Section 2 : L’offre et la demande d’eau douce

À l’échelle internationale, le Canada est le deuxième pays en importance au chapitre de la superficie et le troisième en importance en ce qui concerne l’offre de ressources d’eau douce renouvelables (Tableau 2.1). Parmi les pays développés, seule l’Islande arrive devant le Canada au chapitre des ressources d’eau par habitantNote 1. Toutefois, cette eau douce n’est pas toujours facilement accessible aux fins d’utilisation, étant donné sa distribution inégale sur l’ensemble de la masse terrestre et le fait que son approvisionnement varie d’un mois et d’une année à l’autre.

Le Canada se classe également parmi les principaux pays en importance au chapitre de l’utilisation d’eau par habitant; n’étant surclassé que par les États-Unis. En tant que proportion des ressources d’eau douce renouvelables totales, les prélèvements d’eau aux fins d’utilisation dans les secteurs des industries, des ménages et de l’agriculture sont relativement faibles (1 %). Cependant, les difficultés à établir un équilibre entre l’offre et l’utilisation peuvent tout de même constituer un enjeu en raison de la variation temporelle et régionale de l’offre et la demande d’eau.

L’utilisation de l’eau et les autres activités humaines peuvent aussi avoir des incidences sur la qualité des ressources d’eau douce et sur la santé des écosystèmes. La surveillance des changements relatifs aux ressources d’eau, à leur qualité et à leur utilisation revêt donc une importance cruciale, en particulier compte tenu de la demande changeante à l’égard des ressources d’eau attribuable à des facteurs démographiques et économiques, au développement des ressources ainsi qu’aux changements en cours sur le plan des précipitations, des régimes de températures et des phénomènes météorologiques extrêmes.

2.1 L’eau douce renouvelable au Canada

 En raison de ses nombreux types de paysages et de ses différentes régions climatiques, le Canada est confronté à d’importants défis en ce qui concerne la mesure du volume d’eau douce qui alimente les écosystèmes, le moment et l’endroit où cela se produit, le volume qui est disponible aux fins d’utilisation humaine, et la mesure du renouvellement au fil du temps. De plus, la qualité de l’eau varie naturellement et peut être détériorée par les activités humaines (encadré 2.1).

L’apport en eau

L’apport en eauNote 2 est une estimation du ruissellement de l’eau douce dans les ruisseaux, les rivières et les fleuves qui fournit des renseignements sur l’approvisionnement en eau douce renouvelable du Canada. De 1971 à 2013, l’apport en eau annuel moyen du CanadaNote 3 s’est situé à 3 478 km3 ou 0,349 m3/m2, ce qui équivaut à une profondeur de 349 mm sur l’ensemble de la superficie du pays. Dans l’ensemble, cet apport correspond à des ressources d’eau douce renouvelables de 103 899 m3 par habitant (tableau 2.2).

La répartition de l’apport en eau varie grandement sur l’ensemble de la superficie du Canada (carte 2.1)Note 4. La région de drainage Côte du Pacifique, en Colombie-Britannique, a affiché un apport en eau en fonction de la superficie de 1,5 m3/m2, soit l’apport en eau le plus élevé au pays. Exprimée par habitant, une production moyenne de 339 002 m3 d’eau renouvelable par habitant a été observée dans cette région de drainage.

Par opposition, les régions de drainage des Prairies ont affiché les apports en eau les plus faibles. L’apport annuel moyen en eau en fonction de la superficie pour les régions de drainage Missouri, Assiniboine–Rouge, Saskatchewan Sud et Saskatchewan Nord s’est situé à 0,05 m3/m2. Ces régions de drainage ont affiché un apport en eau moyen de 5 689 m3 par habitant, ce qui représente un niveau comparativement faible.

L’apport en eau mensuel

L’apport en eau varie tout au long de l’année. Au cours d’une année type, la majeure partie de l’eau douce renouvelable est produite au printemps et au début de l’été, mais atteint un sommet à un moment ultérieur dans certains systèmes nordiques et alimentés par l’eau de fonte (des neiges et des glaciers). À la fin de l’été et à l’automne, l’apport en eau diminue habituellement de façon considérable; toutefois, les niveaux sont les plus bas en hiver dans la majeure partie du pays. De 1971 à 2013, l’apport en eau mensuel médian dans le sud du CanadaNote 5 atteignait un sommet de 218 km3 en mai, diminuant ensuite à 76 km3 en août. Il était à son plus bas en février, où le débit médian était de 50 km3 (graphique 2.1).

