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Méthodes
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Discussion

Au cours des 25 dernières années, la prévalence de l'obésité au Canada a augmenté de façon  constante1. Cette hausse fait partie d'un phénomène mondial que l'Organisation mondiale de la Santé a décrit comme épidémique2. L'obésité est reconnue comme un facteur de risque de plusieurs problèmes de santé graves, comme le diabète de type 2 et les maladies cardio-vasculaires2-6.

Même si les causes de l'obésité sont complexes, le surpoids est déterminé en définitive par la différence entre l'énergie provenant des aliments et des boissons consommés et la dépense d'énergie liée au métabolisme de base et aux activités physiques quotidiennes d'une personne. Toutefois, d'autres facteurs — environnementaux et génétiques, par exemple — peuvent influencer les besoins quotidiens en énergie et les dépenses quotidiennes d'énergie7.

Au Canada, la prévalence de l'embonpoint et de l'obésité est beaucoup plus grande chez les Autochtones (des données sont disponibles uniquement pour ceux vivant à l'extérieur des réserves) que dans le reste de la population8,9. Toutefois, les taux élevés d'obésité chez les Autochtones ne sont pas propres au Canada : les mêmes tendances sont observées aux États-Unis10, en Australie11, en Nouvelle-Zélande12 et dans les îles du Pacifique13.

À partir des données de l'Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) de 2004 : Nutrition, le présent article analyse les différences au chapitre de l'embonpoint et de l'obésité entre les Autochtones vivant à l'extérieur des réserves et la population non autochtone âgée de 19 à 50 ans. Les différences entre les habitudes alimentaires des deux groupes sont aussi examinées.

Méthodes

Source des données

Les données sont tirées de l'Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) de 2004 : Nutrition, cycle 2.2. Comme son nom l'indique, l'ESCC de 2004 a servi à recueillir des données concernant les habitudes alimentaires des Canadiens. Contrairement aux cycles précédents de l'ESCC, les taux d'embonpoint et d'obésité calculés à partir des données de ce cycle sont fondés sur des mesures directes, plutôt que sur des données autodéclarées, qui ont tendance à comporter des sous-estimations8,14.

L'ESCC exclut les membres de la force régulière des Forces canadiennes et les habitants des territoires, des réserves indiennes et de certaines régions éloignées, les personnes vivant en établissement, ainsi que tous les résidents (militaires et civils) des bases des Forces canadiennes. Le plan d'enquête, l'échantillon et les méthodes d'interview de l'ESCC sont présentés plus en détail dans un rapport publié antérieurement15.

Étant donné que l'emplacement géographique peut avoir des répercussions sur les choix en matière de nutrition, il est important que les Autochtones et les non-Autochtones soient bien représentés dans chaque province. On avait besoin au minimum de 25 adultes âgés de 19 à 50 ans par province et par sexe pour assurer une représentation minimale. Toutefois, même si un échantillon supplémentaire d'Autochtones a été sélectionné pour l'ESCC de 2004, les Autochtones du Québec et des provinces de l'Atlantique sont nettement sous-représentés dans l'échantillon national de participants à l'enquête. L'échantillon des personnes âgées de 19 à 50 ans pour le Québec et les provinces de l'Atlantique comprenait seulement 76 Autochtones (tableau 1). Par conséquent, la présente analyse se limite à l'Ontario, au Manitoba, à la Saskatchewan, à l'Alberta et à la Colombie-Britannique.

Techniques d'analyse

Des statistiques descriptives ont été utilisées pour estimer les pourcentages de personnes qui avaient de l'embonpoint/étaient obèses ou étaient obèses, selon l'identité autochtone, le sexe, le groupe d'âge, le niveau d'activité physique durant les loisirs, le niveau le plus élevé de scolarité dans le ménage et le revenu du ménage. On a eu recours à la régression logistique pour déterminer les associations entre l'identité autochtone, ces caractéristiques sociodémographiques et l'embonpoint/l'obésité et l'obésité. Étant donné le faible taux de réponse (57,5 %) à la composante de l'ESCC sur la taille et le poids mesurés, un poids d'enquête corrigé tenant compte de la non-réponse a servi aux analyses des mesures anthropométriques. Les analyses présentées sur l'embonpoint/l'obésité et sur l'obésité sont fondées sur 3 544 participants âgés de 19 à 50 ans (Autochtones et non-Autochtones) pour lesquels des mesures de la taille et du poids ont été recueillies.

