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en-tête principal pour « L'emploi et le revenu en perspective »
sous-titre « L'édition en ligne »

Décembre 2001     Vol. 2, no. 12

Écart salarial entre hommes et femmes

Marie Drolet

L'inégalité des salaires entre les hommes et les femmes est une question complexe qu'il faut étudier sous plusieurs angles. Le but du présent article ne consiste pas à fournir une estimation unique et définitive de l'écart salarial, mais plutôt à démontrer l'importance de la mesure choisie, les méthodes de décomposition de l'écart salarial et les variations de ce dernier en fonction de la courbe de répartition des salaires.

Mesures des gains

Pendant trois décennies, l'Enquête sur les finances des consommateurs (EFC) a été la source principale de données sur les gains des Canadiens. En 1997, l'Enquête sur la dynamique du travail et du revenu (EDTR) a remplacé l'EFC. Selon l'EFC, chez les travailleurs occupés à temps plein toute l'année (TPTA), les femmes travaillant à temps plein toute l'année ont gagné 72,5 % du montant gagné par les hommes (tableau 1). Si on le calcule d'après l'EDTR de 1997, le ratio passe de 61,6 % (d'après les salaires et traitements annuels pour tous les employés dans leur emploi principal) à 68,3 % (d'après les salaires et traitements annuels des employés à temps plein occupés toute l'année dans leur emploi principal) et à 80,4 % (d'après le taux horaire de salaire de tous les employés dans tous les emplois).

Pourquoi existe-t-il des écarts importants entre les ratios des gains?

Le ratio calculé d'après l'EDTR, selon le salaire horaire de tous les employés, excédait de huit points de pourcentage celui calculé d'après les données de l'EFC sur les travailleurs à temps plein occupés toute l'année. Cet écart important est attribuable à plusieurs différences conceptuelles entre l'EDTR et l'EFC.

En premier lieu, les ratios sont calculés pour des populations différentes de travailleurs. Le ratio basé sur les données de l'EFC tient compte des employés et des travailleurs autonomes, alors que celui calculé d'après les données de l'EDTR n'englobe que les employés. Les analyses fondées uniquement sur les travailleurs occupés à TPTA ont tendance à exclure une part importante de la population active, particulièrement les femmes. D'après les données de l'EDTR de 1997, à peu près 76 % des hommes et 60 % des femmes travaillaient à temps plein toute l'année. Les ratios fondés sur les taux horaires de salaire ne sont pas influencés par ces problèmes définitionnels et sont représentatifs des écarts salariaux femmes-hommes.

En deuxième lieu, la définition des gains n'est pas la même pour les deux enquêtes. Dans l'EFC, les gains annuels incluent les salaires et traitements en provenance de tous les emplois, et le revenu net provenant d'un travail autonome. Dans le cas de l'EDTR, les gains annuels n'englobent que les salaires et traitements. Les taux horaires de salaire sont particuliers à l'emploi, donc facilitent les comparaisons entre les salaires des hommes et des femmes qui occupent des emplois comparables.

En troisième lieu, les ratios de rémunération fondés sur les gains annuels ne tiennent pas compte avec précision des différences de volume de travail. Même dans le cas des hommes et des femmes qui travaillent à temps plein toute l'année, le nombre d'heures travaillées par semaine varie considérablement. Selon l'Enquête sur la population active, les hommes occupés à temps plein en 1997 ont travaillé 43,1 heures par semaine, tandis que les femmes dans la même situation ont travaillé 39,0 heures par semaine. Les ratios fondés sur le taux horaire de salaire permettent de contourner ce problème.

Le reste de cet article met l'accent sur l'année 1997, alors que les femmes gagnaient en moyenne 15,12 $ l'heure et que les hommes gagnaient 18,81 $. Autrement dit, les femmes gagnaient environ 80 % du salaire horaire moyen des hommes note 1 .

Mesures de l'expérience

L'une des limites importantes des études antérieures est le manque de renseignements sur les déterminants de l'écart salarial. L'un de ces déterminants est l'expérience de travail accumulée au cours de la vie. Souvent, on se sert de l'âge ou de la mesure de l'expérience de Mincer (âge — nombre d'années d'études — 6) comme mesure approximative de l'acquisition de compétences générales formant le capital humain ou de l'expérience de travail potentielle. Cependant, les approximations ont tendance à surestimer l'expérience de travail réelle des femmes parce qu'elles ne tiennent pas compte des interruptions de travail pour se consacrer à l'éducation des enfants (c'est-à-dire un retrait complet du marché du travail) ni de toute restriction du nombre d'heures travaillées par semaine ou du nombre de semaines travaillées par année.

