Diplômés de collège et d'université touchant de faibles revenus au Canada – caractéristiques démographiques et professionnelles

Avertissement Consulter la version la plus récente.

Information archivée dans le Web

L’information dont il est indiqué qu’elle est archivée est fournie à des fins de référence, de recherche ou de tenue de documents. Elle n’est pas assujettie aux normes Web du gouvernement du Canada et elle n’a pas été modifiée ou mise à jour depuis son archivage. Pour obtenir cette information dans un autre format, veuillez communiquer avec nous.

Statistique Canada remercie la Fondation canadiennes des bourses d'études du millénaire et le Conseil ontarien de la qualité de l'enseignement supérieur pour leur soutien financier à l'étude présentée ici. Un rapport présentant les résultats pour la province de l'Ontario devrait être publié plus tard cette année.

Comparaison internationale
Caractéristiques des diplômés collégiaux et universitaires touchant un faible revenu d'emploi
Conclusion

Les comparaisons internationales révèlent que, comparativement aux autres principaux pays de l'OCDE, le Canada présente le pourcentage le plus élevé de travailleurs possédant une formation collégiale et universitaire ayant touché moins que la moitié du revenu d'emploi médian national en 20061. Les indicateurs internationaux ont révélé que 18 % des adultes ayant une formation universitaire et 23 % de ceux ayant une formation collégiale âgés de 25 à 64 ans au Canada avaient touché moins que la moitié du revenu d'emploi médian national en 2006. En d'autres termes, les gains annuels de ces travailleurs ont été inférieurs à 16 917 $ avant impôts et transferts2.

Vu l'importance accordée aux études postsecondaires au Canada, des constatations comme celles de l'OCDE pourraient susciter des préoccupations. Un tel classement laisse t il supposer, par exemple, que des facteurs structuraux au Canada pourraient engendrer un tel résultat? Le Canada produit il trop de diplômés collégiaux et universitaires pour que le marché du travail puisse les absorber? Ou encore, le Canada ne produit il pas la combinaison qui convient de diplômés postsecondaires? La conjoncture économique a par ailleurs changé depuis 2006. Il serait bon de savoir quelles incidences la conjoncture actuelle a sur les revenus des travailleurs titulaires d'un diplôme collégial ou universitaire et comment ceux ci se comparent avec leurs homologues des autres pays et les travailleurs possédant une scolarité inférieure au collège ou à l'université au Canada.

Pour répondre à ces questions, il est essentiel de savoir qui sont les travailleurs possédant une formation de niveau collégial et universitaire qui touchent un faible revenu. Le présent article examine les caractéristiques de ces travailleurs pour définir les attributs démographiques et professionnels qui pourraient expliquer leur situation de travailleurs à faible revenu.

Box 1:
Définition

La définition de l'OCDE sur laquelle est fondée cette comparaison englobe toutes les personnes âgées de 25 à 64 ans ayant touché des revenus d'emploi non nuls3 en 2006 (dernière année où l'on disposait de données au moment de l'analyse de l'OCDE). Pour le Canada, les données sur lesquelles est basé cet indicateur proviennent de l'Enquête sur la dynamique du travail et du revenu (EDTR) de Statistique Canada de 2006.

On a réparti l'ensemble des personnes ayant touché un revenu d'emploi en cinq catégories de revenus en 2006 aux fins de l'analyse :

  • travailleurs touchant la moitié du revenu médian ou moins (16 917 $ ou moins);
  • travailleurs touchant plus de la moitié du revenu médian mais au plus le revenu médian (16 918 $ à 33 834 $);
  • travailleurs touchant plus du revenu médian mais au plus 1,5 fois le revenu médian (33 835 $ à 50 751 $);
  • travailleurs touchant plus de 1,5 fois le revenu médian mais au plus le double du revenu médian (50 752 $ à 67 668 $); et
  • travailleurs touchant plus du double du revenu médian (plus de 67 669 $).

