Chapitre 7
La disparité des compétences sur le marché du travail et l'apprentissage des adultes

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Sommaire
7.1 Aperçu et faits saillants
7.2 La disparité des compétences sur le marché du travail et l'apprentissage des adultes
7.3 Importance de la disparité des compétences
7.4 Ampleur de la concordance et de la disparité des compétences sur le marché du travail
7.5 À qui s'applique la concordance ou la disparité des compétences?
7.6 Participation à l'apprentissage des adultes et disparité des compétences
Conclusion
Bibliographie
Annexe

Début du texte

Sommaire

Ce chapitre porte sur la disparité des compétences sur le marché du travail et sur son rapport avec l'apprentissage des adultes. L'ampleur et la répartition de la disparité entre les exigences courantes concernant la littératie des travailleurs et les compétences en littératie qu'ils possèdent constituent un enjeu important que les données de l'ELCA permettent d'étudier. Une meilleure compréhension de l'interaction entre l'offre et la demande de compétences en littératie peut avoir des conséquences importantes, d'une part sur les politiques sectorielles et les structures du marché du travail qui stimulent la demande et, d'autre part, sur les politiques concernant l'acquisition continue du savoir et les structures de l'éducation qui déterminent l'offre. Selon la méthodologie d'analyse des données, la disparité des compétences serait de l'ordre d'environ 30 % à 40 % dans tous les pays étudiés. Telle qu'elle est définie pour les besoins du présent chapitre, la disparité englobe aussi bien les déficits que les excédents de compétences. La répartition des excédents semble se concentrer chez les jeunes cohortes ainsi que chez les femmes et les non-immigrants, alors que les déficits ont tendance à s'accumuler chez les hommes, les adultes âgés et les immigrants. Il semble également que la concordance et la disparité des compétences soient étroitement liées à la fréquence de la participation à l'éducation des adultes ainsi qu'aux sources de financement de cette participation.

7.1 Aperçu et faits saillants

Ce chapitre porte sur la disparité des compétences sur le marché du travail et sur son rapport avec l'apprentissage des adultes. L'ampleur et la répartition de la disparité entre les exigences courantes concernant la littératie des travailleurs et les compétences en littératie qu'ils possèdent constituent un enjeu important que les données de l'ELCA permettent d'étudier. Une meilleure compréhension de l'interaction entre l'offre et la demande de compétences en littératie peut avoir des conséquences importantes, d'une part sur les politiques sectorielles et les structures du marché du travail qui stimulent la demande et, d'autre part, sur les politiques concernant l'acquisition continue du savoir et les structures de l'éducation qui déterminent l'offre. Selon la méthodologie d'analyse des données, la disparité des compétences serait de l'ordre d'environ 30 % à 40 % dans tous les pays étudiés. Telle qu'elle est définie pour les besoins du présent chapitre, la disparité englobe aussi bien les déficits que les excédents de compétences. La répartition des excédents semble se concentrer chez les jeunes cohortes ainsi que chez les femmes et les non-immigrants, alors que les déficits ont tendance à s'accumuler chez les hommes, les adultes âgés et les immigrants. Il semble également que la concordance et la disparité des compétences soient étroitement liées à la fréquence de la participation à l'éducation des adultes ainsi qu'aux sources de financement de cette participation.

Plusieurs résultats importants ressortent de l'analyse présentée dans ce chapitre :