L'EDTR est conçue pour recueillir des renseignements sur l'expérience de travail à partir du premier emploi rémunéré à temps plein. On demande aux participants à l'enquête d'indiquer les années durant lesquelles ils ont travaillé au moins six mois (année complète), ainsi que celles durant lesquelles ils n'ont pas travaillé du tout, depuis qu'ils ont commencé à travailler à temps plein. Les autres années, on considère que ces personnes n'ont travaillé qu'une partie de l'année. Puis, on demande aux participants à l'enquête d'indiquer quelles années ils ont travaillé au moins six mois et s'ils ont travaillé à temps plein (au moins 30 heures par semaine), à temps partiel ou des deux façons. Les emplois à temps partiel ou les emplois d'été pendant les études ne sont pas inclus. D'après les renseignements recueillis, on calcule une mesure de l'expérience de travail exprimée en équivalent temps plein toute l'année (ETPTA) comme suit :

ETPTA=nombre d'années travaillées à temps plein toute l'année
+0,5(nombre d'années travaillées à temps partiel toute l'année)
+0,5(nombre d'années travaillées toute l'année; en partie à temps plein, en partie à temps partiel)
+0,25(nombre d'années travaillées pendant une partie de l'année, à temps partiel ou pendant une partie de l'année, à temps plein)

Les hommes et les femmes n'ont pas la même expérience du marché du travail (tableau 2). Selon l'approximation de Mincer pour l'expérience de travail potentielle, l'écart entre l'expérience professionnelle des hommes et des femmes est faible (19,5 années et 19,1 années, respectivement). En revanche, si l'on évalue l'expérience réelle du marché du travail, le tableau est assez différent. Exprimée en ETPTA, l'expérience moyenne de travail est de 18,3 années pour les hommes et de 14,4 années pour les femmes. En outre, les hommes passent une plus forte proportion de leurs années potentielles d'expérience professionnelle à travailler à temps plein toute l'année (94 % contre 75 % pour les femmes).

En termes absolus, l'expérience réelle des jeunes femmes est comparable à celle de leurs homologues masculins, mais l'écart se creuse lorsque l'âge augmente (tableau 3). Cette situation pourrait tenir, en partie, au fait que les femmes plus âgées (cohorte des 55 à 64 ans en 1997) ont été moins portées que les générations ultérieures (cohorte des 25 à 34 ans en 1997) à cumuler les responsabilités professionnelles et familiales. Qui plus est, les jeunes hommes et les jeunes femmes viennent d'arriver sur le marché du travail et n'ont pas encore subi les effets des interruptions de carrière.

Même s'il s'agit d'un complément apprécié à l'étude de la différence de salaires, la mesure de l'expérience de travail fondée sur l'EDTR est loin d'être parfaite. L'enquête ne fournit pas de renseignements sur la continuité de l'expérience de travail, la durée des retraits du marché du travail ni la fréquence et le moment de ces retraits. Or, ces facteurs peuvent avoir des effets multiples sur la rémunération des femmes (Corcoran et Duncan, 1979).

D'abord, il existe des différences importantes entre les hommes et les femmes en ce qui concerne le nombre d'heures travaillées et la continuité de l'expérience de travail. Ainsi, les femmes sont plus susceptibles que les hommes de conjuguer des périodes de travail rémunéré et de retrait du marché du travail pour des raisons familiales. Cela a une incidence sur la durée d'occupation de l'emploi, facteur qui influe sur le salaire.

Deuxièmement, les compétences qui font partie du capital humain peuvent se déprécier en cas de retrait prolongé du marché du travail. Les femmes qui retournent travailler pour le même employeur après une interruption d'emploi peuvent être moins susceptibles d'obtenir une promotion. Ou encore, celles qui ne retournent pas travailler pour le même employeur peuvent devoir accepter un travail moins bien rémunéré que celui qu'elles occupaient avant leur retrait.

Troisièmement, les femmes qui s'attendent à quitter plusieurs fois le marché du travail peuvent retarder leur formation, voire même décider d'accepter des emplois peu rémunérés dans des branches d'activité ou des professions où les entrées et les sorties sont aisées.