Les apports en eau des régions de drainage Okanagan–Similkameen et Assiniboine–Rouge proviennent en majeure partie des débits du printemps; dans ces régions, les apports en eau médians d’avril, de mai et de juin représentaient respectivement 75 % et 77 % des débits annuels pour la période de 1971 à 2013 (cartes 3.3.3 et 3.3.12). Par opposition, dans les régions de drainage Saskatchewan Nord et Saskatchewan Sud, les apports en eau médians atteignaient un sommet plus tard dans l’année, pour ensuite diminuer plus graduellement, en raison de l’eau provenant de la fonte des neiges et des glaces.

Dans les régions de drainage Grands Lacs et Saint-Laurent, les apports en eau atteignaient un sommet en avril, les débits de printemps observés en mars, en avril et en mai ayant représenté près de la moitié des volumes annuels. Les apports en eau médians pendant les mois d’été plus secs, soit les mois de juillet, d’août et de septembre, représentaient respectivement 10 % et 14 % des débits annuels dans ces deux régions (cartes 3.3.19 et 3.3.21).

Selon la région, l’apport en eau mensuel peut aussi varier grandement d’une année à l’autre. La plus forte variabilité de l’apport en eau s’observe dans les régions de drainage des Prairies (carte 2.2)Note 6. À ce sujet, la région Assiniboine–Rouge affiche l’indice de variabilité le plus élevé au chapitre des débits mensuels (tableau 2.2), suivie des régions de drainage Missouri, Okanagan–Similkameen et Saskatchewan Sud. La variabilité de l’apport en eau dans les Prairies peut poser des difficultés quant à la satisfaction des diverses demandes d’eau.

La variation de l’apport en eau au fil du temps

L’apport en eau varie tout au long de l’année et selon la région géographique. Il varie également au fil du tempsNote 7. Le changement climatique modifie davantage les caractéristiques régionales et temporelles des conditions hydrologiques (encadré 2.2)Note 8.

L’apport en eau annuel dans le sud du Canada a affiché des fluctuations au fil du temps, ayant atteint un sommet de 1 544 km3 en 1974 et un creux de 1 165 km3 en 1987 (graphique 2.2). L’apport en eau a diminué de 1971 à 1987 et s’est ensuite redressé graduellement jusqu’en 2012, ayant enregistré une baisse de la fin des années 1990 au début des années 2000. De façon semblable, il est fréquent que des fluctuations annuelles soient observées dans les régions de drainage individuelles (graphiques 2.3, 2.4 et 2.5).

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Encadré 2.1 La qualité de l’eau douce et l’influence humaine

La vaste masse terrestre du Canada, ses conditions hydrologiques complexes, son climat changeant et ses activités humaines ont une incidence non seulement sur les volumes d’eau produits par l’environnement, mais aussi sur la qualité de cette eau. Cela a à son tour des conséquences sur la capacité des écosystèmes à fournir les services dont la société dépend, comme le poisson, l’eau et les habitats sains.

La qualité de l’eau renvoie aux propriétés physiques, chimiques et biologiques de l’eau. Ces propriétés varient en fonction de facteurs environnementaux tels que la géologie, le sol et les taux de débit, lesquels ont une incidence sur le type et la quantité de substances dissoutes ou en suspension dans l’eau. La qualité de l’eau peut aussi être détériorée par les activités humaines qui se produisent dans les environs, en amont, voire au loin; les sociétés modifient la couverture terrestre, construisent des barrages et dévient des cours d’eau, ce qui modifie l’hydrologie, et injecte des agents polluants directement dans l’eau et indirectement par les émissions dans l’air.

L’indicateur de la qualité de l’eau douce des cours d’eau canadien, produit dans le cadre des Indicateurs canadiens de durabilité de l’environnement, fournit de l’information sur la capacité de l’eau ambiante à soutenir la vie aquatique pour certains cours d’eau qui sont à risque d’être détériorées par l’activité humaine. Parmi les régions de drainage dans lesquelles plus de cinq sites ont fait l’objet de tests, plus de 70 % incluent des sites de qualité mauvaise à douteuse (tableau 2.3).

Les sources d’eau de surface utilisées pour produire de l’eau potable pour les collectivités font l’objet d’un suivi de sorte que les usines de traitement de l’eau potable puissent assurer un traitement approprié de l’eau, y compris la filtration et la désinfection. Une importante mesure de la qualité des sources d’eau utilisées par les usines de traitement de l’eau potable est la turbidité, c.-à-d. le manque de limpidité de l’eau causé par des particules en suspension dans l’eau. Ces particules peuvent comprendre de l’argile, des limons, des métaux, des matières organiques et des micro-organismesNote 9.

