Vivre en couple chacun chez soi

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par Martin Turcotte

[Communiqué dans Le Quotidien] [Article intégral en PDF]

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Début du texte

Début de l'encadré

Aperçu de l'étude

Plusieurs personnes entretiennent une relation de couple stable mais ne partagent pas le même domicile. Ces couples sont appelés « unions non cohabitantes » ou « couples vivant chacun chez soi » (VCCS). Combien de personnes sont dans une telle situation? S’agit-il d’une période transitoire vers d’autres formes de vie à deux, ou d’un choix de vie?

  • En 2011, 7 % des personnes de 20 ans et plus, représentant 1,9 million de Canadiens, faisaient partie d’un couple VCCS. Cette proportion était en légère diminution par rapport à 2001.
  • Les jeunes adultes étaient plus susceptibles d’être dans une relation de type VCCS. Chez les 20 à 24 ans, près de 1 personne sur 3 était en couple VCCS (31 %). Cette proportion diminuait à 17 % chez les 25 à 29 ans et variait entre 3 % et 5 % au sein des groupes d’âge se situant entre 30 et 59 ans.
  • Bien que seulement 2 % des personnes de 60 ans et plus faisaient partie d’une union non cohabitante en 2011, cette proportion était légèrement à la hausse par rapport à 2001.
  • Alors que plus de 80 % des jeunes adultes en couple VCCS avaient l’intention d’habiter un jour avec leur conjoint actuel, c’était le cas de moins de 30 % des personnes de 60 ans et plus.

Fin de l'encadré

Introduction

Au Canada, comme ailleurs dans le monde, les statistiques sur la famille classifient généralement les adultes qui sont dans une relation de couple comme étant des personnes mariées ou en union libre vivant ensemble. Toutefois, les autres personnes ne sont pas toutes « célibataires » pour autant. En effet, une part non négligeable d’entre elles entretiennent une relation de couple stable, sans toutefois partager le même logement. Ce sont les personnes en couple vivant chacun chez soi (VCCS)Note1.

Les sociologues et les démographes s’intéressent de plus en plus à ce genre d’unions sans cohabitation, autant en ce qui a trait à leur signification du point de vue de l’évolution des relations de couple que des valeurs sociales qui leur sont sous-jacentesNote2. C’est aussi le cas d’organismes qui identifient diverses tendances sociales et démographiques pertinentes pour les politiques publiquesNote3.

Dans quelle mesure doit-on se préoccuper de ce type d’union? En effet, si les unions non cohabitantes sont principalement concentrées chez jeunes adultes et qu’elles se transforment la plupart du temps en cohabitation (mariage ou union libre) ou en séparation, les conséquences sociales et démographiques liées aux couples VCCS sont peut-être relativement limitées.

Si, par contre, la durée et la fréquence de telles unions devaient être à la hausse, diverses conséquences pourraient en découler. Parmi celles-ci, on peut penser aux impacts possibles sur le marché du logement ou sur la fécondité. Chez les personnes âgées, le fait de cohabiter ou non pourrait avoir des conséquences sur les soins fournis par les proches en cas de problème de santé. De plus, une hausse des couples VCCS pourrait apporter une perspective différente vis-à-vis certaines réalités légales et financières, car ils ne sont pas liés par les lois familiales actuelles.

Au Canada, la seule source de données permettant de réaliser un profil des couples VCCS est l’Enquête sociale générale (ESG) sur la famille de 2011 et de 2001 (voir Sources de données, méthodes et définitions). Les cycles sur la famille de l’ESG comprennent plusieurs questions détaillées sur une foule de renseignements matrimoniaux, qu’il s’agisse du statut matrimonial actuel, de l’historique des relations de couple, ou même des intentions de fertilité. Elle définit les personnes en couple VCCS comme étant celles qui n’étaient ni mariées ni en union libre, mais qui avaient une « relation amoureuse stable » avec quelqu’un « vivant dans un autre domicile » au moment de l’enquête.

La première partie de cet article sera consacrée à un profil des couples VCCS, ainsi qu’à leur évolution au cours de la dernière décennie. La deuxième consacrée au degré de stabilité des couples VCCS, en fonction de l’étape de vie des répondants. Autrement dit, les couples VCCS mènent-ils généralement à la cohabitation? S’agit-il, pour certains, d’un choix qui reflète une réelle préférence pour une vie de couple sans cohabitation Note4?

