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  1. Introduction
  2. Données et méthodologie
  3. Analyse
  4. Conclusion

1   Introduction

Le nombre net d'emplois créés ou supprimés dans une économie — l'indicateur qui fait les manchettes — est le résultat de la croissance de certaines entreprises et du déclin d'autres. Ces flux d'emplois se cachent derrière le nombre net d'emplois créés et brossent un tableau plus nuancé de la situation sur le marché du travail, montrant, par exemple, si la suppression d'emplois existants ou l'absence de création d'emplois ralentit la croissance nette de l'emploi. Une analyse des types d'entreprises (p. ex., petites ou grandes) dans lesquelles l'emploi fluctue le plus à un moment donné nous permet de mieux comprendre les forces qui sous-tendent les tendances de la croissance nette de l'emploi.

Dans leur étude des flux d'emplois dans le secteur américain de la fabrication de 1973 à 1988 (période marquée par trois récessions aux États-Unis), Davis et coll. (1996) formulent plusieurs observations clés. Premièrement, ils constatent que les taux de création et de suppression d'emplois étaient beaucoup plus élevés que le taux de croissance nette de l'emploi, tendance qui s'observe dans de nombreux pays et dans diverses industries et catégories de taille d'entreprise (Haltiwanger et coll., 2010; Baldwin, 1995). Deuxièmement, la suppression d'emplois est plus cyclique que la création d'emplois — en période de récession, l'intensification de la suppression d'emplois est habituellement plus grande que le ralentissement de la création d'emplois. Troisièmement, leur analyse selon la taille de l'entreprise révèle que les taux tant de création que de suppression d'emplois sont plus élevés dans les petites entreprises que dans les grandes entreprises.

La plupart des travaux sur les flux d'emplois au Canada ont été effectués au cours des années 1990 et portaient sur le secteur de la fabrication (Baldwin et Gorecki, 1990; Baldwin, 1995; Baldwin et Picot, 1995; Baldwin et coll., 1998). Les propriétés des flux d'emplois aux États-Unis décrites par Davis et coll. (1996) ont été observées également au Canada (Baldwin et coll., 1998; Baldwin et Picot, 1995). Une étude plus récente de la création et de la suppression d'emplois au Canada a été effectuée par Balakrishnan (2008) mais elle présente des données seulement jusqu'à 2004. Une mise à jour est justifiée étant donné que le cycle économique a atteint un sommet mais aussi connu un creux au cours de la deuxième moitié de la décennie. De 2001 à septembre 2008, l'économie canadienne a continué à croître. Toutefois, en octobre 2008, l'emploi ainsi que la production ont commencé à diminuer, tombant à leur niveau le plus bas à la mi-année 2009 (Cross, 2011).

Deux questions principales sont posées dans le présent rapport. Premièrement, quel a été le récent profil des flux d'emplois au Canada et des tendances précises se sont-elles dégagées au cours de la dernière décennie? Deuxièmement, quels types d'entreprises ont été les plus touchées par la récession de 2008-2009?

Pour un tel examen des flux d'emplois, il faut disposer de microdonnées longitudinales qui font le suivi du niveau d'emploi des entreprises au fil du temps. L'auteure du présent document s'appuie sur les données du Programme d'analyse longitudinale de l'emploi (PALE) de Statistique Canada pour analyser la dynamique annuelle de l'emploi dans le secteur canadien des entreprises de 2001 à 2009, soit durant la période d'expansion de 2001 à 2008 et la récession de 2008-2009. Étant donné que la croissance de l'emploi entre 2007 et 2008, mesurée annuellement, est positive, l'année 2008 est comprise dans la période d'expansion.

On décompose la croissance nette de l'emploi en création brute et suppression brute d'emplois afin de mesurer l'ampleur de la redistribution des emplois et des mouvements de l'emploi. Ces mesures des flux d'emplois sont présentées pour l'ensemble du secteur des entreprises ainsi que selon l'industrie et selon la catégorie de taille d'entreprise.