Comparaison internationale

Le tableau 1 confirme qu'en moyenne, faire des études postsecondaires rapporte au Canada. Le groupe le plus représenté au sein de la catégorie des revenus les plus élevés (plus du double du revenu médian) en 2006 est de loin celui des diplômés universitaires, 31,7 % de ceux-ci étant dans la catégorie des gains les plus élevés comparativement à 17,9 % parmi la catégorie des gains les plus faibles. À l'opposé, les travailleurs ayant une scolarité inférieure à des études secondaires étaient beaucoup plus susceptibles de se retrouver dans la catégorie des gains les plus faibles (39,1 %) en 2006 que dans le groupe des gains les plus élevés (5,6 %).

 

Tableau 1
Répartition en pourcentage de la population âgée de 25 à 64 ans selon le niveau de revenu et le niveau de scolarité (2006).
  Niveau de revenu
Moitié du revenu médian ou moins Plus de la moitié du revenu médian mais au plus le revenu médian Plus du revenu médian mais au plus 1,5 fois le revenu médian Plus de 1,5 fois le revenu médian mais au plus le double du revenu médian Plus du double du revenu médian Total
Niveau de scolarité inférieur au secondaire 39,1 31,0 16,8 7,6 5,6 100,0
Diplôme d'études secondaires et métiers 28,2 27,0 22,4 10,8 11,6 100,0
Formation collégiale 23,1 25,3 23,4 14,1 14,1 100,0
Formation universitaire 17,9 16,0 17,5 16,8 31,7 100,0
Total 25,6 24,3 20,8 12,8 16,5 100,0
Source: Statistique Canada, Enquête sur la dynamique du travail et du revenu de 2006.

Néanmoins, comparativement aux autres pays, le pourcentage de diplômés collégiaux et universitaires âgés de 25 à 64 ans ayant eu un revenu d'emploi non nul qui ont touché moins de la moitié du revenu d'emploi médian en 2006 a été le plus élevé au Canada tant parmi les diplômés collégiaux (23 %) qu'universitaires (18 %) en 2006 (graphique 1).

Graphique 1
Pourcentage de diplômés universitaires ou collégiaux âgés de 25 à 64 ans touchant un revenu égal ou inférieur à la moitié du revenu médian, pays de l'OCDE, 2006.

Graphique 1. Pourcentage de diplômés universitaires ou collégiaux âgés de 25 à 64 ans touchant un revenu égal ou inférieur à la moitié du revenu médian, pays de l'OCDE,  2006.

Source : Statistique Canada, Regards sur l'éducation, OCDE, 2008.

Caractéristiques des diplômés collégiaux et universitaires touchant un faible revenu d'emploi

La définition de l'OCDE sur laquelle est basé l'indicateur de faible revenu englobe tous les travailleurs ayant fait part de revenus non nuls d'un emploi en 2006. Le travail pourrait toutefois ne pas avoir constitué la principale activité de ces personnes au cours de l'année. L'horaire de travail a lui aussi joué un rôle déterminant. Seulement 11 % des diplômés collégiaux et universitaires ayant travaillé à temps plein toute l'année se sont situés dans la catégorie des revenus les plus faibles comparativement à 49 % des diplômés collégiaux et à 42 % des diplômés universitaires ayant travaillé à temps partiel.

Les deux principaux paramètres de prévision d'un revenu inférieur au revenu d'emploi national médian parmi l'ensemble des travailleurs ont été le fait que le travail n'ait pas constitué leur principale activité au cours de l'année et le statut de travailleur autonome.4 Une proportion de 43 % des travailleurs à faible revenu de l'ensemble de la population possédant une formation universitaire a fait part d'une activité autre que le travail comme principale activité de l'année même s'ils ont déclaré avoir touché certains revenus d'emploi pendant l'année. De plus, 24 % étaient des travailleurs autonomes et 5 % ont à la fois été des travailleurs autonomes et signalé une activité autre que le travail comme principale activité. Lorsqu'on considère seulement les diplômés universitaires ayant signalé avoir travaillé pour un employeur, seulement 5 % des diplômés universitaires se classaient dans la catégorie des revenus les plus faibles en 2006.