La quantité de sédiments qui sont naturellement en suspension dans l’eau présente un degré de variation considérableNote 10. Cette quantité varie d’un bassin à l’autre, et aussi à l’intérieur des bassins, selon les saisons, et augmente généralement pendant le ruissellement au printemps, pour ensuite diminuer pendant les périodes de faible débit durant l’été. Puisque la turbidité peut être affectée par le ruissellement et l’érosion, elle est donc assujettie aux activités humaines qui modifient le territoire, comme les activités de construction, d’exploitation forestière, d’extraction minière et d’agriculture, entre autres. Des hausses soudaines de la turbidité des étendues d’eau qui sont normalement limpides peuvent signaler un problème de qualité de l’eau.

En 2013, des données permettant de mesurer les valeurs de turbidité maximale mensuelle des sources d’eau de surface ont été recueillies dans le cadre de l’Enquête sur les usines de traitement de l’eau potable. Les sources d’eau de surface des régions de drainage Bas Saskatchewan–Nelson, Saskatchewan Nord et Assiniboine–Rouge dans les Prairies et de la région de drainage Saint-Laurent ont affiché les valeurs les plus élevées, alors que les niveaux les plus faibles ont été enregistrés dans les régions de drainage de la Colombie-Britannique et des provinces atlantiques (carte 2.3)Note 11. Ces résultats étaient semblables à ceux de 2011.

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Encadré 2.2 L’incidence du changement climatique sur le cycle hydrologique

Il a été prouvé scientifiquement que le cycle hydrologique se modifie en raison du changement climatiqueNote 12. Parmi les incidences figurent des hausses des températures de l’eau et de l’évapotranspiration ainsi que des variations de la configuration des précipitations. Ces variations peuvent inclure des changements à l’ampleur, à la durée et à la fréquence de phénomènes météorologiques tels que les sécheresses, les tempêtes et les inondations et au moment où ceux-ci surviennent, ainsi que des changements à l’approvisionnement régulier en eauNote 13.

Le changement climatique a aussi une incidence sur l’environnement hydrique des divers biomes. Par exemple, les hausses des températures de l’air provoquent la fonte du pergélisol, ce qui modifie l’hydrologie des régions nordiquesNote 14. Les caractéristiques de la qualité de l’eau sont elles aussi touchées par le climat changeant. Par exemple, les températures à la hausse ont une incidence sur les nutriments naturellement présents dans l’eau, et l’intensité des tempêtes influe sur la turbidité de l’eauNote 15.

Changements de la température et de l’évapotranspiration

Une étude récente portant sur la période de 1948 à 2015 établit la preuve que les températures moyennes de l’air ont augmenté dans les onze régions climatiques du pays, les hausses les plus importantes ayant été observées dans certaines des régions climatiques du NordNote 16. Ces hausses des températures contribuent également au réchauffement des eaux de surface des océans. Plus précisément, de 1901 à 2014, les températures des eaux de surface des océans ont augmenté de 1,0 °C à 2,6 °C le long de la côte Atlantique, et de 0,7 °C à 1,1 °C le long de la côte Pacifique (carte 2.4). À son tour, l’augmentation des températures des océans intensifie les phénomènes météorologiquesNote 17.

L’évapotranspiration — le processus combiné par lequel l’eau s’évapore des surfaces de terre, des étendues d’eau et des plantes par transpiration — produit la vapeur d’eau atmosphérique nécessaire aux précipitations. Le volume d’eau qui est transféré de la surface de la Terre à l’atmosphère dépend de plusieurs facteurs, y compris le rayonnement solaire, la température de l’air et de l’eau, l’humidité du sol, l’humidité de l’air, la vitesse du vent, le manteau végétal et la profondeur d’enracinement.

D’importants volumes d’eau douce peuvent s’évaporer dans le cadre du processus d’évapotranspiration, en particulier pendant les mois chauds de l’été, ce qui réduit le volume d’eau de ruissellement et d’eau emmagasinée à la surface. Les réserves d’eau souterraine sont également touchées par ce phénomène, qui amoindrit leur réapprovisionnement et le taux d’humidité du sol. Au Canada, on estime qu’un volume de 2 257 km3 d’eau s’évapore dans l’atmosphère chaque année en raison de l’évapotranspirationNote 18.

Les volumes annuels moyens de perte d’eau due à l’évapotranspiration les plus élevés ont été enregistrés dans les régions de drainage Grands Lacs, Saint-Jean–St-Croix, Côte des provinces Maritimes, Des Outaouais, Okanagan–Similkameen, Columbia, Winnipeg, Assiniboine–Rouge et Saint-Laurent (tableau 2.2 et carte 2.5), tandis que les valeurs les plus faibles ont été observées dans le Nord.

