Comprendre l’écart des absences du travail entre les secteurs public et privé

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par Sharanjit Uppal et Sébastien LaRochelle-Côté

[Communiqué dans Le Quotidien] [Article intégral en PDF]

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Début de l'encadré

Aperçu

Les absences du travail sont généralement exprimées en jours perdus par année à partir des données de l’Enquête sur la population active. Cette courte analyse présente les données les plus à jour sur les absences du travail pour 2012 et examine les facteurs pouvant expliquer les différences entre les employés des secteurs public et privé.

  • En 2012, les employés à temps plein se sont absentés 7,6 jours pour cause de maladie ou d’incapacité et un autre 1,6 jour pour obligations personnelles ou familiales, soit un total de 9,3 jours.
  • Chez les employés à temps plein, ceux du secteur privé se sont absentés 8,3 jours en moyenne, tandis que ceux du secteur public se sont absentés 12,4 jours.
  • Les différences de taux de syndicalisation, ainsi que les proportions plus élevées de femmes et de travailleurs plus âgés dans le secteur public expliquent environ 80 % de l’écart entre les absences des employés des secteurs public et privé.
  • Certaines différences d’absences existent entre les groupes de professions, toutefois, elles n’expliquent pas l’écart entre les absences des employés des secteurs public et privé.

Fin de l'encadré

Introduction

Au cours d’une année, plusieurs Canadiens doivent s’absenter du travail en raison d’un problème de santé ou pour s’occuper d’un enfant malade. De telles absences, qui ne comprennent ni les vacances, ni les congés de maternité, ni les congés parentaux, peuvent dépendre à la fois des facteurs personnels, des caractéristiques du travail, et des conditions d’emploi. Par conséquent, certains travailleurs s’absentent plus que d’autres.

Au Canada, les absences du travail peuvent être compilées à partir de l’Enquête sur la population active (EPA). L’EPA offre l’avantage de pouvoir distinguer les différents types d’absences du travail, de sorte que les absences « personnelles » (pour cause de maladie ou d’incapacité ou en raison des obligations familiales ou personnelles) peuvent être distinguées des autres types d’absences, comme les vacances ou les congés parentaux ou de maternité.

Dans ce contexte, cette courte analyse présente les données sur les absences du travail attribuables à des facteurs personnels pour 2012. L’analyse fournit également un éclairage sur les différences entre les employés des secteurs public et privé.

Comment calculer les absences du travail

Lorsque les répondants déclarent qu’ils sont employés dans l’EPA, on leur demande s’ils se sont absentés du travail et, si oui, pendant combien de temps. Étant donné que l’EPA recueille aussi des données sur la principale raison de l’absence (voir Source de données, méthodes et définitions), celles dues à la maladie, à une incapacité ou à des obligations personnelles ou familiales (excluant les congés parentaux et de maternité)1 peuvent être distinguées des autres types d’absences pour dériver trois mesures clés des absences « personnelles » du travail.

La première des trois mesures est le « taux de fréquence », défini comme étant le pourcentage de travailleurs à temps plein qui étaient absents durant la semaine de référence de l’Enquête. Par exemple, en 2012, 8,2 % des travailleurs à temps plein ont été absents (pour des raisons personnelles) à un moment donné de la semaine de référence. Parmi eux, 5,9 % ont dit s’être absentés pour cause de maladie ou d’incapacité et 2,3 % s’être absentés en raison de leurs obligations personnelles ou familiales.

Toutefois, le taux de fréquence ne tient pas compte de la durée de l’absence. Or la durée est importante, puisque plusieurs travailleurs ne s’absentent que quelques heures, par exemple, pour un rendez-vous médical. Afin d’en tenir compte, une autre mesure, soit le « taux d’inactivité », est calculée. Celle-ci est définie comme étant le nombre d’heures perdues en proportion du nombre habituel d’heures de travail par semaine des travailleurs à temps plein. En 2012, 3,7 % des heures étaient perdues au cours d’une semaine type — 3,0 % en raison d’une maladie ou d’une incapacité, et 0,7 % en raison de obligations personnelles ou familiales.

La dernière mesure, et probablement la plus couramment employée, est celle du « nombre moyen de jours perdus par travailleur par année ». On peut l’obtenir en multipliant le taux d’inactivité par le nombre de jours de travail dans une année. Ainsi, en 2012, en moyenne, 9,3 jours (0,037 X 250 jours) ont été perdus — 7,6 pour maladie ou incapacité, et 1,6 pour obligations personnelles ou familiales2,3.