Parmi les diplômés collégiaux, le tiers des travailleurs à faible revenu ont fait part d'une activité autre que le travail comme principale activité de l'année : 27 % étaient des travailleurs autonomes et 4 % ont à la fois été des travailleurs autonomes et signalé une activité autre que le travail comme principale activité. Encore une fois, lorsque l'on considère seulement les personnes ayant signalé avoir travaillé pour un employeur, seulement 8 % des diplômés collégiaux se situaient dans la catégorie des revenus les plus faibles en 2006.

Le fait que le Canada se classe à un rang élevé comparativement aux autres pays de l'OCDE du point de vue de la proportion de diplômés de collège et d'université touchant moins de la moitié du revenu médian soulève par conséquent un certain nombre de questions. Ces personnes étaient elles plus susceptibles que les travailleurs des autres pays de signaler une activité autre que le travail comme principale activité de l'année? Une voie utile à emprunter en vue de futures recherches consisterait à réaliser une comparaison internationale des caractéristiques des travailleurs à faible revenu d'un niveau de scolarité supérieur pour déterminer la mesure dans laquelle les différences dans le degré d'engagement au sein du marché du travail contribuent à cette constatation.

L'analyse révèle, même après la prise en compte des caractéristiques d'emploi, que certaines caractéristiques étaient associées à une probabilité supérieure de se retrouver dans la catégorie des revenus les plus faibles. L'une de ces caractéristiques était le sexe, les femmes possédant une scolarité de niveau collégial et universitaire étant plus susceptibles que leurs homologues masculins de se retrouver dans la catégorie des revenus les plus faibles. L'âge a constitué un autre facteur, les travailleurs âgés (de 55 à 64 ans) étant plus susceptibles de se ranger parmi les faibles revenus. La province de résidence a, elle aussi, un effet : les travailleurs de Terre Neuve et Labrador, de l'Île du Prince Édouard et du Nouveau Brunswick sont plus susceptibles d'être parmi ceux ayant de faibles revenus que les travailleurs des autres provinces.

On a en plus découvert des différences liées au domaine d'études – les travailleurs ayant étudié dans les domaines des arts et de la communication ou des parcs, des loisirs et du conditionnement physique ont été plus susceptibles que les personnes des autres domaines d'études de se classer dans une catégorie de faibles revenus. À l'opposé, les travailleurs de certaines professions, comme ceux des domaines de la gestion, de l'administration des affaires, des professions scientifiques et techniques, de la santé et des sciences sociales, étaient moins susceptibles que ceux des autres professions de toucher de faibles revenus; la situation a été la même dans le cas des personnes travaillant au sein des industries primaires et de l'administration publique.

Finalement, le statut d'immigrant avait aussi un effet important, après la prise en compte d'autres facteurs. Il est à noter que l'effet était particulièrement fort après la prise en considération du niveau de scolarité, suggérant ainsi que les immigrants récents, âgés de 25 à 64 ans (au Canada depuis moins de dix ans), à niveau de scolarité égal à celui des travailleurs nés au Canada, étaient presque deux fois plus susceptibles de tomber dans la catégorie des plus faibles revenus. Les immigrants arrivés au Canada depuis 10 à 29 ans risquaient eux aussi plus que les travailleurs nés au Canada de se trouver dans une situation de faibles revenus, cet effet étant particulièrement important après prise en compte de leur activité principale. Cela signifiait qu'une fois que l'on prenait en considération qu'une personne rapportait ou non que son activité principale pendant l'année était le travail, les travailleurs immigrants étaient plus susceptibles de tomber en situation de faibles revenus.