  • La proportion totale de la concordance des compétences se situe entre 60 % et 70 % dans la plupart des pays si l'on tient compte à la fois des concordances élevées et faibles des compétences.
  • Il y a déficit de compétences chez environ 10 % à 30 % de la population active, selon le pays.
  • La réserve (ou l'excédent) de compétences varie considérablement selon le pays. En Hongrie et en Norvège, plus de 30 % des travailleurs adultes possèdent un excédent de compétences, alors que la réserve de l'Italie se situe autour de 13  %.
  • En matière de disparité des compétences, les écarts entre les sexes sont le plus souvent minimes, mais la proportion de la concordance élevée des compétences est plus forte chez les hommes dans plus de la moitié des pays étudiés, soit les États-Unis, la Norvège, la Nouvelle-Zélande, les Pays-Bas et la Suisse.
  • En général, les femmes sont plus nombreuses que les hommes à occuper un emploi qui n'utilise pas pleinement leurs compétences en littératie.
  • En accord avec la répartition des compétences selon l'âge, les excédents de compétences sont en général plus élevés chez les jeunes cohortes. Par exemple, environ 40 % des jeunes et des jeunes adultes qui sont sur le marché du travail en Hongrie et en Norvège ont un excédent de compétences. L'estimation est aussi relativement élevée aux Bermudes, au Canada et aux Pays-Bas, où environ 30 % des jeunes et des jeunes adultes ont un excédent de compétences.
  • Dans la majorité des pays, un nombre considérable d'immigrants ne rencontrent pas les compétences en littératie qui sont requises dans leur emploi. C'est le cas en particulier des pays qui présentent des taux d'immigration élevés comme le Canada, la Nouvelle-Zélande, la Suisse et les États-Unis.
  • En moyenne, les travailleurs dont la concordance des compétences est élevée ont tendance à participer davantage à l'éducation des adultes que les autres travailleurs. Viennent ensuite les travailleurs ayant un déficit de compétences. On observe les taux de participation les plus faibles chez les travailleurs dont la concordance des compétences est faible.
  • Dans le groupe à concordance élevée, les femmes sont plus nombreuses que les hommes à participer à l'éducation et à la formation des adultes, ce qui concorde avec les écarts entre les sexes dans le taux global de participation des hommes et des femmes occupés.
  • Les employeurs sont surtout portés à investir dans les travailleurs dont la concordance des compétences est élevée. Viennent ensuite les travailleurs ayant un déficit de compétences, ceux qui ont un excédent de compétences et ceux du groupe à concordance faible.
  • Dans un certain nombre de pays, les résultats donnent à penser que le financement public semble consacré davantage aux travailleurs à concordance élevée et aux travailleurs ayant un excédent de compétences qu'à ceux ayant un déficit de compétences ou une concordance faible.

7.2 La disparité des compétences sur le marché du travail et l'apprentissage des adultes

Dans le présent chapitre, nous examinons la disparité des compétences sur le marché du travail et son rapport avec l'apprentissage des adultes. Selon la méthodologie d'analyse des données, la disparité des compétences serait de l'ordre d'environ 30 % à 40 % dans tous les pays étudiés. Telle qu'elle est définie pour les besoins du présent chapitre, la disparité englobe aussi bien les déficits que les excédents de compétences. La répartition des excédents semble se concentrer chez les jeunes cohortes ainsi que chez les femmes et les immigrants, alors que les déficits ont tendance à s'accumuler chez les hommes, les adultes âgés et les non-immigrants. Il semble également que la disparité des compétences soit étroitement liée à la fréquence de la participation à l'éducation des adultes ainsi qu'aux sources de financement de cette participation.

La première section aborde la notion de disparités de compétences dans l'Enquête sur la littératie et les compétences des adultes. La deuxième section présente des résultats sur l'ampleur de la disparité des compétences. La troisième section étudie le profil  socioéconomique de ceux qui présentent un concordance et une disparité des compétences. Et la dernière section aborde la question de la participation à l'apprentissage des adultes et la disparité des compétences.

7.3 Importance de la disparité des compétences

L'ampleur et la répartition de la disparité entre les exigences courantes concernant la littératie des travailleurs et les compétences en littératie qu'ils possèdent constituent un enjeu important que les données de l'ELCA permettent d'étudier. Une meilleure compréhension de l'interaction entre l'offre et la demande de compétences en littératie peut avoir des conséquences importantes, d'une part sur les politiques sectorielles et les structures du marché du travail qui stimulent la demande et, d'autre part, sur les politiques concernant l'acquisition continue du savoir et les structures de l'éducation qui déterminent l'offre.

Depuis quelques années, on accorde une grande attention à la formation d'appoint des travailleurs ayant un « déficit de compétences » (ceux qui possèdent des compétences faibles, mais qui pratiquent néanmoins assez souvent des activités de littératie et de numératie dans le cadre d'un emploi productif), non seulement parce que les déficits reflètent des carences du marché du travail qui risquent de freiner la croissance de la productivité, mais aussi parce que l'évolution influencée par la technologie favorise la création d'emplois exigeant des compétences élevées en littératie. Par contre, de nombreux autres travailleurs possèdent des compétences élevées en littératie, mais ne les exploitent pas pleinement au travail (Krahn et Lowe, 1998; Boothby, 1999). On parle alors d'un « excédent de compétences ». Cette situation favorise la croissance à long terme de l'économie du savoir, mais la sous-utilisation des compétences au travail risque de s'avérer problématique à court terme, car on risque de perdre ses compétences à force de ne pas les utiliser. Les compétences en littératie sont comparables à des muscles qui se développent quand on les utilise, sans quoi ils risquent de s'atrophier (OCDE et DRHC, 1997). La demande et l'utilisation des compétences en littératie ne doivent donc pas être tenues pour acquises.