2   Données et méthodologie

L'information dans la base de données du PALE est produite à partir des états annuels de la rémunération payée (feuillets T4) que les entreprises canadiennes sont tenues de remettre à leurs employés dont la rémunération est supérieure à 500 $ ou si elles ont effectué des retenues sur la paye, par exemple au titre de l'impôt sur le revenu, du Régime de pensions du Canada ou de l'assurance-emploi. Le PALE englobe les entreprises constituées et non constituées en société qui distribuent au moins un feuillet T4 une année civile donnée. Le niveau d'emploi de ces entreprises est mesuré et suivi annuellement.

Les données sur l'emploi dans le PALE sont disponibles sous forme d'unités moyennes de main-d'oeuvre (UMM) ou d'unités individuelles de main-d'oeuvre (UIM). Les UMM sont calculées en divisant la masse salariale annuelle d'une entreprise par les gains annuels moyens d'un travailleur type dans l'industrie, la province et la catégorie de taille de l'entreprise. Ces gains annuels moyens sont tirés de l'Enquête sur l'emploi, la rémunération et les heures de travail, une enquête mensuelle de Statistique Canada. La mesure de l'emploi d'une entreprise exprimée en UMM augmente ou diminue d'une année à l'autre selon les modifications apportées aux pratiques de l'entreprise (nombre de travailleurs, salaire horaire et nombre moyen d'heures par travailleur) et selon la tendance des gains moyens dans l'industrie, la province et la catégorie de taille de l'entreprise (les gains annuels moyens du groupe, qui sont fonction du salaire et des heures). Lorsqu'elle est exprimée en UMM, la mesure de l'emploi des entreprises qui payent des salaires plus faibles est généralement inférieure à une mesure fondée sur un simple décompte des effectifs, comme l'UIM, qui est le nombre total de personnes ayant reçu un feuillet T4. Si des personnes reçoivent plus d'un feuillet T4, leur UIM est affectée aux employeurs proportionnellement aux salaires reçus de ces employeurs. Dans la présente analyse, l'UMM est utilisée parce qu'elle saisit à la fois le nombre d'emplois et leur qualité mesurée par le salaire relatif versé et les heures travaillées.

La population d'entreprises varie au fil du temps en raison des créations et disparitions d'entreprises ainsi que des fusions et acquisitions (F et A). Lorsqu'une entreprise achète ou vend certains de ses établissements à une autre entreprise, le niveau d'emploi de ces deux entreprises change d'une année à l'autre en partie en raison du changement de propriétaire. Les variations de l'emploi enregistrées dans le PALE sont corrigées pour tenir compte de certaines activités de F et A, plus particulièrement les créations et les disparitions d'entreprises attribuables aux F et A 1 . Le suivi de la main-d'oeuvre est utilisé pour examiner toutes les créations et les disparitions d'entreprises afin de supprimer les apparitions et les disparitions qui résultent de fusions ou de dessaisissements (Baldwin et coll., 1992). Lorsque de fausses créations ou disparitions sont décelées, la structure de l'entreprise l'année où la transaction a lieu est appliquée à l'année précédente, de sorte que l'emploi l'année précédente est représenté comme si l'entreprise était dotée alors de sa structure actuelle. L'industrie à laquelle l'entreprise est affectée est son industrie dominante l'année finale.

Bien que le PALE englobe l'ensemble des industries dans l'économie, le secteur public (ou non commercial) est exclu de la présente étude. Étant donné que les organismes dans ce secteur ne visent pas nécessairement à maximiser leurs profits, on s'attend à ce que la dynamique de l'emploi dans leur cas diffère de celle des entreprises du secteur privé 2 .