Enfin, le moment où a lieu le retrait du marché du travail peut avoir des répercussions sur le salaire. Les compétences professionnelles sont habituellement acquises en début de carrière, lequel coïncide généralement avec la période où est prise la décision de fonder une famille. On a montré qu'une part importante de la croissance des gains réels au cours de la vie a lieu durant les premières années après l'obtention d'un diplôme (Murphy et Welch, 1990). Par conséquent, le moment où ont lieu les retraits du marché du travail peut avoir d'importantes répercussions à long terme sur la courbe des gains futurs.

Se fonder sur les définitions du travail à temps plein toute l'année pour calculer l'expérience de travail exprimée en ETPTA peut poser des problèmes. Par toute l'année, on entend l'occupation d'un emploi pendant au moins six mois d'une année civile et par temps plein, on entend un travail d'au moins 30 heures par semaine. Comme on l'a mentionné plus haut, parmi les travailleurs à temps plein, le nombre d'heures habituellement travaillées par semaine varie considérablement. Par exemple, la personne A travaille 45 heures par semaine pendant 12 mois, alors que la personne B travaille 32 heures par semaine pendant 7 mois. D'après la mesure de l'ETPTA fondée sur les données de l'EDTR, chaque personne aurait accumulé une année d'expérience en ETPTA malgré l'écart important entre les nombres d'heures travaillées. En outre, la mesure de l'expérience de travail en ETPTA ne tient pas compte des retraits à court terme (moins de six mois) du marché du travail durant une année donnée. Presque 40 % des femmes qui travaillent prennent un congé de moins de six mois après la naissance d'un enfant (Marshall, 1999). Si ces interruptions de travail et ces heures de travail non enregistrées deviennent plus importantes à mesure que l'expérience augmente, alors la mesure de l'expérience de travail en ETPTA peut refléter moins exactement la quantité relative de travail effectuée par les hommes et par les femmes.

L'écart salarial non corrigé est faible pour les travailleurs ayant moins de deux années d'expérience (4 %), mais grandit à mesure que le nombre d'années d'expérience de travail augmente note 2 . Selon une étude des nouveaux diplômés de niveau postsecondaire réalisée aux fins de l'Enquête nationale auprès des diplômés, la différence de salaires entre les sexes était assez faible deux années après l'obtention du diplôme (7 %), mais s'accentuait de deux à cinq années après celle-ci (16 %) (Finnie et Wannell, 1999). Selon ces deux auteurs, ces résultats ont des conséquences intéressantes en ce qui concerne les profils des gains à long terme des diplômés, puisqu'ils donnent à penser que la réduction à long terme (permanente) de l'écart salarial entre les diverses cohortes de diplômés n'est peut-être guère aussi importante que ne le laissent entendre les résultats observés immédiatement après l'obtention du diplôme.

Instruction et principal domaine d'études

Le niveau de scolarité des Canadiennes s'est accru puisqu'il atteint maintenant celui des hommes et parfois même le dépasse. L'importance des caractéristiques du capital humain — notamment l'instruction — dans le processus de détermination du salaire a été fermement établie dans la littérature économique. L'EDTR fournit des renseignements sur le niveau de scolarité ainsi que sur le principal domaine d'études. Comme il fallait s'y attendre, plusieurs domaines d'études sont dominés par l'un des deux sexes. Par exemple, les diplômés en génie, en technologie et sciences appliquées ou en études professionnelles (écoles de métiers) sont principalement des hommes. Par contre, les femmes sont surreprésentées dans les domaines du commerce ou de l'administration des affaires, ainsi que dans ceux de la santé et de l'éducation. Puisque les salaires varient selon le principal domaine d'études, les choix que font les hommes et les femmes peuvent expliquer en partie la différence de salaires.