7.4 Ampleur de la concordance et de la disparité des compétences sur le marché du travail

Dans le présent chapitre, on entend par concordance ou disparité des compétences la correspondance entre les compétences en littératie mesurées des travailleurs et la mesure dans laquelle ces derniers accomplissent des tâches de littératie au travail. Sur le plan conceptuel, les travailleurs possédant des compétences faibles en littératie et dont l'emploi exige une pratique relativement élevée d'activités de littératie ont un « déficit de compétences », alors que les travailleurs possédant des compétences moyennes ou élevées et dont l'emploi exige une pratique relativement faible d'activités de littératie ont un « excédent de compétences ». De manière empirique, les personnes dont le score concernant la pratique d'activités de lecture se situe au-dessous de la médiane sont assimilées à la catégorie « pratique faible à moyenne », et celles dont le score se situe au-dessus, à la catégorie « pratique moyenne à élevée ». De même, les personnes qui se classent aux niveaux 1 et 2 sur l'échelle de compréhension de textes suivis sont assimilées à la catégorie « compétences faibles » et celles qui se classent aux niveaux 3 et 4 ou 5, à la catégorie « compétences moyennes à élevées ». Ces deux variables ont servi à définir les quatre catégories suivantes :

  • Compétences faibles, pratique faible à moyenne ⇒ Concordance faible
  • Compétences faibles, pratique moyenne à élevée ⇒ Disparité (déficit)
  • Compétences moyennes à élevées, pratique  faible à moyenne ⇒ Disparité (excédent)
  • Compétences moyennes à élevées, pratique moyenne à élevée ⇒ Concordance élevée

Comme le montre la figure 7.1, cette répartition par catégorie dégage une tendance selon laquelle la proportion de la concordance des compétences se situe régulièrement autour de 60 % dans la plupart des pays (elle atteint 70 % en Italie). On pouvait s'y attendre, car il est normal qu'à la longue, les travailleurs aux compétences élevées accèdent à des emplois exigeant plus de compétences, alors que ceux dont les compétences sont faibles ne gravissent pas les échelons. La concordance comprend à la fois la concordance des compétences élevées et celle des compétences faibles. La Hongrie et l'Italie comptent les plus fortes proportions de concordance des compétences faibles, 42 % et 58 % de leurs travailleurs peu qualifiés, respectivement, étant affectés à des emplois peu spécialisés. Le Canada, la Norvège et la Nouvelle-Zélande comptent les plus faibles proportions de leur population active en situation de concordance des compétences faible (de 18 % à 23 %). Inversement, c'est en Hongrie et en Italie que la concordance moyenne à élevée des compétences est la plus faible, mais elle se situe régulièrement autour de 40 % aux Bermudes, au Canada, en Norvège, en Nouvelle-Zélande et aux Pays-Bas. Les États-Unis et la Suisse se situent entre les deux extrêmes avec environ 33 % de leur population active en situation de concordance élevée et 25 % en situation de concordance faible.

Figure 7.1 Répartition de la disparité des compétences

On peut tirer de la figure 7.1 d'autres observations dignes de mention. Premièrement, les proportions de concordance faible et de concordance élevée indiquent non seulement la répartition des compétences de la population active, mais aussi l'ampleur de la demande et de l'offre de compétences en littératie (voir le tableau 7.1 de l'annexe 7). Par extension, les données nous éclairent également sur l'ampleur de la disparité, soit le déficit et l'excédent, des compétences en littératie. Deuxièmement, on observe une disparité dans tous les pays, mais l'ampleur du phénomène varie. On peut supposer qu'un certain niveau de disparité est inévitable sur le marché du travail, mais on ne peut affirmer avec certitude qu'une proportion de 10 %, par exemple, est normale. Toutefois, des taux élevés pourraient bien indiquer la nécessité d'un ajustement.