On a demandé aux participants de dresser une liste de tous les aliments et de toutes les boissons qu'ils avaient consommés le jour d'avant (rappel alimentaire de 24 heures). Une méthode en cinq étapes, fondée sur l'Automated Multiple-Pass Method (AMPM)16,17, laquelle a été élaborée aux États-Unis, avait pour but d'aider les participants à se remémorer avec le plus de précision possible ce qu'ils avaient consommé. Les cinq étapes sont les suivantes :

  • une énumération rapide;
  • des questions sur des catégories particulières d'aliments et certains aliments fréquemment oubliés;
  • des questions concernant les heures et les occasions de consommation;
  • des questions visant à recueillir une description détaillée des aliments et des boissons — de même que des quantités — consommés;
  • une récapitulation finale.

Au total, 35 107 personnes ont rempli le questionnaire initial de rappel alimentaire de 24 heures. Le taux de réponse a été de 76,5 %. La présente analyse est fondée sur 6 224 participants à l'enquête âgés de 19 à 50 ans. Ont été exclus cinq cas pour lesquels l'apport alimentaire était invalide et quatre cas pour lesquels cet apport était nul. Les femmes enceintes (108) et celles qui allaitaient (77) ont également été exclues.

La répartition en éléments nutritifs des aliments et des boissons que les participants ont déclaré avoir consommés a été déterminée selon le Fichier canadien sur les éléments nutritifs (supplément 2001b) de Santé Canada18. Dans le cadre de la présente analyse, on a examiné la quantité et le pourcentage de calories consommées quotidiennement (le cas échéant), pour chacun des nutriments suivants : alcool*, vitamine B12, vitamine B6, vitamine C, caféine, calcium, glucides*, cholestérol, folate, vitamine D, nombre total de calories, acide gras linoléique*, acides gras monoinsaturés*, acide gras linolénique*, acides gras polyinsaturés*, acides gras saturés*, lipides*, fibres alimentaires, acide folique, folacine, folate d'origine naturelle, fer, magnésium, eau, niacine, phosphore, potassium, protéine*, vitamine A, riboflavine, sodium, thiamine, zinc. L'astérisque (*) indique que le nutriment a été analysé tant du point de vue de la quantité que du pourcentage de calories; par exemple, les lipides ont été analysées en grammes et en pourcentage de l'apport calorique quotidien.

Les aliments (aliments de base, recettes ou ingrédients) ont été classés dans un des quatre groupes d'aliments, selon la publication de 1992, Le guide alimentaire canadien pour manger sainement à l'intention des quatre ans et plus19 — légumes et fruits, produits laitiers, produits céréaliers et viandes et substituts —, ou dans la catégorie des « autres aliments ». Aucun aliment n'a été compté deux fois; par exemple, si une recette était classée dans la catégorie des « autres aliments », on utilisait la recette plutôt que les ingrédients, et inversement.

Les quantités exprimées en grammes ont été converties en portions pour les légumes et fruits, les produits laitiers et les produits céréaliers, à l'aide du Fichier canadien sur les aliments nutritifs18. Les quantités de viandes et substituts ont été déterminées selon le poids de la viande cuite, une portion correspondant à 50 à 100 grammes de viande. Les portions définies sans intervalle (le beurre d'arachide, par exemple) ont été multipliées par un facteur équivalent à 50 grammes de viande cuite.

Des statistiques descriptives fondées sur le rappel alimentaire de 24 heures ont servi à estimer l'apport nutritionnel moyen. Les poids originaux de l'enquête ont servi à maximiser la taille de l'échantillon.

La méthode du bootstrap20,21, qui tient compte du plan d'enquête complexe, a servi à estimer les erreurs-types, les coefficients de variation et les intervalles de confiance. Le niveau de signification a été fixé à p < 0,05.

