Aperçus économiques
Taux d’activité des épouses immigrantes et des épouses nées au Canada, 2006 à 2014

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par René Morissette et Diane Galarneau
Division de l’analyse sociale et de la modélisation et Division de statistique du travail

Date de diffusion : 7 janvier 2016 Date de correction : (si requis)

Début de l'encadré

Le présent article d’Aperçus économiques documente les différences entre les taux d’activité observés pour les épouses immigrantes et les épouses nées au Canada au cours de la période de 2006 à 2014. Il évalue aussi le degré auquel le taux d’activité plus faible des épouses immigrantes, en comparaison de leurs homologues nées au Canada, peut être attribuable à des différences entre certaines caractéristiques socioéconomiques telles que la taille de la famille, la rémunération hebdomadaire du mari et le taux d’activité dans le pays d’origine. L’étude utilise les données de l’Enquête sur la population active et les indicateurs de la Banque mondiale sur les caractéristiques des pays d’origine pour examiner ces questions. L’étude se limite aux femmes nées au Canada et aux femmes immigrantes ayant obtenu le droit d’établissement de 25 à 54 ans qui sont mariées (ou vivant en union de fait) à des maris de 25 à 54 ans qui sont employés à titre de salariésNote 1. Par souci de simplicité, nous utilisons les expressions « mari » et « épouse » pour désigner les hommes et les femmes qui sont mariés ou en union de fait.

Fin de l'encadré

Introduction

Au cours des dernières décennies, plusieurs études canadiennes ont tenté de déterminer pourquoi les hommes et les femmes immigrants gagnent moins que leurs homologues nés au Canada. Les compétences linguistiques, la rétribution relativement faible de l’expérience professionnelle acquise à l’étranger, les problèmes de reconnaissance des titres de compétences, les différences perçues ou réelles en matière de qualité de l’enseignement, la surreprésentation des immigrants récents au sein des petites entreprises et des entreprises offrant des salaires peu élevés ainsi que la discrimination ont tous été cités comme facteurs potentielsNote 2. L’attention considérable accordée à ces différences de rémunération s’explique notamment par le fait qu’elles ont des répercussions importantes sur le revenu des familles, et donc sur leur bien-être économique.

En plus des différences en matière de rémunération horaire, les différences entre les taux d’activité des épouses immigrantes et des épouses nées au Canada peuvent contribuer aux différences constatées en matière de revenu familial. En effet, des taux d’activité plus faibles chez les épouses immigrantes se traduisent par un revenu familial plus faible, même en l’absence de disparités salariales. Pourtant, malgré l’importance de cette question, les taux d’activité des femmes immigrantes ont fait l’objet d’un nombre relativement faible de recherches. Bien que certaines études aient présenté des résultats descriptifs montrant que les femmes immigrantes ont des taux d’activité plus faibles en comparaison des femmes nées au Canada (p. ex. Preston et Giles, 2004), aucune n’avait tenté de quantifier le degré auquel la différence entre les deux groupes peut être expliquée par les caractéristiques socioéconomiques observées.

Le présent article utilise les données de l’Enquête sur la population active (EPA) et les indicateurs de la Banque mondiale sur les caractéristiques des pays d’origine pour combler cette lacune. Il évalue le degré auquel le taux d’activité plus faible des épouses immigrantes, en comparaison de leurs homologues nées au Canada, peut être attribuable à des différences entre certaines caractéristiques socioéconomiques telles que la taille de la famille, la rémunération hebdomadaire du mari et le taux d’activité dans le pays d’origine.

Les épouses immigrantes — tout particulièrement les épouses plus jeunes — sont moins actives sur le marché du travail en comparaison des épouses nées au Canada

Parmi toutes les épouses immigrantes de 25 à 54 ans dont les maris étaient âgés de 25 à 54 ans et étaient employés à titre de salariés, 76 % étaient actives sur le marché du travail, c.-à-d. qu’elles avaient un emploi ou recherchaient activement un emploi, de 2010 à 2014 (tableau 1). Le taux d’activité des épouses nées au Canada était plus élevé d’environ 12 points de pourcentage, soit environ 88 %.

Peu importe leur niveau de scolarité, la taille de leur famille ou leur région de résidence, les épouses immigrantes ont des taux d’activité inférieurs d’au moins 6 points de pourcentage à ceux des épouses nées au Canada. Cette constatation s’applique tout autant à la période de 2006 à 2009 qu’à la période de 2010 à 2014.

