Section 2
Les mesures de faible revenu et les modifications proposées

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2.1 La méthodologie de MFR actuelle
2.2 Remplacement de la famille économique par le ménage
2.3 Adoption de l'échelle d'équivalence fondée sur la racine carrée
2.4 Le facteur de pondération

2.1 La méthodologie de MFR actuelle

Actuellement, Statistique Canada produit trois types de seuils de faible revenu, notamment : le seuil de faible revenu (SFR), la mesure de faible revenu (MFR) et la mesure fondée sur un panier de consommation (MPC). Ces mesures aident les décideurs et les analystes à examiner le faible revenu sous plusieurs angles.1 Depuis 1991, des seuils de MFR ont été définis pour trois concepts de revenu, à savoir le revenu du marché, le revenu avant impôt et le revenu après impôt.2 Quel que soit le concept de revenu, le calcul implique les étapes suivantes :

  • Pour chaque famille économique, calculer la « taille équivalente » en utilisant les données sur sa taille et sa composition ainsi que l'échelle d'équivalence.
  • Diviser le revenu total d'une famille par sa taille équivalente pour obtenir son « revenu équivalent ».
  • Classer toutes les familles économiques selon leur revenu équivalent pour obtenir la valeur médiane des revenus équivalents pour toutes les familles au sein de la population.
  • Diviser la médiane par 2 pour obtenir le « seuil de MFR standard », qui équivaut au seuil de MFR pour une personne.
  • Pour les familles composées de deux membres ou plus, multiplier le seuil de MFR standard par les tailles équivalentes de ces familles pour obtenir leur seuil MFR.

Les échelles d'équivalence sont utilisées afin de prendre en compte les économies d'échelles relatives à la consommation des différentes tailles et compositions de famille. Une famille de deux membres nécessite un plus gros revenu qu'une famille d'une personne, mais ce revenu ne doit pas forcément être deux plus fois plus élevé pour maintenir le même niveau de vie. Par conséquent, si une famille composée d'un membre a besoin d'une unité de revenu, la famille de deux membres en nécessite plus d'une, mais moins de deux. Le système d'échelle d'équivalence selon la MFR attribue 1 unité de revenu à une famille composée d'un membre, 1,4 unité de revenu à une famille de deux membres (deux adultes ou un adulte et un enfant âgé de moins de 16 ans), 1,7 unité à une famille de trois membres composée de deux adultes et d'un enfant, etc.3

Le tableau 1 contient les seuils de MFR après impôt pour l'année 2006.4 En utilisant des données de l'Enquête sur la dynamique du travail et du revenu (EDTR), la valeur médiane estimée du revenu après impôt ajusté est de 30 358 $. Par conséquent, le seuil de MFR standard est 30 358 ÷ 2 = 15 179 $. Le seuil de MFR pour une famille composée d'un membre est simplement égal au seuil standard, étant donné que sa taille équivalente est 1 unité. Pour une famille de deux membres, puisque son échelle d'équivalence est de 1,4, son seuil de MFR sera de 15 179 $ x 1,4 = 21 251 $.

Tableau 1 Seuils de MFR après impôt pour l'année 2006

2.2 Remplacement de la famille économique par le ménage

Le présent document propose trois modifications à la méthodologie de MFR existante. La première consiste à remplacer la famille économique par le ménage en tant qu'unité de compte de base, dans laquelle les membres rassemblent leurs revenus et tirent parti des économies d'échelle en termes de consommation.

Comme il est décrit dans la section précédente, la méthodologie de MFR actuelle utilise la famille économique comme unité de base. La famille économique est définie par deux critères : (1) un groupe de deux personnes ou plus habitant dans le même logement et (2) apparentées par le sang, par alliance, par union libre ou par adoption. La vaste majorité des Canadiens vivent dans un ménage ne comportant qu'une famille économique. En 2007, 94,9 % des Canadiens vivaient dans un ménage composé d'une seule famille économique, alors que 5,1 % partageaient un logement avec une autre famille économique. Ainsi, seulement 2,5 % de la population vivait dans des familles économiques secondaires au sein d'un ménage. Cette situation est demeurée relativement stable au cours des trente dernières années.