Environ 1 personne sur 13 entretient une relation de couple non cohabitante

En 2011, environ 1,9 million de personnes, soit 7,4 % des personnes de 20 ans et plus, étaient en couple VCCS — c’est à dire qu’elles étaient célibataires, veuves, divorcées ou séparées, mais entretenaient une relation amoureuse stable avec une personne vivant dans un autre domicile (tableau 1). Il s’agissait d’une proportion comparable à celles enregistrées dans d’autres paysNote5. À ce groupe, on peut ajouter environ 240 000 personnes qui, tout en étant mariéesNote6, vivaient dans un logement séparé de celui de leur conjoint (voir Les mariages de navetteurs). Celles-ci représentaient cependant moins de 1 % des 20 ans et plusNote7.

Tableau 1
Situation conjugale des personnes de 20 ans et plus, 2001 et 2011
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de situation conjugale des personnes de 20 ans et plus total, 2001 et 2011, calculées selon nombre (en milliers) et pourcentage unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
Total
2001 2011 2001 2011
nombre (en milliers) pourcentage
En couple VCCSNote 1 1 899 1 930 8,4 7,4Note *
Marié mais vivant dans un logement séparé 131 240Note * 0,6 0,9Note *
Marié 12 799 14 300Note * 56,7 54,8Note *
Union libre 2 381 3 237Note * 10,6 12,4Note *
Sans conjoint 5 352 6 393Note * 23,7 24,5
* différence statistiquement significative par rapport à 2001
1. Personnes en couple vivant chacun chez soi.
Source : Statistique Canada, Enquête sociale générale, 2001 et 2011.

En comparaison, le nombre de personnes en couple partageant le même logement était nettement plus élevé. En 2011, environ 14,3 millions de personnes de 20 ans et plus, soit 54,8 % de cette population, étaient mariées et vivaient sous le même toit. Un autre 3,2 millions de personnes, ou 12,4 % des Canadiens de 20 ans et plus, étaient conjoints de fait et cohabitaient. Finalement, 6,4 millions de personnes n’étaient pas dans une relation de couple stable (24,5 % des 20 ans et plus).

Contrairement à la perception selon laquelle la proportion de personnes en couple VCCS est à la hausseNote8, celle-ci était en fait plus basse en 2011 (7,4 %) qu’elle ne l’était en 2001 (8,4 %). Cette diminution a été accompagnée, durant la même période, d’une hausse du nombre et de la proportion de personnes sans conjoint alors que la proportion de personnes mariées ou en union de fait est restée stableNote9.

Beaucoup plus de personnes en couple VCCS chez les jeunes adultes

Les jeunes adultes, dont un très grand nombre vivent avec leurs parents, étaient nettement plus susceptibles de faire partie d’un couple VCCS que leurs aînés (graphique 1). Chez les 20 à 24 ans, près de 1 personne sur 3 était en couple VCCS (31 %). En comparaison, cette proportion était de 5 % chez les 30 à 39 ans. Chez les personnes de 70 ans et plus, seulement 2 % entretenaient une relation de couple stable avec quelqu’un vivant dans un autre domicile. Ainsi, les personnes de 20 à 24 ans représentaient 9 % de la population des 20 ans et plus, mais 38 % des personnes entretenant une relation de couple non cohabitante (graphique 2).

Description du graphique 1

Graphique 1 Chez les jeunes adultes de 20 à 24 ans, près de 1 sur 3 faisait partie d'un couple vivant chacun chez soi, 2011

Description du graphique 2

Graphique 2 Les jeunes adultes de 20 à 24 ans représentaient 38 % de toutes les personnes en couple VCCS1, 2011

Étant donné les proportions plus faibles de personnes en couple VCCS au sein des groupes d’âge plus avancés, on pourrait croire que le vieillissement de la population est à l’origine du déclin de la proportion de personnes faisant partie de ce genre d’unions. Cependant, si la structure par âge en 2011 était demeurée identique à ce qu’elle était en 2001, la diminution aurait été pratiquement la même. La baisse est plutôt venue du fait que les adultes de moins de 60 ans étaient moins susceptibles de se trouver en union VCCS en 2011 qu’il y a 10 ans. Chez les 60 ans et plus, on a plutôt observé une légère progression de la proportion de personnes en couple VCCS.