Bien que les différences entre les taux d’activité des femmes immigrantes et des femmes nées au Canada soient répandues, leur importance varie selon le groupe d’âge. La différence est la plus prononcée chez les femmes de 25 à 34 ans, avec environ 20 points de pourcentage. Elle est plus modeste chez les femmes de 35 à 44 ans, avec 9 à 10 points de pourcentage, et elle est la plus faible chez les femmes de 45 à 54 ans, avec environ 4 points de pourcentage.

La différence plus faible observée pour les femmes de 45 à 54 ans permet de penser que le taux d’activité des épouses immigrantes peut augmenter avec les années passées au Canada. Le fait que les épouses immigrantes arrivées au Canada au cours des cinq dernières années aient des taux d’activité plus faibles en comparaison de leurs homologues qui sont arrivées il y a au moins six ans confirme cette opinion. Cependant, la relation positive entre le taux d’activité et le nombre d’années depuis l’arrivée ne suppose pas une relation de cause à effet. Elle pourrait plutôt refléter un effet de cohorte, c’est-à-dire des taux d’activité chutant progressivement pour chaque cohorte d’entrée successive d’immigrantsNote 3.

En plus de leur variation selon l’âge, les taux d’activité des épouses immigrantes varient selon la région de naissance. Au cours de la période de 2006 à 2009 et de la période de 2010 à 2014, les femmes immigrantes en provenance de l’Afrique et de l’Asie avaient, en moyenne, des taux d’activité plus faibles que ceux de leurs homologues de l’Amérique latine ou de l’Europe (graphique 1). Selon le pays de naissance pris en compte, les taux d’activité des épouses immigrantes variaient d’environ 50 % à 90 % (tableau 2)Note 4. Les épouses nées au Canada se trouvaient à l’extrémité supérieure de cette répartition, avec 87 %. Dans l’ensemble, le tableau 1 et le tableau 2 indiquent que les différences entre les taux d’activité des épouses immigrantes et des épouses nées au Canada sont généralisées et généralement substantielles.

Description du graphique 1

Le titre du graphique est « Graphique 1 Taux d'activité des femmes immigrantes sur le marché du travail canadien, par région de naissance, 2006 à 2009 et 2010 à 2014 ».
Ceci est un graphique à colonnes groupées.
Il y a au total 2 catégories sur l'axe horizontal. L'axe vertical débute à 0 et se termine à 90 avec des mesures à tous les 10 points.
Il y a 4 séries dans ce graphique.
L'axe vertical s'intitule « pourcentage ».
Les unités de l'axe horizontal sont des années de 2006 à 2009 et 2010 à 2014.
La valeur minimale est 78,9 survenue en 2010 à 2014.
La valeur maximale est 80,3 survenue en 2006 à 2009.
Le titre de la série 2 est « Europe ».
La valeur minimale est 80,0 survenue en 2006 à 2009.
La valeur maximale est 83,6 survenue en 2010 à 2014.
Le titre de la série 3 est « Afrique ».
La valeur minimale est 69,2 survenue en 2010 à 2014.
La valeur maximale est 72,1 survenue en 2006 à 2009.
Le titre de la série 4 est « Asie ».
La valeur minimale est 72,6 survenue en 2006 à 2009.
La valeur maximale est 74,3 survenue en 2010 à 2014.

Tableau de données du graphique 1
Périodes Amérique latine Europe Afrique Asie
2006 à 2009 80,3 80 72,1 72,6
2010 à 2014 78,9 83,6 69,2 74,3

Environ la moitié de la différence entre les taux d’activité des épouses immigrantes et des épouses nées au Canada est attribuable aux caractéristiques socioéconomiques

Différentes raisons peuvent expliquer les taux d’activité relativement faibles des épouses immigrantes.

Leurs familles, qui comptent en moyenne près de quatre personnes, sont plus nombreuses que celles de leurs homologues nées au Canada (tableau 3). Comme la taille de la famille est corrélée négativement avec le taux d’activité (tableau 1), elle peut expliquer au moins certaines des différences documentées ci-dessus.

Aussi, en règle générale, les épouses immigrantes proviennent de pays où la participation des femmes au marché du travail, en comparaison de celle des hommes, est inférieure à celle mesurée au Canada. Par exemple, au cours des années 2000, les ratios femmes-hommes des taux d’activité en Amérique latine, en Afrique et en Asie étaient d’environ 0,60, soit un chiffre beaucoup plus faible que le ratio de 0,84 observé au Canada (graphique 2)Note 5. Si, comme l’illustre le graphique 3, les femmes en provenance de pays où le taux d’activité des femmes est faible en comparaison de celui des hommes participent également moins au marché du travail canadien (Frank et Hou, 2015), alors les différences entre les épouses immigrantes et les épouses nées au Canada peuvent refléter des effets au niveau du pays.