L'hypothèse implicite qui sous-tend la méthodologie de MFR est que les économies d'échelle pour chaque personne sont générées à l'intérieur de la famille économique uniquement. Cette hypothèse peut sembler raisonnable, car, comme mentionné précédemment, la vaste majorité des Canadiens vivent exclusivement avec des personnes apparentées par le sang, par alliance, par union libre ou par adoption. Néanmoins, nous proposons de remplacer la famille économique par le ménage en nous basant sur deux considérations.

Premièrement, la famille économique n'est pas la seule unité dans laquelle les membres partagent des ressources et tirent parti des économies d'échelle relatives à la consommation. Dans certains cas, des membres de différentes familles économiques vivant dans le même logement achètent tour à tour certains produits ou services aux fins de consommation par le ménage. Ainsi, ces familles économiques peuvent économiser sur leurs dépenses liées au logement et aux services publics, comme les intérêts hypothécaires, les frais de chauffage, de climatisation et d'éclairage, etc. Ce fait est particulièrement important étant donné que les coûts de logement représentent une grande part de la consommation des familles à faible revenu. Par exemple, deux couples, chacun étant une famille économique indépendante, peuvent choisir de vivre dans un appartement de deux chambres à coucher, en partageant des espaces communs ainsi que des appareils ménagers. En partageant des espaces communs, ces couples nécessiteront moins de revenus que s'ils vivaient dans deux appartements individuels d'une chambre à coucher. Avec la méthodologie de MFR existante, les économies mentionnées ci-dessus sont exclues. À l'inverse, elles seront prises en compte avec la modification proposée.

Lors de la mesure du faible revenu, il est important de tenir compte des économies d'échelle puisque la situation des particuliers dans le ménage est probablement liée à leur revenu. On peut raisonnablement supposer que la vie privée est un bien normal. Et comme tout bien normal, la vie privée est nettement influencée par le revenu. Ainsi, une augmentation de revenu dans une famille économique réduira sa tendance à partager un logement avec d'autres familles ou personnes, et une baisse du revenu aura l'effet contraire. Par conséquent, les familles ou personnes à faible revenu sont les plus susceptibles de « renoncer » à leur vie privée pour maintenir leur niveau de vie. La méthodologie de MFR actuelle ne tient pas compte des économies mentionnées précédemment et peut donc surestimer la fréquence du faible revenu.

Case 1
Comment Statistique Canada définit-il la famille économique?

La famille économique désigne un groupe de deux personnes ou plus qui partagent le même logement et qui sont apparentées par le sang, par alliance ou par adoption ou qui vivent en union libre. Une personne vivant seule est également considérée comme une famille économique à des fins statistiques.

Le concept de famille économique utilisé par Statistique Canada est compatible avec la définition de la « famille à l'intérieur du ménage » présentée dans le document des Nations Unies intitulé Principes et recommandations concernant les recensements de la population et de l'habitat (Nations Unies, 1998), qui définit « la famille à l'intérieur du ménage » comme étant « composée des membres du ménage qui sont apparentés, à un degré déterminé, par le sang, l'adoption ou le mariage ».

Le deuxième point tout aussi important, voire plus, est que le ménage est la norme internationale utilisée dans des enquêtes statistiques comparatives sur les revenus et le bien-être, alors que le concept de famille économique est rarement utilisé par d'autres pays.5 En effet, bien que le document des Nations Unies Principes et recommandations concernant les recensements de la population et de l'habitat (1998) définisse la famille comme étant « composée des membres du ménage qui sont apparentés, à un degré déterminé, par le sang, l'adoption ou le mariage », il précise : « le degré de parenté choisi pour délimiter la famille ainsi définie dépend de l'utilisation que l'on compte faire des données recueillies, et il n'est donc pas possible d'en donner de définition applicable à l'échelle mondiale ». De même, dans le Rapport final et recommandations (2001) du groupe de Canberra, le groupe international d'experts en matière de statistique sur le revenu des ménages considère le ménage comme l'unité d'analyse préférée pour la répartition du revenu, et cette préférence est en grande partie attribuable au lien entre les ménages et les microdonnées (enquêtes) et données agrégées (Système de comptabilité nationale) utilisées. Ainsi, l'utilisation du ménage comme unité d'analyse garantit une comparabilité internationale maximale par rapport à la famille économique.6

Case 2
Comment Statistique Canada définit-il le logement et le ménage?