Peu de changements dans les absences du travail de 2011 à 2012

Les trois mesures d’absences ont très peu changé de 2011 à 2012. Cependant, le résultat de 2012 (9,3 jours) était plus élevé que celui de 1997, où le nombre moyen de jours perdus par travailleur par année était de 7,4. Cette hausse a principalement eu lieu à la fin des années 1990 et au début des années 2000 (graphique 1).

Graphique 1 de l'article Comprendre les  différences entre les secteurs public et privé en ce qui a trait aux absences  du travail

Description du graphique 1

Tel que démontré dans les publications précédentes, les absences varient selon les caractéristiques personnelles4. De façon générale, les hommes se sont moins absentés que les femmes (7,6 jours par rapport à 11,4 en moyenne en 2012) (tableau 1). Les employés plus âgés, soit ceux de 55 à 64 ans, se sont davantage absentés (12,4 jours) que les employés plus jeunes, âgés de moins de 25 ans (environ 6 jours en moyenne).

Tableau 1
Moyenne des jours perdus par travailleur par année selon diverses caractéristiques, 1997, 2011 et 2012
Note 1
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de moyenne des jours perdus par travailleur par année selon diverses caractéristiques 1997, 2011 et 2012, calculées selon jours unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
  1997 2011 2012
jours
Les deux sexes 7,4 9,3 9,3
Hommes 6,3 7,7 7,6
Femmes 9,1 11,4 11,4
Groupe d'âge  
15 à 19 ans 4,6 6,5 6,0
20 à 24 ans 5,0 5,9 6,1
25 à 34 ans 6,2 7,8 7,9
35 à 44 ans 7,6 8,8 9,0
45 à 54 ans 8,9 10,3 10,2
55 à 64 ans 10,9 13,2 12,4
65 ans et plus Note F: trop peu fiable pour être publié 10,2 10,5
Taux de syndicalisation  
Membre d'un syndicat ou couvert par une convention collective 10,7 13,2 12,9
Non syndiqué 5,6 7,5 7,5
Secteur  
Public 9,8 12,9 12,4
Privé 6,7 8,2 8,3

Les absences variaient aussi en fonction des caractéristiques de l’emploi. Par exemple, les travailleurs membres d'un syndicat ou couverts par une convention collective se sont absentés plus longtemps en moyenne que les employés non syndiqués (12,9 jours contre 7,5). Les employés du secteur public, qui sont plus susceptibles d’être syndiqués, d’être plus âgés et d’être de sexe féminin, étaient aussi plus susceptibles de s’absenter (12,4 jours) que les employés du secteur privé (8,3 jours). Ainsi, l’écart séparant les employés des secteurs public et privé était de 4,1 jours en 2012.

Dans la plupart des catégories, le nombre de jours perdus a très peu changé de 2011 à 2012. Toutefois, lorsqu’on le compare à 1997, le nombre de jours perdus a augmenté dans toutes les catégories. Dans le secteur privé, par exemple, le nombre de jours perdus pour maladie ou raisons personnelles a augmenté de 6,7 à 8,3 jours au cours de la période, tandis qu’il a crû de 9,8 à 12,4 jours dans le secteur public. Dans les deux cas, la majorité de la hausse était attribuable au nombre de jours perdus pour maladie ou incapacité.

Différences entre les employés des secteurs public et privé

En 2012, les travailleurs à temps plein du secteur privé se sont absentés 8,3 jours en moyenne (6,7 pour leur propre maladie ou incapacité et 1,5 pour des raisons personnelles et familiales). En comparaison, les travailleurs à temps plein du secteur public se sont absentés 12,4 jours (10,5 jours pour maladie ou incapacité et 2,0 jours pour des obligations personnelles ou familiales)5.

Dans le secteur public, les employés de l’administration publique fédérale ont pris en moyenne 14,9 jours de congé en 2012. De ceux-ci, 11,4 jours étaient attribuables à une maladie ou une incapacité (comparativement à 6,7 jours dans le secteur privé) et 3,5 jours étaient attribuables aux obligations personnelles ou familiales. Le nombre de jours perdus a peu changé par rapport à celui de 2011, mais, depuis 1997, le nombre de jours perdus a augmenté d’environ 5 jours chez les employés fédéraux.

Parmi les employés des administrations publiques provinciales, les absences ont augmenté sensiblement, passant de 11,9 jours en 2011 à 14,6 jours en 2012, principalement en raison des absences liées à une maladie ou une incapacité. À titre de comparaison, ceux-ci prenaient 5,8 jours de congé de moins en 19976.

