Quelles sont les tendances en matière de violence conjugale autodéclarée au Canada?

Avertissement Consulter la version la plus récente.

Information archivée dans le Web

L’information dont il est indiqué qu’elle est archivée est fournie à des fins de référence, de recherche ou de tenue de documents. Elle n’est pas assujettie aux normes Web du gouvernement du Canada et elle n’a pas été modifiée ou mise à jour depuis son archivage. Pour obtenir cette information dans un autre format, veuillez communiquer avec nous.

Par Jodi-Anne Brzozowski et Robyn Brazeau

Introduction
Définir et mesurer la violence conjugale
La prévalence de la violence conjugale est demeurée la même entre 1999 et 2004
La violence est plus fréquente dans les relations antérieures que dans les relations actuelles
Les femmes continuent d'être victimes d'actes de violence plus graves que les hommes
Lien entre la violence psychologique et la violence physique
Facteurs qui augmentent le risque de violence conjugale
Les niveaux de déclaration de violence conjugale à la police demeurent stables
Conclusion
Bibliographie

Introduction 1

Jusqu'en 1993, les statistiques de la police étaient l'unique source d'information nationale sur la nature et l'étendue de la violence conjugale au Canada. Cependant, on convenait de façon générale qu'il était limitatif de se fier à ces données qui englobaient seulement les incidents ayant été portés à l'attention de la police. Étant donné la nature délicate de ces incidents, la violence conjugale est une infraction qui est rarement déclarée aux autorités.

Afin de dresser un tableau plus exhaustif de la nature et de l'étendue de la violence conjugale, Statistique Canada a mesuré la violence conjugale faite aux femmes, pour la première fois en 1993, par le biais de l'Enquête sur la violence envers les femmes (EVEF).

En 1999, Statistique Canada a commencé à recueillir de l'information sur la violence conjugale envers les femmes et les hommes par l'intermédiaire de son Enquête sociale générale (ESG) sur la victimisation. Un échantillon aléatoire d'environ 24 000 Canadiennes et Canadiens âgés de 15 ans et plus, vivant dans les 10 provinces, a été sondé sur la question des actes de violence pouvant avoir été commis à leur endroit par leur conjoint ou leur conjoint de fait (conjoint actuel et ex-conjoint) dans les cinq années précédant l'enquête.2,3 Les questions relatives à la violence conjugale ont été répétées dans l'ESG de 2004, et les résultats permettent d'analyser l'évolution des tendances de la violence conjugale entre les deux cycles d'enquête.

Définir et mesurer la violence conjugale4

Pour mesurer la violence conjugale dans le cadre du cycle de la victimisation de l'ESG, une série de 10 questions ont été posées à tous les répondants qui étaient mariés ou qui vivaient en union libre au moment de l'entrevue, ou qui avaient été mariés ou qui avaient vécu en union libre dans les cinq années précédant l'enquête et qui avaient été en contact avec leur ex-partenaire durant cette période de cinq ans. Les 10 questions portaient sur les actes de violence physique et sexuelle définis dans le Code criminel, auxquels la police pouvait donner suite. Dans le cadre de l'ESG, la gravité des actes de violence allait des menaces à l'agression sexuelle, et les incidents rapportés devaient être survenus pendant la période de 12 mois et de cinq ans précédant l'entrevue.

La prévalence de la violence conjugale est demeurée la même entre 1999 et 20045

Sept pour cent des Canadiennes et Canadiens qui étaient mariés ou qui vivaient en union libre en 2004 ou antérieurement avaient été victimes de violence conjugale au cours des cinq années précédant l'enquête6. Cette estimation est similaire à celle qui avait été déclarée dans l'enquête de 1999 et représente environ 653 000 femmes et 546 000 hommes victimes de violence conjugale.

Bien que le niveau de violence conjugale contre les hommes n'ait pas changé de façon significative entre 1999 et 2004 (de 7 % à 6 %), on a observé un léger repli statistiquement significatif chez les femmes (de 8 % à 7 %).

La violence est plus fréquente dans les relations antérieures que dans les relations actuelles

La prévalence globale de la violence conjugale est demeurée la même entre les deux périodes d'enquête. Toutefois, les actes de violence de la part d'un ancien conjoint étaient en baisse. La proportion de personnes qui ont été victimisées par un ancien conjoint a diminué aussi bien chez les femmes (de 28 % en 1999 à 21 % en 2004) que chez les hommes (de 22 % en 1999 à 16 % en 2004).7 Cela dit, la violence faite par un ancien conjoint est demeurée considérablement plus fréquente que celle faite par le conjoint actuel.

On a constaté en 1999 que 4 % des hommes et des femmes actuellement mariés ou vivant en union libre étaient victimes de violence physique ou sexuelle aux mains de leur partenaire. En 2004, cette proportion est demeurée pratiquement inchangée aussi bien chez les hommes que chez les femmes.8

Graphique 1 Tendances de la violence conjugale, proportions quinquennales, 1999 et 2004. Une nouvelle fenêtre s'ouvrira.

Graphique 1
Tendances de la violence conjugale, proportions quinquennales, 1999 et 2004

Les femmes et les hommes qui avaient été en contact avec un ex-conjoint dans les 5 années précédant l'enquête étaient plus susceptibles que ceux dans les relations actuelles à rapporter tous les types de violence.

