Sommaire et conclusions

Avertissement Consulter la version la plus récente.

Information archivée dans le Web

L’information dont il est indiqué qu’elle est archivée est fournie à des fins de référence, de recherche ou de tenue de documents. Elle n’est pas assujettie aux normes Web du gouvernement du Canada et elle n’a pas été modifiée ou mise à jour depuis son archivage. Pour obtenir cette information dans un autre format, veuillez communiquer avec nous.

Dans le présent rapport, on a examiné la participation des enfants et des jeunes nés en 1987 et en 1990 aux crimes déclarés par la police de 1995 à 2005, dans les régions du Canada visées par le Programme de déclaration uniforme de la criminalité fondé sur l'affaire (DUC 2). Les services de police qui ont fourni des données dans le cadre du Programme DUC 2 au cours de cette période desservaient environ la moitié de la population du Canada. Les infractions déclarées par la police et commises par chaque membre de la population étudiée ont été couplées pour constituer des enregistrements de leurs carrières délinquantes. Chaque auteur présumé a été suivi pendant 10 ans exactement : les auteurs présumés nés en 1987, de leur 8e anniversaire jusqu'au jour précédant leur 18e anniversaire, et ceux nés en 1990, de leur 5e anniversaire jusqu'au jour précédant leur 15e anniversaire.

Les services de police ont déclaré qu'un peu moins du cinquième (18,5 %) de toutes les personnes nées en 1987 — le quart des garçons et le huitième des filles — avaient commis une infraction criminelle avant leur 18e anniversaire. Ils avaient imputé une infraction contre la personne à 1 garçon sur 11, une infraction contre les biens à 1 sur 6 d'entre eux et une autre infraction à 1 sur 10. Ainsi, particulièrement dans le cas des garçons, les actes de délinquance consignés étaient assez répandus dans la population. Cette constatation concorde avec les conclusions de recherches semblables menées dans d'autres pays (Piquero, Farrington et Blumstein, 2003) et avec des recherches canadiennes fondées sur les dossiers des tribunaux de la jeunesse (Carrington, Matarazzo et deSouza, 2005).

La grande majorité de ces jeunes auteurs présumés avaient été impliqués dans des crimes consignés pendant leur adolescence et non leur enfance. En effet, moins de 2 % des auteurs présumés nés en 1987 et en 1990 avaient perpétré des crimes consignés avant leur 12e anniversaire. Dans une certaine mesure, ce chiffre peut révéler une sous-déclaration par le public ou un sous-enregistrement par la police de l'activité criminelle avant l'âge de responsabilité criminelle. Même si la période visée par la présente étude se termine au 18e anniversaire, on n'a observé aucune tendance à la stabilisation du nombre de nouveaux auteurs présumés primaires inscrits à cet âge. Au contraire, il semble probable que beaucoup plus que le cinquième des membres de la population seraient inscrits comme des auteurs présumés si la tranche d'âge visée par l'étude était élargie. Cette conclusion est également confirmée par les résultats de recherches effectuées dans d'autres pays dans lesquelles l'activité criminelle a été suivie jusqu'au début et au milieu de l'âge adulte (Piquero, Farrington et Blumstein, 2003), ainsi que par des recherches canadiennes fondées sur les données des tribunaux. Ces dernières recherches ont révélé que, pour 43 % des personnes qui ont comparu en cour entre leur 12e et leur 22e anniversaire, il s'agissait de la première inculpation durant leur vie en rapport avec une infraction présumée commise après leur 18e anniversaire (Carrington, Matarazzo et deSouza, 2005).

Le nombre d'enfants et de jeunes impliqués dans des crimes consignés augmentait avec chaque année d'âge, passant de très peu d'enfants de 5 ans à un sommet de 1 adolescent sur 17 à l'âge de 16 ans. Pour les filles, la participation à des crimes consignés atteignait un sommet un an plus tôt, soit à 15 ans. La proportion d'auteurs présumés ayant à leur actif des crimes contre les biens diminuait au fur et à mesure qu'augmentait l'âge, chutant de plus de 90 % chez les enfants de 5 ans à 50 % chez les jeunes de 17 ans, alors que la proportion d'auteurs présumés ayant commis des crimes contre la personne suivait une tendance à la hausse, allant de moins de 10 % chez les enfants de 5 ans à 30 % chez les adolescents de 17 ans. La proportion d'auteurs présumés impliqués dans d'autres infractions est passée de 0 % chez les enfants de 5 ans à plus de 40 % chez les 17 ans, cette proportion n'affichant aucun signe de stabilisation, contrairement à ce que l'on a constaté pour les deux autres catégories d'auteurs présumés.