Certains facteurs sont souvent mis de l’avant pour expliquer les différences entre les employés des secteurs privé et public. La première explication fait référence à l’âge et au sexe des travailleurs, puisque les femmes et les employés plus âgés — lesquels sont plus susceptibles de travailler dans le secteur public — ont tendance à s’absenter plus souvent. Cela n’est pas nécessairement surprenant, puisque les femmes prennent souvent plus de responsabilités familiales que les hommes et que les personnes qui avancent en âge sont plus susceptibles d’être malades.

La deuxième explication est liée aux différences sur le plan des négociations collectives. Étant donné que 76 % des travailleurs du secteur public (2,1 millions d’employés à temps plein) sont membres d’un syndicat ou couverts par une convention collective, plusieurs d’entre eux ont droit à un nombre déterminé de jours de congé pour maladie ou obligations personnelles pour une année donnée. En comparaison, 19 % des employés du secteur privé (1,6 million de travailleurs) sont membres d’un syndicat ou couverts par une convention collective. En 2012, les travailleurs syndiqués des secteurs public et privé ont perdu respectivement 13,6 et 11,9 jours, comparativement à 8,7 et 7,4 jours chez leurs homologues non syndiqués.

La troisième explication tient aux différences professionnelles. Certaines professions comportent un plus grand risque de maladie (comme les professions liées à la santé) ou un plus grand risque de blessure et se trouvent dans chacun des secteurs.

En 2012, la différence totale entre le nombre de jours perdus par les employés des secteurs public et privé était de 4,1 jours (12,4 jours dans le secteur public contre 8,3 jours dans le secteur privé). Si les employés du secteur privé avaient eu le même âge, la même proportion de femmes, un même taux de syndicalisation et une répartition identique entre types de professions, ceux-ci auraient-ils affiché la même différence par rapport aux employés du secteur public7?

Lorsque les différences d’âge et de sexe sont prises en compte, le nombre de jours d’absence pour raisons personnelles parmi les employés du secteur privé augmente à 9,4 (graphique 2). Lorsque les différences liées à la syndicalisation sont également prises en compte, le nombre de jours perdus dans le secteur privé passe à 11,6 jours. En tout et pour tout, cela signifie que si les employés du secteur privé avaient eu des caractéristiques semblables à ceux du secteur public en ce qui a trait à l’âge, au sexe et à la syndicalisation, la différence entre le public et le privé en jours perdus aurait été de 0,8 jour plutôt que 4,1, ce qui correspond à 80 % de l’écart. Parce que les différences professionnelles n’ont que peu d’effet sur les différences entre les secteurs public et privé8, le plus grand nombre de journées d’absences dans le secteur public était donc attribuable à la plus grande syndicalisation (représentant environ de 55 % de la différence totale) ainsi qu’à la plus large proportion de femmes et de travailleurs plus âgés (environ 25 % de la différence)9.

Graphique 2 de l'article Comprendre les  différences entre les secteurs public et privé en ce qui a trait aux absences  du travail

Description du graphique 2

Sharanjit Uppal est analyste principal à la Division de la statistique du travail et Sébastien LaRochelle-Côté est rédacteur en chef de Regards sur la société canadienne, Statistique Canada.

Document consulté

DABBOUSSY, Maria et Sharanjit UPPAL. « Les absences du travail en 2011 », L’emploi et le revenu en perspective, vol. 24, no 2, été, produit no 75-001-X au catalogue de Statistique Canada.

Début de l'encadré

Source de données, méthodes et définitions

Source de données et méthodes

Dans la présente étude, les données sont fondées sur les moyennes annuelles de l'Enquête sur la population active (EPA). Elles portent sur les employés à temps plein occupant un seul emploi (sauf les militaires). Les travailleurs à temps partiel, les travailleurs autonomes et les travailleurs familiaux non rémunérés sont exclus de l'étude, parce que leur horaire de travail leur laisse généralement plus de flexibilité pour s'acquitter de leurs obligations personnelles ou familiales. De même, les personnes cumulant des emplois ne sont pas prises en compte parce qu'il est impossible de déterminer, à partir des données de l'EPA, à quels emplois précisément sont associés le temps perdu et la raison des absences. Les femmes en congé de maternité sont également exclues depuis 1997. Par contre, les hommes ayant pris des congés parentaux (lesquels représentent une faible proportion des absences) sont inclus dans le calcul jusqu'en 2006.

Les raisons incluses dans le présent rapport sur les absences sont :

  • maladie ou incapacité du répondant
  • soins à donner à ses enfants
  • soins à donner à un parent âgé (60 ans ou plus)
  • autres obligations personnelles ou familiales

La première catégorie correspond aux absences dues à une maladie ou une incapacité, tandis que les trois autres représentent les absences dues à des obligations personnelles ou familiales. Les absences incluent à la fois les absences payées et non payées.

