Performance du module de dépistage du cancer du poumon du Modèle de gestion des risques de cancer

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par William M. Flanagan, William K. Evans, Natalie R. Fitzgerald, John R. Goffin, Anthony B. Miller et Michael C. Wolfson

Le National Lung Screening Trial (NLST) a été mené aux États-Unis d’août 2002 à avril 2004 afin de déterminer si le dépistage par tomodensitométrie à faible dose (TDMFD) pouvait réduire la mortalité par cancer du poumon. Le NLST, qui comptait plus de 53 000 participants, a montré que trois tomodensitométries annuelles chez une population à haut risque réduisaient de 20 % la mortalité par cancer du poumon après environ six ans de suiviNote 1,Note 2. Des essais européens à plus petite échelle fondés sur des protocoles de dépistage et des populations à risque un peu différents ont donné certaines preuves d’une plus faible mortalité ou n’ont révélé aucun avantageNote 3-5. Le Preventive Services Task Force a évalué la qualité de ces essais européens comme étant tout au plus passable, mais a considéré que le NLST était un essai de grande portée de bonne qualitéNote 6, et a fait une recommandation de grade B concernant le dépistage annuel par TDMFD chez les personnes de 55 à 80 ans ayant des antécédents d’usage du tabac de 30 paquets-années qui fument ou ont arrêté de fumer au cours des 15 dernières annéesNote 7. Cependant, on ne sait pas quelle est la population « à risque » optimale pour le dépistage, ni la fréquence ou la durée optimale du dépistage. En outre, les rapports coût-efficacité de la TDMFD et de l’abandon du tabac ont été projetés pour une population américaineNote 8, mais non pour le Canada.

Le Modèle de gestion des risques de cancer (MGRC) du Partenariat canadien contre le cancer, élaboré en partenariat avec Statistique Canada, incorpore le risque de développer un cancer, le dépistage de la maladie et la prise en charge clinique à des données sur les coûts et la main-d’œuvre pour évaluer les résultats en matière de santé et les incidences économiques. L’ajout d’un module de dépistage au module du cancer du poumon (MGRC-CP) permet d’évaluer différents scénarios pour diverses populations cibles ayant des taux de participation et d’observance ainsi qu’une fréquence du dépistage par TDMFD variés. La présente étude décrit ce module et évalue la mesure dans laquelle il arrive à reproduire les principaux résultats du NLST.

Méthodes

Le MGRC simule de grands échantillons représentatifs de la population canadienne, une personne à la fois, de la naissance au décès. Des équations et des probabilités calculées d’après des données empiriques sont appliquées aux personnes simulées pour établir leur profil démographique, leurs caractéristiques d’activité sur le marché du travail, leurs expositions à des facteurs de risque, leur risque de développer un cancer, leur état de santé et leur risque de décès. Les cheminements de vie individuels se déroulent dans une microsimulation Monte Carlo d’événements discrets en temps continu avec risques concurrents explicites. Cette simulation est comparable à une enquête longitudinale complète sur la santé, les caractéristiques démographiques et les caractéristiques économiques de la population incluant les années futures.

Modèle de référence du cancer du poumon

Le risque de développer un cancer du poumon a été calculé en utilisant une équation de risque tirée de la littératureNote 9 dans laquelle les taux d’incidence de référence (par âge/sexe/province) sont multipliés par les risques relatifs associés au nombre cumulé de paquets de cigarettes fumés par la personne et à son exposition cumulée au radon. Le risque de développer un cancer du poumon est réévalué chaque année à mesure que la personne vieillit, et est appliqué comme un temps d’attente jusqu’à la détection clinique.

Le comportement d’usage du tabac a été simulé de manière à ce qu’il concorde avec les données d’enquête canadiennes au cours du temps, selon l’âge, le sexe et la province, en se basant sur l’Enquête santé Canada de 1979, l’Enquête nationale sur la santé de la population de 1994-1995 et l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes de 2008Note 10-12. Les trajectoires d’usage du tabac ont fait l’objet d’une validation externe au moyen des données de ces enquêtes pour d’autres années et de données des fabricants de tabacNote 13. Les trajectoires avant 1979 ont été obtenues par extrapolation et comparées aux données sur l’usage du tabac recueillies antérieurement pour le CanadaNote 14. Les tendances récentes de l’usage du tabac ont été extrapolées par projection au-delà de 2008.