Les offres salariales plus faibles constituent un troisième facteur potentiel. Les modèles économiques simples prédisent que, toutes choses étant égales par ailleurs, une rémunération plus faible rend un emploi moins attrayant et par conséquent, tend à abaisser le taux d’activité. Lorsque l’on compare des femmes dont les caractéristiques observées sont équivalentes, la rémunération horaire pour la période allant de 2006 à 2014 des épouses immigrantes est de 20 % inférieure à celle des épouses nées au CanadaNote 6. Autrement dit, la rémunération horaire réelle normalisée des épouses immigrantes en situation d’emploi est inférieure à celle de leurs homologues nées au Canada. Comme l’illustre le graphique 4, les groupes d’épouses — définis par le pays de naissance — qui gagnent une rémunération horaire réelle normalisée relativement faible comportent également des taux d’activité normalisés relativement faibles. Cette tendance correspond à la thèse voulant que des offres salariales plus faibles puissent abaisser le taux d’activité des épouses immigrantesNote 7.

Description du graphique 2

Le titre du graphique est « Graphique 2 Ratios femmes-hommes des taux d'activité dans le pays de naissance, par région de naissance, moyenne pour 2000 à 2009 ».
Ceci est un graphique à colonnes groupées.
Il y a au total 5 catégories sur l'axe horizontal. L'axe vertical débute à 0 et se termine à 1 avec des mesures à tous les 0,1 points.
Il y a 1 séries dans ce graphique.
L'axe vertical s'intitule « ratio ».
L'axe horizontal s'intitule « Région de naissance ».
Le titre de la série 1 est « ratio ».
La valeur minimale est 0,565 et ceci correspond à « Afrique ».
La valeur maximale est 0,838 et ceci correspond à « Canada ».

Tableau de données du graphique 2
  ratio
Canada 0,838
Amérique latine 0,612
Europe 0,772
Afrique 0,565
Asie 0,588

Description du graphique 3

Taux d'activité des épouses sur le marché du travail canadien et ratios femmes-hommes des taux d'activité dans le pays d'origine, par pays de naissance »

Le titre du graphique est « Taux d’activité des épouses sur le marché du travail canadien et ratios femmes-hommes des taux d’activité dans le pays d’origine, par pays de naissance »

Ceci est un graphique à nuage de points.

Le titre de l’axe vertical est « Taux d’activité (pourcentage) ».

Le titre de l’axe horizontal est « Ratio femmes-hommes des taux d’activité ».

Description : Les taux d’activité sont présentés pour les femmes nées au Canada et les femmes immigrantes ayant obtenu le droit d’établissement de 25 à 54 ans, mariées (ou vivant en union de fait) à des maris de 25 à 54 ans qui sont employés à titre de salariés. On calcule la moyenne des taux pendant la période de 2006 à 2014 pour les pays comptant au moins 20 observations d’épouses employées à titre de salariées, c.-à-d. pour 85 pays (y compris le Canada). On calcule ensuite la moyenne des ratios femmes-hommes des taux d’activité pendant la période de 2000 à 2009. Un ratio femmes-hommes des taux d’activité de 1 signifie que le taux d’activité des femmes dans un pays donné est égal à celui des hommes. Ce graphique montre que les femmes en provenance de pays où le taux d’activité des femmes est faible en comparaison des hommes participent également moins au marché du travail canadien.

Les sources de données utilisées pour la création de ce graphique sont l’Enquête sur la population active (mars et septembre) de Statistique Canada et les indicateurs du développement social de la Banque mondiale.

Description du graphique 4

Taux d'activité normalisés des épouses sur le marché du travail canadien et rémunération horaire réelle normalisée gagnée au Canada par les épouses employées à titre de salariées, par pays de naissance, 2006 à 2014 »

Le titre du graphique est « Taux d’activité normalisés des épouses sur le marché du travail canadien et rémunération horaire réelle normalisée gagnée au Canada par les épouses employées à titre de salariées, par pays de naissance, 2006 à 2014 »

Ceci est un graphique à nuage de points.

Le titre de l’axe vertical est « Taux d’activité normalisés (pourcentage) ».

Le titre de l’axe horizontal est « Logarithmes normalisés des salaires horaires réels (dollars de 2014) ».