Les changements climatiques, le pergélisol et les écosystèmes de tourbière

Les tourbières figurent parmi les écosystèmes qui subissent déjà les répercussions des changements climatiques. Le Canada compte plus de 1,1 million de kilomètres carrés de tourbières, lesquelles couvrent 12 % de la superficie totale du paysNote 19. Ces milieux humides organiques fournissent des services précieux aux écosystèmes en emmagasinant du carbone, en fournissant des habitats uniques et en régulant le débit de l’eau. Plus du tiers de la superficie totale des tourbières au Canada est gelé pendant toute l’année (pergélisol). D’importantes quantités d’eau sont entreposées dans les sols de ces tourbières gelées.

Les régions climatiques du district du Mackenzie et de la forêt du Nord-OuestNote 20 du centre-nord du Canada comptent environ 462 117 km2 de tourbières, dont 58 % sont en pergélisol (carte 2.6)Note 21. Dans ces régions climatiques principalement recouvertes de tourbières, les températures annuelles moyennes ont augmenté de 2,6 °C et de 1,9 °C respectivement de 1948 à 2015Note 22, ce qui provoque le dégel du pergélisol. Les changements des températures sont encore plus marqués durant l’hiverNote 23.

Ces changements font croître les risques d’incendieNote 24; les émissions de gaz à effet de serre tels que le dioxyde de carbone, l’oxyde nitreuxNote 25 et le méthaneNote 26; le réapprovisionnement des eaux souterraines et l’écoulement des eaux de surfaceNote 27; et modifient l’habitat des plantes et des animauxNote 28.

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2.2 La demande d’eau

L’eau extraite des plans d’eau fournit l’eau potable destinée à être bue ou servant à d’autres usages domestiques, et soutient aussi diverses utilisations économiques telles que la production thermique d’énergie électrique, la fabrication, l’agriculture, l’extraction minière et l’extraction de pétrole et de gaz. De plus, d’importantes utilisations de l’eau sans prélèvement comprennent la navigation, la pêche et les activités récréatives, tandis que l’eau soutient aussi les fonctions des écosystèmes, la végétation, les poissons et la faune (encadré 2.3).

Pour comprendre les pressions qui peuvent s’exercer sur les écosystèmes et les difficultés à équilibrer les demandes concurrentes en eau, il importe de disposer de renseignements sur le volume et le moment des extractions d’eau, le type et l’emplacement des sources d’eau et la quantité d’eau retournée aux réseaux d’alimentation en eau. Comprendre la contribution que les utilisateurs d’eau apportent à l’économie aide aussi à comprendre la valeur de l’eau.

En 2013, 37 892 millions de m3 d’eau (37, 9 km3) ont été extraits de l’environnement et utilisés dans le cadre d’activités économiques et d’activités des ménages au CanadaNote 29. La majeure partie de cette eau (87 %) a été prélevée directement de rivières, de lacs et d’eaux souterraines par les industries et les ménages. La production d’eau potable par les usines de traitement de l’eau potable est à l’origine du reste (13 %)Note 30.

Bien qu’une partie de cette eau ait été consommée (p. ex. pertes d’eau dues aux phénomènes d’évaporation et de transpiration ou eau incluse dans des produits), la majorité a été retournée dans l’environnement après utilisation.

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Encadré 2.3 Le captage d’eau

Bien que les données sur l’utilisation de l’eau présentées ici portent surtout sur l’extraction d’eau, dans le System de comptabilité économique et environnementale, le captage total d’eau comprend les quantités beaucoup plus importantes de précipitations et d’eau du sol qui servent à soutenir la production agricole et de bois d’œuvre, ainsi que les vastes quantités d’eau circulant dans les turbines à des fins de production d’hydroélectricitéNote 31.

Selon les estimations précédentes du captage d’eau, au Canada, en 2005, l’irrigation représentait moins de 2 % de l’eau totale captée à des fins de production agricole, les terres boisées nécessitaient plus de 500 milliards de m3 d’eau pour soutenir la production de bois d’œuvre, et l’eau captée à des fins de production d’hydroélectricité était de l’ordre de 3 billions de mètres cubesNote 32.

Les estimations de l’eau captée à des fins de production d’hydroélectricité ou de production agricole et de bois d’œuvre non irriguée ne sont pas agrégées avec les données sur les autres utilisations de l’eau présentées dans ce rapport, qui sont axées sur l’eau extraite de l’environnement.