Les entreprises sont regroupées selon l'une des six catégories de dynamique de l'emploi : création, réapparition, croissance, stabilité, déclin et disparition (ou sortie). Les entreprises qui entrent sur le marché du travail sont classées comme entreprises nouvellement créées si on ne peut trouver aucun antécédent d'emploi pour l'une quelconque de leurs parties constituantes. Les réapparitions sont les entreprises sans employés l'année précédente mais qui ont eu des employés à un moment donné dans le passé. Les entreprises en croissance, stables et en déclin sont les entreprises qui demeurent en activité ayant des employés l'année précédente ainsi que l'année courante. Elles sont classées selon que leur effectif a augmenté, est demeuré stable ou a diminué entre ces deux années : a) 1 UMM ou plus pour les entreprises en croissance; b) entre -1 UMM et 1 UMM pour les entreprises stables; c) -1 UMM ou moins pour les entreprises en déclin. Les disparitions (ou sorties) sont les entreprises ayant des employés l'année précédente mais n'en ayant pas l'année courante.

Lorsqu'on examine les distributions des tailles d'entreprise pour une année donnée, on utilise la taille de l'entreprise en l'année en question (l'année finale). Toutefois, lorsqu'on examine la variation de l'emploi selon la taille de l'entreprise, on utilise la moyenne de la taille de l'entreprise l'année précédente et l'année finale. Cette méthode, qui consiste à établir la taille de l'entreprise selon la taille moyenne, a des propriétés souhaitables comparativement à l'établissement de la taille selon la taille de référence et selon la taille de fin (Okolie, 2004).

3   Analyse

Au cours de la période de 2001 à 2008, l'emploi total a augmenté chaque année au taux moyen de 1,8 %. Toutefois, en 2009, en conséquence de la crise financière mondiale, le secteur canadien des entreprises a employé environ 369 000 personnes de moins qu'en 2008, ce qui représente une baisse de 3,2 % (graphique 1). Le nombre d'entreprises a augmenté de 2001 à 2009, la hausse globale s'établissant à 15,7 %. Même en 2009, tandis que l'emploi diminuait, le nombre d'entreprises a continué d'augmenter, quoique plus modérément que dans les années précédentes, ce qui a entraîné une diminution de la taille moyenne de l'entreprise (tableau 1). La taille moyenne de l'entreprise avait également diminué entre 2001 et 2008, mais cette diminution était attribuable à l'augmentation plus rapide du nombre d'entreprises (15,5 %) que du nombre d'emplois (13,5 %).

3.1  Création et suppression d'emplois

La croissance nette de l'emploi est le résultat de la création brute et de la suppression brute d'emplois, soit les emplois créés par les entreprises nouvellement créées et les entreprises en croissance et ceux supprimés par les entreprises sortantes et en déclin. La variation nette de l'emploi total masque une turbulence considérable dans l'économie au fur et à mesure de l'apparition, de la disparition, de la croissance et du déclin des entreprises.

Conformément à la littérature, les taux de création brute et de suppression brute d'emplois au Canada au cours de cette période ont été nettement supérieurs aux taux de croissance nette de l'emploi (graphique 2, tableau 2). Par exemple, la croissance nette de l'emploi de 1,4 % observée en 2001 a été attribuable à une augmentation de 13,5 % des emplois dans les entreprises nouvellement créées et les entreprises en croissance, et à une perte de 12,1 % d'emplois dans les entreprises sortantes et en déclin. Toutefois, durant la période d'expansion de 2001 à 2008, la création brute d'emplois et la suppression brute d'emplois ont toutes deux affiché une tendance à la baisse 3 .

Les variations d'une année à l'autre montrent si les variations nettes sont attribuables à la création d'emplois ou à la suppression d'emplois dans l'économie, ou aux deux. Par exemple, la diminution nette enregistrée en 2004 a été attribuable uniquement à un ralentissement de la création d'emplois, puisque la suppression d'emplois a légèrement diminué. Entre 2005 et 2007, toutefois, l'augmentation nette a été le fait principalement de la suppression d'un plus petit nombre d'emplois.

Les récessions ont tendance à avoir des répercussions plus importantes sur la suppression brute d'emplois que sur la création brute d'emplois. Au cours de la récession de 2008-2009, l'augmentation du taux de suppression d'emplois (+3.2 points de pourcentage) a été supérieure à la diminution du taux de création d'emplois (-1.9 points de pourcentage) 4  .