Définitions

L'appartenance ethnique a été déterminée à partir de la question suivante : « Les gens qui habitent au Canada ont des origines culturelles et raciales très variées. Êtes-vous :

  1. Blanc(he)? »
  2. Chinois(e)? »
  3. Sud-Asiatique (p. ex., Indien[ne] de l'Inde, Pakistanais[e], Sri-Lankais[e])? »
  4. Noir(e)? »
  5. Philippin(e)? »
  6. Latino-Américain(e)? »
  7. Asiatique du Sud-Est (p. ex., Cambodgien[ne], Indonésien[ne], Laotien[ne], Vietnamien[ne])? »
  8. Arabe? »
  9. Asiatique occidental(e) (p. ex., Afghan[e], Iranien[ne])? »
  10. Japonais(e)? »
  11. Coréen(ne)? »
  12. Autochtone (Indien[ne] de l'Amérique du Nord, Métis[se] ou Inuit[e])? »
  13. Autre – Précisez. »

Les participants à l'enquête pouvaient indiquer plus d'une catégorie. La catégorie 12 a servi à identifier les Autochtones vivant à l'extérieur des réserves, y compris ceux qui s'identifiaient aussi à un autre groupe. Les autres catégories représentent ensemble la population non autochtone.

Les définitions d'embonpoint et d'obésité sont fondées sur l'indice de masse corporelle (IMC), qui est calculé en divisant le poids exprimé en kilogrammes par le carré de la taille exprimé en mètres. Aux fins de la présente analyse, les catégories d'IMC pour les adultes ont été établies selon les lignes directrices de Santé Canada22. Les participants à l'enquête dont l'IMC était égal ou supérieur à 30 kg/m2 étaient considérés comme obèses, et ceux dont l'IMC était supérieur ou égal à 25 kg/m2 étaient considérés comme ayant de l'embonpoint (l'embonpoint comprend l'obésité).

Le niveau d'activité physique pendant les loisirs est fondé sur la dépense énergétique () totale pendant les loisirs. La a été calculée d'après la fréquence et la durée déclarées de toutes les activités physiques pratiquées pendant les loisirs par un participant à l'enquête au cours des trois mois ayant précédé l'interview de l'ESCC de 2004, et d'après la demande d'énergie métabolique (valeur de l'équivalent métabolique ou MET) de chaque activité, laquelle avait été établie indépendamment23 :

    DÉ = ∑(Ni*Di*METi / 365 jours) où
    Ni = nombre d'occurrences de l'activité i pendant une année,
    Di = durée moyenne en heures de l'activité i, et
    METi = une valeur constante pour le coût en énergie métabolique de l'activité i.

Aux fins de la présente analyse, les participants dont la était inférieure à 1,5 kilocalorie par kilogramme par jour (KKJ) étaient considérés comme inactifs, et ceux dont la était plus élevée étaient considérés comme actifs.

Le niveau le plus élevé de scolarité dans le ménage a été défini selon qu'au moins un membre du ménage avait obtenu un diplôme d'études secondaires.

Le revenu du ménage a été défini en fonction du nombre de personnes vivant dans le ménage et du revenu total provenant de toutes les sources au cours des 12 mois ayant précédé l'interview. Pour la présente analyse, deux groupes ont été définis :

Groupe de revenu du ménage Nombre de personnes dans le ménage Revenu total du ménage
Le plus faible 1 ou 2 Moins de 10 000 $
3 ou 4 Moins de 15 000 $
5 et plus Moins de 20 000 $
 
Moyen ou élevé 1 ou 2 10 000 $ et plus
3 ou 4 15 000 $ et plus

5 et plus

20 000 $ et plus

Les boissons gazeuses ordinaires (par opposition à diète) et les sandwichs ont été définis selon les groupes du Bureau des sciences de la nutrition (BSN) établis à Santé Canada et fondés sur les systèmes britanniques et américains de groupes alimentaires. Les boissons gazeuses ordinaires se rapportent à la catégorie 46A, et les sandwichs, aux catégories 219, A à F.