Le stade du cancer du poumon au moment du diagnostic a été attribué en fonction des distributions selon l’âge et le sexe dans les données du Registre canadien du cancer. Des courbes de survie par stade établies d’après l’examen des dossiers et les données de la littérature ont été appliquées au moment du diagnostic initial pour générer les durées jusqu’à la rechute et au décès. Les taux d’incidence de référence ont été étalonnés d’après le nombre de nouveaux cas dans le Registre canadien du cancer pour 2005 et leur alignement a été évalué sur la période de 1999 à 2009. La mortalité par cancer du poumon a été étalonnée d’après la Base canadienne de données sur la mortalité pour 2005 et comparée au fil du temps. Le modèle complet et ses paramètres sont publiés sur le site Web du Partenariat canadien contre le cancerNote 15. Le module du cancer du poumon du MGRC et les sources de données utilisées sont décrits ailleursNote 16,Note 17. La version 2.1 du MGRC a été utilisée pour la présente analyse.

Simulation du dépistage

Le MGRC-CP simule une phase préclinique détectable du cancer, c’est-à-dire la période avant la détermination clinique durant laquelle le dépistage permettrait de détecter le cancer. Les phases précliniques détectables du cancer sont tirées aléatoirement à la naissance d’une distribution exponentielle hypothétique (de moyenne déterminée par ajustement de modèles) pour tenir compte de l’hétérogénéité de la croissance de la tumeur. À mesure que la personne vieillit, la phase préclinique détectable du cancer qui lui est attribuée est comparée à la durée courante jusqu’à la détection clinique pour déterminer si le cancer est détectable par dépistage.

La première fois que le cancer est simulé comme étant détectable, la sensibilité du dépistage par TDMFD est appliquée pour générer des vrais positifs et faux négatifs. Les vrais positifs ont un temps d’avance au diagnostic (lead time) égal à la durée entre la détection par dépistage et le moment où le cancer aurait été décelé cliniquement dans la simulation. Les faux positifs sont générés au moyen du paramètre de spécificité de la TDMFD.

La TDMFD est supposée pouvoir déceler les cancers du poumon non à petites cellules à un stade plus précoce, ce qui mène à un traitement plus efficace et, donc, a une réduction de la mortalité. Il se peut que la TDMFD permette aussi de déceler les cancers du poumon à petites cellules, mais le dépistage ne devrait pas modifier le pronostic de ce cancer agressif.

Cohorte de dépistage

Pour participer au NLST, les sujets devaient présenter un risque élevé de cancer du poumon, c’est-à-dire être âgés de 55 à 74 ans sans antécédents de cancer du poumon, mais avec des antécédents de consommation de 30 paquets-années pour les fumeurs (48 %) et pour les anciens fumeurs qui avaient arrêté de fumer au cours des 15 dernières années (52 %)Note 2. La plupart des participants au NLST étaient âgés de 55 à 59 ans (43 %) ou de 60 à 64 ans (31 %); 18 % étaient âgés de 65 à 69 ans, et 9 %, de 70 à 74 ans. La majorité des participants (59 %) étaient des hommes. Les distributions par stade ont été déclarées selon le cycle de dépistage et selon le résultat du dépistage (dépistage positif, dépistage négatif, pas de dépistage). Les faux positifs ont été communiqués.

Selon le MGRC-CP, environ 1,4 million de Canadiens satisfaisaient aux critères de participation au dépistage du NLST en 2014. La population simulée était plus âgée et comptait des pourcentages plus élevés d’hommes et de fumeurs que celle du NLST et, par conséquent, présentait un plus grand risque. Afin d’ajuster le modèle sur les résultats du NLST pour une population à risque similaire, une cohorte de dépistage présentant les mêmes distributions par strate d’âge, de sexe et d’usage du tabac que les participants au NLST a été sélectionnée aléatoirement parmi l’ensemble de Canadiens admissibles. La cohorte de dépistage était constituée d’environ 555 000 personnes simulées, mais les résultats du MGRC-CP présentés ont été rééchelonnés en se basant sur la taille du NLST pour permettre les comparaisons.