La suppression brute d'emplois a été plus importante en 2009 qu'en l'une des quelconques années précédentes au cours de cette période. En effet, en 2009, les entreprises sortantes et en déclin ont été à l'origine d'une plus grande variation de l'emploi (-1,4 million) que les entreprises nouvellement créées et celles en expansion (+1,1 million). Par conséquent, la croissance nette de l'emploi a été négative pour la première fois au cours de la décennie, soit une perte nette de 369 000 emplois.

3.2  Redistribution des emplois et roulement de l'emploi

Le taux de redistribution des emplois est la somme des taux de création brute et de suppression brute d'emplois. Durant la période d'expansion de 2001 à 2008, le taux de redistribution des emplois a diminué progressivement, passant de 25,7 % à 20,1 % (tableau 2). Autrement dit, il y a eu moins de restructurations de la main-d'oeuvre vers la fin de la période d'expansion : un emploi sur quatre a été soit créé, soit supprimé en 2001, comparativement à un emploi sur cinq en 2008. Une tendance semblable a été observée aux États-Unis au cours des 30 dernières années (Haltiwanger et coll., 2011).

La redistribution excédentaire des emplois est la répartition des emplois au-delà de celle attribuable à la seule croissance nette de l'emploi. Il s'agit d'une mesure du roulement brut sur le marché du travail et elle est calculée par soustraction du taux de croissance net du taux de redistribution des emplois (Davis et coll., 1996). Un ralentissement de la redistribution excédentaire des emplois au cours de la période d'expansion a pris fin en 2007.

3.3  Le rôle des entreprises demeurées en activité

De 2001 à 2009, la distribution en pourcentage des entreprises dans les six catégories de dynamique de l'emploi est généralement demeurée la même (graphique 3). En moyenne, 53 % des entreprises ont été stables, c'est-à-dire que leur emploi a varié de moins de 1 UMM d'une année à l'autre. Les créations, les disparitions, les entreprises en déclin et les entreprises en croissance représentaient dans chaque cas environ 11 % des entreprises. Les 2 % restants étaient des réapparitions.

Les créations et disparitions d'entreprises ont été responsables de parts relativement petites de la création et de la suppression d'emplois, respectivement. En moyenne, durant cette période, 16 % de la création d'emplois a été attribuable aux entreprises nouvellement créées (graphique 4) et 17 % de la suppression d'emplois a été attribuable aux disparitions d'entreprises (graphique 5). Ces pourcentages sont nettement inférieurs à la fourchette de 30 % à 40 % observée par Haltiwanger et coll. (2010) dans 16 économies développées et émergentes. Une partie de la différence peut tenir à la façon dont l'emploi est mesuré 5  .

Entre 2001 et 2009, le nombre d'emplois créés par les entreprises nouvellement créées et le nombre d'emplois supprimés en raison des disparitions d'entreprises ont connu une tendance à la baisse (graphique 6). Cette situation s'explique en partie par le fait que la taille moyenne tant des entreprises nouvellement créées que des entreprises sortantes a diminué (tableau 1; Ciobanu et Wang, 2012). En outre, vers la fin de la période, la contribution de la création d'entreprises à la création brute d'emplois et celle de la disparition d'entreprises à la suppression brute d'emplois étaient encore plus petites qu'au cours des années précédentes.

Par conséquent, les entreprises demeurées en activité ont joué au fil du temps un rôle de plus en plus important dans les flux tant bruts que nets d'emplois. Le roulement qui a eu lieu a été dans une large mesure attribuable aux entreprises demeurées en activité, celles-ci étant à l'origine d'une part plus importante de la création et de la suppression d'emplois que les entreprises nouvellement créées et les entreprises sortantes. En fait, la contribution à la croissance nette de l'emploi des entreprises demeurées en activité a été supérieure à celle des créations, réapparitions et disparitions combinées chaque année sauf en 2004 et en 2005 (graphique 7).