D'après les données de la figure 7.1, il y a déficit de compétences chez environ 7 % à 24 % de la population active, selon le pays. Les pays qui accusent un déficit de compétences relativement élevé comptent une forte proportion de travailleurs dont les compétences fonctionnelles en littératie sont faibles et qui travaillent néanmoins dans des emplois exigeant une pratique moyenne à élevée de tâches de littératie. Cette situation dénote des carences du marché du travail et risque de nuire à la productivité ainsi qu'à la santé et à la sécurité au travail, d'autant plus que les exigences professionnelles en matière de compétences augmentent en raison de l'évolution influencée par la technologie, par exemple avec la diffusion des TIC et de l'ordinateur personnel au travail, dans tous les secteurs et à tous les niveaux. C'est en Suisse et aux États-Unis que la population active accuse les déficits les plus élevés en matière de compétences : dans ces deux pays, respectivement, environ 24 % et 22 % des travailleurs possèdent des compétences relativement faibles en littératie, compte tenu de la fréquence et de la variété des tâches de lecture à accomplir au travail. Les Bermudes, la Hongrie, la Norvège et les Pays-Bas accusent de faibles déficits.

De même, la réserve (ou l'excédent) de compétences, définie par le nombre de travailleurs aux compétences fonctionnelles en littératie moyennes ou élevées qui occupent des emplois exigeant une pratique d'activités faible ou moyenne, varie considérablement, elle aussi, selon le pays. La Hongrie et la Norvège possèdent des réserves de compétences équivalant à plus de 32 %, alors que celle de l'Italie se situe autour de 13 %. Le rendement global d'un pays, mesuré par l'ELCA, a tendance à être lié à la taille de la réserve de compétences. Si un excédent de compétences favorise la croissance à long terme de l'économie du savoir, la sous-utilisation des compétences au travail risque de s'avérer problématique à court terme, car elle expose les travailleurs au risque de perte de compétences. La pratique d'activités joue un rôle important dans l'entretien et le perfectionnement des compétences (Reder, 2009; Desjardins, 2004). Par extension, les travailleurs qui sont privés de l'occasion d'accomplir des tâches complexes de littératie risquent de perdre une partie de leurs compétences. Il en résulte un enjeu stratégique important et complexe, ainsi que la nécessité d'envisager comment les politiques sectorielles et celles du marché du travail peuvent favoriser l'utilisation des compétences au travail. Selon une étude comparative, les conditions structurelles de certains marchés nationaux permettent aux employeurs de se concurrencer en ayant recours à des stratégies axées sur des compétences faibles, alors qu'ailleurs, on utilise des stratégies axées sur des compétences élevées pour produire des biens et des services semblables (Brown, Green et Lauder, 2001).

7.5 À qui s'applique la concordance ou la disparité des compétences?

La présente section porte sur les caractéristiques démographiques et socioéconomiques de la disparité des compétences en fonction d'interactions avec des variables comme le sexe, l'âge, le statut d'immigrant et le statut professionnel.

Sexe

En matière de disparité des compétences, les écarts entre les sexes sont le plus souvent minimes, mais la figure 7.2 révèle certains écarts entre les pays qui sont dignes de mention. Premièrement, la proportion de la concordance moyenne à élevée des compétences est plus forte chez les hommes dans plus de la moitié des pays étudiés, soit les États-Unis, la Norvège, la Nouvelle-Zélande, les Pays-Bas et la Suisse. L'écart est particulièrement prononcé en Suisse, où 40 % des hommes sont affectés à des emplois moyennement ou hautement spécialisés, comparativement à 26 % des femmes. Aux Bermudes, au Canada et en Italie, les hommes et les femmes sont affectés en proportions égales à des emplois moyennement ou hautement spécialisés, alors qu'en Hongrie, les femmes sont plus nombreuses que les hommes à être affectées à ce genre d'emploi. Deuxièmement, les excédents de compétences ont tendance à se concentrer chez les femmes, alors que les déficits de compétences semblent plus répandus chez les hommes. On peut en déduire qu'en général, les femmes sont plus nombreuses que les hommes à occuper un emploi qui n'utilise pas pleinement leurs compétences en littératie. Inversement, les hommes sont plus nombreux que les femmes à occuper un emploi exigeant une pratique élevée d'activités de lecture, même s'ils possèdent de faibles compétences en littératie.