Explication de l'écart

Afin de décrire les causes des différences observées sur le marché du travail, les économistes examinent d'abord les divers attributs apportés en milieu de travail par les travailleurs. Il n'existe aucun ensemble universellement reconnu de variables de contrôle qu'il convient d'intégrer. Cependant, de l'avis général, il faut inclure des variables permettant de tenir compte de l'effet des facteurs liés à la productivité, comme la scolarité (niveau et principal domaine d'études), l'expérience, le carré de l'expérience, la durée d'occupation de l'emploi, l'état matrimonial, la présence d'enfants, la situation de travail à temps partiel, la situation syndicale, la taille de l'entreprise, la région et la taille urbaine. L'ajout de contrôles pour la profession et la branche d'activité est discutable. Si les employeurs font une distinction entre les hommes et les femmes en ayant tendance à engager les uns plutôt que les autres pour certains emplois, alors l'attribution de la profession est le résultat des pratiques des employeurs plutôt que celui d'un choix personnel (Altonji et Blank, 1999). Les analyses qui ne tiennent pas compte de la profession et de la branche d'activité peuvent ne pas saisir l'importance du rôle joué par les caractéristiques liées aux antécédents et aux choix dans l'établissement du salaire, alors que celles qui tiennent entièrement compte de l'effet de ces variables peuvent sous-évaluer l'effet des contraintes du marché du travail sur ces résultats (voir Explication de la différence de salaires entre les hommes et les femmes).

L'utilisation de la mesure de l'expérience réelle au lieu de l'expérience potentielle permet d'expliquer une plus grande part de la différence de salaires (tableau 4). La part expliquée par le modèle classique est environ de 9,2 % à 37,4 % (en utilisant l'expérience de travail potentielle) et celle expliquée par le modèle augmenté est de 29,2 % à 49,3 % (en utilisant l'expérience de travail réelle). Ce résultat est nouveau pour le Canada, mais comparable à ceux obtenus pour d'autres pays (par exemple, Wright et Ermisch [1991] pour le Royaume-Uni; O'Neill et Polachek [1993] pour les États-Unis).

La portion de l'écart salarial imputable aux différences liées à l'expérience de travail entre les hommes et les femmes est gravement sous-estimée lorsque l'on fonde les calculs sur l'expérience potentielle plutôt que réelle du marché du travail. Les différences en ce qui concerne l'expérience de travail réelle expliquent jusqu'à 12 % de l'écart, tandis que les différences d'expérience de travail potentielle rendent compte de moins de 1 % de cet écart. Cela peut s'expliquer comme suit : d'abord, comme susmentionné, l'écart entre les hommes et les femmes est faible si l'on examine les caractéristiques moyennes de l'expérience de travail potentielle, mais il est important si l'on se fonde sur l'expérience de travail réelle exprimée en ETPTA note 3 , ensuite, bien que les nombres potentiel et réel d'années d'expérience de travail soient fortement corrélés, une année supplémentaire d'expérience en ETPTA produit un rendement plus élevé qu'une année d'expérience de travail potentielle. Donc, si l'on se sert de la mesure de l'expérience exprimée en ETPTA, aussi bien l'écart entre les moyennes que celui entre les rendements expliquent une part plus importante de la différence de salaires que lorsque l'on se fonde sur l'expérience potentielle.

Les écarts entre les niveaux de scolarité des hommes et des femmes réduisent la partie expliquée de 5 % tout au plus, tandis que les différences entre les principaux domaines d'études selon le niveau de scolarité ne rendent pas compte de plus de 5 % de l'écart salarial. La contribution de chaque principal domaine d'études à l'écart salarial varie considérablement. Le fait que les hommes soient plus susceptibles que les femmes d'obtenir un diplôme en génie ou en sciences appliquées et que le rendement des diplômes dans ces domaines de spécialisation soit élevé permettent d'expliquer environ 15 % note 4  de l'écart. Cependant, la prévalence des femmes qui obtiennent un diplôme en sciences de la santé ou en éducation — professions pour lesquelles les gains sont élevés — réduit de 5 % à 9 % la partie expliquée de l'écart.

Malgré la longue liste de facteurs ayant trait à la productivité utilisée dans la présente étude, une part importante de l'écart salarial reste inexpliquée. D'autres grandes études menées au Canada ont produit des résultats semblables (Baker et autres, 1995; Gunderson, 1998; Christofides et Swidinsky, 1994). Ces différences considérables et inexpliquées peuvent être attribuables à des facteurs reliés à la productivité, aux décisions prises sur le marché du travail ou à des mesures des compétences dont les données de l'EDTR ne rendent pas compte.