Le nombre annuel moyen d'affaires consignées par auteur présumé progressait également en fonction de l'âge, mais non de façon aussi spectaculaire que le nombre d'auteurs présumés dans la population. Il est passé d'une moyenne de 1,1 affaire pour les auteurs présumés de 5 à 8 ans à 1,8 affaire par auteur présumé de 15 ans (1,9 pour les garçons et 1,4 pour les filles). La hausse de l'activité moyenne entre 8 et 11 ans tenait en grand partie aux infractions contre la personne perpétrées par les garçons; de 12 à 15 ans, elle était en grande partie attribuable à des infractions contre l'administration de la justice et des infractions relatives aux drogues perpétrées par les deux sexes.

Même si l'activité criminelle consignée était assez répandue chez les jeunes Canadiens, le nombre de crimes consignés commis par la plupart des enfants et des adolescents était très faible, et il était concentré dans les types de crimes les moins graves. L'expression « carrière délinquante » est plutôt mal choisie pour presque les deux tiers des auteurs présumés nés en 1987 — 59 % des garçons et 76 % des filles —, qui n'avaient commis qu'une seule infraction consignée pendant la période d'observation. Seulement 10 % des auteurs présumés nés en 1987 avaient à leur actif cinq infractions consignées ou plus, et ils pourraient donc être appelés « multirécidivistes » ou « auteurs présumés chroniques ». Chacun de ces auteurs présumés comptait en moyenne 11 infractions consignées et, ensemble, ils étaient responsables de 46 % de tous les crimes consignés imputés à la cohorte de naissance de 1987. Dans l'ensemble, les auteurs présumés nés en 1987 avaient perpétré en moyenne 2,4 infractions consignées — ou 2,1 si l'on exclut les infractions contre l'administration de la justice — au cours de la période de 10 ans entre leur 8e et leur 18e anniversaire.

Environ le quart (24 %) des infractions imputées à ces jeunes étaient des vols mineurs, et 15 % étaient soit des dommages mineurs à la propriété (méfaits), soit la possession de biens volés ou la fraude. Neuf pour cent étaient des voies de fait simples et 10 %, des infractions relatives aux drogues, presque toutes concernant la simple possession de cannabis. Toutefois, près du cinquième (18 %) étaient des infractions très graves : vol qualifié, voies de fait armées ou causant des lésions corporelles, agression sexuelle, autres infractions contre la personne, introduction par effraction et vol majeur. Rien ne porte à croire que les carrières délinquantes ont tendance à passer des infractions moins graves à des infractions plus graves. La notion de « progression » ne s'applique pas à la majorité des carrières, lesquelles consistaient en une seule infraction. Cependant, même chez les récidivistes, les infractions qui ont été commises plus tard dans la carrière n'étaient pas, en moyenne, plus graves que celles qui avaient été perpétrées antérieurement.

Il y a très peu d'indications d'une spécialisation dans un type de crime particulier par ces auteurs présumés, même lorsque le type de crime est défini d'une façon très large, selon les trois catégories d'infractions : les infractions contre la personne, les infractions contre les biens et les autres infractions. Les deux tiers des récidivistes nés en 1987 avaient commis plus d'un type de crime pendant leur carrière. En outre, on constate une forte relation inverse entre la spécialisation dans un type de crime et le nombre d'infractions dans la carrière : 50 % des carrières délinquantes marquées par seulement deux infractions consignées étaient spécialisées, comparativement à 20 % des carrières comptant cinq infractions et 10 % des carrières comportant 10 infractions ou plus. Ces chiffres laissent entendre que la « spécialisation » est plutôt fonction du faible nombre d'infractions perpétrées que d'une tendance à se spécialiser de la part de l'auteur présumé. Parmi les 35 % des récidivistes affichant des carrières spécialisées, 24 % étaient spécialisés dans les infractions contre les biens, 7 %, dans les infractions contre la personne et 4 %, dans les autres infractions.