La cohorte de dépistage a été simulée avec et sans dépistage par TDMFD pour ajuster et évaluer le modèle. Le scénario de dépistage reproduisait le protocole du NLST et comprenait trois dépistages annuels par TDMFD, avec 95 % de chances de répétition du dépistage à chaque cycle. Le scénario de contrôle simulé consistait en l’absence de dépistage plutôt qu’en une radiographie thoracique, parce que cette dernière n’est pas associée à une réduction de la mortalitéNote 18,Note 19.

Estimation des paramètres pour l’ajustement du modèle

Le premier objectif de l’évaluation du modèle consistait à obtenir des estimations des paramètres de sensibilité et de durée moyenne de la phase préclinique détectable du cancer qui, combinées, généraient un nombre accru de cas de cancer sur les trois premiers cycles de dépistage et des nombres réduits de nouveaux cas de cancer du 4e au 6e cycles afin de reproduire les conditions du NLST. Parallèlement, le pourcentage de cas de cancer décelés après le dépistage, qu’il s’agisse de résultats positifs ou négatifs, devaient concorder. Le deuxième objectif consistait à s’assurer d’obtenir une concordance raisonnable avec la réduction de la mortalité par cycle de dépistage signalée dans le cas du NLST. La réduction de la mortalité est réalisée au moyen d’une combinaison de transition de stade (stage shift) et d’amélioration intra-stade de la survie des cas détectés au dépistage.

Une recherche dirigée séquentielle et itérative a été adoptée pour obtenir des estimations des paramètres satisfaisant aux objectifs d’ajustement du modèle du MGRC-CP. Premièrement, on a évalué les distributions par stade. Deuxièmement, on a estimé la sensibilité et la durée moyenne de la phase préclinique détectable du cancer simultanément afin de s’assurer que les nombres de nouveaux cas par cycle de dépistage concordent avec ceux du NLST. Troisièmement, on a ajusté les taux d’incidence de référence. Quatrièmement, on a mis les courbes de survie par stade en correspondance avec celles du NLST en estimant les grandeurs scalaires du temps d’avance au diagnostic par stade et en appliquant un ratio des risques aux courbes de survie par stade de référence. Une solution paramétrique est offerte. L’incertitude des paramètres n’a pas été évaluée. On a évalué la structure du modèle en effectuant des tests de cohérence interne et de plausibilité des résultats pour une gamme de scénarios de dépistage s’étendant au-delà de la portée du plan d’expérience du NLST, et en comparant les résultats à ceux d’autres études. L’erreur Monte Carlo a été minimisée en exécutant de grandes simulations de 32 millions de personnes.

Pour calculer les probabilités de transition de stade, on a comparé la distribution des stades du cancer du poumon non à petites cellules dans la branche de dépistage du NLST à celle observée pour la population générale des États-Unis âgée de 55 à 74 ans fournie par le Surveillance, Epidemiology, and End Results ProgramNote 20. On a supposé que la distribution des stades du cancer du poumon à petites cellules ne changeait pas. La distribution par stade des cas de cancer du poumon non à petites cellules selon le résultat du dépistage (positif, négatif, pas de dépistage) a été inférée d’après les résultats du NLST en supposant que les cas de cancer du poumon à petites cellules étaient répartis proportionnellement entre les catégories de détection et en les soustrayant des totaux. Un deuxième ensemble de probabilités de transition de stade a été estimé en se basant sur les variations de la distribution par stade selon le cycle de dépistage. Dans la simulation, le stade des cas de cancer du poumon non à petites cellules détectés cliniquement a été modifié, d’abord en fonction des résultats du dépistage, puis, en fonction du cycle de dépistage. L’ensemble complet de probabilités de transition de stade en tant que paramètres d’entrée est publié avec le MGRC-CPNote 15.

La spécificité de la TDMFD a été calculée directement d’après les résultats du NLST par cycle de dépistage. On a calculé la sensibilité d’après les données du NLST en se basant sur l’intervalle d’un an entre les dépistages. Cependant, pour les besoins de la modélisation, la sensibilité a dû être estimée en même temps que la durée moyenne de la phase préclinique détectable du cancer, car elle reflète la capacité de la TDMFD à déceler des cas de cancer durant cette période. Le tableau 1 montre la sensibilité et la durée moyenne de la phase préclinique détectable du cancer obtenues par calage du modèle. Les cibles de calage étaient le nombre de cas déclarés par cycle de dépistage dans le NLST et la sensibilité à un an.