Pour chaque aliment consommé, les participants à l'enquête devaient préciser l'occasion : petit déjeuner, déjeuner, dîner ou consommation entre les repas. La consommation entre les repas couvre tous les aliments non déclarés au petit déjeuner (ou brunch), au déjeuner ou au dîner. Il s'agit notamment des collations, des boissons consommées à l'extérieur des repas, de la consommation continue (aliments ou boissons consommés tout au long de la journée) et des autres occasions non précisées.

Résultats

Embonpoint et obésité

En Ontario et dans les provinces de l'Ouest, la prévalence de l'embonpoint/de l'obésité et de l'obésité chez les 19 à 50 ans était beaucoup plus élevée parmi les Autochtones vivant à l'extérieur des réserves que parmi les non-Autochtones. Dans une très large mesure, cette différence globale rend compte des taux plus élevés chez les femmes autochtones; les différences entre les hommes autochtones et non autochtones n'étaient pas significatives (graphique 1).

Dans une certaine mesure, ces différences peuvent rendre compte des caractéristiques socio-démographiques des Autochtones et des non-Autochtones, dont on a démontré précédemment qu'elles comportaient un lien avec le surpoids8 : activité physique pendant les loisirs, scolarité et revenu.

Une majorité, soit 56 %, d'Autochtones et de non-Autochtones âgés de 19 à 50 ans étaient « inactifs » pendant leurs loisirs (données non présentées). En outre, peu importe si elles étaient autochtones ou non autochtones, les personnes inactives avaient des taux élevés d'embonpoint/d'obésité et d'obésité. Toutefois, l'association semblait plus forte dans le cas des Autochtones. Parmi les personnes inactives, 50 % des Autochtones étaient obèses, comparativement à 23 % des non-Autochtones (graphique 2).

L'association entre la scolarité et le surpoids différait pour les Autochtones et les non-Autochtones. Chez les non-Autochtones, le surpoids était plus répandu dans les ménages dont aucun membre n'avait de diplôme d'études secondaires (graphique 3). Par contre, les Autochtones dans de tels ménages étaient moins susceptibles que ceux vivant dans des ménages ayant un niveau plus élevé de scolarité d'avoir de l'embonpoint/d'être obèses. En fait, parmi les résidents de ménages ayant un plus faible niveau de scolarité, les Autochtones étaient moins susceptibles que les non-Autochtones d'avoir de l'embonpoint/d'être obèses.

Le fait de vivre dans un ménage à faible revenu était lié à un taux plus élevé d'obésité chez les Autochtones, mais le revenu du ménage ne comporte pas de lien avec l'obésité chez les non-Autochtones (graphique 4).

Des modèles multivariés distincts pour les Autochtones et les non-Autochtones confirment certains de ces résultats univariés (tableau 2). Même lorsque les autres variables sont prises en compte, les risques d'obésité chez les personnes inactives pendant leurs loisirs, qu'il s'agisse d'Autochtones ou de non-Autochtones, étaient significativement plus élevés que pour les personnes actives. L'association entre le niveau de scolarité dans le ménage et le surpoids persistait aussi : chez les personnes autochtones, les risques d'embonpoint/d'obésité étaient significativement plus faibles pour les personnes appartenant à des ménages ayant un faible niveau de scolarité, tandis que les non-Autochtones appartenant à de tels ménages avaient des risques significativement plus élevés d'obésité. Par contre, l'association entre le surpoids et le faible revenu du ménage n'était plus significative pour les Autochtones.

En dépit des associations entre ces facteurs et le surpoids, lorsque leurs effets sont contrôlés, l'identité autochtone ressort comme comportant un lien avec l'embonpoint/l'obésité et avec l'obésité chez les personnes âgées de 19 à 50 ans en Ontario et dans les provinces de l'Ouest (tableau 3). En fait, les risques d'obésité étaient plus de deux fois et demie plus élevés pour les Autochtones.

