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    Culture, tourisme et Centre de la statistique de l'éducation

    Différer les études postsecondaires : qui le fait et pendant combien de temps?

    Section 5 : Analyse

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    L'objet de cette étude était de circonscrire et d'analyser le moment choisi pour entreprendre des EPS chez un échantillon de Canadiens diplômés du secondaire. Les données de l'EJET ont été utilisées pour examiner le délai médian s'écoulant entre l'obtention du DES et le début du premier programme d'EPS jusqu'à l'âge de 28 ans, ainsi que les principales covariables qui influent sur cette transition. De manière générale, près de la moitié des diplômés du secondaire commençaient des EPS dans les quatre mois suivant l'obtention du DES et, quinze mois après la fin des études secondaires, près de trois quarts avaient commencé des EPS. Ces résultats sont compatibles avec ce que d'autres chercheurs ont constaté en utilisant les mêmes données. Par exemple, Tomkowicz et Bushnik (2003) ont noté que près de 60 % des diplômés du secondaire commençaient des EPS dans les 12 mois de la fin du secondaire, tandis que Hango (2008) a constaté que près de 40 % d'entre eux commençaient dans un délai de quatre mois. Les légères différences relevées entre la présente étude et celles publiées antérieurement et fondées sur les mêmes données sont normales, compte tenu des différences dans la sélection de l'échantillon et le fait que cette étude est la première à analyser les délais en utilisant des méthodes d'analyse de l'histoire événementielle. Les chiffres actuels sont également très semblables à ceux présentés aux États-Unis. Bozick et DeLuca (2005), par exemple, ont constaté qu'environ 67 % des diplômés du secondaire entreprenaient un premier programme d'EPS dans les sept mois de la fin du secondaire. Pendant ce temps, des données compilées sur les taux de report des études au Royaume-Uni (UCAS, 2010) laissent croire que, chaque année entre 2003 et 2010, entre 7 % et 7,5 % environ des diplômés reportent d'une année leur inscription à un établissement d'enseignement supérieur du Royaume-Uni.1

    Les résultats peuvent être classés dans cinq grandes catégories : structure du système d'éducation, emploi du temps, inscription à un programme d'EPS, attitudes et aspirations ainsi qu'influence des camarades.

    Premièrement, les facteurs liés à la structure du système d'éducation se sont révélés importants. Par exemple, l'analyse descriptive des tables de survie montre que la plupart des jeunes adultes commencent des EPS pendant les mois qui semblent correspondre aux dates normales de début de ces études, c'est-à-dire à l'automne. L'examen du graphique 1 nous a appris que les taux d'inscription aux EPS augmentaient beaucoup plus rapidement vers le troisième ou le quatrième mois, vers le 15e ou le 16e mois ainsi que vers le 27e ou le 28e mois, moments repères qui correspondent grosso modo à l'automne de l'année où les diplômés du secondaire quittent l'école, à l'automne de l'année qui suit le départ de l'école (12 mois plus trois ou quatre mois), puis à l'automne suivant (24 mois plus trois ou quatre mois). Ainsi, même si les jeunes adultes prennent la décision de différer les EPS ou de s'inscrire à un programme d'EPS immédiatement après leurs études secondaires, ils ne peuvent rien faire concernant la structure du système d'éducation et les échéances des établissements d'enseignement postsecondaire. Par conséquent, un certain degré de planification est nécessaire s'ils veulent reprendre les études. Par exemple, si un diplômé du secondaire décide de ne pas s'inscrire à l'université à l'automne de l'année où il obtient son DES, il devra commencer à planifier son retour aux études plusieurs mois plus tard parce qu'il devra probablement présenter sa demande d'inscription à la session d'automne entre janvier et juillet, selon l'établissement qu'il désire fréquenter. En outre, la question du « report » d'un programme se pose. La plupart des universités, par exemple, permettent aux étudiants acceptés de reporter la date du début des études d'un semestre ou d'une année entière. Il va de soi que les diplômés du secondaire qui décident de prendre une année de pause et qui ont déjà été acceptés à un programme d'EPS ont une vision différente de celle de leurs camarades qui n'ont pas été acceptés concernant leur période hors du réseau de l'éducation. L'avenir des premiers est plus clairement défini et, par conséquent, ils peuvent être en mesure de planifier leur année de pause un peu mieux que les diplômés du secondaire qui n'ont pas encore été acceptés dans un programme d'EPS. Ce ne sont que des hypothèses pour l'instant, car les données requises pour mesurer ces effets n'étaient pas accessibles dans le cadre de la présente recherche.