Toutefois, l’EPA collecte aussi des données sur les types d’absences suivants, non abordés dans la présente étude :

  • congé de maternité (depuis 1997)
  • congé parental pour hommes (depuis 2007)
  • vacances
  • conflit de travail (grève ou lock-out)
  • mise à pied temporaire en raison de la conjoncture économique
  • jour férié (légal ou religieux)
  • mauvais temps
  • début ou fin d'emploi durant la semaine
  • travail à temps réduit (en raison du manque d'équipement, de l'entretien de l'usine ou de réparations, par exemple)
  • autres

Définitions

Fréquence des absences : pourcentage des travailleurs rémunérés à temps plein ayant déclaré une absence au cours de la semaine de référence, et ce, peu importe la durée de l’absence, que ce soit une heure, une journée ou une semaine entière.

Taux d'inactivité : nombre d'heures perdues en proportion du nombre habituel d'heures hebdomadaires de travail des travailleurs rémunérés à temps plein. Cette mesure tient compte de la fréquence et de la durée des absences au cours de la semaine de référence.

Jours perdus par travailleur : taux d'inactivité multiplié par le nombre estimé de jours de travail dans l'année (250).

Employés du secteur public : employés de l’administration publique fédérale, provinciale, territoriale et municipale, des Premières Nations, et d’autres instances autochtones, ainsi que ceux des sociétés d’État, des régies des alcools et des établissements publics comme les écoles (y compris les universités), les hôpitaux et les bibliothèques.

Fin de l'encadré

 


Notes

  1. Avant 1997, les données sur les congés de maternité n’étaient pas recueillies séparément. Elles étaient plutôt compilées comme des congés « personnels ». Les renseignements sur d’autres formes de congé parental (par exemple, les hommes en congé parental) sont recueillis séparément depuis 2007. Toutefois, cela n’a eu que peu d’effet sur les résultats.
  2. Certains spécialistes des ressources humaines excluent les travailleurs absents pour maladie ou incapacité de longue durée (excédant une année) de leurs statistiques sur les présences. Par contre, ces personnes sont incluses dans les estimations des absences du travail de Statistique Canada lorsque les répondants se déclarent employés. En excluant ces personnes des estimations, le taux de fréquence des absences du travail pour maladie ou incapacité serait passé de 5,9 % à 5,6 %, le taux d’inactivité de 3,0 % à 2,8 %, et le nombre de jours perdus par travailleurs cette année-là aurait baissé de 7,6 à 7,0 jours.
  3. Les trois mesures liées aux absences sont disponibles dans CANSIM. On peut y distinguer les absences dues à la maladie de celles attribuables aux raisons personnelles. Les absences du travail selon les caractéristiques personnelles et professionnelles sont disponibles dans les tableaux CANSIM de 279-0029 à 279-0039.
  4. Voir Dabboussy et Uppal (2012) pour l’analyse précédente, portant sur des données de 2011 sur les absences du travail.
  5. Même lorsque les travailleurs absents pour maladie ou incapacité de longue durée sont exclus des calculs, la différence entre les employés des secteurs public et privé demeure semblable (3,6 jours plutôt que 4,1).
  6. En plus des employés fédéraux et provinciaux, le secteur public inclut les employés des administrations locales et municipales, des sociétés d’État, des écoles publiques, des hôpitaux, et d’autres institutions publiques comme les sociétés de loteries et les régies des alcools.
  7. Afin de répondre à cette question, une méthode des moindres carrés ordinaires a été appliquée à la population du secteur privé avec le nombre de jours perdus comme variable dépendante et le groupe d’âge, le sexe, la syndicalisation et les catégories professionnelles comme variables indépendantes. Un scénario alternatif pour le secteur privé a pu alors être obtenu à partir des résultats des coefficients et des proportions dans la population du secteur public.
  8. L’effet de certaines professions du secteur public qui sont typiquement associées à de plus longues absences, comme les professions du domaine de la santé, a été plus que compensé par l’effet des professions du secteur privé qui sont aussi associées à de plus longues absences : comme celles des métiers, du transport et de l’opération de machinerie, et les professions propres au secteur de la transformation, de la fabrication et des services publics.
  9. Les travailleurs temporaires ont aussi tendance à moins s’absenter que les employés permanents. Toutefois, ajouter la variable de la permanence d’emploi dans le modèle ne modifie pas les résultats, puisque les secteurs public et privé affichent la même proportion d’employés permanents (environ (90 %). Étant donné qu’elles sont liées à l’âge, les variables d’ancienneté, si elles avaient été ajoutées, auraient réduit la valeur explicative de l’âge, mais n’auraient pas accru la portion expliquée de l’écart.
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