Le dépistage détecte les cas de cancer qui auraient été diagnostiqués cliniquement durant des années subséquentes. Pour simuler l’effet sur l’incidence du cancer dans les années ultérieures, les taux d’incidence de référence ont été ajustés au moyen d’un jeu de multiplicateurs qui varient dans le temps du début à la fin du dépistage. Les multiplicateurs tiennent compte de l’effet cumulé des dépistages répétés, de la fréquence du dépistage, de la sensibilité de la TDMFD, de la durée moyenne de la phase préclinique détectable du cancer et d’un paramètre d’ajustement du modèle (α = 0,8) appliqué pendant trois années après l’arrêt du dépistage pour ajuster les résultats de mortalité et d’incidence sur ceux du NLST.

En se basant sur les données du NLST obtenues sur demande spéciale, on a construit les courbes de survie au cancer du poumon selon le stade. L’écart entre les courbes de survie par stade pour les branches de dépistage et de contrôle peut être attribué à une combinaison de temps d’avance au diagnostic et d’amélioration de la survie intra-stade résultant de la détection précoce. Les cas de surdiagnostic contribuent à l’amélioration de la survie intra-stade des patients de stade I, mais ces cas ne donnent pas lieu à une réduction de la mortalité. Les paramètres pour le temps d’avance au diagnostic et l’amélioration de la survie intra-stade ont été estimés simultanément (tableau 2), de sorte que l’écart entre les courbes de survie pour les branches de dépistage et de contrôle concorde avec l’écart observé dans le cas du NLST. L’estimation de l’amélioration de la survie intra-stade était de 20 % pour les cas de cancer du poumon non à petites cellules de stade I détectés au dépistage, quoique le surdiagnostic soit un facteur de confusion qui influe sur ce résultat. Aucune amélioration de la survie intra-stade n’était nécessaire pour obtenir la concordance pour les cas de cancer de stades plus avancés.

Pour évaluer la robustesse du MGRC-CP et le comparer aux résultats du Cancer Intervention and Surveillance Modeling Network (CISNET) Note 21, on a effectué des analyses de sensibilité portant sur l’âge au début et à la fin du dépistage, les antécédents d’usage du tabac et l’intervalle entre les dépistages pour une cohorte de personnes de 45 ans dont l’observance du programme de dépistage était parfaite qui ont été suivies jusqu’à l’âge de 90 ans.

Résultats

La sensibilité à un an du dépistage par TDMFD, calculée sous forme du ratio du nombre de cas de cancer détectés au dépistage au nombre total de cas de cancer détectés dans les 12 mois après le dépistage, était de 0,938 pour le NLST et de 0,939 pour le MGRC-CP.

Sur six ans, la différence entre les nombres de cas de cancer du poumon dans les branches de dépistage du MGRC-CP et du NLST était, au plus, de 2,3 % (figure 1); la différence d’incidence cumulée à six ans était inférieure à 1 % (figure 2). La branche de contrôle du MGRC-CP a produit 32 % de cas de moins que la branche de contrôle du NLST durant la première année, mais à la sixième année, il n’existait pratiquement plus aucune différence d’incidence cumulée. Comparativement, le MGRC-CP a généré 120 % de cas de cancer du poumon de plus au premier dépistage par TDMFD que pour une cohorte comparable non soumise au dépistage, et les niveaux concordaient de près avec ceux signalés pour le NLST. La sixième année, l’excédent cumulé de cas de cancer du poumon dans la branche de dépistage était de 19 % pour le MGRC-CP, comparativement à 15 % pour le NLST. La stabilisation de la différence de nombre cumulé de cas de cancer du poumon du NLST durant les années subséquentes démontre le retour au statu quo des niveaux après l’arrêt du dépistage. Le suivi durant les deux dernières années du NLST était insuffisant pour permettre des comparaisons valables avec les résultats du MGRC-CP.