Figure 7.2 Disparité des compétences selon le sexe

Âge

En accord avec la répartition des compétences selon l'âge, les données de la figure 7.3 montrent qu'en général, les excédents de compétences sont plus élevés chez les jeunes cohortes. Par exemple, environ 40 % des jeunes et des jeunes adultes qui sont sur le marché du travail en Hongrie et en Norvège ont un excédent de compétences. L'estimation est aussi relativement élevée aux Bermudes, au Canada et aux Pays-Bas, où environ 30 % des jeunes et des jeunes adultes ont un excédent de compétences. La raison en est peut-être que les jeunes et les jeunes adultes sont habituellement plus nombreux à occuper des emplois temporaires ou de débutant pour lesquels les compétences exigées ne correspondent pas nécessairement à leur domaine d'études ou à leur niveau de compétence en littératie. Le degré de concordances est naturellement appelé à augmenter avec l'âge, à mesure que les travailleurs accèdent à des emplois qui correspondent mieux à leur niveau de compétence. Il reste cependant des niveaux appréciables d'excédent de compétences chez les cohortes âgées. La Hongrie, par exemple, présente les plus hauts niveaux d'excédent, mais aussi les plus faibles niveaux de déficit de compétences, tous groupes d'âge confondus. Dans la majorité des pays, au moins 15 % des cohortes âgées ont un excédent de compétences. Seules l'Italie (11 %) et la Suisse (13 %) présentent des niveaux relativement faibles d'excédent chez les groupes âgés. À l'instar de la Suisse, les États-Uniset la Nouvelle-Zélande accusent certains des plus hauts niveaux de déficit de compétences chez les cohortes âgées.

Figure 7.3 Disparité des compétences selon le groupe d'âge

Immigration

L'écart entre les proportions d'immigrants et de non-immigrants ayant un excédent de compétences sur le marché du travail est parfois considérable. Comme le montrent les données de la figure 7.4, c'est le cas en particulier au Canada et aux États-Unis, qui comptent environ 12 % et 14 % de plus d'immigrants que de non-immigrants ayant un excédent de compétences. Si l'on observe l'inverse en Italie et en Hongrie, on compte cependant environ 4 % à 7 % de plus d'immigrants que de non-immigrants ayant un excédent de compétences dans les autres pays . Ceci ne surprend guère étant donné que bon nombre d'immigrants doivent d'abord s'acclimater et développer leurs habilités dans la langue du pays d'accueil, ce qui en échange constitue un facteur clé dans la transmission de leurs compétences en littératie dans la langue du pays d'accueil. Alors dans les pays présentant des taux d'immigration élevés, comme le Canada, la Nouvelle-Zélande, la Suisse et les États-Unis, les immigrants ont plus tendance à se retrouver dans un situation de déficit de compétences que dans une situation excédentaire.

Figure 7.4 Disparité des compétences selon le statut d'immigrant

Profession

On observe des déficits et des excédents dans tous les pays, mais les écarts selon le type de profession sont parfois très marqués. Comme le montre la figure 7.5, la tendance, parmi les professions non spécialisées, veut que la proportion d'excédents l'emporte sur celle des déficits. Les États-Unis sont le seul pays où les travailleurs non qualifiés sont aussi nombreux à avoir un excédent qu'un déficit de compétences. La Hongrie et la Norvège comptent les plus fortes proportions de travailleurs ayant un excédent de compétences, surtout chez les travailleurs non spécialisés. Par contre, dans les secteurs spécialisés, les États-Unis, l'Italie et la Suisse accusent des déficits importants : 22 %, 26 % et 26 % de leurs travailleurs respectifs occupent des emplois spécialisés, mais n'atteignent pas le niveau 3 sur l'échelle de compréhension de textes suivis. C'est aux Bermudes (11%), au Canada (16%), en Hongrie (15%), en Norvège (10%) et aux Pays-Bas (16%) que les déficits sont les plus bas dans le secteur spécialisé. Au chapitre des professions moyennement spécialisées, on observe les déficits les plus élevés aux États-Unis (23%), en Suisse (23%) et en Nouvelle-Zélande (21 %), et les plus faibles en Hongrie (5%), en Norvège (10%) et aux Pays-Bas (14%).

Figure 7.5 Disparité des compétences selon la profession

7.6 Participation à l'apprentissage des adultes et disparité des compétences

Quelle est l'incidence de la concordance ou de la disparité des compétences sur la participation à l'éducation et à la formation des adultes? Selon des études antérieures, les gens n'ont pas tous les mêmes possibilités de participer à l'éducation et à la formation des adultes et cette inégalité dépendrait en partie des caractéristiques de l'emploi (OCDE et Statistique Canada, 2000; Tuijnman et Boudard, 2001). La figure 7.6 présente un aperçu de la variation des taux de participation à l'éducation et à la formation des adultes selon que les travailleurs sont en situation de concordance ou de disparité des compétences. La tendance est plus ou moins uniforme. En moyenne, les travailleurs dont la concordance des compétences est élevée ont tendance à participer davantage à l'éducation des adultes que les autres travailleurs. Les pays comptant les plus hauts taux de participation parmi le groupe à concordance moyenne à élevée sont la Suisse (64%), la Nouvelle-Zélande (62%), les États-Unis (60%), la Norvège (59%), les Pays-Bas (57%) et le Canada (56%). Ceux qui comptent les plus faibles taux de participation parmi ce groupe sont l'Italie (35%) et la Hongrie (37%). L'Italie est le seul pays où les travailleurs ayant un déficit de compétences participent presque dans la même mesure que ceux qui bénéficient d'une concordance moyenne à élevée (35%). Les travailleurs ayant un déficit de compétences affichent le deuxième taux de participation en importance, suivis par ceux qui ont un excédent de compétences. On observe les taux de participation les plus faibles chez les travailleurs dont la concordance des compétences est faible. En Italie et en Hongrie, seuls 10 % et 11 %, respectivement, des travailleurs dont la concordance des compétences est faible participent à l'éducation des adultes. Parmi le groupe à concordance faible, le taux de participation atteint 34 % en Suisse.