Choix d'une structure salariale non discriminatoire

Les questions concernant la différence de rémunération sont souvent formulées de façon à établir dans quelle mesure le salaire des femmes est équivalent à celui des hommes présentant des caractéristiques comparables. Par conséquent, la structure salariale des hommes est souvent considérée comme étant la structure salariale « concurrentielle » ou « non discriminatoire ». Toutefois, on peut choisir d'autres structures salariales concurrentielles. Si l'on prend pour référence la structure salariale des femmes, la question qui se pose est celle de savoir quel salaire hypothétique les hommes recevraient s'ils étaient rémunérés conformément à la structure salariale des femmes. D'autres approches sous-entendent que la structure concurrentielle serait, en fait, comprise entre les structures salariales des hommes et des femmes. Selon certains auteurs, la structure salariale concurrentielle devrait s'approcher davantage de la structure observée pour le groupe le plus important (Cotton, 1988). Autrement dit, le rendement doit être estimé sous forme de moyenne pondérée des coefficients appliqués pour les hommes et pour les femmes, où les poids correspondent simplement aux proportions respectives d'hommes et de femmes dans la population totale. D'autres proposent d'utiliser comme estimation de la structure salariale concurrentielle l'estimation par les moindres carrés en partant d'un modèle combiné ou groupé (Neumark, 1988).

Si l'on adopte la structure salariale des hommes comme norme concurrentielle, 51 % de la différence de salaires est expliquée par les différences de rendement des caractéristiques qui déterminent les salaires, tandis que 49 % est attribuable à des différences entre les quantités possédées de caractéristiques déterminant les salaires. En revanche, si l'on adopte la structure salariale des femmes, les différences entre les caractéristiques hommes-femmes expliquent 6 % de l'écart, tandis que celles entre les rendements des caractéristiques qui déterminent les salaires rendent compte de 94 % de l'écart salarial.

Par construction, la méthode de la moyenne pondérée produit des valeurs de décomposition qui sont bornées par celles obtenues lorsque l'on utilise les structures salariales distinctes des hommes et des femmes. Cette méthode produit une composante expliquée de 30 % et une composante inexpliquée de 70 %. Enfin, lorsque comparée aux trois autres modèles de structure salariale concurrentielle, la méthode groupée attribue une proportion plus faible (39 %) de l'écart salarial à des différences de rendement des caractéristiques qui déterminent les salaires, mais une proportion plus forte à des différences entre les caractéristiques des deux sexes.

Ces résultats suggèrent que le choix d'une autre structure salariale comparative peut mener à des interprétations assez différentes des composantes liées aux différences salariales entre les sexes.

La différence de salaires varie en fonction de la répartition des salaires

L'un des principaux inconvénients des méthodes décrites plus haut tient au fait qu'elles ne s'appuient que sur les renseignements concernant la différence moyenne de rémunération et qu'elles se fondent sur l'hypothèse que la grandeur de l'écart salarial et ses composantes ne varient pas le long de la courbe complète de répartition des salaires.

Comparativement à la différence absolue prévue de salaires calculée d'après les attributs du travailleur type, les différences entre les caractéristiques observables hommes-femmes expliquent environ 47 % de la différence de rémunération au 90e centile, mais 57 % au 25e centile. Ces résultats donnent à penser que les 50 % de l'écart salarial imputables aux hommes et aux femmes qui possèdent des caractéristiques différentes déterminant le salaire à la moyenne ne représentent pas exactement les différences observées le long de la courbe de répartition des salaires. En outre, l'importance du rôle joué par les facteurs pertinents dans l'explication de la différence de salaires varie en fonction de la courbe de répartition des salaires. L'expérience de travail, les responsabilités professionnelles et la branche d'activité sont des facteurs qui expliquent davantage les différences de salaires à l'extrémité supérieure qu'à l'extrémité inférieure de la courbe de répartition, tandis que la profession, la situation syndicale et la situation de travail à temps partiel expliquent davantage les différences observées à l'extrémité inférieure qu'à l'extrémité supérieure de la courbe note 5 .

Apport possible d'autres facteurs

Les modèles de régression utilisés pour l'analyse de décomposition n'expliquent pas plus que la moitié de la variation des salaires horaires des hommes et des femmes. On pourrait améliorer l'ajustement du modèle aux données de l'EDTR par l'ajout d'autres variables considérées comme ayant un effet sur le salaire. Les données habituellement utilisées proviennent d'enquêtes-ménages. Les chercheurs n'ont pu démontrer l'incidence potentielle qu'ont les caractéristiques de l'entreprise — autres que la branche d'activité et la taille de l'entreprise — sur les salaires des hommes et des femmes. La nouvelle Enquête sur le milieu de travail et les employés permettra aux chercheurs d'aller au-delà des caractéristiques spécifiques au travailleur en donnant plus d'importance au lieu de travail. Toutefois, comme on l'a déjà mentionné, la différence de salaires ne peut être expliquée que si le facteur en question a un effet sur le salaire et que la répartition du facteur n'est pas la même pour les hommes que pour les femmes.