Description : Ce graphique illustre l’association entre les taux d’activité normalisés et les logarithmes normalisés des salaires horaires réels des femmes nées au Canada et des femmes immigrantes ayant obtenu le droit d’établissement de 25 à 54 ans, mariées (ou vivant en union de fait) à des maris de 25 à 54 ans qui sont employés à titre de salariés. Les chiffres sont présentés pour les pays comptant au moins 20 observations d’épouses employées à titre de salariées, c.-à-d. pour 85 pays (y compris le Canada). On obtient les taux d’activité normalisés et les salaires réels une fois que sont contrôlées toutes les caractéristiques socioéconomiques indiquées au tableau 4 de l’étude. Le tableau montre que les groupes de femmes, définis par le pays de naissance, qui gagnent des salaires horaires réels normalisés relativement faibles affichent également des taux d’activité normalisés relativement faibles.

Les sources de données utilisées pour la création de ce graphique sont l’Enquête sur la population active (mars et septembre) de Statistique Canada et les indicateurs du développement social de la Banque mondiale.

On s’attend à ce que d’autres facteurs soient associés à des taux d’activité plus élevés chez les femmes immigrantes. Leur niveau de scolarité plus élevé en comparaison des femmes nées au Canada en est un exemple. Notons aussi le fait que les maris des épouses immigrantes gagnent une rémunération hebdomadaire plus faible en comparaison des maris des épouses nées au Canada (tableau 3). Si la rémunération plus faible des maris incite les femmes à intensifier leur activité sur le marché du travail (Devereux, 2004; Morissette et Hou, 2008), les épouses immigrantes devraient donc, toutes choses étant égales par ailleurs, afficher des taux d’activité plus élevés que ceux des épouses nées au Canada.

Parmi les cinq facteurs — la taille de la famille, les ratios femmes-hommes des taux d’activité au niveau du pays, la rémunération horaire réelle des épouses, le niveau de scolarité des épouses et la rémunération des maris — la rémunération horaire réelle des épouses est le plus difficile à évaluer. Cela s’explique par le fait que bien que la rémunération horaire réelle puisse être observée pour les épouses en situation d’emploi, elle ne l’est pas pour les épouses sans emploi. Par conséquent, il est nécessaire d’estimer les offres salariales potentielles reçues par les femmes sans emploi, une tâche difficile au plan statistiqueNote 8. À l’inverse, les quatre autres facteurs peuvent être observés à la fois pour les épouses en situation d’emploi et les épouses sans emploi.

Il s’agit de la raison pour laquelle l’étude évalue dans un premier temps la contribution de ces quatre facteurs au moyen d’analyses multivariéesNote 9. Les résultats sont illustrés au tableau 4. Au cours de la période de 2006 à 2014, le taux d’activité des épouses immigrantes était plus faible de 11,4 points de pourcentage en comparaison des épouses nées au Canada. Une fois les effets de la taille de la famille contrôlés, l’écart diminue à 9,9 points de pourcentage, ce qui permet de penser que le taux d’activité plus faible des épouses immigrantes résulte en partie de leurs familles plus nombreuses. Une fois les effets de la taille de la famille et des ratios femmes-hommes des taux d’activité au niveau du pays contrôlés, la différence entre les taux d’activité des femmes immigrantes et des femmes nées au Canada est ramenée à 4,8 points de pourcentage. Cela indique que les effets au niveau du pays, mesurés par les ratios femmes-hommes des taux d’activité, comptent pour une proportion considérable de la différence de 11,4 points de pourcentage. L’ajout de contrôles additionnels pour l’âge et le niveau de scolarité des épouses accroît la différence corrigée entre les taux d’activité (de -4,8 points de pourcentage à -5,8 points de pourcentage). Ce résultat est prévisible, puisque les épouses immigrantes sont plus instruites que les épouses nées au Canada, et que le taux d’activité est corrélé positivement avec le niveau de scolarité. Une fois les effets de la rémunération hebdomadaire des maris contrôlés (ainsi que la taille de la famille, les ratios femmes-hommes des taux d’activité au niveau du pays et l’âge et le niveau de scolarité des épouses), la différence corrigée en valeur absolue augmente également (de -5,8 points de pourcentage à -6,5 points de pourcentage), ce qui confirme la thèse voulant que la rémunération hebdomadaire plus faible des maris immigrants n’explique pas le taux d’activité relativement faible de leurs épouses.