Le pourcentage de surdiagnostic, calculé comme étant l’augmentation nette du nombre de cas de cancer du poumon dans la branche de dépistage exprimée en pourcentage du nombre total de cas de cancer détectés au dépistage après un suivi de 6,5 années en moyenne était de 24,8 % pour le MGRC-CP, comparativement à 18,5 % pour le NLST. Dans le cas du MGRC-CP, l’estimation du surdiagnostic après 20 ans de suivi était de 21,9 %.

Le temps d’avance au diagnostic moyen estimé par le MGRC-CP pour les cas de cancer du poumon non à petites cellules détectés au dépistage était de 1,8 an, et variait selon le stade (2,4, 0,8, 0,6 et 0,5 année pour les stades I, II, III et IV, respectivement). Les courbes de survie établies pour les cas de cancer du poumon non à petites cellules de stade I détectés au dépistage ont été ajustées en prenant un temps d’avance au diagnostic moyen de 2,4 années (durant lequel le décès par cancer du poumon était impossible) et une réduction de 20 % (risque relatif de 0,8) par rapport à la courbe de survie de référence pour produire des courbes de survie comparables à celles du NLST.

Les différences entre les branches de dépistage et de contrôle du MGRC-CP et du NLST sont résumées au tableau 3. Pour le stade I, les résultats du MGRC-CP et du NLST sont comparables, ce qui est le plus important, car la majorité des cas sont de stade I. Pour le stade II, l’alignement a été plus difficile durant les trois premières années du dépistage, mais la survie à long terme était similaire. Cela aurait peu d’effet sur les résultats de simulation du MGRC-CP, parce que les tumeurs de stade II représentent moins de 8 % des cas. Pour les stades III et IV, les courbes de survie sont de forme similaire à celles du NLST. La survie à cinq ans des patients atteints d’un cancer du poumon dans la cohorte non soumise au dépistage simulée dans le MGRC-CP était plus faible que celle observée pour la branche de contrôle du NLST, l’écart étant de 10 % pour le stade I, de 8 % pour le stade II, et de l’ordre de 3 % pour les stades III et IV, ce qui pourrait refléter le surdiagnostic associé au dépistage par radiographie thoracique.

La simulation de trois tomodensitométries annuelles a donné une réduction de la mortalité de 18 % après six ans, résultat qui concorde avec la réduction calculée directement d’après les données du NLST (tableau 4), et qui était légèrement inférieur à l’estimation de 20 % publiée pour le NLST. Une réduction maximale de la mortalité de 23 % a été atteinte la quatrième année de la simulation du MGRC-CP comparativement à un maximum de 19 % calculé d’après les données du NLST.

Les analyses de sensibilité portant sur une cohorte de personnes de 45 ans observant complètement le dépistage ont donné la preuve de la robustesse du modèle aux variations de l’âge au dépistage, des antécédents d’usage du tabac et de l’intervalle de dépistage — plus de dépistages donnaient des avantages plus importants. Comparativement aux modèles du CISNET, le MGRC-CP a produit des estimations un peu plus faibles du nombre de personnes admissibles au dépistage, de la transition de stade et du nombre d’années de vie gagnées, des estimations considérablement plus élevées du surdiagnostic, et une réduction considérablement plus faible de la mortalité (tableau 5).

Discussion

Les paramètres de dépistage du MGRC-CP ont été estimés de manière à ce que les courbes de distribution par stade, d’incidence et de mortalité du modèle correspondent à celles du NLST. Des paramètres de modélisation ont été estimés pour la sensibilité du dépistage par TDMFD, la durée de la phase préclinique détectable du cancer, la transition de stade, l’effet du dépistage en aval sur l’incidence de référence, le temps d’avance au diagnostic et l’amélioration intra-stade de la survie. Le modèle ajusté a produit des augmentations plausibles de l’incidence par année de l’étude et une réduction maximale de la mortalité de 23 %, qui est supérieure à l’estimation de 20 % publiée pour le NLST.