Les préférences pour un type particulier de travail (c'est-à-dire le travail rémunéré ou autonome, le nombre d'heures travaillées, le lieu de travail, les responsabilités) varient selon la personne. Les différences entre les hommes et les femmes sur le marché du travail peuvent refléter d'authentiques différences quant aux préférences, aux expériences vécues avant l'entrée sur le marché du travail, aux attentes ou aux possibilités. Il est par conséquent difficile de faire la distinction entre une décision fondée sur un choix et un traitement différent fondé sur le sexe. Par exemple, les expériences vécues avant l'entrée sur le marché du travail — qui sont liées aux attentes fondées sur le sexe, aussi bien à la maison que dans le système d'éducation — peuvent avoir une incidence sur le niveau de scolarité atteint et le choix du principal domaine d'études, la participation au marché du travail, le choix de l'emploi et les habitudes de travail.

La plupart des articles publiés à ce jour insistent sur le rôle important de l'imperfection de l'information au sujet des attributs des travailleurs. Les employeurs, qui prennent constamment des décisions concernant le recrutement et les promotions, peuvent tenir compte du sexe pour prédire l'engagement professionnel futur. Certaines entreprises peuvent hésiter à engager des femmes, parce que celles-ci comptent, en moyenne, un plus grand nombre d'interruptions de carrière et un plus grand nombre d'absences pour des raisons familiales que les hommes. Par conséquent, il pourrait y avoir une discrimination statistique (Arrow, 1973). Cela serait particulièrement vrai dans le cas des entreprises dont les coûts de recrutement et de formation sont importants ou dont les barèmes salariaux sont plus élevés. Si le comportement des employeurs évolue à mesure que s'accroît la participation des femmes au marché du travail, l'accès de ces dernières à des emplois fortement rémunérés s'améliorera en raison de la diminution de la discrimination statistique.

Résumé

Bien que les différences entre les gains des hommes et ceux des femmes se soient atténuées depuis les années 1970, elles restent étonnamment persistantes. Les questions de nature quantitative et méthodologique jouent un rôle important dans l'étude de ces différences.

Les estimations du ratio ayant trait à la rémunération dépendent de la mesure utilisée. Les différences conceptuelles entre les sources de données et l'utilisation de mesures des gains qui ne tiennent pas pleinement compte des différences de volume de travail font varier la valeur du ratio. La portion de l'écart salarial attribuable aux différences relatives à l'expérience de travail entre les hommes et les femmes est gravement sous-estimée si l'on utilise des approximations de la mesure de l'expérience plutôt que la mesure réelle de cette dernière. Le niveau de scolarité n'explique qu'une très faible partie de la différence de salaires, mais le principal domaine d'études choisi nous permet de mieux la comprendre.

Les conclusions tirées dépendent fréquemment de la méthode choisie par le chercheur. Les questions étudiées sont souvent énoncées de façon à déterminer dans quelle mesure les femmes sont payées de la même façon que les hommes ayant des caractéristiques comparables. La plupart des études ont pour point de référence la structure salariale des hommes. Cependant, il est possible d'utiliser d'autres structures salariales, qui produisent des estimations de la partie inexpliquée de la différence de salaires variant de 39 % à 94 %.

L'un des inconvénients tient au fait que l'on ne s'appuie que sur l'écart moyen. Un tableau différent se dégage lorsque l'on tient compte de la grandeur de l'écart salarial et ses composantes le long de la courbe complète de répartition des salaires.

 

Source des données

Les données proviennent de l'Enquête sur la dynamique du travail et du revenu (EDTR) de 1997. L'EDTR sert à obtenir des renseignements sur la nature et la tendance liés à l'expérience du marché du travail des personnes selon les genres d'emplois qu'elles ont occupés, leurs gains et certaines caractéristiques de l'employeur. Toutefois, afin de brosser un tableau complet du bien-être économique, l'EDTR permet aussi de recueillir de l'information sur le revenu, et ce, en utilisant des catégories semblables à celles dont on se sert dans l'Enquête sur les finances des consommateurs.

Depuis janvier 1993, l'EDTR a permis de mener annuellement des interviews touchant l'emploi et le revenu auprès de 15 000 à 20 000 ménages à travers le pays. Un nouveau panel s'ajoute à l'enquête tous les trois ans (le deuxième, en 1996) et y participe pendant six ans.