    Le fait que les diplômés du secondaire du Québec et des provinces de l'Atlantique affichaient des délais médians moins longs que la moyenne, tandis que les diplômés de l'Ontario et de l'Ouest enregistraient des délais plus longs était lié à la structure du système d'éducation. Cet effet est le plus manifeste au Québec en raison du réseau provincial de cégeps, que les élèves doivent fréquenter avant de s'inscrire à l'université. Ainsi, en moyenne, les diplômés des écoles secondaires québécoises entreprennent des EPS avant les élèves du reste du pays, tout simplement en raison de la structure du système provincial d'éducation. En outre, comme les droits de scolarité sont généralement moins élevés dans les cégeps et les universités du Québec, moins de jeunes sont susceptibles de différer les EPS pour des raisons financières. Des résultats semblables ont été rapportés par Tomkowicz et Bushnik (2003), qui ont constaté que, comparativement aux élèves du secondaire de l'Ontario, les jeunes du Québec étaient plus susceptibles d'entreprendre des EPS dans l'année suivant la fin de leurs études secondaires, tandis que les jeunes de l'Alberta, du Manitoba et de Terre-Neuve-et-Labrador étaient plus susceptibles d'attendre plus d'un an.

    Deuxièmement, plusieurs résultats rapportés ici sont associés de façon plus générale à des questions liées à l'emploi du temps pendant l'adolescence. Par exemple, les facteurs qui semblent éloigner les élèves du secondaire de leurs études ou qui nuisent aux études à l'extérieur de l'école ont souvent une incidence négative sur la rapidité à laquelle les élèves s'inscrivent à un programme d'EPS. L'un des plus importants facteurs était le fait de travailler pendant les études secondaires, mais uniquement pendant un grand nombre d'heures. En effet, les diplômés du secondaire qui travaillaient plus de 20 heures par semaine avaient des probabilités beaucoup plus faibles de poursuivre des EPS. Ces résultats sont assez robustes lorsque l'on considère qu'ils vont dans le même sens que d'autres sources canadiennes utilisant les mêmes données, mais des définitions légèrement différentes d'une année de pause (Tomkowicz et Bushnik, 2003; Hango et de Broucker, 2007). En outre, cela correspond aux difficultés auxquelles font face les jeunes adultes qui tentent de combiner les études et un comportement de travailleur (Marsh et Kleitman, 2005).

    Les activités parascolaires constituent un autre facteur pouvant réduire le nombre d'heures et l'attention que les jeunes consacrent à leurs études. Les effets de ce facteur sur les résultats scolaires varient toutefois en fonction des activités en question et du fait que ces activités soient organisées ou non par l'école (Darling, 2005; Eccles et coll., 2003). Les résultats présentés ici sont compatibles avec ceux des recherches précédentes. D'une part, le fait de consacrer de nombreuses heures (de quatre à huit ou plus) par semaine à des activités parascolaires organisées par l'école se traduit par un délai plus court entre l'obtention du DES et le début des EPS. D'autre part, la participation, à une fréquence hebdomadaire élevée, à des activités parascolaires non organisées par l'école conduit à un délai au regard du début des EPS. Ces résultats concordent avec ceux de Broh (2002) ainsi que Chambres et Schreiber (2004), aux États-Unis. Ces chercheurs ont effet constaté que les activités qui exigeaient un plus grand engagement envers l'école et qui étaient plus organisées entraînaient de meilleurs résultats scolaires que les activités qui exigeaient moins d'engagement et étaient moins organisées.

    Troisièmement et comme cela était à prévoir, les facteurs influant sur la possibilité de s'inscrire à un programme d'EPS avaient aussi un effet sur le moment choisi pour faire cette inscription. Par exemple, les notes sont l'un des facteurs les plus importants déterminant l'accès aux EPS. Nous avons également constaté ici que le fait d'avoir des notes plus élevées accélérait la transition vers les EPS pour les jeunes adultes diplômés du secondaire. L'effet demeurait très robuste en présence de tous les autres contrôles. Cette constatation est compatible avec celles de Tomkowicz et Bushnik (2003) ainsi que de Bozick et DeLuca (2005). L'incidence des notes médiocres entraîne également le résultat selon lequel les jeunes déclarant que les notes seront un obstacle à leurs aspirations scolaires avaient des chances beaucoup plus faibles de poursuivre des EPS.