Ainsi, les entreprises demeurées en activité ont été les plus durement touchées par l'adaptation nécessaire au cours de la période d'expansion de 2001 à 2008 et de la récession de 2008-2009. La plus grande partie de la diminution de l'emploi au cours de la récession a été attribuable aux entreprises qui ont réduit leurs effectifs mais qui n'ont pas fermé leurs portes. La probabilité d'être mis à pied était plus petite durant la récession de 2008-2009 que durant les récessions qui ont eu lieu au début des années 1980 et des années 1990 (Chan et coll., 2011), les employeurs ayant recours davantage aux semaines de travail plus courtes et moins aux suppressions d'emplois que dans le passé (Cross, 2011). Cette constatation concorde avec le rôle modeste, observé ici, que les entreprises sortantes jouent dans la suppression d'emplois, puisque les emplois perdus par suite de la fermeture d'entreprises sont plus susceptibles d'être des mises à pied permanentes.

3.4  Analyse sectorielle et sous-sectorielle

Une différence s'observe entre la dynamique de l'emploi dans le secteur des biens et dans le secteur des services au cours de la décennie. Le secteur des biens a été un destructeur net d'emplois durant quatre ans, tandis que le secteur des services l'a été seulement en 2009 (graphique 8). Il n'est donc pas étonnant de constater que le secteur des services a été à l'origine de la plus grande partie de la croissance annuelle nette de l'emploi durant la période d'expansion de 2001 à 2008.

Par contre, même si moins du tiers des travailleurs étaient employés dans le secteur des biens, plus de la moitié de la perte nette d'emplois en 2009 a eu lieu dans ce secteur. En 2009, la part de l'emploi du secteur des biens s'établissait à 26 %, ce qui représente une baisse par rapport à 31 % en 2001 (graphique 9).

En outre, des différences s'observent entre les cinq sous-groupes du secteur des biens en ce qui concerne la croissance nette de l'emploi (graphique 10). Les sous-secteurs de la fabrication de biens durables et non durables et le sous-secteur de l'agriculture, de la foresterie, de la pêche et de la chasse ont été en général des destructeurs nets d'emplois durant la période d'expansion. Les deux autres sous-secteurs, soit celui de la construction et des services publics et celui de l'extraction minière et de l'extraction de pétrole et de gaz, ont été généralement des créateurs nets d'emplois. En 2009, toutefois, tous les cinq sous-secteurs ont subi une perte nette d'emplois. Ensemble, les sous-secteurs de la fabrication de biens durables et de la fabrication de biens non durables ont affiché une perte nette de 162 600 emplois en 2009, ce qui représente 44 % de la perte nette totale d'emplois.

Presque tous les sous-secteurs des services étaient des créateurs nets d'emplois durant la période d'expansion (graphique 11). En 2009, toutefois, seulement deux sous-secteurs, soit celui de l'éducation et des services de santé et celui des arts, des spectacles, des loisirs, de l'hébergement et des services de restauration, ont créé plus d'emplois qu'ils n'en ont supprimés. Le sous-secteur du commerce et des services connexes et le sous-secteur des services professionnels ont chacun été à l'origine du quart environ de la perte nette totale d'emplois enregistrée en 2009.

Le secteur des biens et celui des services différaient pour ce qui est des volumes relatifs de création et de suppression d'emplois qui ont eu lieu durant la période d'expansion de 2001 à 2008 (tableau 3). Les deux secteurs avaient des niveaux comparables de création d'emplois, mais le taux de suppression d'emplois était de 1,6 point de pourcentage plus élevé dans le secteur des biens. La création brute d'emplois dans le secteur des biens s'est établie en moyenne à 11,7 % tandis que la suppression brute d'emplois a été en moyenne de 11,5 %, donnant une croissance nette de l'emploi de 0,2 %. Dans le secteur des services, le taux de création brute d'emplois de 11,9 % et le taux de suppression brute d'emplois de 9,9 % ont donné une croissance nette de l'emploi de 2,0 %. Ainsi, la différence entre les secteurs sur le plan de la croissance nette de l'emploi n'est pas attribuable à une plus faible création d'emplois, mais à des différences entre les taux de suppression d'emplois.