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L’utilisation d’eau par l’industrie et par les ménages

En 2013, les principaux utilisateurs d’eau étaient les secteurs de la production, du transport et de la distribution d’électricitéNote 33; de la fabrication; des ménages; de l’agriculture; de l’extraction minière et extraction de pétrole et de gaz; et de la distribution de gaz naturel et des réseaux d’aqueduc et d’égout et autresNote 34 (graphique 2.6). Ces secteurs, qui utilisent des systèmes d’auto-approvisionnement en eau ainsi que le réseau public d’alimentation en eau, étaient à l’origine de 22 % du produit intérieur brut total et de 14 % de l’emploi en 2013 (tableau 2.4). Les autres secteurs combinés étaient responsables de seulement 3 % de l’utilisation de l’eau en 2013.

Services publics

Le secteur des services publics, qui comprend les industries de production d’électricité, de distribution de gaz naturel, les réseaux d’aqueduc et d’égout, et autres, requiert de grandes quantités d’eau. Les centrales hydroélectriques entreposent de vastes quantités d’eau derrière des barrages dans des réservoirs et s’en servent pour actionner les turbinesNote 35. Les centrales thermiques extraient de l’eau des plans d’eau et l’utilisent principalement à des fins de refroidissement avant de la retourner dans l’environnement. Dans son ensemble, l’industrie de la production d’électricité a produit 628 millions de mégawatt heures d’électricité en 2014, les centrales hydroélectriques étant à l’origine de 60 % de la production d’électricité, suivies des centrales thermoélectriques (37 %). Les autres sources de production d’électricité (p. ex. l’énergie éolienne, marémotrice, solaire) représentaient 2 % de la production (tableau 2.5). En 2014, 91 % de l’électricité produite a été utilisée au paysNote 36. Le reste (9 %) représentait 0,6 % de la valeur des exportations totalesNote 37.

En 2013, 25 635 millions de m3 d’eau ont été utilisés pour la production thermique d’énergie électriqueNote 38. Cela représentait 68 % de l’utilisation totale d’eau; cependant, la plus grande partie (98 %) de cette eau a été rejetée dans l’environnement après utilisation, et de petites quantités ont été perdues en raison de l’évaporationNote 39. Le secteur de la distribution de gaz naturel et des réseaux d’aqueduc et d’égout a utilisé 885 millions de m3 d’eau, soit 2 % de l’utilisation totale d’eau.

La plus grande partie (88 %) de l’eau utilisée par les centrales thermoélectriques était de l’eau douce dont elles se sont auto approvisionnée à même les plans d’eau de surface, le reste provenant d’eaux sujettes aux marées et d’autres sources d’eau salineNote 40. Les centrales thermoélectriques en Ontario étaient responsables de 81 % des extractions d’eau de l’industrie, suivies de celles des provinces de l’Atlantique (10 %) et des provinces des Prairies (9 %) (graphique 2.7)Note 41.

L’utilisation d’eau mensuelle moyenne de l’industrie de 2007 à 2013 était la plus élevée en juillet et en aoûtNote 42 en raison de la demande accrue d’électricité en été. En 2013, l’utilisation totale d’eau à des fins de production thermique d’énergie électrique était en baisse de 8 % par rapport aux 27 834 m3 utilisés en 2007.

L’industrie de la production thermique d’énergie électrique a dépensé 172 millions de dollars en eau en 2013, la moitié pour l’acquisition d’eau, 30 % pour le traitement de l’eau prélevée, le reste étant lié à la recirculation de l’eau et au traitement de l’eau évacuéeNote 43.

Fabrication

Dans l’ensemble, le secteur de la fabrication a utilisé 3 954 millions de m3 d’eau en 2013, ce qui représente 10 % de l’utilisation totale d’eauNote 44. Les quantités les plus importantes ont été utilisées par les industries de la fabrication de papier (1 537 millions de m3) et de la première transformation du métal (1 142 millions de m3). En tout, 90 % de l’eau totale prélevée par le secteur de la fabrication a fini par être rejetée dans l’environnementNote 45.

Pour la plus grande partie (88 %) de l’eau qu’il a prélevée, le secteur de la fabrication s’est auto-approvisionné, et 95 % du prélèvement total était sous forme d’eau douce (tableau 2.6). Plus du tiers (35 %) de l’eau prélevée par les industries de la fabrication provient de la région de drainage Grands Lacs; viennent ensuite les régions de drainage Saint-Laurent (18 %), Côte du Pacifique (8 %), Fraser–Basses-terres (7 %) et Côte des Maritimes (6 %) (graphique 2.8).

Le prélèvement d’eau moyen par le secteur de la fabrication était le plus élevé à l’été (graphique 2.9). Dans l’ensemble, les prélèvements d’eau pour la fabrication ont diminué de 13 % par rapport aux 4 573 millions de m3 prélevés en 2007. Les ventes annuelles de biens fabriqués ont diminué de 11 % entre 2007 et 2013Note 46.