Conclusion

La principale conclusion à laquelle en arrive la présente analyse est qu'en fait les situations de faible revenu dépendent en grande partie de la nature de la participation de l'intéressé au marché du travail. Même s'il est vrai que les diplômés sont sensiblement moins susceptibles de se retrouver dans la catégorie des faibles revenus que les diplômés collégiaux, les deux autres facteurs à considérer étaient le travail sur une base moindre qu'à temps plein et à longueur d'année, et le travail autonome.

La situation du revenu des travailleurs autonomes représente un cas particulier qu'il faudrait étudier plus à fond. Certaines personnes pourraient être des travailleurs autonomes touchant un faible revenu d'emploi si, par exemple, elles continuent à travailler tout en recevant des prestations de retraite. Il faudra effectuer plus de recherches pour déterminer si ces personnes travaillent parce qu'elles veulent travailler ou si elles ont dû trouver un emploi rémunéré pour combler un revenu de retraite insuffisant.

Il reste une autre question à savoir : les travailleurs possédant une scolarité élevée demeurent-ils dans la catégorie des faibles revenus pendant une certaine période de temps? Le faible engagement au sein du marché du travail constitue t il une situation temporaire ou se prolonge t il pendant une longue période? Quelles sont les caractéristiques des personnes qui demeurent parmi le groupe des faibles revenus comparativement à celles qui passent à des échelons de revenus plus élevés? Qu'en est il des diplômés récents – l'obtention d'un diplôme collégial ou universitaire entraîne t elle des gains salariaux, par exemple les étudiants émergent ils de la catégorie des faibles revenus au cours des années suivant l'obtention du diplôme? On peut seulement répondre aux questions de ce genre au moyen d'une analyse longitudinale, que permettent les données de l'Enquête sur la dynamique du travail et du revenu. Des recherches plus poussées de cette nature seraient utiles pour obtenir des réponses à ces questions et mieux comprendre les situations de revenus des diplômés collégiaux et universitaires au Canada.

L'analyse décrite dans cet article s'est attardée sur les travailleurs possédant une scolarité collégiale et universitaire qui touchaient un faible revenu au Canada; elle visait la compréhension des caractéristiques clés qui pourraient expliquer leur situation de travailleurs à faible revenu. Il reste toutefois des questions à éclaircir en ce qui concerne le classement du Canada par rapport à cet indicateur à l'échelle internationale. Quelle est la situation dans les autres pays? Les travailleurs de niveau collégial et universitaire sont ils généralement plus engagés au sein du marché du travail que leurs homologues canadiens ou existe t il moins de travailleurs autonomes parmi ceux ci? On peut en outre se poser des questions au sujet des méthodes et de la définition utilisées par les différents pays dans la fourniture des chiffres aux organismes internationaux. Il pourrait être utile d'axer de futurs travaux sur des comparaisons internationales des méthodes d'établissement des rapports, définissant la mesure dans laquelle les différences dans le classement international correspondent à des différences réelles du mode de fonctionnement des marchés du travail dans les différents pays par opposition à des différences dans les méthodes de préparation des rapports.

Notes

  1. Organisation de coopération et de développement économique, Regards sur l'éducation, Paris, OCDE, 2008.

  2. Il est à noter que ces conclusions visent 2006, soit une période se situant bien avant le repli économique actuel. Il est par conséquent probable que la situation ait changé au Canada tout comme dans les autres pays.

  3. Cela englobe les travailleurs ayant fait part de gains négatifs.

  4. La répartition des gains des travailleurs autonomes diffère de celles des salariés. Comme les données sur les revenus tirées de l'Enquête sur la dynamique du travail et du revenu proviennent de fichiers de données fiscales, ces chiffres sont très probablement liés à la façon dont les travailleurs autonomes font part de leurs revenus. Ils déclarent fréquemment des gains de travail autonome faibles ou même négatifs parce qu'ils peuvent déduire des frais pour l'exploitation de leurs entreprises.