Un logement est défini comme un ensemble de pièces d'habitation. On reconnaît deux genres de logements, soit les logements collectifs et les logements privés. Les premiers sont des logements de nature institutionnelle, communautaire ou commerciale. Les autres désignent un ensemble séparé de pièces d'habitation possédant une entrée privée soit à partir de l'extérieur de l'immeuble, soit à partir d'un hall, d'un foyer, d'un vestibule ou d'un escalier commun situé à l'intérieur de l'immeuble.

Le terme ménage s'applique à un ensemble de pièces d'habitation dans lesquelles une personne ou un groupe de personnes vivent (ou pourraient vivre). Un ménageest généralement défini comme une personne ou un groupe de personnes qui habitent ensemble ou qui occupent le même logement et n'ayant pas de domicile habituel ailleurs au Canada ou à l'étranger. Le logement peut être un logement collectif ou un logement privé. Un ménage peut se composer d'un groupe familial (famille de recensement), de deux familles ou plus partageant le même logement, d'un groupe de personnes non apparentées ou d'une personne seule.

L'une des caractéristiques intéressantes de la modification est qu'elle accentue la différence conceptuelle avec les deux autres seuils de faible revenu produits par Statistique Canada. Toutefois, cette différence ne signifie pas que nous ne pouvons pas comparer les statistiques sur le faible revenu produites selon différents seuils. En fait, les trois seuils de faible revenu mesurent le même phénomène du bien-être économique en s'appuyant sur diverses hypothèses et perspectives. Par ailleurs, ils reposent tous sur des choix arbitraires et des hypothèses implicites, et les niveaux de faible revenu sous différents seuils de faible revenu ne sont donc pas directement comparables avec ou sans la modification. Les trois seuils de faible revenu ont été définis afin d'être mutuellement complémentaires. En offrant la possibilité de prendre en compte les économies d'échelle qui ne sont pas mesurées par les autres seuils, la MFR constitue un meilleur complément du seuil de faible revenu (SFR) et de la mesure fondée sur un panier de consommation (MPC).

Grâce à la modification proposée, une personne sera définie comme ayant un faible revenu si le ménage dans son ensemble a un faible revenu, ce qui générera des statistiques différentes. Avec la méthodologie existante, les économies d'échelle liées à la consommation ne sont sans doute pas totalement prises en compte en termes de coûts de logement. Par conséquent, on peut relever un biais à la hausse dans les statistiques sur le faible revenu. Paradoxalement, sachant que les familles économiques ne partagent pas tout dans un ménage, la MFR révisée peut exagérer les économies d'échelle. Ainsi, toutes choses étant égales par ailleurs, les statistiques sur le faible revenu produites avec la modification peuvent afficher un biais à la baisse par rapport à la MFR existante. Sur le plan empirique, il est donc difficile de dire quel facteur est dominant; le biais à la hausse obtenu avec la méthode existante ou le biais à la baisse généré avec la nouvelle méthode.

On ne s'attend pas à ce que la modification ait une incidence substantielle sur les statistiques du faible revenu puisque, comme relevé précédemment, le nombre de ménages comportant plusieurs familles n'est pas important et est demeuré relativement stable au cours des trente dernières années. Néanmoins, il semble que les personnes qui ont choisi de vivre dans un ménage comportant plusieurs familles économiques répondent, en fait, aux critères caractérisant un ménage, notamment à l'égard de la répartition du revenu. Comme le montre la figure 1, les personnes vivant au sein d'un ménage qui comporte plusieurs familles économiques ont une répartition du revenu (de famille économique) très similaire à celle de personnes seules vivant dans un ménage ne comprenant qu'une famille économique. Cependant, la répartition du revenu des ménages est très semblable à celle des ménages composés d'une famille économique de deux personnes ou plus.

Figure 1 Répartition du revenu par le type de ménage

Un autre point important est le fait que la grande majorité des ménages comportant plusieurs familles économiques sont de taille relativement petite, ce qui laisse supposer un choix conscient de former un nouveau ménage: Environ 44 % des personnes vivent dans une famille économique au sein d'un ménage de deux personnes, et 32 % dans un ménage de trois personnes. Cela signifie que dans les trois quarts des cas, deux personnes seules choisissent de vivre ensemble ou une personne seule vit avec une famille économique de deux personnes.