Le secteur de la fabrication a dépensé au total 1,2 milliard de dollars en eau en 2013, ce qui comprend des coûts d’acquisition (465 millions de dollars), de traitement de l’eau prélevée (198 millions de dollars), de recirculation (97 millions de dollars) et de traitement de l’eau évacuée (447 millions de dollars)Note 47.

Ménages

Le secteur des ménages était responsable de 9 % (3 239 millions de m3) de l’utilisation totale d’eau au pays en 2013, ce qui comprend tant l’eau provenant du réseau public d’alimentation que les estimations de l’eau de puits utilisée par les ménagesNote 48. Bien qu’une partie de cette eau utilisée par les ménages ait été consommée, environ 90 % des extractions d’eau finissent par être rejetées dans l’environnement après traitement par les usines de traitement des eaux uséesNote 49. Voir l’encadré 2.4 pour obtenir de plus amples renseignements sur les pratiques d’utilisation et de conservation de l’eau par les ménages.

Les usines de traitement de l’eau potable ont produit 5 059 millions de m3 d’eau potable en 2013, dont le secteur résidentiel a utilisé 39 % (1 978 millions de m3) (graphique 2.10)Note 50. Toutefois, le secteur d’utilisation était inconnu pour 21 % de l’eau provenant du réseau public d’alimentation et les pertes attribuables au système de distribution s’établissaient à 13 %.

En 2013, l’eau potable traitée par les usines de traitement de l’eau potable provenait d’eaux de surface dans une proportion de 88 %, suivies d’eaux souterraines (10 %) et d’eaux souterraines sous l’influence directe de l’eau de surface (2 %)Note 51. Les extractions d’eau effectuées par les usines de traitement de l’eau potable atteignent un sommet à l’été (graphique 2.11) et étaient les plus élevées dans les régions de drainage Grands Lacs et Saint-LaurentNote 52. Les ménages ont dépensé 3,2 milliards de dollars pour l’acheminement de l’eau potable provenant du réseau public d’alimentation en 2013Note 53.

La plupart des maisons au Canada sont raccordées à une source d’eau municipale. En 2015, l’eau fournie par les services d’eau publics était la principale source d’eau pour 89 % des ménagesNote 54. Les maisons non-raccordées à une source d’eau municipale avaient le plus souvent un puits privé en tant que source d’eau principale. La proportion des ménages utilisant une source d’eau non municipale était la plus élevée dans les Maritimes : 51 % des logements à l’Île‑du-Prince-Édouard, 48 % au Nouveau-Brunswick et 41 % en Nouvelle-Écosse dépendaient d’une source d’eau non municipale.

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Encadré 2.4 La conservation de l’eau à la maison

L’utilisation d’eau à des fins résidentielles comprend l’utilisation intérieure (toilettes, robinets, douches, bains, machines à laver et lave-vaisselle) et l’utilisation extérieure saisonnière (p. ex. arrosage des pelouses). Les plus grandes proportions de l’utilisation intérieure de l’eau sont attribuables à la chasse d’eau des toilettes, aux robinets et aux douchesNote 55. De nombreux facteurs peuvent expliquer les différences dans l’utilisation d’eau, y compris les pratiques de tarification et de facturation, les mesures de conservation, les caractéristiques démographiques, les types de logement, les activités économiques, l’état de l’infrastructure et le climat. L’utilisation extérieure de l’eau est particulièrement variable.

L’utilisation d’eau par les ménages canadiens a diminué au cours des dernières années. En 2013, l’utilisation totale avait diminué de 16 % par rapport aux 3 875 millions de m3 enregistrée en 2005Note 56. Par ailleurs, de 2005 à 2013, l’utilisation d’eau par habitant est passée de 330 L par habitant par jour à 250 L par habitant par jourNote 57.

Dans le cas des ménages desservis par les services d’eau publics, l’utilisation quotidienne d’eau par habitant était supérieure à la moyenne canadienne à Terre-Neuve‑et-Labrador, au Yukon, en Colombie-Britannique, à l’Île‑du-Prince-Édouard, au Québec, dans les Territoires du Nord-Ouest et au Nouveau-Brunswick (graphique 2.12). Les résidents des trois provinces des Prairies et du Nunavut avaient l’utilisation la moins élevée par habitant.

