (p. ex., le Royaume-Uni, l'Australie, la France).

Néanmoins, la proportion des personnes âgées nées au Canada qui résidaient aux États-Unis, et dans une moindre mesure au Royaume-Uni, avant de rentrer au pays a diminué de 1991 à 2006, autre signe de l'importance des pays non traditionnels en tant que destinations des émigrants. Parmi les immigrants de 60 ans ou plus qui sont retournés au Canada, la majorité avaient résidé cinq ans auparavant ailleurs qu'aux États-Unis ou au Royaume-Uni, mais ces deux pays demeuraient quand même les principaux pays sources des immigrants de retour au Canada. Hong Kong, la Chine continentale et l'Inde étaient les autres principaux pays sources.

Dans certains cas, les différences observées entre 1991 et 2006 découlent vraisemblablement de l'évolution de la situation dans les pays d'origine des immigrants. Par exemple, le classement relativement élevé de Hong Kong en tant que pays source des immigrants âgés de retour au Canada tant en 1991 qu'en 2006 fait suite à l'afflux massif d'immigrants au Canada dans les années 1980, juste avant l'intégration de l'ancienne colonie britannique à la Chine (Aydemir et Robinson, 2006; Zhang, 2009b). En outre, le fait que la Chine ne figurait pas parmi les 10 principaux pays sources en 1991, mais qu'elle se retrouvait au quatrième rang des pays sources des Canadiens de souche et des immigrants âgés de retour au Canada en 2006, témoigne de la croissance rapide et de l'intégration internationale de l'économie chinoise.

Bien que les États-Unis et le Royaume-Uni soient les pays en provenance desquels de nombreux émigrants âgés rentrent au Canada, ce ne sont souvent pas les pays où les immigrants de retour sont nés. En particulier, alors que 26 % des immigrants âgés rentrés au Canada résidaient aux États-Unis cinq ans avant leur retour au pays, seulement 7 % étaient de souche américaine. De toute évidence, certains immigrants ne retournent pas dans leur pays d'origine lorsqu'ils quittent le Canada. Les principaux pays de naissance des immigrants âgés de retour au Canada sont le Royaume-Uni, la Chine, les États-Unis et l'Inde (graphique C).

Quant aux immigrants âgés qui sont rentrés des États-Unis, la plupart sont nés dans ce pays, mais un bon nombre sont également nés au Royaume-Uni et, à un moindre degré, en Allemagne, en Inde, aux Pays-Bas et en Chine (graphique D).

Parmi les Canadiens de souche âgés qui vivent aux États-Unis, ceux qui rentrent au pays sont peu nombreux, mais plus scolarisés

Les données de recensement canadiennes et américaines peuvent servir à estimer les taux d'émigration de retour en provenance des États-Unis (tableau 3.1 et tableau 3.2). Bien que les taux de retour des Canadiens de souche puissent être estimés, l'examen des immigrants canadiens qui rentrent des États-Unis ne comprendrait que ceux qui vivaient au Canada en 1995 et qui résidaient aux États-Unis en 2000. Par conséquent, la présente analyse est axée sur les émigrants nés au Canada2.

Seul un faible pourcentage des émigrants âgés nés au Canada qui résidaient aux États-Unis en 2000 sont rentrés au Canada dans les cinq ans précédant 2006. Alors qu'environ 12 % ou 13 % des émigrants nés au Canada âgés de 20 à 39 ans sont revenus au pays dans les cinq ans précédant 2006, environ 3 % de ceux de 60 à 69 ans et moins de 1 % de ceux de 70 ans ou plus ont fait de même. Dans l'ensemble, à peu près un émigrant né au Canada sur 10 de retour des États-Unis en 2006 avait 60 ans ou plus.

Les personnes âgées nées au Canada qui rentrent au pays en provenance des États-Unis ont souvent des niveaux élevés de scolarité. Parmi celles qui sont rentrées au bercail entre 2000 et 2006, près de 30 % étaient titulaires d'un grade universitaire, comparativement à environ 20 % de l'ensemble des émigrants nés au Canada (de 60 ans ou plus) qui résidaient aux États-Unis en 2000 et à 10 % des personnes âgées nées au Canada qui résidaient au Canada de 2000 à 20063.