La figure 2 présente les taux de faible revenu mesurés au niveau des personnes avec la méthodologie de MFR existante ainsi que les taux calculés en adoptant le ménage comme unité de compte de base, avec l'échelle d'équivalence et le système de pondération actuels. Cette modification réduit légèrement les taux de faible de revenu estimés, mais ne laisse paraître aucun changement de la tendance du faible revenu.

Figure 2 Taux de faible revenu lorsque la famille économique est remplacée par le ménage

2.3 Adoption de l'échelle d'équivalence fondée sur la racine carrée

L'une des composantes clés de la méthodologie de MFR est le choix de l'échelle d'équivalence.7 Essentiellement, l'échelle d'équivalence évalue la mesure dans laquelle la consommation d'une personne doit être modifiée lorsque sa situation au sein de la famille change, afin de maintenir son niveau de bien-être. Par exemple, une femme qui vit seule et consomme un panier de produits et de services pour un prix donné atteint un certain niveau d'utilité. Le problème que pose la détermination de son échelle d'équivalence est de savoir combien d'argent cette femme économiserait si elle vivait avec une autre personne, tout en maintenant le même niveau d'utilité. Étant donné qu'une personne ne peut vivre seule et avec une autre personne en même temps, il est généralement impossible de définir l'échelle d'équivalence de façon individuelle.

Néanmoins, le regroupement et le partage des ressources ont lieu dans une famille économique ou un ménage, et des économies d'échelle relatives à la consommation commune existent. Par exemple, deux familles, chacune composée de deux personnes, décident de former une nouvelle famille de quatre; les membres n'auront donc pas besoin d'autant de voitures, de cuisinières et de réfrigérateurs qu'auparavant pour maintenir le même niveau de satisfaction. Ils pourront également profiter des prix de gros et des escomptes de volume. En pratique, l'échelle d'équivalence est utilisée principalement pour tenir compte des économies accumulées sur les dépenses de consommation des personnes vivant ensemble. Cependant, le problème est qu'il n'y a pas d'accord unanime sur le degré et l'ampleur des économies; c'est la raison pour laquelle diverses échelles d'équivalence sont proposées et utilisées.

Les échelles d'équivalence pour la MFR ont été choisies en tant que point médian approximatif de plusieurs échelles représentées dans différentes séries de SFR et d'échelles administratives et législatives utilisées dans les guides budgétaires municipaux et aux niveaux provinciaux d'assistance sociale. Comme le montre le tableau 2, ces échelles d'équivalence sont une combinaison de l'ancienne échelle de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) (également appelée échelle d'Oxford) et de l'échelle établie par Poulin (1988) à partir des enquêtes sur la satisfaction à l'égard du revenu. Ces échelles ont été utilisées par Statistique Canada pour produire les seuils de MFR depuis 1991 ainsi que les versions étendues aux années précédentes. Les échelles d'équivalence de la MFR sont également prises en compte dans le seuil de la MPC.8

Tableau 2 Les échelles d'équivalence de la mesure de faible revenu se situent au milieu

Il est important de noter que toutes les échelles d'équivalence sont soumises à des hypothèses et à des choix arbitraires, comme il décrit en détail par Jäntti et Danziger (2008, p. 319), selon lesquels « il n'existe pas de méthode optimale pour calculer une échelle d'équivalence. Ils précisent que sans hypothèses supplémentaires, il n'est pas possible de sélectionner les critères de base pour choisir une échelle d'équivalence, à plus forte raison la bonne échelle d'équivalence, parmi la multitude d'échelles suggérées ». Cependant, le choix des échelles d'équivalence évolue au fil des années. Ce fait est particulièrement notable au sein de l'OCDE. L'« ancienne échelle » de l'OCDE présentée au tableau 2 était largement utilisée dans les années 1980. Au début des années 1990, une « échelle modifiée » de l'OCDE fut adoptée par l'Office statistique de l'Union européenne (Eurostat). Cette échelle modifiée attribue les valeurs de 1,0 au chef du ménage, de 0,5 à chaque adulte supplémentaire et de 0,2 à chaque enfant. Plus récemment, l'OCDE a commencé à utiliser couramment, dans ses publications sur la pauvreté et les inégalités, la racine carrée de la taille du ménage pour rajuster le revenu du ménage.9

Nous proposons d'adopter l'échelle d'équivalence fondée sur la racine carrée pour rajuster le revenu du ménage. Cette méthode est simple et en harmonie avec les pratiques internationales. Sa simplicité repose, entre autres, sur le fait qu'elle est monotone relativement à la taille de la famille ou du ménage, tandis que les autres échelles ne le sont pas.