Figure 7.6 Participation et disparité des compétences

Figure 7.6 (fin) Participation et disparité des compétences

Les taux de participation présentent des écarts entre les sexes dans tous les groupes et dans tous les pays, mais sans modifier la tendance globale. Comme le montre la figure 7.7, les femmes du groupe à concordance moyenne à élevée sont régulièrement plus nombreuses que les hommes à participer à l'éducation et à la formation des adultes, ce qui concorde avec les écarts entre les sexes dans le taux global de participation des hommes et des femmes occupés. Dans le groupe à concordance moyenne à élevée, l'écart atteint 9 % à 10 % aux Bermudes et en Nouvelle-Zélande. On observe à peu près la même tendance chez les travailleurs ayant un excédent de compétences ou une concordance faible. Aux Bermudes et en Hongrie, il n'y a pas d'écart de taux de participation entre les sexes dans le groupe à concordance faible, mais les écarts en faveur des femmes peuvent atteindre 9 % à 10 % aux États-Unis, en Norvège et aux Pays-Bas et peuvent être aussi bas que de 1 % à 3 % au Canada, en Italie, en Nouvelle-Zélande et en Suisse. De même, en Norvège et en Suisse, il n'y a pas d'écart de taux de participation entre les sexes chez les travailleurs ayant un excédent de compétences, mais les écarts en faveur des femmes peuvent être aussi élevés que 17 % aux Bermudes et 13 % en Italie.  Chez les travailleurs ayant un déficit de compétences, les hommes participent plus que les femmes ; les écarts s'établissent à 8 % en Italie, à 6 % en Hongrie, à 5 % aux Pays-Bas et à 4 % en Suisse. Ces derniers résultats concordent avec ceux d'études antérieures selon lesquels les hommes reçoivent plus souvent que les femmes le soutien de l'employeur pour participer à l'éducation et à la formation des adultes (voir OCDE et Statistique Canada, 2005).

Figure 7.7 Sexe, participation et disparité des compétences

Selon la correspondance entre l'emploi et le travailleur, les employeurs et les adultes peuvent être portés à divers degrés à investir dans la poursuite des études et de la formation. Les données des figures 7.8 et 7.9 permettent d'examiner de plus près les sources de financement selon la concordance ou la disparité des compétences. Trois constatations s'en dégagent.

Premièrement, comme on pouvait s'y attendre, les employeurs sont surtout portés à investir dans les travailleurs dont la concordance des compétences est moyenne à élevée. Viennent ensuite les travailleurs ayant un déficit de compétences, ceux qui ont un excédent de compétences et ceux du groupe à concordance faible. Si l'ampleur de la propension à investir varie selon le pays, les tendances globales sont plutôt uniformes. Les rapports de cotes ajustés présentés dans la figure 7.9 soutiennent cette conclusion. Toutefois, les résultats ajustés révèlent qu'en Italie et en Norvège, les travailleurs ayant un déficit de compétences bénéficient le plus du financement de l'employeur pour la poursuite des études et de la formation.

Deuxièmement, l'autofinancement se concentre chez les travailleurs ayant un excédent de compétences ou dont la concordance des compétences est moyenne à élevée. Les rapports de cotes ajustés confirment que les travailleurs à concordance moyenne à élevée sont les plus portés à investir eux-mêmes dans l'éducation et la formation des adultes, suivis respectivement par les travailleurs ayant un excédent de compétences, ceux ayant un déficit de compétences et ceux du groupe à concordance faible. Cette constatation concorde avec celles d'études antérieures selon lesquelles les sources privées d'investissement dans l'éducation des adultes auraient tendance à se concentrer chez les personnes possédant déjà des niveaux de compétence relativement élevés.