Les personnes âgées de retour occupaient surtout des emplois de professionnels ou de gestionnaires

Vu le niveau de scolarité élevé des émigrants de retour, il y a lieu de se demander si leurs taux d'emploi et leurs résultats sur le marché du travail diffèrent de ceux de la population générale. Par exemple, le niveau de scolarité élevé des émigrants peut se traduire par une rémunération supérieure et une probabilité accrue d'exercer des emplois spécialisés (Michalowski et Tran, 2008). De même, il se peut que les immigrants de retour au Canada soient représentés de façon disproportionnée dans les emplois de professionnels étant donné la forte émigration chez les immigrants appartenant à la catégorie des travailleurs qualifiés ou à celle des gens d'affaires (Dryburgh et Hamel, 2004). De plus, il se peut que les émigrants rentrés au Canada soient plus susceptibles d'être actifs sur le marché du travail à leur retour au pays pour des raisons financières, puisque les prestations du Régime de pensions du Canada et du Régime de rentes du Québec sont fondées sur la durée et le niveau de cotisations versées (Elgersma, 2010).

Dans la tranche d'âge de 60 ans ou plus, les émigrants de retour affichent des taux d'emploi plus élevés que ceux des personnes restées au pays. La différence entre ces deux groupes est de quatre points de pourcentage parmi les personnes nées au Canada et de 2,5 points chez les immigrants (tableau 4). Les émigrants de retour qui sont nés au Canada ont le taux d'emploi le plus élevé des quatre groupes décrits. De plus, les personnes âgées de retour sont plus susceptibles que leurs homologues restés au pays de chercher activement du travail (c.-à-d. d'être sans emploi).

Parmi les personnes de 60 ans ou plus qui occupent un emploi, les émigrants de retour sont beaucoup plus susceptibles que les non-émigrants d'exercer un emploi de gestionnaire ou de professionnel. En effet, la majorité des Canadiens de souche rentrés au pays (55 %) appartiennent à ces deux grandes catégories professionnelles, comparativement à 27 % des personnes nées au Canada qui n'ont pas émigré. On observe aussi une différence marquée entre les immigrants de retour au Canada et les immigrants restés au pays (45 % et 32 %, respectivement).

Les émigrants de retour de 60 ans ou plus reçoivent moins de transferts gouvernementaux que les autres Canadiens âgés

Comparativement aux autres, les personnes qui émigrent du Canada affichent généralement des niveaux de revenu plus élevés (Finnie, 2006) qui correspondent à leurs niveaux de scolarité plus élevés. Par conséquent, on pourrait s'attendre à ce que les émigrants de retour aient un revenu moyen supérieur à celui des personnes restées au Canada. Il se peut par contre que le revenu provenant des transferts gouvernementaux soit moins élevé chez les émigrants de retour que chez les non-émigrants en raison des exigences en matière de résidence et de cotisations. En outre, une récente étude indique que les Canadiens de souche rentrés au pays ont de meilleurs résultats économiques que les immigrants de retour au Canada (Fondation Asie-Pacifique du Canada, 2011).

En 2005, le revenu total moyen des Canadiens de souche rentrés au pays (43 800 $) était plus élevé que celui de leurs homologues restés au pays (31 900 $) (tableau 5). Cette situation s'explique par le fait que le revenu moyen du marché était environ 15 000 $ plus élevé pour les Canadiens de souche rentrés au pays que pour leurs homologues qui n'ont pas émigré. Par contraste, le revenu moyen provenant des transferts gouvernementaux était moins élevé chez les émigrants de retour. L'écart de revenu entre les Canadiens de souche rentrés au pays et leurs homologues qui n'ont pas émigré était particulièrement prononcé dans le groupe d'âge de 60 à 69 ans (données non présentées).

Si l'on compare les immigrants âgés de retour au Canada et leurs homologues restés au pays, leur revenu moyen total différait de moins de 1 000 $ du fait que les transferts gouvernementaux moins élevés dont bénéficiaient ces premiers étaient compensés par un revenu du marché supérieur.