Apport calorique

Les différences entre l'apport énergétique (ou calorique) quotidien moyen des Autochtones et des non-Autochtones âgés de 19 à 50 ans étaient relativement minimes (131 calories de plus pour les hommes autochtones; 103 calories de plus pour les femmes autochtones) et n'étaient pas statistiquement significatives (tableau A en annexe). Toutefois, ces résultats globaux cachent un écart important chez les femmes âgées de 19 à 30 ans. Dans cette fourchette d'âge, l'apport énergétique quotidien moyen des femmes autochtones dépassait de 359 calories celui des femmes non autochtones (tableau B en annexe). Toutefois, ces femmes autochtones ne dépensaient pas plus d'énergie et n'avaient pas de besoins caloriques plus grands, et elles n'étaient pas plus susceptibles d'être actives pendant leurs loisirs (données présentées). L'âge moyen de ces deux groupes était le même (24 ans), de même que la taille moyenne (1,64 mètre ou 5 pieds 4,5 pouces), et la différence dans leur poids moyen (70,3 kilos ou 154,7 livres pour les femmes autochtones, comparativement à 66,7 kilos ou 146,7 livres pour les femmes non autochtones) ne représentait que 37 des 359 calories excédentaires24 (données non présentées). Par conséquent, les taux plus élevés d'embonpoint/d'obésité et d'obésité chez les femmes autochtones étaient en partie associés à un apport calorique plus grand.

Groupes alimentaires

Au moment de l'ESCC de 2004, Le guide alimentaire canadien pour manger sainement à l'intention des quatre ans et plus19, publié en 1992, était en vigueur. Le Guide fait état de quatre groupes d'aliments : légumes et fruits, produits laitiers, produits céréaliers et viandes et substituts. Les aliments n'appartenant pas à l'un de ces groupes (par exemple, les bonbons, les huiles, les boissons gazeuses, les condiments) appartiennent à la catégorie « autres aliments ». Le Guide recommande un certain nombre de portions dans chacun de ces quatre groupes, et indique que la consommation des « autres aliments » doit être limitée.

Les hommes autochtones consommaient significativement moins de produits laitiers que les hommes non autochtones — environ la moitié d'une portion de moins par jour (tableau 4). Chez les femmes, les Autochtones consommaient une portion de moins par jour de légumes et fruits et de produits céréaliers que les non-Autochtones.

L'effet produit par ces différences est évident dans la proportion quotidienne de calories provenant des divers groupes d'aliments et des « autres aliments ». Chez les hommes, la différence dans le pourcentage de calories tiré des produits laitiers était statistiquement significative (graphique 5). Chez les femmes, les Autochtones tiraient une part plus faible de leurs calories des produits céréaliers et des produits laitiers, mais une part plus grande des « autres aliments ». En fait, parmi les femmes âgées de 19 à 30 ans, les « autres aliments » fournissaient plus de 35 % de l'apport calorique quotidien moyen chez les femmes autochtones, comparativement à 24 % chez les femmes non autochtones (données non présentées). Cette différence explique à elle seule 90 % de l'apport calorique quotidien plus élevé chez les femmes autochtones âgées de 19 à 30 ans.

Boissons gazeuses et sandwichs

Une analyse précédente des données de l'ESCC de 2004 a démontré que les boissons gazeuses ordinaires (par opposition à diète) constituent la principale source de calories provenant des « autres aliments » chez la population canadienne en général25. Chez les 19 à 50 ans, la consommation de boissons gazeuses par les Autochtones dépassait de façon significative celle des non-Autochtones. Par exemple, les femmes autochtones âgées de 19 à 30 ans consommaient en moyenne 450 grammes de boissons gazeuses ordinaires par jour, soit environ trois fois plus que les femmes non autochtones (139 grammes) (tableau 5).

De façon générale, l'apport moyen supérieur reflète une proportion plus grande d'Autochtones ayant déclaré avoir consommé des boissons gazeuses le jour qui a précédé l'interview. Lorsqu'on comparait les apports quotidiens des « consommateurs » de ces boissons, la différence entre les Autochtones et les non-Autochtones n'était pas statistiquement significative. Seuls faisaient exception les hommes âgés de 19 à 30 ans : à ces âges, les hommes autochtones et non autochtones étaient aussi susceptibles de consommer des boissons gazeuses, mais chez ceux qui en consommaient, la consommation était nettement supérieure chez les hommes autochtones (961 grammes comparativement à 632 grammes).