On observe également que les employeurs investissent dans la formation de personnes déjà qualifiés ou plus instruites, donc souvent considérées comme de meilleurs candidats à la formation (voir par exemple, OCDE et Statistique Canada, 2005). Toutefois, les données de la figure 7.9 laissent entrevoir que la tendance est plus complexe. Si le niveau combiné de soutien des employeurs consacré aux travailleurs à concordance moyenne à élevée et à ceux ayant un excédent de compétences dépasse celui consacré aux travailleurs ayant un déficit de compétences, ce dernier groupe semble cependant bénéficier davantage du soutien des employeurs que les travailleurs ayant un excédent de compétences. On pouvait s'y attendre, puisque les employeurs peuvent accroître la productivité en consacrant leur soutien aux travailleurs qui en ont le plus besoin, soit ceux ayant un déficit de compétences.

Troisièmement, les résultats présentés dans les figures 7.8 et 7.9 donnent à penser que le financement public semble consacré au moins autant aux travailleurs à concordance moyenne à élevée qu'à ceux ayant un excédent de compétences. Cette constatation semble confirmer que le recours aux méthodes axées sur le marché et les critères d'affectation des fonds selon le rendement, dans le cadre de stratégies ciblées, pourraient profiter aux personnes possédant déjà le plus de compétences parce qu'elles sont le plus susceptibles de réussir (Rubenson et Desjardins, 2009).

Figure 7.8 Source de financement de la participation et disparité des compétences

Figure 7.9 Effet de la concordance et de la disparité des compétences sur la participation à l'éducation des adultes

La figure 7.10.1 présente les résultats d'une analyse plus détaillée portant sur les facteurs déterminants du soutien de l'employeur à l'éducation et à la formation des adultes. La concordance moyenne à élevée des compétences et le déficit de compétences figurent parmi les principaux facteurs déterminants du financement de l'éducation des adultes par l'employeur. L'effet associé à la première catégorie est très marqué au Canada et aux États-Unis. Il importe de mentionner que ces deux catégories (concordance moyenne à élevée et déficit de compétences) reflètent une pratique moyenne à élevée d'activités de lecture au travail, caractéristiques liées à la nature de l'emploi. Selon des études antérieures, les autres facteurs déterminants importants sont habituellement la taille de l'entreprise, le niveau de scolarité initial et l'âge, qui sont aussi étroitement associés à la participation (voir la figure 7.10.2). En Italie, le fait de travailler dans une grande entreprise constitue le principal facteur déterminant du financement de l'éducation des adultes par l'employeur.

Ensemble, ces résultats semblent confirmer que le soutien de l'employeur à l'éducation des adultes dépend d'abord et avant tout des caractéristiques favorables de l'emploi (des tâches hautement spécialisées, une grande entreprise), mais que les personnes possédant des caractéristiques personnelles favorables (les travailleurs hautement qualifiés) alliées aux caractéristiques favorables de l'emploi (une forte demande de compétences) en profitent le plus. Toutefois, ce n'est pas nécessairement le cas dans tous les pays. Les employeurs italiens et norvégiens semblent cibler un peu plus les travailleurs ayant un déficit de compétences.

Figure 7.10.1 Facteurs déterminants de la participation à l'apprentissage des adultes financé par l'employeur

Figure 7.10.2 Facteurs déterminants de la participation à l'apprentissage des adultes financé par l'employeur

Conclusion

Les compétences en littératie ne dépendent pas uniquement de la scolarité initiale, mais aussi d'une foule d'autres facteurs, notamment la pratique d'activités de littératie au travail (voir Desjardins, 2004). Au cours des dernières années, on a accordé beaucoup d'attention aux déficits de compétences, mais les excédents de compétences entrent également en ligne de compte. La sous-utilisation des compétences au travail risque de nuire au perfectionnement et au maintien des profils de compétences à l'échelle individuelle et nationale. La demande et l'utilisation des compétences ne doivent donc pas être tenues pour acquises. En général, on a beaucoup moins réfléchi au fait que l'insuffisance de la demande de compétences sur le marché du travail empêche de vastes groupes de population de participer à la production à valeur ajoutée ainsi qu'au perfectionnement des compétences grâce à la souplesse de l'apprentissage des adultes.