Figure 3 Facteur d'équivalence moyen pour le énième membre de la famille selon diverses échelles d'équivalence

La figure 3 présente le facteur d'équivalence moyen pour chaque membre supplémentaire de la famille. Avec l'échelle de MFR et l'échelle fondée sur la racine carrée, le deuxième membre de la famille est toujours associé à la valeur de 0,4. Cependant, la racine carrée affiche des facteurs en baisse pour chaque membre suivant, contrairement à l'échelle de MFR qui se stabilise après le troisième membre.10 Par ailleurs, avec l'échelle de la racine carrée, il ne suffit que de tenir compte du nombre de personnes dans la famille, tandis qu'avec l'échelle de MFR, on doit considérer l'âge des membres de la famille et si la famille est monoparentale ou non.

Cette méthode simple favorise la transparence et la possibilité d'interprétation des résultats. Lors de la comparaison de pays, on doit s'interroger sur la mesure dans laquelle des compositions de famille différentes peuvent influer sur le taux de faible revenu, étant donné que les membres sont traités comme des personnes individuelles.

Des recherches empiriques récentes semblent indiquer que la racine carrée de la taille du ménage est une bonne approximation des vraies économies d'échelle.11 Avec cette modification, nous nous attendons à ce que le taux de faible revenu soit inférieur à celui qui est calculé avec l'échelle d'équivalence existante, puisque la nouvelle échelle permet d'économiser davantage comme le montre la figure 3. Rappelons toutefois; que nous ne prévoyons pas que cette modification ait des répercussions importantes sur les statistiques du faible revenu, car la nouvelle méthode ne diffère sensiblement de la méthode existante que si la taille de la famille ou du ménage est importante.

Tableau 3 Exemples des échelles d'équivalences actuelles et proposées

Comme le démontre le tableau 3, lorsqu'une famille ou un ménage est composé de quatre personnes ou moins, les deux échelles d'équivalence sont pratiquement identiques. En effet, les statistiques sur le faible revenu observées avec la nouvelle échelle d'équivalence correspondent aux prévisions. La figure 4 présente les taux de faible revenu avec la méthodologie de MFR actuelle, sauf que l'échelle d'équivalence a été remplacée par la racine carrée de la taille de la famille. Cette modification réduit légèrement les taux de faible de revenu, mais ne révèle aucune différence importante. En outre, les tendances du faible revenu restent les mêmes avec les deux méthodes.

Figure 4 Taux de faible revenu avec différentes échelles d'équivalence

2.4 Le facteur de pondération

Le bien-être économique des personnes constitue la préoccupation majeure des décideurs et chercheurs qui s'intéressent à l'économie de bien-être. Par exemple, Statistique Canada produit régulièrement des statistiques sur le nombre de personnes âgées ou d'enfants à faible revenu, à la suite de quoi ces personnes reçoivent des paiements de soutien du revenu de la part du gouvernement. Cependant, comme souligné précédemment, le plus important déterminant du bien-être économique d'une personne est le revenu de la famille ou du ménage dans lequel elle vit.

On doit donc décider de calculer le revenu médian en se basant sur les ménages, les familles économiques ou les personnes. Comme nous l'avons mentionné plus tôt, la méthodologie de MFR actuelle classe les familles économiques et concorde largement avec le SFR à cet égard.12 Toutefois, la norme internationale exige de suivre la deuxième approche. Par exemple, le guide du groupe de Canberra recommande les étapes suivantes pour définir un seuil :

« Une fois que les ajustements des échelles d'équivalence ont été appliqués au ménage de sorte que le revenu de ce dernier ne reflète plus directement sa taille, le revenu pondéré du ménage peut être multiplié par le nombre de personnes dans chaque unité pour obtenir le revenu pondéré par personne. En appliquant ces revenus pondérés par personne au revenu équivalisé du ménage, on peut alors faire des estimations de la répartition du revenu entre tous les personnes. Ainsi, une unité de six personnes est comptée comme valant six fois plus qu'une unité d'une personne » (Canberra, 2001, P41).13

