L'étendue de la délinquance

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Le nombre d'affaires criminelles consignées au cours d'une carrière délinquante est un indicateur de l'étendue globale de l'activité criminelle de l'auteur présumé. La plupart des auteurs présumés dans les deux cohortes de naissance avaient été impliqués dans seulement une affaire consignée pendant la période d'observation de 10 ans. Une minorité d'entre eux avaient eu des carrières très actives. En moyenne, les auteurs présumés nés en 1987 avaient été impliqués dans 2,4 affaires consignées entre leur 8e et leur 18e anniversaire, dont 2,1 affaires comptaient au moins une infraction substantielle et 0,3 affaire comptait uniquement des infractions présumées contre l'administration de la justice1. La moyenne des affaires était quelque peu inférieure pour la cohorte de 1990, ces membres ayant enregistré, en moyenne, 1,7 affaire entre le 5e et le 15e anniversaire, dont 1,6 comptait au moins une infraction substantielle. Ces chiffres traduisent le moins grand nombre d'affaires criminelles consignées qui est caractéristique des enfants plus jeunes, et l'absence presque totale d'infractions contre l'administration de la justice avant que soit atteint l'âge de responsabilité criminelle au 12e anniversaire. Étant donné que les enfants de moins de 12 ans ne peuvent être inculpés ni reconnus coupables d'infractions criminelles, ils ne risquent pas de perpétrer les infractions contre l'administration de la justice courantes, comme un manquement aux conditions de la probation ou de la liberté sous caution, ou le défaut de comparaître en cour.

L'un des résultats les plus frappants des recherches sur les carrières délinquantes et criminelles est la répartition inégale de l'activité criminelle chez les auteurs. Cette inégalité a d'abord été observée dans l'étude classique de la délinquance chez les garçons de Philadelphie effectuée par Wolfgang, Figlio et Sellin (1972). Ces auteurs ont constaté qu'un petit nombre d'auteurs très actifs étaient responsables de la majorité des crimes consignés commis par les membres de la cohorte de naissance. Plus précisément, 52 % des crimes consignés avaient été perpétrés par les 18 % des auteurs qui avaient commis cinq infractions consignées ou plus, et qui étaient désignés par l'expression « chronic offenders » (multirécidivistes) dans l'étude. Ces multirécidivistes avaient commis en moyenne 8,5 infractions consignées entre leur 7e et leur 18e anniversaire. Par contre, presque la moitié des auteurs dans la cohorte de naissance (46 %) n'avaient commis qu'une seule infraction consignée pendant la période d'observation. Ce résultat a été également observé dans de nombreuses autres études. Par exemple, dans leur étude des carrières devant les tribunaux2 des jeunes Canadiens de 12 à 22 ans nés en 1979-1980, Carrington, Matarazzo et deSouza (2005) ont conclu que 16 % des contrevenants qui avaient été impliqués dans cinq affaires ou plus pendant leur carrière devant les tribunaux étaient responsables de 58 % de toutes les affaires, et que 55 % des contrevenants n'avaient eu qu'une seule affaire à leur actif au cours de leur carrière.

La figure 31 et le tableau 5 montrent la répartition des auteurs présumés et de leurs infractions séparément pour les cohortes de naissance de 1990 et 1987, à l'aide de la même classification que celle utilisée par Wolfgang, Figlio et Sellin. La répartition inégale était évidente dans les deux cohortes. Les multirécidivistes représentaient seulement 10 % des auteurs nés en 1987, mais ils étaient responsables de 46 % des affaires imputées aux membres de cette cohorte; ils affichaient en moyenne 10,8 affaires par auteur présumé. Par contre, 63 % des auteurs nés en 1987 n'avaient eu qu'une seule affaire consignée durant leur carrière délinquante3.

Figure 31 Répartition inégale des actes criminels consignés chez les auteurs présumés. Une nouvelle fenêtre s'ouvrira.

Figure 31
Répartition inégale des actes criminels consignés chez les auteurs présumés

Tableau 5 Répartition inégale de l'activité criminelle consignée chez les auteurs présumés. Une nouvelle fenêtre s'ouvrira

Tableau 5
Répartition inégale de l'activité criminelle consignée chez les auteurs présumés

Les trois catégories d'auteurs présumés dans la classification de Wolfgang ne donnent qu'un aperçu rudimentaire de l'inégalité des actes de délinquance consignés. Le coefficient de Gini est un indicateur plus précis de l'inégalité qui est fondée sur la répartition complète des infractions. Cet indice est couramment utilisé pour mesurer l'inégalité de la répartition de la richesse ou du revenu dans une population, et il varie entre 0 (pour une répartition parfaitement égale) et 1 (pour une répartition parfaitement inégale). Les valeurs du coefficient de Gini pour le nombre d'affaires consignées au cours des carrières des membres des cohortes de 1987 et de 1990 étaient de 0,49 et 0,37 respectivement (tableau 5), ce qui confirme l'inégalité plus prononcée dans l'activité de la cohorte de 19874.