L'âge de début consigné d'une carrière délinquante est défini comme l'âge auquel la première infraction consignée aurait été commise. Le nombre d'auteurs présumés dont la date de début consignée était survenue pendant l'enfance était très faible, et il était beaucoup plus élevé pendant l'adolescence. Si l'expression « début pendant l'enfance » désigne les carrières entamées avant le 12e anniversaire, alors 11 % des auteurs présumés des deux cohortes entrent dans cette catégorie. L'âge le plus courant consigné pour le début d'une carrière était de 15 ans, 3,7 % de tous les membres (4,8 % des garçons et 2,6 % des filles) de la cohorte de 1987 ayant commencé leur carrière délinquante à cet âge. Pour les garçons, l'âge de début le plus courant était un an plus tard, à 16 ans, alors que 4,9 % des garçons avaient commencé leur carrière délinquante. Ainsi, presque 1 garçon sur 10 né en 1987, c'est-à-dire environ 40 % des auteurs présumés de sexe masculin nés en 1987, avaient commencé leur carrière délinquante à 15 ou 16 ans. L'âge de début le plus courant pour les infractions contre la personne et les infractions contre les biens était aussi de 15 ans, mais dans le cas des autres infractions, cet âge était inconnu, car les chiffres poursuivaient leur hausse jusqu'à la fin de la période d'observation (le 18e anniversaire).

À l'instar des résultats d'autres recherches, dans la présente étude, on a constaté que les auteurs présumés qui avaient commencé leur carrière pendant l'enfance avaient tendance à avoir des carrières qui duraient plus longtemps, dans les limites de la période d'observation, et qui comportaient plus d'affaires criminelles que les auteurs présumés qui avaient commis leur première infraction lorsqu'ils étaient plus âgés. Toutefois, les auteurs qui avaient commencé leur carrière pendant l'adolescence étaient, ensemble, responsables de la plupart des crimes consignés (83 %) parce qu'ils étaient beaucoup plus nombreux — ils représentaient 89 % de tous les auteurs présumés dans l'étude.

Il est difficile de tirer des conclusions concernant la durée des carrières délinquantes et criminelles de cette population, car on ne dispose pas d'information sur ces carrières après le 18e anniversaire. On ignore donc si la carrière délinquante s'est poursuivie et est devenue une carrière criminelle à l'âge adulte. Cinquante-neuf pour cent des auteurs présumés dans l'étude avaient commis une infraction consignée au cours des deux dernières années d'observation, et il se pourrait donc fort bien qu'ils aient poursuivi leur carrière au-delà de la période d'observation. En fait, les carrières d'une forte proportion d'auteurs présumés dans cette population avaient débuté seulement pendant les deux dernières années d'observation. Les 41 % restants des carrières qui pouvaient être considérées comme terminées avant le 18e anniversaire étaient pour la plupart de très courte durée. Environ les quatre cinquièmes comportaient une seule infraction consignée, et leur durée était donc de zéro. Les autres carrières terminées (qui représentaient environ 9 % de toutes les carrières délinquantes) affichaient une durée moyenne de un an et trois mois.

Nous serions tentés de conclure que la courbe de la criminalité selon l'âge tracée à la figure 1 est représentative des courbes de l'évolution du grand nombre de carrières délinquantes étudiées. Toutefois, nous aurions grand tort de donner cette interprétation. Très peu des carrières délinquantes consignées qui ont été examinées dans l'étude ont duré pendant toute la période d'observation de 10 ans. La courbe apparaissant à la figure 1 représente plutôt l'agrégation d'un grand nombre de carrières très brèves et de quelques carrières plus longues — en fait, la majorité comporte seulement une infraction; elles sont donc présentées à la figure 1 comme un élément d'un seul point. Pour la majorité des auteurs présumés dans cette étude, le concept de « carrière délinquante » ne s'applique vraiment pas. Même chez les récidivistes, la plupart des carrières délinquantes étaient de courte durée et comprenaient peu d'infractions consignées. Par ailleurs, les quelques multirécidivistes, ou auteurs présumés chroniques (qui représentaient 10 % des auteurs nés en 1987), qui avaient commis cinq infractions consignées ou plus au cours de la période de 10 ans étaient responsables d'un nombre disproportionné (46 %) de tous les crimes commis par les membres de cette cohorte de naissance.