Ces tendances sont conformes aux résultats d’autres études, qui ont aussi révélé d’importants reculs de l’utilisation quotidienne de l’eau par les ménages dans de nombreuses villes de l’Amérique du NordNote 58. Ces changements ont surtout été attribués à une plus grande efficacité de l’utilisation d’eau par les toilettes et les machines à laver. D’autres études indiquent que les compteurs d’eau et la tarification en fonction du volume peuvent aider à réduire l’utilisation d’eau résidentielleNote 59.

D’après l’Enquête sur les ménages et l’environnement de 2015, 51 % des ménages au Canada ont déclaré que leur logement était muni d’une toilette à faible volume d’eau, 62 %, d’une pomme de douche à faible débit, et 43 %, d’un compteur d’eauNote 60. Parmi les outils de conservation de l’eau utilisée à l’extérieur, 15 % des ménages se servaient d’un baril ou d’une citerne pour entreposer l’eau en 2015Note 61. De plus, chez 32 % des ménages utilisant un système de gicleurs pour arroser leur pelouse, celui-ci était relié à une minuterie.

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Agriculture

En 2013, la valeur de la production agricole canadienne se chiffrait à 55,2 milliards de dollars Note 62 et les produits agricoles et de la pêche et les produits intermédiaires des aliments constituaient 6 % des exportationsNote 63.

Les cultures agricoles et l’élevage étaient responsables de 5 % du totale des extractions d’eau en 2013, ce qui représente au total 2 007 millions de m3. Cette eau a surtout été utilisée à des fins d’irrigation et d’abreuvement des animaux d’élevageNote 64. Les cultures agricoles représentaient légèrement plus de la moitié (53 %) de ce totalNote 65. Bien qu’une partie de l’eau d’irrigation soit absorbée et intégrée dans les plantes ou transpirée, il y en a aussi qui s’évapore et qui peut percoler ou ruisseler des champsNote 66.

Les exploitations agricoles ont dépensé 21,1 millions de dollars pour acheter de l’eau ou des droits relatifs à l’eau à des fins d’irrigation en 2013Note 67. La quantité d’eau destinée à l’irrigation et le moment de l’irrigation dépendent du type de culture et de la configuration locale des températures et des précipitations.

D’après le Recensement de l’agriculture, 7 % des exploitations agricoles au Canada ont irrigué leurs terres en 2011Note 68. En superficie, les grandes cultures céréalières, oléagineuses et semencières comme le blé, l’orge, le maïs et le canola représentaient le plus important type de cultures irriguées (60 %), suivies de la luzerne, du foin et des pâturages (29 %), puis des légumes, des fruits et des autres superficies irriguées (11 %)Note 69.

En 2014, les exploitations agricoles au Canada ont utilisé 1 679 millions de m3 d’eau pour irriguer 585 870 ha de terres agricolesNote 70. En pourcentage de l’eau d’irrigation, les principales sources d’eau comprennent les sources d’eau hors ferme (71 %), les eaux de surface à la ferme (21 %) et les sources d’eaux souterraines à la ferme (7 %)Note 71. Les volumes d’irrigation les plus élevés ont été utilisés dans la région de drainage Saskatchewan Sud (qui représentait 78 % du volume d’irrigation annuel), suivie de la région de drainage Fraser–Basses-terres (11 %) (tableau 2.7)Note 72. L’utilisation d’eau à des fins d’irrigation est la plus élevée en juillet (graphique 2.13).

Extraction minière, exploitation en carrière, et extraction pétrolière et gazière

Le pétrole brut et le gaz naturel représentaient 78 % de la production d’énergie primaire au Canada en 2013Note 73; 76 % de la production de pétrole brut et 52 % de celle de gaz naturel étaient destinées à l’exportationNote 74. Les produits énergétiques excluant l’électricité représentaient 24 % des exportations en 2013, tandis que les minerais métalliques et minerais non métalliques en formaient 4 %Note 75.

En tout, 982 millions de m3 d’eau ont été utilisés pour l’extraction minière et l’extraction de pétrole et de gaz en 2013, ce qui représente moins de 3 % de l’utilisation totale d’eauNote 76. Bien que l’industrie pétrolière et gazière réutilise une bonne partie de l’eau qu’elle prélève, cette eau est majoritairement consommée : par exemple, elle peut être perdue sous forme de vapeur, injectée dans les réservoirs de pétrole ou conservée dans des bassins de résidus après utilisationNote 77.