Les sous-secteurs qui ont connu une croissance durant la période d'expansion avaient généralement des taux plus élevés de création d'emplois et les sous-secteurs qui ont connu un déclin, des taux plus élevés de suppression d'emplois. Toutefois, le sous-secteur de l'agriculture, de la foresterie, de la pêche et de la chasse et celui de l'information, de la culture et des autres services ont eu simultanément des taux élevés de création d'emplois et des taux élevés de suppression d'emplois. En conséquence, le taux moyen de redistribution des emplois de ces deux secteurs était supérieur à 25 %.

Durant la récession, la création d'emplois a ralenti et la suppression d'emplois s'est intensifiée dans la plupart des sous-secteurs en déclin. Dans le sous-secteur de l'extraction minière et de l'extraction de pétrole et de gaz, le taux de suppression d'emplois a été supérieur à 20 %; autrement dit, un cinquième des emplois dans ce secteur ont disparu entre 2008 et 2009. Le sous-secteur de l'agriculture, de la foresterie, de la pêche et de la chasse a été le seul sous-secteur dans lequel la création d'emplois a augmenté durant la récession.

3.5  Taille de l'entreprise

La distribution de l'emploi selon la taille de l'entreprise a été relativement stable au cours de la période étudiée (graphique 12). Le changement le plus notable est une hausse de 1,5 point de pourcentage de la part de l'emploi dans les entreprises comptant moins de 50 employés (38,4 % en 2009, comparativement à 36,9 % en 2001). Cette croissance a eu lieu aux dépens des entreprises de taille moyenne (comptant de 100 à 499 employés). Les entreprises comptant 500 employés ou plus représentaient un 36 % relativement stable de l'emploi durant toute la période.

On fait parfois des généralisations au sujet de la mesure dans laquelle une catégorie de taille donnée (p. ex., les petites entreprises) est à l'origine de la plus grande partie de la création d'emplois. La contribution des entreprises de différentes tailles à la croissance nette de l'emploi a évolué considérablement d'une année à l'autre (graphique 13). Les entreprises comptant 500 employés ou plus ont subi des pertes nettes d'emplois à quatre reprises, soit en 2001, 2002, 2004 et 2009; en fait, cette catégorie de taille représentait 50 % de la diminution nette de l'emploi en 2009. Par contre, ces grandes entreprises ont contribué de façon significative à la croissance de l'emploi en 2003, 2006, 2007 et 2008. Un gain moyen net de 41 000 emplois chaque année durant la période d'expansion de 2001 à 2008 était attribuable aux micro-entreprises (moins de cinq employés). Même si le nombre absolu net d'emplois auquel les micro-entreprises ont contribué est demeuré relativement inchangé, la part annuelle de la croissance nette de l'emploi de ces entreprises a varié considérablement en fonction de la situation dans les entreprises plus grandes.

Les flux d'emplois selon la taille de l'entreprise fournissent d'autres détails sur la nature du changement (tableau 4). Durant la période d'expansion de 2001 à 2008, le taux de croissance net de l'emploi a été d'environ 2,0 % dans les trois groupes intermédiaires (5 à moins de 50 UMM, 50 à moins de 100 UMM et 100 à moins de 500 UMM). La croissance nette de l'emploi a été sensiblement plus élevée seulement dans le cas des micro-entreprises. Les autres taux de flux d'emplois — création d'emplois, suppression d'emplois, redistribution des emplois et redistribution excédentaire des emplois — ont diminué avec la taille de l'entreprise. Conformément à la situation dans d'autres pays, tant durant la période d'expansion que durant la récession, un pourcentage plus petit d'emplois dans les entreprises comptant 500 employés ou plus ont été créés ou supprimés annuellement (Haltiwanger et coll., 2010).

4   Conclusion

La variation nette de l'emploi total, la statistique sommaire qui retient l'attention, est le résultat d'une redistribution et d'un roulement considérables de l'emploi à mesure que certaines entreprises prennent de l'expansion et que d'autres connaissent un déclin.