L'inégalité de l'activité criminelle diminue légèrement si l'on retient uniquement les infractions substantielles — c'est-à-dire si l'on exclut les affaires comprenant seulement des infractions contre l'administration de la justice. Les proportions de multirécidivistes nés en 1987 chutent alors de 10 % à 8 %, et celles des multirécidivistes nés en 1990, de 5 % à 4 %. En outre, les valeurs du coefficient de Gini et de l'écart type sont également un peu plus faibles (tableau 5).

Le tableau 6 montre le nombre moyen d'affaires consignées selon le sexe. Dans la cohorte de 1987, les garçons étaient plus actifs que les filles, ayant enregistré 2,7 affaires consignées en moyenne pendant leur carrière, par rapport à 1,8 affaire pour les filles. On a relevé des écarts du même ordre pour ce qui est de la cohorte de 1990. Dans la cohorte de 1987, l'activité plus intense des garçons s'observait davantage dans la proportion plus élevée (13 %) de multirécidivistes chez les garçons que chez les filles (5 %) que dans le nombre moyen d'affaires commises par ces multirécidivistes, qui ne variait pas beaucoup selon le sexe (11,0 affaires pour les garçons contre 9,4 pour les filles). Les multirécidivistes étaient responsables de la moitié (51 %) de toutes les affaires consignées mettant en cause des garçons nés en 1987, mais de seulement 27 % des affaires imputées à des filles. Les résultats de la comparaison sont semblables pour la cohorte de 1990. La plus forte différence, ou inégalité, pour ce qui est de l'activité des garçons ressort également des coefficients de Gini : dans la cohorte de 1987, les coefficients étaient de 0,52 pour les garçons et de 0,38 pour les filles. Les résultats obtenus par les garçons peuvent être comparés avec ceux qui ont été enregistrés pour les garçons de Philadelphie par Wolfgang et autres (1972) il y a une trentaine ou une quarantaine d'années. Wolfgang et ses collègues ont constaté que les 18 % de multirécidivistes de sexe masculin affichaient en moyenne 8,5 infractions consignées et étaient responsables de 52 % des crimes consignés pour la cohorte. La présente étude a révélé que 13 % des multirécidivistes de sexe masculin nés en 1987 affichaient en moyenne 11 infractions consignées et étaient responsables de 51 % des crimes consignés pour la cohorte. Les auteurs primaires représentaient 46 % des auteurs dans l'étude de Wolfgang et 59 % des auteurs présumés de sexe masculin dans la présente étude.

Tableau 6 Répartition inégale de l'activité criminelle consignée chez les auteurs présumés, selon le sexe. Une nouvelle fenêtre s'ouvrira

Tableau 6
Répartition inégale de l'activité criminelle consignée chez les auteurs présumés, selon le sexe

 


Notes

  1. Les infractions substantielles désignent toutes les infractions sauf les infractions contre l'administration de la justice, dont les plus courantes sont les manquements aux conditions de la probation ou de la liberté sous caution, et le défaut de comparaître en cour. D'autres infractions contre l'administration de la justice qui sont beaucoup moins courantes comprennent le bris de prison, l'évasion d'une garde légale et d'autres infractions très peu fréquentes. Voir le tableau A.1 de l'annexe pour obtenir une répartition détaillée des infractions imputées aux membres de la population étudiée.
  2. Il s'agit des affaires qui ont abouti au dépôt d'accusations et qui ont été instruites par un tribunal de la jeunesse ou un tribunal de juridiction criminelle pour adultes.
  3. Il y a moins de multirécidivistes dans la cohorte de naissance de 1990, car cette cohorte est observée dans la présente étude pendant une période de la vie où l'activité délinquante consignée est moins intense. Seulement 5 % des auteurs présumés nés en 1990 se classaient dans la catégorie des multirécidivistes, mais leur niveau d'activité moyen (9,3 affaires par auteur présumé) était presque aussi élevé que celui des multirécidivistes nés en 1987. Les multirécidivistes étaient en cause dans 27 % des affaires attribuées aux membres de la cohorte de 1990. Soixante-quatorze pour cent des auteurs présumés nés en 1990 n'avaient commis qu'une seule affaire consignée entre leur 5e et leur 15e anniversaire. Tout comme on l'a noté pour le nombre moyen d'affaires dans la carrière, les proportions de membres de la cohorte de naissance de 1990 indiquées pour les trois catégories de Wolfgang révèlent à la fois le moins grand nombre d'infractions substantielles consignées pour ces enfants plus jeunes et le fait qu'ils ne risquent pas de perpétrer les types les plus courants d'infractions contre l'administration de la justice avant l'âge de 12 ans.
  4. Comme le calcul du coefficient de Gini nécessite des données non pondérées, ces valeurs sont fondées sur des fréquences brutes plutôt que sur les données démographiques pondérées utilisées ailleurs dans le présent rapport. Un autre indice de l'inégalité est l'écart type, qui peut être calculé au moyen de données pondérées, mais qui est plus difficile à interpréter parce qu'il ne comporte pas de valeur maximale fixe. L'écart type de la répartition des affaires consignées pour la cohorte de 1987 est de 4,5, et pour la cohorte de 1990, il est de 2,5 (tableau 5).