Après l’inclusion de contrôles additionnels pour le nombre d’autres membres de la famille en situation d’emploi, le lieu de résidence, l’âge et le niveau de scolarité des maris ainsi que les indicateurs du statut de travailleur à temps plein et du statut d’employé permanent des maris, la différence entre les taux d’activité des épouses immigrantes et des épouses nées au Canada se maintient à 5,3 points de pourcentage. Ainsi, les caractéristiques socioéconomiques illustrées au tableau 4 contribuent à environ la moitié de la différence de 11,4 points de pourcentage constatée pour les taux d’activité observés pendant la période de 2006 à 2014, la taille de la famille et les effets au niveau du pays contribuant à une part importante de la différenceNote 10,Note 11.

Incertitude quant à la contribution de la rémunération

L’étape suivante consiste à déterminer si, une fois contrôlés les effets de toutes les caractéristiques abordées précédemment (et illustrées au tableau 4), la différence entre les taux d’activité des épouses immigrantes et des épouses nées au Canada est encore davantage réduite lorsque la rémunération des épouses est prise en considération.

Comme on l’avait évoqué plus haut, la réponse à cette question présente des défis au plan statistique parce que les offres salariales ne peuvent pas être observées pour les épouses sans emploi. Certaines épouses sans emploi d’un âge, niveau de scolarité, taille de la famille et lieu de résidence donnés peuvent être inactives parce que le coût de la participation au marché du travail est relativement élevé pour ellesNote 12. D’autres peuvent être inactives parce que les salaires qu’elles pourraient potentiellement gagner sont relativement faibles. Plus spécifiquement, certaines de ces épouses peuvent potentiellement gagner un salaire inférieur à la rémunération horaire type — par exemple, la rémunération horaire médiane — reçue par leurs homologues en situation d’emploi. La difficulté découle ici du fait que bien que certaines épouses sans emploi puissent se voir offrir des salaires qui correspondent, disons, au 40e centile de l’échelle de la distribution des salaires pour les femmes en situation d’emploi dans une catégorie donnée d’âge, de niveau de scolarité, de taille de la famille et de lieu de résidence, d’autres peuvent potentiellement gagner moins ou plus que le 40e centile si elles acceptent une offre d’emploi.

Le graphique 5 montre que la distinction est importante au plan empirique. Les différences entre les taux d’activité des épouses immigrantes et des épouses nées au Canada sont calculées une fois contrôlées toutes les caractéristiques socioéconomiques du tableau 4, ainsi que la rémunération des épouses. Les résultats sont affichés pour différentes stratégies d’imputation de la rémunérationNote 13. Lorsque la rémunération des épouses nées au Canada sans emploi dans un groupe donné (défini par l’interaction entre trois catégories d’âge, trois niveaux de scolarité, quatre catégories de taille de famille et sept régions) est imputée en fonction de la rémunération horaire médiane de leurs homologues en situation d’emploi dans ce même groupe, et lorsque la rémunération des épouses immigrantes sans emploi en provenance d’un pays donné est imputée en fonction de la rémunération médiane de leurs homologues en situation d’emploi en provenance de ce même pays, la différence corrigée entre les taux d’activité demeure inchangée, à 5,3 points de pourcentageNote 14. Lorsque la rémunération des épouses sans emploi est imputée en fonction du 40e centile des cellules définies ci-dessus, la différence corrigée chute de 5,3 points de pourcentage à 3,2 points de pourcentage. Enfin, lorsque l’imputation de la rémunération est fondée sur le 30e centile, la différence corrigée est ramenée à environ 1,0 point de pourcentage. Ainsi, ces chiffres permettent de penser que la rémunération plus faible obtenue par les épouses immigrantes peut en partie expliquer pourquoi les épouses immigrantes sont moins actives sur le marché du travail que leurs homologues nées au Canada. Cependant, il existe une incertitude quant à la contribution exacte de la rémunération à la différence constatée entre les taux d’activité observés chez les deux groupes de femmes.

Description du graphique 5

Le titre du graphique est « Graphique 5 Différence corrigée entre les taux d'activité des épouses immigrantes et des épouses nées au Canada, 2006 à 2014 ».
Ceci est un histogramme à barres groupées.
Ceci est un graphique à barres horizontales, donc les catégories sont sur l'axe vertical et les valeurs sont sur l'axe horizontal.
Il y a au total 5 catégories sur l'axe vertical. L'axe horizontal débute à -6 et se termine à 2 avec des mesures à tous les 1 points.
Il y a 1 séries dans ce graphique.
L'axe horizontal s'intitule « points de pourcentage ».
L'axe vertical s'intitule « Stratégie d'imputation de la rémunération ».
Le titre de la série 1 est « points de pourcentage ».
La valeur minimale est -5,3 et ceci correspond à « Aucun contrôle pour la rémunération et Rémunération imputée à la médiane ».
La valeur maximale est 1,4 et ceci correspond à « Rémunération imputée au 20e centile ».