Même si les émigrants de retour touchaient un revenu total plus élevé ou comparable, ils étaient plus susceptibles que les personnes restées au pays d'être en situation de faible revenu en 2005. En fait, parmi les personnes âgées, près du quart des immigrants de retour au Canada avaient un faible revenu, comparativement à 17 % des Canadiens de souche rentrés au pays, à 16 % des immigrants restés au Canada et à 14 % des personnes nées au Canada qui n'ont pas émigré.

Le revenu moyen supérieur et la fréquence plus élevée du faible revenu chez les émigrants âgés nés au Canada qui sont rentrés au pays ressortent de leur répartition entre les catégories de revenu personnel. Comme le montre le graphique E, les personnes âgées nées au Canada qui sont rentrées au bercail étaient proportionnellement plus nombreuses que leurs homologues restés au pays à gagner un revenu personnel inférieur à 10 000 $ ou bien égal ou supérieur à 50 000 $ en 2005. Cette répartition plus polarisée du revenu sous-tend les différences au chapitre du revenu moyen et des taux de faible revenu. Les immigrants âgés de retour au Canada étaient proportion- nellement plus nombreux que leurs homologues restés au pays à afficher un revenu personnel de moins de 10 000 $, comme en témoigne la fréquence du faible revenu chez ces premiers.

Les transferts gouvernementaux représentaient une part bien moins considérable du revenu total des émigrants âgés de retour comparativement aux membres de ce groupe d'âge restés au pays. C'est particulièrement vrai des émigrants de retour nés au Canada, dont plus de 80 % du revenu total provenait du revenu du marché. Une part légèrement plus faible du revenu des immigrants de retour au Canada provenait des salaires et traitements, du revenu d'un travail autonome, et du revenu de placements ou de retraite. Par comparaison, les transferts gouvernementaux représentaient près du tiers du revenu des personnes âgées qui n'ont pas émigré du Canada.

Conclusion

Bien que cette étude ait été motivée par les éventuelles incidences du retour au pays d'émigrants âgés, les données du recensement indiquent que ce sont les jeunes émigrants, majoritairement nés au Canada, qui reviennent au pays en plus grand nombre. En fait, les émigrants de retour de 60 ans ou plus forment un faible pourcentage de l'ensemble des émigrants de retour et une part infime de la population âgée du Canada. Dans l'ensemble, les émigrants qui reviennent au Canada en sont surtout à leurs années d'activité maximale.

Le plus souvent, les émigrants âgés de retour reviennent des États-Unis ou du Royaume-Uni. Toutefois, on observe un changement quant aux principaux pays en provenance desquels les Canadiens rentrent : ils sont de plus en plus nombreux à revenir de pays en développement, en particulier la Chine. Parmi les personnes qui ont quitté le Canada pour aller résider aux États-Unis, les jeunes Canadiens de souche sont proportionnellement plus nombreux que leurs homologues âgés à rentrer au pays.

Les profils d'établissement des émigrants de retour au Canada diffèrent énormément selon qu'ils sont nés au pays ou qu'il s'agit d'immigrants. En effet, les immigrants âgés de retour au Canada sont deux fois plus susceptibles que les aînés de souche canadienne rentrés au pays de vivre dans une des trois principales régions métropolitaines de recensement (RMR) et trois fois moins susceptibles de vivre dans des régions non urbaines.

Les aînés qui reviennent au Canada forment un groupe très scolarisé. La moitié d'entre eux ont fait des études postsecondaires au moins partielles, tandis qu'environ le tiers sont titulaires d'un grade universitaire. En outre, leur taux d'emploi est plus élevé que celui des personnes âgées restées au pays, et ils occupent souvent des emplois de professionnels et de gestionnaires.

En moyenne, le revenu du marché et le revenu total des personnes âgées nées au Canada qui sont rentrées au pays dépassent ceux de leurs homologues non émigrants. En outre, les émigrants de retour de 60 ans ou plus tirent un plus faible revenu des transferts gouvernementaux que ce n'est le cas des non-émigrants de ce groupe d'âge. En particulier, le montant des transferts en provenance du Régime de pensions du Canada et du Régime de rentes du Québec est moins élevé pour les Canadiens de souche et les immigrants qui sont revenus au Canada que pour les non-émigrants et il est le plus faible pour les immigrants de retour au pays. Les émigrants de retour reçoivent également moins de prestations de la Sécurité de la vieillesse et du Supplément de revenu garanti que ce n'est le cas des personnes restées au Canada. Malgré leur revenu moyen supérieur, les personnes âgées de retour au Canada, en particulier les immigrants, sont plus susceptibles que leurs homologues restés au pays de tomber sous les seuils de faible revenu, ce qui témoigne de la distribution asymétrique du revenu chez ces premiers.