La présente étude porte sur les employés de 18 à 64 ans qui ne sont pas inscrits à un programme d'études à temps plein durant l'année. Les travailleurs autonomes, avec ou sans entreprise constituée en société, ainsi que les personnes pour lesquelles des données manquaient sur le salaire horaire, l'expérience de travail à temps plein toute l'année, le nombre d'années d'études ou le nombre total d'heures habituellement travaillées dans l'emploi en question durant l'année ont été exclus. L'analyse se fonde sur 28 303 emplois — 14 604 occupés par des hommes et 13 699, par des femmes.

Notes

  1. Pour ce qui est des logarithmes moyens des salaires, la différence de salaires horaires femmes-hommes est de 0,220.
  2. Les ratios des salaires horaires femmes-hommes sont de 0,96 pour 0 à 2 années d'expérience de travail réelle en ETPTA, 0,87 pour 3 à 5 années, 0,85 pour 6 à 9 années, 0,82 pour 10 à 19 années et 20 à 29 années, et 0,80 pour 30 années ou plus.
  3. Les hommes comptent 0,4 année d'expérience de travail potentielle et 3,9 années d'expérience réelle de plus que les femmes.
  4. Le calcul de la contribution de chaque principal domaine d'études à l'écart salarial femmes-hommes se fonde sur les résultats du modèle augmenté qui comprend des données détaillées sur la profession et la branche d'activité.
  5. L'expérience de travail, les responsabilités professionnelles et la branche d'activité expliquent 14 %, 13 % et 29 % des différences de salaires entre les hommes et les femmes au 90e centile, comparativement à 12 %, 4 % et 15 % au 25e centile. La profession, la situation syndicale et la situation de travail à temps partiel rendent compte de 6 %, 5 % et 7 % des différences de salaires au 25e centile, alors qu'au 90e centile, ces facteurs ont tendance à réduire la composante expliquée de -15 %, -3 % et -4 %, respectivement. La meilleure façon de concevoir l'expérience consiste à se fonder sur les caractéristiques du travailleur type près du centile considéré, puisque les caractéristiques des travailleurs qui se situent à l'extrémité supérieure de la courbe de répartition des salaires diffèrent de celles du travailleur moyen ou des travailleurs qui se situent à l'extrémité inférieure de cette répartition.

Documents consultés

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  • ARROW, K. « The theory of discrimination », Discrimination in Labor Markets, New Jersey, Princeton University Press, O. Ashenfelter et A. Rees, 1973, p. 3 à 33.
  • BAKER, M., et autres. « The distribution of the male/female earnings differential, 1970-1990 », Canadian Journal of Economics, Canadian Economics Association, août 1995, vol. 28, no 3, p. 479 à 501.
  • CHRISTOFIDES, L., et R. SWIDINSKY. « Wage determination by gender and visible minority status: evidence from the 1989 LMAS », Canadian Public Policy, mars 1994, vol. 20, no 1, p. 34 à 51.
  • CORCORAN, M., et G. DUNCAN. « Work history, labor force attachment and earnings differences between the races and the sexes », Journal of Human Resources, hiver 1979, vol. 14, no 1, p. 3 à 20.
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  • NEUMARK, D. « Employers' discriminatory behavior and the estimation of wage discrimination », Journal of Human Resources, été 1988, vol. 23, no 3, p. 279 à 295.
  • O'NEILL, J., et S. POLACHEK. « Why the gender gap in wages narrowed in the 1980s », Journal of Labor Economics, janvier 1993, vol. 11, no 1, partie 1, p. 205 à 228.
  • WRIGHT, R., et J. ERMISCH. « Gender discrimination in the British labour market : a reassessment », Economic Journal, mai 1991, vol. 101, no 406, p. 508 à 522.

Auteur

Marie Drolet est au service de la Division de l'analyse des entreprises et du marché du travail. On peut communiquer avec elle au (613) 951-5691 ou à marie.drolet@statcan.gc.ca.

 


Appendice : Explication de la différence de salaires entre les hommes et les femmes

L'examen de la structure des salaires des hommes et des femmes se fonde sur l'estimation de la relation entre le taux horaire de salaire et les caractéristiques observées exprimée sous forme semi-logarithmique, à savoir :

(1)équation

où le logarithme naturel du salaire est la variable dépendante, symbol représente un vecteur des caractéristiques du travailleur et de l'employeur, symbol représente un vecteur des coefficients mesurant le rendement de ces caractéristiques et symbol représente le terme d'erreur. Chaque coefficient correspond à la variation en pourcentage du taux horaire de salaire causée par une variation d'une unité de la valeur de la variable explicative.