Des différences entre groupes d’âge existaient aussi en ce qui a trait aux autres formes d’arrangements. Ainsi, tandis que les personnes de 20 à 34 ans étaient plus susceptibles d’être seules en 2011 qu’en 2001, les 60 ans et plus devenaient proportionnellement de moins en moins nombreux à l’être (tableau 2). Les personnes plus âgées étaient également plus susceptibles d’être en union libre que 10 ans auparavantNote10.

Tableau 2
Situation conjugale1 des personnes de 20 ans et plus, selon l'âge et le sexe, 2001 et 2011
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de situation conjugale des personnes de 20 ans et plus total, 20 à 34 ans, 35 à 59 ans, 60 ans et plus, 2001 et 2011, calculées selon pourcentage unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
Total 20 à 34 ans 35 à 59 ans 60 ans et plus
2001 2011 2001 2011 2001 2011 2001 2011
pourcentage
Total  
En couple VCCSNote 2 8,4 7,4Note * 19,6 17,9Note * 5,0 4,1Note * 1,8 2,3Note *
Union libre 10,6 12,6Note * 17,2 18,4 10,6 13,5Note * 2,0 4,8Note *
Marié 57,3 55,5Note * 33,4 29,9Note * 68,4 66,3Note * 62,8 62,6
Sans conjoint 23,7 24,5 29,9 33,7Note * 16,1 16,1 33,5 30,3Note *
Hommes  
En couple VCCSNote 2 9,0 7,3Note * 20,2 17,5 5,3 3,7Note * 2,4 2,9
Union libre 11,0 13,2Note * 15,7 16,6 11,5 14,7Note * 2,7 6,3Note *
Marié 58,8 58,0 29,7 27,0 68,9 67,3 75,4 74,9
Sans conjoint 21,2 21,5 34,4 38,9Note * 14,3 14,3 19,6 15,9Note *
Femmes  
En couple VCCSNote 2 7,8 7,5 19,0 18,4 4,7 4,6 1,3 1,8
Union libre 10,2 12,0Note * 18,6 20,3 9,7 12,3Note * 1,4 3,5Note *
Marié 55,8 53,1Note * 37,1 32,8Note * 67,8 65,3Note * 52,3 52,0
Sans conjoint 26,2 27,4Note * 25,2 28,5Note * 17,8 17,9 45,0 42,7
* différence statistiquement significative par rapport à 2001
1. Contrairement au tableau 1, les personnes mariées ou en union libre qui vivent dans des logements séparés sont simplement considérées dans les catégories ‘Marié’ et ‘Union libre’.
2. Personnes en couple vivant chacun chez soi.
Source : Statistique Canada, Enquête sociale générale, 2001 et 2011.

Bien que l'âge reste sans conteste le facteur le plus déterminant pour ce genre d'union, d'autres facteurs sont aussi associés à la probabilité de faire partie d'une union non cohabitante, mais ceux-ci n'étaient pas de même ampleur (voir « Facteurs associés aux chances d'être en relation VCCS » dans Sources de données, méthodes et définitions).

Les personnes en couple VCCS le sont depuis peu de temps

Quelles sont les autres caractéristiques des couples VCCS? Généralement, les personnes en couple VCCS se trouvaient dans cette situation depuis assez peu de temps : pour 2 personnes sur 3 dans un couple VCCS, la relation avait moins de 3 ans.

La durée moyenne d’une relation de couple VCCS variait sensiblement selon l’âge. Elle était naturellement plus courte chez les plus jeunes soit de 2,3 ans chez les 20 à 29 ans, comparativement à 3,8 ans chez les 40 à 49 ans et à 7,5 ans chez les 60 ans et plus (graphique 3).

Description du graphique 3

Graphique 3 La durée des relations est en moyenne relativement courte parmi les personnes en couple VCCS1, 2011

La forte majorité des personnes étaient assez sérieusement engagées dans leur relation pour en informer leur entourage. En effet, 9 personnes en couple VCCS sur 10 ont déclaré que la plupart ou tous les membres de leur famille et amis proches étaient au courant qu’elles avaient un conjoint.