La même analyse sur les habitudes alimentaires de la population en général25 a aussi permis de déterminer que la catégorie des « sandwichs » (qui comprend non seulement les sandwichs proprement dits, mais aussi la pizza, les sous-marins, les hamburgers et les hot-dogs) constituait une source plus importante de lipides dans le régime alimentaire des Canadiens que toute autre catégorie d'aliments. Ce type d'aliments était aussi populaire auprès des Autochtones âgés de 19 à 50 ans. Toutefois, les différences en matière de consommation entre les Autochtones et les non-Autochtones étaient significatives uniquement pour les femmes âgées de 19 à 30 ans (tableau 6). Les femmes autochtones se situant à l'intérieur de cette fourchette d'âge étaient plus susceptibles d'avoir consommé des « sandwichs » le jour avant l'interview de l'ESCC (68 % comparativement à 48 %) et d'avoir tiré une part plus grande de leurs calories de ces aliments (19 % comparativement à 13 %). Toutefois, si l'on tient compte uniquement des consommateurs de ces aliments, la part de calories qu'ils en tiraient était la même.

Collations

Un examen plus étroit des habitudes alimentaires des femmes montre en outre des différences significatives quant à la consommation d'aliments entre les repas. Les femmes autochtones âgées de 19 à 30 ans tiraient 36 % de leur apport calorique quotidien des aliments consommés entre les repas, comparativement à 28 % pour les femmes non autochtones (données non présentées). La tendance était similaire chez les 31 à 50 ans, les femmes autochtones ayant tiré 28 % de cet apport des collations, comparativement à 24 % pour les femmes non autochtones. Aucune différence significative quant à l'apport calorique entre les repas n'était évidente chez les hommes (données non présentées).

Les femmes autochtones et non autochtones âgées de 19 à 30 ans différaient aussi quant à leurs choix de collations. Les « autres aliments » représentaient 63 % des calories consommées entre les repas par les femmes autochtones se situant à l'intérieur de cette fourchette d'âge, comparativement à 43 % pour leurs homologues non autochtones.

Macronutriments et nutriments

Un régime alimentaire équilibré nécessite un apport approprié, mais pas excessif, de « macronutriments » (lipides, glucides et protéines) et de « nutriments » (vitamines et minéraux)24.

Dans l'ensemble, par rapport aux hommes non autochtones, les hommes autochtones tiraient un pourcentage plus faible de leurs calories des protéines et avaient un apport de calcium et de vitamine A moins important (tableau A). Toutefois, les différences significatives dans la part de calories tirées des protéines et dans l'apport de calcium entre ces deux groupes rendent compte des choix alimentaires des hommes âgés de 19 à 30 ans (tableau B). En outre, les hommes autochtones âgés de 19 à 30 ans avaient une alimentation plus faible en riboflavine que les hommes non autochtones. Par contre, la répartition des aliments en macronutriments et en nutriments chez les hommes autochtones et non autochtones âgés de 31 à 50 ans ne différait pas de façon significative (tableau C).

Comme il est indiqué précédemment, chez les femmes autochtones âgées de 19 à 30 ans, les calories excédentaires provenaient principalement des « autres aliments ». Ces aliments ont tendance à avoir une forte teneur en lipides, en sucre et en sel. En fait, il y avait des différences significatives dans les apports de lipides et de sodium entre les femmes autochtones et les femmes non autochtones dans cette tranche d'âge (tableau B). Par ailleurs, la consommation de glucides et la part de calories tirée de ce macronutriment étaient plus grandes chez les femmes autochtones. Les femmes autochtones âgées de 19 à 30 ans tiraient moins de leurs calories des protéines, mais avaient une alimentation plus riche en lipides que les femmes non autochtones.

Les femmes autochtones âgées de 31 à 50 ans avaient une alimentation plus pauvre en fibres, en magnésium, en vitamine A, en acide folique, en folate d'origine naturelle et en équivalents folates alimentaires que les femmes non autochtones (tableau C).