Sources des données et définitions

Dans la présente étude, nous utilisons les données de l'échantillon de 20 % des quatre recensements canadiens menés entre 1991 et 2006, en mettant un accent particulier sur les résultats du Recensement de 2006. Les multiples années de données et la grande taille de l'échantillon permettent d'examiner l'évolution des tendances et jettent un éclairage sur la taille et les caractéristiques de la population des émigrants âgés de retour au Canada. De plus, les données du recensement américain de 2000 servent à estimer le nombre de personnes nées au Canada qui résidaient aux États-Unis cette année-là.

Les répondants au questionnaire complet du recensement ont fourni des renseignements sur le pays où ils résidaient cinq ans auparavant, ce qui permettait de repérer les personnes qui sont revenues au Canada depuis. Les Canadiens de souche rentrés au pays désignent les personnes qui sont nées au Canada, qui vivaient à l'étranger cinq ans avant le recensement et qui étaient de retour au pays au moment du recensement. Les immigrants de retour au Canada s'entendent des personnes qui sont nées à l'étranger et qui ont immigré au Canada, qui vivaient à l'extérieur du Canada cinq ans avant le recensement et qui résidaient de nouveau au Canada au moment du recensement. Nous utilisons les termes « personnes restées au pays » ou « non-émigrants » pour désigner les immigrants et les personnes nées au Canada qui vivaient au Canada cinq ans avant le recensement. Comme l'analyse se limite aux personnes âgées de 20 ans ou plus, en sont exclus les enfants et les jeunes qui ont déménagé avec leurs parents. Sauf indication contraire, les termes « âgé » et « aîné » se rapportent aux personnes de 60 ans ou plus.

Il convient de souligner que les émigrants de retour relevés à chaque recensement constituent un sous-ensemble des émigrants de retour au sein de la population, puisqu'il est impossible de reconnaître les personnes qui sont déménagées à l'étranger et qui sont rentrées au Canada dans les cinq ans précédant le recensement. Il n'est pas possible non plus de cerner les personnes qui sont revenues au Canada plus de cinq ans avant le recensement.


Notes

  1. Entre 1980 et 2009, le nombre d'émigrants âgés de 20 à 59 ans fluctuait. D'après les estimations, 26 600 personnes de 20 à 59 ans ont émigré en 1980, alors que 37 100 émigrants appartenaient à ce groupe d'âge en 2009 (Statistique Canada, 2011). L'émigration des personnes de 60 ans ou plus tendait généralement à croître de façon relativement constante au fil des ans : selon les estimations, le nombre d'émigrants de 60 ans ou plus est passé de 1 900 en 1980 à 4 400 en 2009.
  2. Une analyse des immigrants canadiens qui résidaient aux États-Unis en 2000 et qui étaient de retour au Canada en 2006 ne fait ressortir aucune tendance claire du taux de migration de retour selon l'âge. Parmi cette population, une plus grande proportion des immigrants de 60 à 69 ans étaient de retour au Canada en 2006 comparativement aux immigrants des groupes d'âge plus jeunes. Chez les émigrants nés à l'étranger qui sont retournés au Canada en provenance des États-Unis, ceux de 20 à 29 ans étaient proportionnellement les moins nombreux, suivis de ceux de 40 à 49 ans et de ceux de 70 ans ou plus.
  3. On observe des résultats semblables chez les immigrants qui étaient de retour des États-Unis en 2006. Environ 30 % des immigrants vivant aux États-Unis en 2000 avaient un grade universitaire, comparativement à plus de 40 % des immigrants qui sont retournés au Canada.

Documents consultés

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Auteurs

Kristyn Frank et Feng Hou travaillent à la Division de l'analyse sociale. Kristyn Frank peut être rejointe au 613-951-3962. Feng Hou peut être rejoint au 613-951-4337 ou l'un ou l'autre à perspective@statcan.gc.ca.

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