En 2011, 20 % des personnes en couple VCCS demeuraient à au moins une heure de route de leur conjoint, 34 % vivaient de 30 minutes à 1 heure de route, et 45 % vivaient dans le même voisinage. Ces pourcentages variaient peu en fonction des groupes d’âge, exception faite des 60 ans et plus qui avaient plus tendance à résider dans le même voisinage que leur conjoint non cohabitant.

Choix de vie ou période de transition?

Les renseignements à propos de la durée semblent suggérer que bon nombre de couples VCCS sont transitoires chez les jeunes adultes, c'est-à-dire qu’ils constituent une étape relativement brève avant le mariage ou l’union libre. Chez les plus âgés, pour qui ces unions sont souvent une seconde ou une troisième relation, ce type d’union semble au contraire durer plus longtemps.

Ainsi, les personnes en couple VCCS sont-elles dans cette situation par choix ou par nécessité? Parmi les jeunes adultes, une relation VCCS est peut-être une nécessité à ce stade de leur cycle de vie, étant donné les contraintes imposées par les études postsecondaires et le coût élevé du logementNote11. Les groupes plus âgés ne sont pas non plus à l’abri de certaines contraintes. Par exemple, il peut être difficile de trouver des offres d’emploi satisfaisantes dans la même région pour les deux conjoints.

Afin de déterminer si la relation VCCS résulte d’un choix ou d’une obligation, une question de l’ESG a été posée à toutes les personnes en couple VCCS, laquelle était formulée comme suit : « Quelle est la raison pour laquelle vous vivez séparément? »

À cette question, beaucoup ont répondu que les « circonstances les y obligeaient » (42 %). Cependant, beaucoup ont également évoqué les raisons suivantes :

  1. 32 % ont mentionné qu’elles et leur conjoint avaient décidé de vivre séparément;
  2. 17 % ont rapporté ne pas avoir songé à l’idée de vivre ensemble;
  3. 7 % ont indiqué qu’elles-mêmes voulaient vivre séparément;
  4. 1 % ont indiqué que leur conjoint voulait vivre séparément.

Les personnes en couple VCCS par choix peuvent donc être raisonnablement définies comme étant celles ayant choisi les options a) et c). Le choix était donc clairement un facteur dans 39 % des cas.

Cependant, tout comme c’était le cas pour la durée moyenne, les résultats varient sensiblement selon le groupe d’âge. Ainsi, les deux tiers des personnes de 60 ans et plus ont mentionné être en couple VCCS par choix (c.-à-d., qu’elles avaient décidé de vivre séparément, avec ou sans l’accord du conjoint) alors que c’était le cas de moins du tiers des jeunes adultes de 20 à 24 ans (31 %).

Aux personnes qui vivaient séparément à cause de circonstances les y obligeant, on a demandé de préciser laquelle était la principale. Les circonstances liées aux études (26 %) et celles d’ordre financier (25 %) étaient mentionnées le plus souvent — particulièrement chez les jeunes adultes de moins de 30 ans. Les circonstances professionnelles étaient quant à elles évoquées par 15 % des répondantsNote12, une proportion qui augmentait à 32 % chez les 40 à 49 ans.

Parmi les répondants ayant décidé de vivre séparément — donc pour qui le couple VCCS représentait un choix — on a aussi demandé de préciser pour quelle raison principale ils avaient opté pour un tel arrangement. Reflétant le fait que plusieurs couples VCCS aient été formés de façon relativement récente et qu’ils soient formés de jeunes adultes, la raison la plus fréquemment mentionnée était « de ne pas encore se sentir prêts à vivre ensemble » (48 %)Note13. Le « désir d’indépendance », souvent associé au phénomène des couples vivant séparément, a été quant à lui évoqué par 28 % des personnes en couple VCCS par choix, ou 11 % de la totalité des personnes en couple VCCS.