Discussion

Conclusion

La présente analyse des données de l'Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes de 2004 montre que les Autochtones vivant à l'extérieur des réserves et âgés de 19 à 50 ans en Ontario et dans les provinces de l'Ouest avaient des taux significativement plus élevés d'embonpoint/d'obésité et d'obésité que les non-Autochtones. Un écart comparable entre les Autochtones et les non-Autochtones est ressorti d'une étude antérieure à partir des données de l'ESCC de 2004 portant sur l'ensemble de la population adulte âgée de 18 ans et plus8. Par ailleurs, des analyses de données autodéclarées dans le cadre de l'ESCC de 2001 et de 2003 ont montré des taux plus élevés d'embonpoint et d'obésité chez les Autochtones que chez tout autre groupe ethnique9.

Toutefois, dans la présente étude, les rapports entre les facteurs sociodémographiques et l'obésité chez les Autochtones ne sont pas nécessairement les mêmes que ceux déclarés pour l'ensemble de la population dans les analyses précédentes. Les moments de loisir inactifs étaient liés à un surpoids pour l'ensemble de la population adulte8 et aussi pour les Autochtones. Toutefois, même si les proportions de personnes déclarant être inactives étaient les mêmes, les conséquences semblaient plus lourdes pour les Autochtones.

Un faible niveau de scolarité a été lié à l'obésité chez les adultes dans leur ensemble8, mais pour les Autochtones, le surpoids avait tendance à être plus répandu chez ceux appartenant à un ménage où le niveau de scolarité était relativement élevé. Par ailleurs, pour l'ensemble de la population adulte, le faible revenu du ménage a été lié à des taux plus faibles d'embonpoint et d'obésité8, mais la tendance était inverse pour les Autochtones — ceux appartenant à des ménages à revenu plus faible étant plus susceptibles d'être obèses. Néanmoins, comme il a été déterminé dans le cadre de l'étude antérieure fondée sur des données autodéclarées9, lorsque le sexe, l'activité physique, la scolarité et le revenu du ménage étaient pris en compte, l'identité autochtone continuait de comporter un lien significatif avec l'embonpoint/l'obésité et l'obésité.

Dans la présente étude, les différences globales entre les Autochtones et les non-Autochtones au chapitre de l'embonpoint/de l'obésité et de l'obésité sont attribuables dans une large mesure aux femmes autochtones, et plus particulièrement celles âgées de 19 à 30 ans. En dépit de besoins énergétiques identiques, elles consommaient davantage de calories que les femmes non autochtones, et principalement des aliments n'appartenant pas à l'un des quatre groupes du Guide alimentaire19. Une part importante de la consommation de ces « autres aliments » comme il a été indiqué dans un rapport antérieur25, prenait la forme de collations entre les repas. Les « autres aliments » expliquent en outre les différences dans les apports de glucides, de lipides et de sodium entre les femmes autochtones et non autochtones se situant à l'intérieur de cette fourchette d'âge.

Les liens entre l'obésité chez les femmes autochtones âgées de 19 à 30 ans et leur consommation élevée de gras ne sont pas surprenants. Toutefois, plusieurs autres habitudes alimentaires chez les Autochtones peuvent être liées à l'obésité. La consommation plus élevée de protéines a été associée à des taux plus faibles d'obésité abdominale26, mais les hommes autochtones consommaient moins de protéines que les hommes non autochtones. La consommation élevée de fibres est liée elle aussi à des niveaux plus faibles d'obésité26, et les femmes autochtones en consommaient significativement moins que les femmes non autochtones. En outre, même si elle n'est pas liée directement au surpoids, la surconsommation de sodium, qui est répandue chez les femmes autochtones âgées de 19 à 30 ans, a été liée à un risque accru d'hypertension27.

Néanmoins, on a noté de nombreuses similitudes entre les caractéristiques en matière de santé des Autochtones et des non-Autochtones de l'Ontario et des provinces de l'Ouest. Comme c'était le cas pour les Canadiens en général25, de nombreux Autochtones ne suivaient pas les recommandations du Guide alimentaire. Par exemple, un pourcentage important d'entre eux ne consommaient pas le nombre recommandé de portions de légumes et fruits, de produits céréaliers et de produits laitiers.