Tableau de données du graphique 5
  points de pourcentage
Aucun contrôle pour la rémunération -5,3
Rémunération imputée à la médiane -5,3
Rémunération imputée au 40e centile -3,2
Rémunération imputée au 30e centile -0,9
Rémunération imputée au 20e centile 1,4

Les femmes immigrantes célibataires et les femmes célibataires nées au Canada présentent des taux d’activité similaires

En l’absence d’un partenaire qui peut potentiellement contribuer au revenu d’emploi de la famille, les femmes immigrantes peuvent être actives sur le marché du travail à un degré similaire à celui des femmes nées au Canada en raison de la nécessité économique. Le tableau 5 illustre cette situation en comparant les taux d’activité des femmes immigrantes et des femmes nées au Canada de 25 à 54 ans qui ne sont ni mariées ni en union de fait. Dans l’ensemble, les grandes différences en matière de taux d’activité observées entre les épouses immigrantes et les épouses nées au Canada ne sont pas constatées pour les femmes célibataires. Environ 83 % des femmes célibataires immigrantes étaient actives sur le marché du travail de 2010 à 2014, en comparaison de 84 % des femmes célibataires nées au Canada. Puisque les femmes célibataires immigrantes sont plus instruites que leurs homologues nées au Canada, l’inclusion de contrôles pour les niveaux de scolarité chez les femmes donne lieu à une légère augmentation des différences entre les taux d’activité des deux groupes, soit d’environ 1,0 point de pourcentage à entre 2,0 points de pourcentage et 2,6 points de pourcentage, selon que l’on prend en considération la période de 2006 à 2009 ou la période de 2010 à 2014Note 15. Les différences correspondantes entre les épouses immigrantes et les épouses nées au Canada sont sensiblement plus importantes, soit de 11,5 points de pourcentage à 12,3 points de pourcentage. Par conséquent, les différences entre les taux d’activité des femmes immigrantes et des femmes nées au Canada sont très faibles pour les femmes célibataires et sont substantiellement plus faibles pour ce groupe en comparaison des femmes mariées.

Sommaire

Les épouses immigrantes sont moins actives sur le marché du travail canadien que les épouses nées au Canada. Comme ce taux d’activité plus faible a des répercussions sur le revenu et le niveau de vie des familles d’immigrants, il importe de bien comprendre les sources de cette différence.

La présente étude montre que les différences entre les caractéristiques socioéconomiques expliquent environ la moitié de la différence entre les taux d’activité des épouses immigrantes et de leurs homologues nées au Canada observés pour la période de 2006 à 2014. Les résultats indiquent que les ratios femmes-hommes des taux d’activité dans le pays d’origine et, dans une moindre mesure, la taille de la famille sont des déterminants importants de la différence entre les taux d’activité observés chez les deux groupes de femmes. Les salaires moins élevés obtenus par les femmes immigrantes sur le marché du travail canadien semblent jouer un rôle, cependant il est difficile de quantifier leur contribution.

Les résultats soulèvent la question de savoir quels sont les facteurs que les ratios femmes-hommes des taux d’activité au niveau du pays permettent de saisir. Frank et Hou (2015) ont montré que ces ratios demeurent statistiquement significatifs dans les modèles des taux d’activité des femmes immigrantes, même une fois les rôles de l’homme et de la femme dans le pays d’origine contrôlésNote 16. Cette constatation permet de penser que ces ratios permettent de saisir, du moins partiellement, d’autres influences qui ont une incidence sur les taux d’activité des femmes immigrantes.

Dans l’ensemble, l’étude montre que toute compréhension approfondie des différences entre le revenu familial des couples immigrants et des couples nés au Canada nécessite de comprendre non seulement les différences entre les taux de rémunération — ce que la plupart des études au Canada ont réussi à établir — mais aussi les différences entre les taux d’activité des épouses.

Bibliographie

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Preston, V., et W. Giles. Employment Experiences of Highly Skilled Immigrant Women: Where Are They in the Labour Market? Article présenté au colloque Gender and Work: Knowledge Production in Practice, Université York, 1er et 2 octobre 2004.

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