D'après les régressions calculées, on décompose l'écart entre les logarithmes moyens des salaires des hommes et des femmes en trois termes, à savoir (tableau A1) :

(2)équation

symbol représente le choix de la structure comparative des salaires. On traite du choix de cette structure dans la section Choix d'une structure salariale non discriminatoire. Le premier terme représente la partie expliquée, qui inclut les différences hommes-femmes quant aux caractéristiques des travailleurs symbol évaluées selon la structure salariale concurrentielle symbol. Le résidu, ou composante inexpliquée, est la partie de l'écart attribuable aux différences de rendement des caractéristiques déterminant la rémunération et comprend un avantage masculin (deuxième terme) et un désavantage féminin (troisième terme). Cette décomposition est possible en raison de la propriété des moindres carrés ordinaires (MCO) qui fait que le salaire moyen dans l'échantillon, symbol est égal au produit du vecteur moyen des caractéristiques symbol et des coefficients de régression estimés symbol.

Des études antérieures ont montré qu'il existe entre les hommes et les femmes des différences qui peuvent influer sur leur productivité, mais qui n'expliquent pas nécessairement l'écart entre leurs salaires. Ces différences ne peuvent expliquer l'écart salarial que si elles-mêmes sont d'importants déterminants de la rémunération. L'écart entre les salaires des hommes et des femmes peut tenir à des différences entre les caractéristiques liées à la productivité ou encore à des différences de rémunération pour les mêmes caractéristiques ayant trait à la productivité.

Les méthodes de régression par quantile révèlent une dispersion des valeurs de la différence de salaires que les modèles des MCO ne permettent pas de saisir. Les propriétés du modèle des MCO utilisées plus haut (équation 1) assurent que le salaire moyen, symbol est égal aux caractéristiques moyennes d'échantillon symbol évaluées pour les coefficients de régression estimés symbol. Cependant, le modèle de régression par quantile ne possède aucune propriété comparable et, par conséquent, ne permet aucune décomposition exacte. L'écart entre les logarithmes des salaires des hommes et des femmes peut être exprimé (conformément à la notation de Mueller, 1998) de la façon suivante :

(3)équation

symbol est le logarithme naturel du salaire horaire pour le sexe symbol évalué au quantile symbol est un vecteur des coefficients estimés pour le sexe symbol évalués au quantile symbol est un vecteur des caractéristiques moyennes du travailleur symbol (symbol = m, symbol représente les sexes masculin et féminin respectivement et symbol = 0,10, 0,25, 0,50, 0,75 et 0,90).

Les coefficients du modèle de régression par quantile du logarithme du salaire horaire permettent de calculer deux ensembles de valeurs prévues. Le premier est subordonné aux conditions d'un vecteur des caractéristiques des hommes et des femmes qui se situent autour du centile considéré, tandis que le deuxième est subordonné au vecteur des caractéristiques moyennes de l'ensemble des hommes et des femmes (tableau A2). Pour calculer les salaires prévus des hommes et des femmes au 25e centile, le premier ensemble de variables de contrôle comprend les caractéristiques des personnes comprises entre les 20e et 30e centiles. Le deuxième ensemble de variables de contrôle, utilisé pour calculer les salaires prévus, est simplement celui des caractéristiques moyennes de l'ensemble des hommes et des femmes, respectivement.

Pour chaque centile, les salaires réel et prévu des hommes sont toujours supérieurs à ceux des femmes. La différence prévue de salaires peut s'écarter de la différence réelle de salaires. Par exemple, pour le 10e centile, la différence réelle de salaires est d'environ 23 %. Par contre, la différence prévue est de 18 % si l'on tient compte des caractéristiques du travailleur type, et de 19 % si l'on se fonde sur les caractéristiques moyennes. Si l'on prend pour référence les caractéristiques du travailleur moyen, la différence prévue de salaires augmente le long de la courbe de répartition des salaires. Cependant, on ne peut tirer la même conclusion si l'écart prévu est fondé sur les caractéristiques d'un travailleur type du centile considéré ou si l'on calcule la différence réelle de salaires.

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