La cohorte simulée du MGRC-CP avait une composition par âge, sexe et situation d’usage du tabac correspondant à celle de la cohorte du NLST. D’autres caractéristiques susceptibles d’améliorer la concordance, comme les antécédents familiaux de cancer du poumon et la présence de maladies respiratoires, ont été mentionnées pour le NLST, mais n’ont pas été intégrées dans la simulation en raison de la complexité des équations de modélisation dynamique de chacune d’elles et de l’élaboration d’une nouvelle équation d’incidence du risque de cancer du poumon dans laquelle ces caractéristiques sont incluses comme prédicteurs. Tammemagi et coll. ont présenté une gamme de caractéristiques qui amélioreraient la détermination d’un risque élevé et ont élaboré un calculateur du risque qui pourrait être pris en considération pour de futures améliorations du modèle courantNote 22. Néanmoins, la comparaison de l’incidence du cancer du poumon dans la branche de contrôle avec dépistage par radiographie thoracique du NLST et chez la cohorte non soumise au dépistage du MGRC-CP révèle, pour les diverses années de l’étude, des écarts comparables à ceux signalés pour le Prostate, Lung, Colorectal and Ovarian Cancer Screening Trial, un grand essai randomisé à l’échelle de la population parrainé par le National Cancer Institute pour déterminer les effets du dépistage sur la mortalité par cancer chez les personnes de 55 à 74 ansNote 19.

On a fait varier les estimations de la sensibilité et de la durée moyenne de la phase préclinique détectable du cancer selon le cycle de dépistage afin qu’elles concordent avec les résultats du NLST. Cela pourrait refléter des artéfacts de l’essai qui ne se concrétiseraient peut-être pas dans le dépistage à l’échelle de la population. Le nombre accru de cas de cancer détectés lors du premier dépistage du NLST pourrait être dû à des facteurs tels que les cas prévalents (anciens cas) et le surdiagnostic. Une plus forte prévalence de la maladie de stade avancé donnerait lieu à des estimations plus élevées de la sensibilité au premier dépistage; le surdiagnostic contribuerait à une durée de la phase préclinique détectable du cancer supérieure à la moyenne au premier dépistage. L’augmentation du nombre de cas de cancer détectés entre les 2e et 3e cycles de dépistage du NLST pourrait refléter un examen plus minutieux des lésions suspectes au 3e cycle, qui était la dernière occasion de soumettre les patients au dépistage durant l’essai. Dans les simulations d’un programme à l’échelle de la population qui favorise le dépistage continu, il pourrait être plus plausible de maintenir la sensibilité constante que de l’accroître au troisième cycle de dépistage.

Les estimations du surdiagnostic du NLST (18,5 %)Note 23 pourraient être trop élevées, étant donné la perte de patients au suivi à la fin de l’essai. Un suivi plus long permettrait de déterminer si une partie des cas excédentaires à 6,5 années aurait été détectée cliniquement dans la branche de contrôle. Dans le cas du MGRC-CP, la projection de la cohorte de dépistage 20 ans dans l’avenir a montré que la prévalence du surdiagnostic pourrait être 3 % plus faible que la valeur calculée après six ans. Les modèles du CISNET projetaient un surdiagnostic de 8,7 % chez une cohorte de personnes de 45 ans entièrement observantes ayant subi le dépistage de 55 ans à 77 ans et suivies jusqu’à l’âge de 90 ans, comparativement à 22,9 % pour le MGRC-CP.

L’approche fondée sur l’incidence du MGRC-CP est robuste à diverses fréquences de dépistage et diverses durées du dépistage, et sensible aux hypothèses au sujet de l’effet du dépistage sur les taux d’incidence de référence en aval. D’autres modèles, y compris les modèles du CISNET, ont été fondés sur des antécédents naturels de progression de la maladie. Une comparaison des résultats du MGRC-CP et du CISNET donne à penser que les modèles se comportent de manière comparable et attendue pour divers programmes de dépistage; autrement dit, l’accroissement du dépistage se traduit par de plus grands avantages. Cependant, des divergences se dégagent également.

Les différences de pourcentage de la population admissible au dépistage reflètent vraisemblablement les différences de prévalence et d’intensité de l’usage du tabac entre les deux modèles. La réduction de la mortalité par cancer du poumon est considérablement plus faible dans le cas du MGRC-CP que dans le cas du modèle du CISNET en raison du pourcentage plus faible de cas admissibles et de cas de stade avancé, mais cela pourrait également refléter des hypothèses différentes au sujet de la survie à long terme, la guérison et la mortalité. Le nombre d’années de vie gagnées, qui est peut-être un indicateur plus important des avantages du dépistage que la réduction de la mortalité, concorde davantage dans les deux modèles. Pour la cohorte non soumise au dépistage, le MGRC-CP a généré un plus grand nombre de cas de cancer pour 100 000 que le modèle du CISNET, ce qui est conforme aux résultats pour les populations du CanadaNote 24 et des États-UnisNote 25. Une étude plus approfondie des hypothèses qui sous-tendent les modèles et des différences entre pays est nécessaire pour expliquer pleinement les différences entre les modèles.