Le revenu pondéré par personne produit une estimation de la répartition générale du revenu parmi les personnes dans la population, en supposant que tous les revenus du ménage ou de la famille sont regroupés. Cette procédure est particulièrement appropriée pour les comparaisons de populations selon une période ou une région dans laquelle on note de grandes différences entre les tailles de famille ou un lien entre la taille de la famille et le revenu. La répartition individuelle reflète l'hypothèse selon laquelle le revenu du ménage ou de la famille est partagé de façon égale entre tous les membres, mais elle n'indique pas de perception directe d'un revenu par chaque membre. Du fait que de nombreux membres de ménage ne perçoivent pas de revenu (p. ex. les enfants plus jeunes), il est difficile de rejeter cette hypothèse sur le plan pratique, en attendant les avancées de l'étude dans ce domaine.14

Les deux approches généreraient des statistiques sur le faible revenu différentes, si la famille ou le ménage était corrélé au revenu. À titre d'exemple, prenons une population composée de 11 familles et de 36 personnes. Ces familles comportent le nombre de personnes suivant, respectivement : 1, 2, 2, 2, 3, 3, 4, 4, 4, 5 et 6.

Supposons que leurs revenus ajustés sont, respectivement :

{15 000 $; 20 000 $; 30 000 $; 40 000 $; 45 000 $; 50 000 $; 60 000 $; 65 000 $; 70 000 $; 80 000 $; 85 000 $}

Si nous classons les familles selon leur revenu ajusté, le revenu médian estimé est de 50 000 $, la moitié étant 25 000 $. Dans un tel cas, 2 des 11 familles ont un faible revenu. Étant donné qu'il n'y a que 3 personnes de ces familles à faible revenu, le taux de faible revenu mesuré au niveau individuel est de 8,3 % dans cette population. Par ailleurs, si nous classons les personnes comme le suggère le groupe de Canberra, le revenu médian estimé est de 65 000 $, donnant ainsi un seuil de faible revenu de 32 500 $. Dans ce scénario, 5 personnes de 3 familles auraient un faible revenu, ce qui équivaut à un taux de faible revenu de 13,9 % au niveau individuel.

De façon plus générale, si les familles ou les ménages à l'extrémité gauche de la répartition du revenu sont de taille importante et que les familles ou ménages à l'extrémité droite de la répartition du revenu sont petites, la médiane de la répartition basée sur le revenu pondéré par personne sera inférieure à la médiane de répartition basée sur le revenu pondéré de la famille ou du ménage. En revanche, si les familles ou ménages à l'extrémité droite de la répartition du revenu sont de taille importante, la médiane basée sur le revenu pondéré par personne sera supérieure à la médiane basée sur le revenu pondéré de la famille ou du ménage. À la figure 5, qui présente le dernier cas, la médiane pondérée du revenu par personne est égale à 33 311 $, tandis que la médiane pondérée du revenu familial équivaut à 31 363 $.

Figure 5 Répartitions cumulées des revenus avec différents systèmes de pondération

Notez que l'axe vertical dans la figure 5 indique la proportion des familles à faible revenu (seuil du revenu pondéré des familles) et la proportion des personnes à faible revenu basée sur le revenu de leur famille économique (seuil du revenu pondéré par personne). Ces deux indicateurs prennent en compte le revenu de la famille économique. Le taux de faible revenu de 18,8 % au niveau de la famille économique est supérieur au taux obtenu au niveau individuel. Le niveau inférieur de ce dernier est dû au fait que les familles à faible revenu sont plus petites que les familles n'ayant pas un faible revenu. En effet, l'exemple de la figure 5 suppose un taux de faible revenu de 16,8 %.

Lorsque nous comparons l'incidence de la pondération révisée sur les taux de faible revenu au fil des années, comme le montre la figure 6, on fait immédiatement deux constats. D'une part, les tendances générales de faible revenu au cours des trente dernières années sont presque identiques, quel que soit le système de pondération. D'autre part, les taux de faible revenu estimés avec les deux systèmes de pondération étaient similaires dans les années 1970 mais ils ont commencé à afficher un écart dans les années 1980; les taux de faible revenu obtenus avec le nouveau système de pondération dépassant progressivement les taux calculés avec le système de pondération existant. Au milieu des années 1980, ces écarts étaient généralement inférieurs à un point de pourcentage, mais, en 2007, ils sont passés à environ deux points de pourcentage.