Ce désir d’indépendance était cependant plus fréquemment mentionné chez les plus âgés. Ainsi, 37 % de toutes les personnes de 60 ans et plus faisant partie d’un couple VCCS ont mentionné qu’il s’agissait d’un choix motivé par un désir d’indépendance. En comparaison, seuls 15 % des 40 à 49 ans et 4 % des 20 à 24 ans ont évoqué cette raisonNote14.

Intentions de cohabiter

Jusqu’ici, les résultats présentés semblent démontrer qu’un nombre important de relations VCCS sont transitoires, en particulier pour les jeunes — plusieurs sont en relation depuis peu de temps et bon nombre sont en couple VCCS à cause des circonstances plutôt que par choix. On en arrive à la même conclusion en interrogeant directement les principaux intéressés à propos de leurs intentions quant à la cohabitation.

En effet, lorsqu’on leur a demandé si elles avaient l’intention d’habiter avec leur conjoint actuel, la forte majorité des personnes en couple VCCS ont répondu positivement (33 % ont dit « oui, certainement » et un autre 37 % ont affirmé « oui, probablement »). En tout, moins de 1 personne sur 6, parmi celles en couple VCCS ont affirmé qu’elles n’avaient pas l’intention de cohabiter. Cependant, presque 60 % des personnes de 60 ans et plus n’avaient pas l’intention d’emménager avec leur conjoint (graphique 4) Note15.

Description du graphique 4

Graphique 5 L'intention d'emménager avec son conjoint diminue avec l'âge, 2011

Si les répondants sont en couple VCCS par choix et disent aussi ne pas avoir l’intention de cohabiter, ils peuvent alors clairement être considérés comme étant en couple « non transitoire ». Selon ces critères, 11 % seulement des personnes en couple VCCS étaient dans un couple non transitoire, c’est-à-dire, désiré et envisagé comme tel pour l’avenir. Cette proportion passait cependant de 4 %, chez les 20 à 34 ans, à 17 %, chez les 35 à 59 ans, et à 42 %, chez les 60 ans et plus.

Avec le vieillissement de la population, il sera intéressant de suivre l’évolution du nombre de personnes en couple VCCS non transitoire. En effet, selon d’autres études, les personnes qui sont aujourd’hui au tournant de la soixantaine (les baby-boomers) seraient beaucoup plus susceptibles que les cohortes précédentes de former un couple VCCSNote16. Les chiffres semblent d’ailleurs confirmer cette tendance puisque, chez les 60 ans et plus, on constate une diminution de la proportion de personnes sans relation de couple stable et une légère hausse des couples VCCS. Il convient toutefois de rappeler que les personnes âgées en relation de couple non cohabitante demeurent peu nombreuses.

Conclusion

Les personnes vivant en couple chacun chez soi représentent une minorité de la population adulte au Canada, soit environ 1 personne sur 13 chez les 20 ans et plus. Par rapport à 10 ans auparavant, on a même constaté un léger recul de cette proportion. Les personnes les plus susceptibles de faire partie de ce genre d’unions sont surtout des jeunes adultes. Toutefois, les tendances semblent surtout à la baisse chez les jeunes et légèrement à la hausse chez les plus âgés.

Étant donné que les couples VCCS demeurent concentrés chez les plus jeunes, plusieurs se trouvent dans cette situation en raison de circonstances les y obligeant. Un certain nombre sont cependant dans une telle relation par choix, surtout chez les plus âgés. Il n’est donc pas exclu que le vieillissement de la population pourrait avoir un impact sur ces relations à l’avenir. En effet, on a constaté que le nombre de personnes en couple VCCS qui désiraient demeurer dans cette situation avait sensiblement augmenté chez les plus âgés entre 2001 et 2011. Cette tendance est importante puisque le nombre de veufs et de veuves augmentera vraisemblablement dans l’avenir. Dans ce contexte, les relations de couple VCCS pourraient constituer une source de soutien émotif et contribuer au bien-être de certains aînés ne désirant pas nécessairement reformer une union et cohabiterNote17. La question des couples VCCS reste donc une histoire à suivre.

Martin Turcotte est analyste principal à la Division de la statistique du travail de Statistique Canada.