Pour l’extraction minière et l’exploitation en carrière (sauf l’extraction de pétrole et de gaz), le prélèvement d’eau total s’élevait à 599 millions de m3, l’utilisation la plus élevée de l’eau résultant de l’extraction de minerais métalliques (373 millions de m3 d’eau ou 62 %), de l’extraction de minerais non métalliques (134 millions de m3 ou 22 %) et de l’extraction de charbon (92 millions de m3 ou 15 %)Note 78. Les volumes d’eau évacués par les industries de l’extraction minière se chiffraient à 675 millions de m3 en 2013; la plus grande partie (71 %) a été rejetée dans les eaux de surface, suivie des bassins de résidus (13 %) et des eaux souterraines (8 %)Note 79.

De toute l’eau prélevée pour l’extraction minière et l’exploitation en carrière, 73 % a été tirée de systèmes d’auto-approvisionnement en eau douce de surface, suivis des eaux souterraines (12 %) et d’autres sources d’auto-approvisionnement en eau douce (9 %)Note 80. Les travaux d’extraction minière et d’exploitation en carrière dans les provinces de l’Atlantique étaient responsables de plus du tiers des prélèvements d’eau, suivis des travaux de cette nature au Québec (22 %) et dans les Prairies (21 %) (graphique 2.14). L’eau a été utilisée majoritairement (71 %) à des fins industrielles et dans une proportion de 5 % à des fins de refroidissement, de condensation et de production de vapeurNote 81.

En 2013, les industries de l’extraction minière ont dépensé 179 millions de dollars en eau, et 70 % de ce montant a été payé par l’industrie de l’extraction de minerais métalliques. L’acquisition de l’eau était à l’origine de 19 % des coûts totaux, tandis que l’évacuation en représentait 45 %Note 82.

L’utilisation d’eau selon la demande finale

Il est également possible d’examiner l’utilisation de l’eau du point de vue de la demande finale. Cette façon de procéder consiste à attribuer l’utilisation d’eau pour la production de biens et de services à l’utilisateur final de ce produit plutôt qu’au producteur. Par exemple, l’eau utilisée pour la production d’électricité est attribuée aux entreprises ou aux ménages qui consomment l’électricité.

Selon ce point de vue, les ménages constituent les principaux utilisateurs d’eau au Canada. Lorsqu’on prend en compte l’utilisation directe de l’eau à la maison (y compris pour faire la cuisine, boire, nettoyer et arroser la pelouse) ainsi que l’utilisation indirecte de l’eau nécessaire pour satisfaire à la demande, par les ménages, de biens et de services comme l’électricité et la nourriture, les ménages étaient à l’origine de 53 % de l’utilisation totale d’eau en 2013 (graphique 2.15)Note 83. La production de biens et de services destinés à l’exportation arrivait au deuxième rang au chapitre de la demande finale, étant responsable de 30 % de l’utilisation de l’eau en 2013.

Les demandes concurrentes en eau

Dans certaines régions du pays, des préoccupations ont été soulevées concernant la répartition de l’eau selon les demandes concurrentes (eau potable, agriculture, fabrication et autres industries) pendant les périodes de pénurie de l’eau Note 84. Des écoulements fluviaux moins élevés qu’à la normale peuvent avoir d’importantes incidences économiques sur l’agriculture, les pêches, les municipalités et les industries, y compris la production d’électricité, tout en se répercutant sur la qualité de l’eau, l’habitat aquatique et les possibilités récréativesNote 85.

Il peut être plus difficile d’équilibrer la demande d’eau de ces différents secteurs pendant les mois d’été, qui coïncident souvent avec une demande accrue d’eau d’irrigation et de source municipale, alors que l’offre d’eau se trouve à un bas niveauNote 86.

Les ratios des extractions d’eau douce de surface à l’apport en eau pour le mois d’août 2013Note 87 étaient supérieurs à 40 % dans les régions de drainage Assiniboine–Rouge et Grands Lacs, tandis qu’ils variaient entre 20 % et 40 % dans les régions de drainage Saskatchewan Sud et Okanagan–Similkameen (carte 2.7). Ces ratios plus élevés indiquent une possibilité accrue de pénuries d’eau et de conflits entre des utilisations concurrentes, et font craindre que les débits des cours d’eau ne suffisent pas à combler les besoins des écosystèmesNote 88.

Les ratios élevés du prélèvement à l’apport en eau dans les régions de drainage Grands Lacs et Assiniboine–Rouge étaient attribuables en grande partie aux extractions en vue de la production thermique d’énergie électrique. La plus grande partie de cette eau a fini par être rejetée dans le plan d’eau d’où elle a été tirée.

Les extractions d’eau à des fins d’irrigation représentaient la majorité des prélèvements d’eau totaux dans la région de drainage Saskatchewan Sud et plus de 40 % de ceux dans l’Okanagan–SimilkameenNote 89. Peu d’eau extraite à des fins d’irrigation est retournée à la source d’eauNote 90.

Notes


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