Figure 6 Incidence du système de pondération du revenu par personne sur le taux de faible revenu

Étant donné que le résultat présenté dans la figure ci-dessus n'est attribuable qu'au facteur de pondération, une explication plausible est que les tailles relatives des familles à revenu faible et élevé ont évolué au fil des années. Il s'avère que c'est bien ce qui a eu lieu au cours des trente dernières années. La figure 7 montre qu'au milieu des années 1970, il n'y avait pas de lien bien défini entre le revenu et la taille de la famille. Un lien positif s'avérait peu crédible, car les familles du quartile supérieur étaient typiquement de la taille moyenne la plus petite. De même, un lien négatif était improbable, car, en moyenne, les familles du deuxième et du troisième quartile étaient plus petites que les familles des quartiles inférieurs. Cependant, à partir du milieu des années 1980, on a noté l'établissement d'un lien positif entre la taille de la famille et le revenu. Ainsi, d'après le simple modèle que nous avons décrit au début de cette section, lorsque la taille de la famille et le revenu sont corrélés positivement, la médiane basée sur le classement des personnes sera supérieure à celle qui est basée sur la famille, et on obtiendra un seuil de faible revenu standard plus élevé.

Figure 7 Tailles des familles économiques par quartile de revenu


Notes

  1. Il est important de garder à l'esprit que l'utilisation des trois seuils de faible revenu permet d'avoir une idée plus complète du faible revenu mais; ce dernier ne représentant, en effet, qu'un des aspects du bien être économique et de la pauvreté.
  2. Le revenu du marché est défini comme la somme des gains (provenant d'un travail salarié ou autonome), du revenu de placements, du revenu de retraite et d'autres revenus tels qu'une pension alimentaire, une indemnité de départ, une bourse d'études, des paiements forfaitaires de pension, des régimes de retraite à participation différée aux bénéfices reçus au moment du retrait du régime ainsi que des prestations supplémentaires de chômage. Le revenu avant impôt, également appelé revenu total, est la somme du revenu du marché et des transferts gouvernementaux, alors que le revenu après impôt représente le revenu total moins les impôts provincial et fédéral sur le revenu.
  3. Voir la section 2.3 pour plus de détails.
  4. Étant donné que ce document ne vise pas à présenter les plus récentes statistiques sur le faible revenu à l'aide de la MFR, le lecteur y notera un certain nombre d'années de référence.
  5. Le Canada et les États-Unis utilisent des concepts de famille économique similaires pour l'analyse du faible revenu; cependant, le terme consacré aux États-Unis est « famille de recensement ».
  6. Selon le groupe de Canberra (2001), les définitions de ménage utilisées dans les divers pays diffèrent uniquement dans le fait que, dans certains pays, elles incluent le critère définitionnel de « prendre ses repas ensemble ».
  7. Voir Nelson (1993), qui traite de l'histoire conceptuelle des échelles d'équivalence.
  8. Avec la méthodologie de la MPC, les seuils de faible revenu sont estimés pour la famille standard, c'est-à-dire composée de deux adultes et de deux enfants, dans les 48 régions. Les seuils pour les autres types de famille sont calculés en multipliant le seuil de la famille standard dans la région par les échelles d'équivalence de la MFR de ces familles.
  9. OCDE (2008).
  10. L'échelle de MFR se situe quelque part entre 0,3 (enfant) et 0,4 (adulte), ce qui reflète les proportions différentes d'adultes et d'enfants pour une taille de famille spécifique dans la population.
  11. Voir l'exemple dans Fleurbaey et Gaulier (2007).
  12. Wolfson et Evans (1989) soulignent le fait que le SFR est basé sur une analyse des ménages tirée de l'Enquête sur les dépenses des familles, tandis que les seuils sont appliqués aux familles économiques.
  13. Ce point est également souligné dans le contexte canadien par Skuterund, Frenette et Poon (2004).
  14. Il existe des études empiriques intéressantes sur la répartition intra-ménage de la consommation, cependant, ces travaux ne sont suffisamment avancés pour fournir une base solide pour des solutions de rechange à l'hypothèse d'une répartition égale.
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