Le rapport coût-efficacité d’un dépistage bisannuel par opposition à annuel est une question stratégique importante. La sensibilité, la transition de stade et l’amélioration de la survie intra-stade « réelles » pourraient différer de celles estimées pour le dépistage annuel. Comme le NLST ne fournit pas de données directes pour estimer les paramètres d’un dépistage bisannuel, des analyses de sensibilité doivent être effectuées pour tester diverses solutions possibles.

Limites

L’ajustement d’un modèle sur les données détaillées du NLST ne garantit pas sa généralisabilité. L’un des problèmes tient à l’extrapolation des paramètres de dépistage au-delà des trois tomodensitométries du NLST. En outre, la population du NLST diffère de la population du MGRC-CP. Qui plus est, la façon dont les professionnels de la santé travaillent dans le contexte d’un essai clinique diffère de la façon dont un vaste programme à l’échelle de la population fonctionnerait.

Même la définition d’une lésion suspecte et la façon dont elle est étudiée pourraient ne pas être les mêmes dans un programme de dépistage à l’échelle de la population que dans le contexte du NLST, où les examens de dépistage et les investigations diagnostiques ont eu lieu dans des centres choisis offrant un haut niveau de perfectionnement. L’extension du dépistage à une plus grande population et à une plus vaste gamme de fournisseurs de soins de santé aboutirait vraisemblablement à des estimations différentes de la sensibilité et de la spécificité du dépistage par TDMFD et nécessiterait donc des hypothèses supplémentaires au sujet des tests de stadification utilisés et de la distribution des cas par stade.

Mot de la fin

En se fondant sur le National Lung Screening Trial réalisé aux États-Unis, on a élaboré un nouveau module du Modèle de gestion des risques de cancer canadien, désigné MGRC-CP, pour simuler le dépistage du cancer du poumon par tomodensitométrie à faible dose. En créant une population conçue de manière à reproduire celle du NLST, on a trouvé une solution de paramétrisation plausible du modèle qui a donné un dépistage simulé concordant avec les résultats du NLST.

Le MGRC-CP peut générer des résultats pour diverses stratégies de dépistage afin d’estimer le rapport coût-efficacité, les retombées budgétaires et les demandes de ressources du dépistage par TDMFD au Canada. Les responsables de l’élaboration des politiques peuvent utiliser cette information pour décider s’il faut lancer des programmes de dépistage du cancer du poumon à l’échelle de la population et de quelle façon le faire. Les coûts et les avantages potentiels du dépistage du cancer du poumon peuvent être évalués en faisant varier les antécédents d’usage du tabac, les taux de participation et l’observance du programme de dépistage, les fréquences et les durées de dépistage, et les programmes pour cesser de fumer connexes. Des analyses de sensibilité déterministes sont recommandées pour fournir une gamme de projections qui tiennent compte de l’incertitude du modèle.

Remerciements

Les auteurs remercient Andy Coldman et Sonya Cressman de leurs commentaires concernant le manuscrit, Sharon Fung pour l’analyse des données du NLST, et Saima Memon pour l’exécution des scénarios de test au moyen du modèle. Nous tenons aussi à souligner la contribution d’un grand nombre d’autres personnes qui ont participé à l’élaboration du Modèle de gestion des risques de cancer (voir www.cancerview.ca/crmmacknowledgements).

La présente analyse est fondée sur le Modèle de gestion des risques de cancer, du Partenariat canadien contre le cancer. Santé Canada a financé le Modèle par l’entremise du Partenariat canadien contre le cancer. Les hypothèses et les calculs qui sous-tendent les résultats de la simulation ne sont pas ceux du Partenariat et ce dernier n’assume aucune responsabilité quant à leur utilisation ou interprétation.

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