La disparité des compétences sur le marché du travail est de l'ordre d'environ 30 % à 40 %. Cette donnée repose sur une méthodologie qui répartit les travailleurs en quatre groupes (concordance élevée des compétences, concordance faible des compétences, excédent de compétences et déficit de compétences). La disparité (déficit et excédent) s'échelonne entre 10 % et 30 %, selon le pays. Des taux élevés de disparité pourraient bien indiquer la nécessité d'un ajustement, notamment la nécessité d'une formation accrue des personnes ayant un déficit de compétences. De même, si des niveaux élevés d'excédent des compétences favorisent la croissance de l'économie du savoir, la sous-utilisation des compétences au travail risque d'entraîner leur perte.

Les excédents de compétences ont tendance à se concentrer chez les jeunes cohortes ainsi que chez les femmes et les non-immigrants. Dans le premier cas, ils sont liés à des emplois temporaires ou de débutant, souvent peu spécialisés, que de nombreux jeunes et étudiants acceptent au début de leur vie professionnelle. Quant aux femmes, il s'agit d'un groupe traditionnellement désavantagé en général, notamment sur le marché du travail, ce qui dénote peut-être une sous-utilisation systématique des compétences fondée sur d'autres mécanismes d'affectation en usage sur le marché du travail.

Enfin, la concordance et la disparité des compétences s'avèrent étroitement liées à la fréquence de la participation à l'éducation et à la formation des adultes ainsi qu'aux sources de financement de cette participation. En général, les sources de financement privées ont tendance à être consacrées aux groupes possédant déjà des niveaux élevés de compétences, soit les travailleurs à concordance élevée et ceux ayant un excédent de compétences. Toutefois, d'après les résultats présentés dans le présent chapitre, les employeurs consacreraient leur soutien financier aux travailleurs ayant un déficit de compétences plus souvent qu'à ceux ayant un excédent de compétences. Dans la plupart des pays, les sources de financement publiques sont consacrées davantage aux personnes possédant déjà des compétences élevées qu'à celles qui en ont le plus besoin, soit les travailleurs peu qualifiés.

Bibliographie

Boothby, D. (1999), "Literacy Skills, the Knowledge Content of Occupations and Occupational Mismatch", Working Paper 99-3E, Applied Research Branch, Human Resource Development Canada, Hull, Quebec.

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Contributors
Richard Desjardins, Statistique Canada

Annexe

Valeurs des données des figures

Tableau 7.1 Répartition de la disparité des compétences selon le pays, 2003 et 2008

Tableau 7.2 Répartition de la disparité des compétences selon le sexe et selon le pays, 2003 et 2008

Tableau 7.3 Répartition de la disparité des compétences, selon le groupe d'âge et selon le pays, 2003 et 2008

Tableau 7.4 Répartition de la disparité des compétences selon le statut d'immigrant et selon le pays, 2003 et 2008

Tableau 7.5 Répartition de la disparité des compétences, selon la profession et selon le pays, 2003 et 2008

Tableau 7.6 Pourcentage d'adultes âgés de 16 à 65 ans (à l'exclusion des étudiants à temps plein âgés de 16 à 24 ans) ayant participé à l'éducation et à la formation des adultes au cours des 12 mois précédant l'interview, selon la catégorie de concordance ou de disparité et selon le pays, 2003 et 2008

Tableau 7.7 Pourcentage d'adultes âgés de 16 à 65 ans (à l'exclusion des étudiants à temps plein âgés de 16 à 24 ans) ayant participé à l'éducation et à la formation des adultes au cours des 12 mois précédant l'interview, selon le sexe, la catégorie de concordance ou de disparité et le pays, 2003 et 2008

Tableau 7.8 Pourcentage d'adultes âgés de 16 à 65 ans (à l'exclusion des étudiants à temps plein âgés de 16 à 24 ans) ayant bénéficié de l'éducation et de la formation des adultes au cours des 12 mois précédant l'interview, selon la source de financement, la catégorie de concordance ou de disparité et le pays, 2003 et 2008

Tableau 7.9 Rapports de cotes ajustés des adultes âgés de 16 à 65 ans (à l'exclusion des étudiants à temps plein âgés de 16 à 24 ans) ayant bénéficié de l'éducation et de la formation des adultes au cours des 12 mois précédant l'interview, selon la concordance ou la disparité, le type de financement et le pays, 2003 et 2008

Tableau 7.10 Rapports de cotes ajustés montrant la probabilité que des adultes âgés de 16 à 65 ans (à l'exclusion des étudiants à temps plein âgés de 16 à 24 ans) aient participé à l'éducation et à la formation des adultes financée par l'employeur au cours des 12 mois précédant l'interview, selon divers facteurs déterminants et selon le pays, 2003 et 2008

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