Certains de ces processus sous-jacents sont caractéristiques de l'économie, d'autres sont attribuables à des changements structurels particuliers à une période donnée et d'autres encore sont les résultats de chocs comme la crise financière mondiale de 2008-2009. Il est difficile de différencier les trois, particulièrement dans une analyse comme celle-ci qui porte sur une décennie seulement et sur une seule récession.

Néanmoins, plusieurs conclusions se dégagent de la présente analyse. Dans l'ensemble, les caractéristiques des flux d'emplois au Canada sont conformes à ceux observés aux États-Unis et dans d'autres pays.

Les taux de création et de suppression d'emplois ont été considérablement plus élevés que la croissance nette de l'emploi. L'emploi total a varié moins de 4 % chaque année, mais les taux tant de création que de suppression d'emplois ont été supérieurs à 8 %.

La suppression d'emplois a été plus sensible que la création d'emplois aux tendances du cycle économique. La suppression d'emplois a diminué progressivement durant la période d'expansion (passant de 12,1 % en 2001 à 9,1 % en 2008), puis est remontée fortement durant la récession (pour atteindre 12,6 %).

Les taux de création d'emplois, de suppression d'emplois et de redistribution des emplois ont diminué avec la taille de l'entreprise. Chaque année, en moyenne, les entreprises comptant 500 employés ou plus ont créé et supprimé moins de 10 % de leurs emplois, tandis que les entreprises comptant moins de 5 employés ont créé et supprimé plus de 25 % de leurs emplois.

Plusieurs des tendances observées au Canada après 2000 pourraient refléter des changements structurels, mais des recherches sont nécessaires pour pouvoir examiner ces questions plus en profondeur.

En premier lieu, le ralentissement de la création d'emplois, de la suppression d'emplois et de la réattribution des emplois, qui est comparable aux tendances observées aux États-Unis, laisse supposer une plus grande stabilité sur les marchés du travail nord-américains vers la fin de la décennie.

En deuxième lieu, la contribution des créations et des disparitions d'entreprises à la création et à la suppression d'emplois a diminué de sorte qu'à la fin de la décennie, 14 % de la création d'emplois était attribuable aux entreprises nouvellement créées et 13 % de la suppression d'emplois était attribuable à la disparition d'entreprises. Le Canada se trouve de ce fait nettement au-dessous de la fourchette de 30 % à 40 % observée dans d'autres pays, mais il faut effectuer d'autres recherches pour déterminer dans quelle mesure cette situation est attribuable à des différences sur le plan des données et des définitions.

En troisième lieu, les grandes entreprises étaient, semble-t-il, particulièrement susceptibles aux fluctuations économiques. Toutefois, ce phénomène est peut-être particulier à la période postérieure à 2000, qui a été marquée par une forte appréciation du cours du dollar canadien, entraînant une baisse de l'intensité des exportations qui a touché tout particulièrement les grandes entreprises manufacturières.

En quatrième lieu, l'augmentation de 1,5 point de pourcentage de la part de l'emploi des petites entreprises aux dépens des entreprises de taille moyenne peut être attribuable à des événements exogènes qui ont fait augmenter l'importance du secteur des services par rapport au secteur des biens plutôt qu'à un avantage dont disposent les petites entreprises. La hausse peut également être attribuable à l'adaptation du secteur manufacturier à l'appréciation du taux de change.

En cinquième lieu, la diminution de la taille moyenne de l'entreprise au cours des 10 dernières années pourrait être associée à la décroissance observée dans le secteur des biens et à la croissance correspondance observée dans le secteur des services.

Plusieurs caractéristiques de la récession de 2008-2009 se dégagent de cette analyse. Les fermetures d'entreprises ont peu contribué à la récession : moins de 15 % des suppressions d'emplois ont été attribuables aux disparitions d'entreprises tandis que les entreprises en déclin ont été à l'origine de plus de 80 % des suppressions d'emplois. En fait, durant la récession, le nombre d'entreprises n'a pas diminué mais au contraire est demeuré stable. Le secteur des biens a été durement touché, affichant une perte nette de 7,6 % de ses emplois; le pourcentage correspondant pour le secteur des services était de 2,3 %.

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