Notes

  1. Dans la littérature spécialisée sur le sujet, on fait plus souvent appel à l’expression LAT pour Living-apart-together.
  2. Voir Duncan et Phillips (2011) et Bawin-Legros et Gauthier (2001).
  3. La Commission économique des Nations Unies pour l'Europe a reconnu les relations VCCS comme l'une des cinq formes de familles émergentes (voir Commission économique des Nations Unies pour l'Europe, 2011). De plus, diverses organismes statistiques recueillent désormais des renseignements sur ces unions non cohabitantes, comme le Royaume-Uni (voir Haskey, 2005) et l'Australie (voir Reimondos et coll., 2011).
  4. Il se peut qu'une cohabitation soit suivie d'une union VCCS. Il n’est cependant pas possible de le déterminer avec les données de l’Enquête sociale générale.
  5. La façon de définir les personnes en couple vivant chacun chez soi n'est pas uniforme d'un pays à l'autre. Cela étant dit, d'autres études en sont arrivées à des proportions comparables d'adultes vivant dans de telles unions : 10 %, en Grande-Bretagne (voir Duncan et Phillips, 2011), 9 %, en Australie (voir Reimondos et coll., 2011), environ 6 %, en France (en 2005) et de 6 % à 7 %, aux États-Unis (voir Strohm et coll., 2009).
  6. Ce groupe inclut un petit nombre de répondants qui se sont dits conjoints de fait. Il est possible que ces personnes qui ont vécu ensemble sans être mariées forment toujours un couple, mais qu'elles aient dû ou aient choisi de vivre séparément pour une raison ou une autre au moment de l'entrevue.
  7. Étant donné la faible proportion de personnes dans les mariages de navetteurs, celles-ci sont considérées comme faisant partie des couples mariés ou en union libre dans le reste de l’article.
  8. Voir Wolfe-Wylie (2011).
  9. Les poids bootstrap ont été utilisés pour les tests de significativité visant à évaluer les différences entre 2001 et 2011.
  10. L'allongement de l'espérance de vie des hommes et le fait que de plus en plus d'aînés forment une seconde et une troisième union expliquent ces diverses tendances. Par exemple, entre 2001 et 2011, la proportion des personnes de 60 ans et plus qui ont connu deux unions ou plus au cours de leur vie est passée de 14 % à 26 %. Malgré tout, on doit rappeler que l'union non cohabitante (2,3 % des cas chez les 60 ans et plus) tout comme l'union libre (4,8 % des cas) demeurent des phénomènes plutôt exceptionnels chez les personnes plus âgées (tableau 2).
  11. Ce serait par exemple le cas en Espagne (voir Castro-Marin et coll., 2008).
  12. Notons que les personnes ayant mentionné des raisons professionnelles étaient nettement plus portées à vivre loin de leur conjoint : environ 7 sur 10 vivaient à une heure de route ou plus, par rapport à seulement 2 sur 10 pour l'ensemble des personnes en couple VCCS.
  13. On considère ici toutes les personnes ayant choisi de ne pas vivre ensemble, que cette décision ait été prise par elles-mêmes uniquement, par leur conjoint seulement, ou, comme c'est plus souvent le cas, d'un commun accord.
  14. Ce désir d'indépendance était particulièrement répandu chez les femmes âgées de 60 ans et plus. En effet, 46 % d'entre elles ont évoqué le maintien de leur indépendance pour justifier le fait qu'elles soient en couple VCCS, comparativement à 30 % des hommes du même groupe d'âge. Certaines études ont suggéré que les femmes, parce qu'elles devaient assumer la responsabilité de la majorité des tâches domestiques, seraient plus susceptibles d'évoquer des raisons reliées au maintien de leur autonomie pour choisir l'union VCCS. À ce sujet, voir Ghazanfareeon Karlsson et Borell, (2002).
  15. Ce résultat a aussi été observé en Australie (voir Reimondos et coll., 2011).
  16. Voir De Jong Gierveld (2004).
  17. Un des aspects positifs fréquemment mentionné parmi les partenaires âgés VCCS est justement le soutien émotif et pratique que ces relations apportent. Cela dit, l'apport de soins à un conjoint ayant un problème de santé à long terme pourrait être moins « naturel » chez les couples vivant dans des logements séparés, parce que le niveau de responsabilité envers un conjoint non cohabitant est souvent moindre (voir Ghazanfareeon Karlsson et Borell, (2002).

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