Une étude plus poussée pourrait être nécessaire pour déterminer si les recommandations pour l'ensemble de la population sont appropriées pour les Autochtones vivant à l'extérieur des réserves. D'autres facteurs, environnementaux ou génétiques, par exemple, pourraient influencer les taux d'embonpoint et d'obésité chez les Autochtones.

Limites

Pour diverses raisons, la taille et le poids de nombreux participants à l'ESCC de 2004 n'ont pu être mesurés directement. Même si cette non-réponse a été prise en compte, il se pourrait que les estimations soient biaisées si les caractéristiques des participants qui n'ont pas été mesurées différaient systématiquement de celles des participants pour lesquels des mesures directes ont été obtenues.

Le fait de dépendre de l'indice de masse corporelle (IMC) pour déterminer l'embonpoint et l'obésité pose un problème. L'IMC est une bonne mesure au niveau de la population, mais pas nécessairement au niveau individuel. Elle pourrait entraîner un mauvais classement des jeunes adultes qui sont encore en croissance, des personnes qui sont très minces, très musclées, très lourdes ou très petites, et de certains groupes ethniques ou raciaux9. L'IMC ne permet pas d'évaluer la répartition du tissu adipeux, et plus particulièrement l'accumulation abdominale de tissus adipeux, qui est liée à des risques accrus pour la santé22. En outre, étant donné la petite taille de l'échantillon, les personnes qui ont été classées comme ayant de l'embonpoint (IMC de 25,0 à 29,9), mais pas comme étant obèses, n'ont pas pu faire l'objet d'un examen distinct dans le cadre de la présente analyse.

Les activités pendant les loisirs des participants à l'enquête avaient trait uniquement aux trois mois ayant précédé l'interview de l'ESCC, et il est possible que ces résultats aient fait l'objet d'erreurs de remémoration. En outre, les activités pendant les loisirs ne rendent pas compte de l'activité physique totale d'une personne; l'activité au travail, à l'école ou pendant le transport (par exemple, la bicyclette) n'a pas été prise en compte dans la présente analyse.

Les données sur la nutrition sont autodéclarées et il est possible que les participants ne se soient pas rappelé exactement ce qu'ils avaient mangé ou les quantités consommées. Afin de réduire le plus possible les erreurs de mémoire, on a eu recours dans le cadre de l'ESCC de 2004 à une méthode à passes multiples en cinq étapes16,17. Dans des conditions contrôlées, cette méthode permet d'évaluer efficacement l'apport énergétique moyen28,29. Toutefois, dans d'autres conditions, certaines études ont révélé une sous-déclaration30-32, et d'autres, une surdéclaration33-35.

En dépit des efforts visant à assurer une représentation équitable des jours de la semaine pendant la collecte des données, certains jours sont peut-être sous-représentés. Cela pourrait avoir des répercussions sur les résultats pour l'apport alimentaire moyen.

Les résultats pour les Autochtones montrent une prévalence élevée d'embonpoint/d'obésité et d'obésité. Toutefois, les données se rapportent uniquement à la population de l'Ontario et des provinces de l'Ouest vivant à l'extérieur des réserves.

Par ailleurs, la petite taille de l'échantillon a empêché des analyses distinctes de groupes d'Autochtones particuliers (Indiens de l'Amérique du Nord, Métis et Inuits).

Étant donné que l'ESCC est une enquête transversale, aucun rapport de cause à effet entre l'obésité et le comportement lié à la santé ou d'autres facteurs n'a pu être déduit.

Par ailleurs, le terme « origines culturelles et raciales » du questionnaire de l'ESCC peut avoir été une source de confusion pour certains participants à l'enquête36.

Pour obtenir plus de détails au sujet des limites de l'enquête, voir le document Cycle 2.2 de l'Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) – Nutrition : Guide de consultation et d'interprétation des données, publié par Santé Canada et accessible sur son site Web.