    En ce qui a trait à d'éventuelles EPS, il importe également de prendre en considération le statut socioéconomique de la famille qui, dans la présente analyse, a été mesuré en utilisant les données sur le niveau de scolarité des parents ainsi que sur le nombre de frères et de sœurs, cette dernière variable servant de variable substitutive pour l'amenuisement des ressources mises à la disposition de chaque enfant dans les familles nombreuses. Les jeunes adultes dont les parents étaient titulaires d'un diplôme d'EPS avaient de bien meilleures chances de poursuivre eux-mêmes des EPS par comparaison avec les jeunes adultes dont les parents n'avaient pas terminé leurs études secondaires. Bozick et Deluca (2005) ont mis au jour des effets fort semblables aux États-Unis en utilisant les données de la National Education Longitudinal Study (NELS). Le nombre de frères et sœurs s'est aussi révélé être une observation importante en ce sens que, pour chaque frère ou sœur supplémentaire, la probabilité de poursuivre des EPS diminuait. Cet effet peut être rapproché des recherches plus générales sur l'amenuisement des ressources et le niveau de scolarité (Downey, 1995). La perception qu'ont les jeunes de la façon dont les difficultés financières peuvent bouleverser leurs aspirations scolaires est également puissante. Les jeunes adultes de l'échantillon qui estimaient que les difficultés financières nuiraient à leurs aspirations scolaires avaient une probabilité beaucoup plus faible d'entreprendre des EPS.

    Quatrièmement, les facteurs liés à l'attitude au regard des études et aux aspirations scolaires en général se sont révélés importants quant au choix du moment pour entreprendre des EPS. En règle générale, nous avons constaté que plus les aspirations scolaires sont élevées, plus grande est la probabilité de faire des EPS. Ce lien a été mis au jour tant en ce qui concerne les aspirations des parents que celles des jeunes adultes eux-mêmes. Hango et de Broucker (2007) ont également constaté que les attentes des parents sont importantes pour déterminer s'il pouvait y avoir une pause après le secondaire, mais ce lien était subordonné au fait que le diplôme du secondaire obtient ou non un grade universitaire. Les résultats actuels ne prennent toutefois pas le niveau de scolarité final en compte. En ce qui concerne l'effet des aspirations scolaires des jeunes, il n'est pas surprenant de constater que, étant donné le lien entre les aspirations scolaires et le niveau de scolarité (Hagan, MacMillan et Wheaton, 1996), les jeunes ayant des aspirations élevées ne diffèrent pas leurs EPS aussi longtemps les jeunes ayant des aspirations moins profondes.

    Cinquièmement, les effets liés à l'influence des camarades étaient robustes dans tous les modèles. Comme cela a été le cas pour Tomkowicz et Bushnik (2003), nous avons relevé une forte corrélation négative entre le moment d'entreprendre des EPS et le fait d'avoir un petit nombre d'amis proches qui prévoyaient entreprendre eux-mêmes des EPS. En effet, 26 % des jeunes qui différaient d'une année ou plus leur inscription à un programme d'EPS n'avaient aucun ami proche prévoyant faire des EPS ou ils n'en avaient que quelques-uns. D'autre part, le pourcentage correspondant chez les jeunes qui faisaient des EPS dans l'année suivant la fin du secondaire se situait à 16 %. De même, le délai médian chez les diplômés de secondaire dont aucun ami proche ne prévoyait faire des EPS ou dont seulement quelques-uns prévoyaient le faire était de 15 mois comparativement à trois mois lorsque la plupart des amis proches ou tous les amis proches prévoyaient faire des EPS. Ces résultats vont dans le même sens que ceux d'autres recherches examinant l'incidence des camarades sur les aspirations scolaires et le comportement en général (Ryan, 2000; Brooks, 2003).

    On estime souvent que la mobilité résidentielle a un effet négatif sur les résultats en matière d'éducation (Pribesh et Downey, 1999; Swanson et Schneider, 1999). Cette mobilité résidentielle peut se solder par une perte de relations importantes (Coleman, 1988), du stress (Haveman, Wolfe et Spaulding, 1991) ou l'incidence d'un nouveau groupe de camarades (Sud, Haynie et Bose, 2007). Dans la présente recherche, nous avons constaté que la probabilité d'entreprendre des EPS diminue avec chaque nouvelle école secondaire fréquentée, et cela est parfaitement compatible avec les résultats des recherches précédentes. Toutefois, étant donné la structure des mesures et des données actuelles, il est impossible de déterminer exactement pourquoi le fait de fréquenter une nouvelle école secondaire réduit la probabilité de poursuivre des EPS. Indépendamment de la raison, la solide relation entre le changement d'école et le moment du début des EPS chez les diplômés du secondaire indique qu'il s'agit d'une importante mesure de contrôle.


    Notes

    1. Ces dates de report sont certes légèrement différentes, mais aucun chiffre comparable publié et semblable à ceux obtenus grâce aux données de l'EJET au Canada ou à la NELS aux États-Unis n'est disponible au Royaume-Uni (Jones, 2004).
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