Les femmes continuent d'être victimes d'actes de violence plus graves que les hommes

Bien que les résultats de l'ESG de 1999 et de 2004 indiquent que des proportions à peu près égales de femmes et d'hommes signalent être victimes de violence conjugale, les données révèlent également que dans les deux cycles, les femmes ont été victimes d'actes de violence plus graves que les hommes.

Lorsqu'on observe les types d'actes de violence les plus graves déclarés lors de l'enquête, on constate qu'une plus grande proportion de femmes que d'hommes ont signalé avoir été battues, étranglées, menacées ou attaquées avec une arme à feu ou un couteau par leur partenaire intime.

En 2004, les chiffres étaient trop peu élevés pour pouvoir établir une comparaison statistique fiable entre les femmes et les hommes relativement aux types de violences exercées par les conjoints actuels. Dans le cas des relations conjugales violentes antérieures, les femmes étaient plus susceptibles que les hommes de déclarer qu'elles étaient battues (27 % contre 15 %) ou étranglées (25 % contre 9 %). Les résultats de l'enquête de 1999 étaient similaires.

Entre 1999 et 2004, les données de l'ESG révèlent que la gravité des actes de violence conjugale envers les hommes a légèrement diminué, mais que le degré de gravité des actes de violence envers les femmes est demeuré le même.

À titre d'exemple, en 1999 et 2004, des proportions semblables d'hommes victimes de violence conjugale ont dit avoir été battus, étranglés, menacés avec une arme à feu ou un couteau, attaqués avec une arme à feu ou un couteau, ou agressés sexuellement par leur conjointe ou conjointe de fait, actuelle ou antérieure (16 % chaque année). Toutefois, 34 % des hommes en 2004 ont précisé que la violence conjugale la plus grave dont ils ont été victimes se résumait à avoir reçu des coups de pied, a avoir été mordus, frappés ou frappés avec quelque chose; une proportion en baisse par rapport à 43 % en 1999.

En 2004, 39 % des femmes ont déclaré que la violence conjugale la plus grave dont elles ont été victimes consistait essentiellement à avoir été battues, étranglées, menacées ou attaquées avec une arme à feu ou un couteau, agressées sexuellement par leur conjoint ou leur conjoint de fait, actuel ou antérieur. Cette proportion n'était pas statistiquement différente de celle observée dans le cadre de l'enquête de 1999.

Tant les résultats de 1999 que 2004 ont révélé que les conséquences de la violence conjugale étaient plus graves pour les femmes que pour les hommes. Par exemple, en 2004, les femmes victimes de violence conjugale étaient plus susceptibles que les hommes de rapporter qu'elles étaient blessées (44 % contre 19 %) et qu'elles craignaient pour leur vie (34 % contre 10 %).

Lien entre la violence psychologique et la violence physique9

Tant chez les femmes que chez les hommes, les niveaux de violence dans les relations où il y avait de la violence psychologique étaient considérablement plus élevés que dans les relations où il n'y avait aucune violence psychologique en 1999 comme en 2004. Par exemple, en 2004, la prévalence de la violence conjugale dans les relations psychologiquement abusives était de 34 % pour les femmes et de 26 % pour les hommes, tandis que pour les relations où il n'y avait aucune violence psychologique, la proportion était de 1 % contre 2 % respectivement.

Facteurs qui augmentent le risque de violence conjugale10

Bien que la violence conjugale touche tous les groupes sociodémographiques, certains segments de la population sont plus vulnérables que d'autres à la violence conjugale. Les résultats des enquêtes de 1999 et de 2004 ont révélé que les personnes qui étaient âgées de 15 à 24 ans, qui vivaient en union libre, qui étaient Autochtones11 et dont le partenaire buvait souvent à l'excès12 étaient plus à risque d'être victimes de violence aux mains de leur partenaire intime.

Pour la première fois, dans l'ESG de 2004, on tentait de déterminer s'il y avait un lien entre la durée de la relation conjugale ou de la cohabitation d'un couple et le niveau de risque de violence dans la relation. L'enquête a permis de constater que les taux de violence conjugale sur 12 mois sont particulièrement élevés dans les mariages et les unions libres qui durent depuis trois ans ou moins.

Les niveaux de déclaration de violence conjugale à la police demeurent stables

Selon le cycle de l'ESG de 1999, 27 % des répondants victimes de violence conjugale ont déclaré que la police était au courant de la violence, une proportion qui n'était pas statistiquement différente de celle de 28 % déclarée en 2004. Les deux cycles d'enquête ont permis de constater que chez les victimes de violence conjugale, les femmes étaient deux fois plus susceptibles que les hommes de demander l'aide de la police.

Conclusion

À l'aide des données de 1999 et 2004 du cycle de la victimisation de l'ESG, Statistique Canada a été en mesure d'évaluer l'étendue et la nature de la violence conjugale autant chez les femmes que chez les hommes au Canada. De plus, il a été possible d'observer les tendances dans les taux de violence conjugale, les facteurs de risques et les conséquences de la violence conjugale.

Les questions portant sur la violence conjugale seront reportées dans le prochain cycle de la victimisation de l'ESG en 2009, et permettront une analyse des tendances à long terme de la violence conjugale au Canada.

Bibliographie

Condition féminine Canada. 2002, Évaluation de la violence contre les femmes : un profil statistique, produit no SW21-101/2002F-IN au catalogue de Condition féminine Canada, Ottawa, Ministres responsables de la condition féminine à l'échelle fédérale, provinciale et territoriale. 

Johnson, H. 2000,  « Tendances des agressions contre la conjointe signalées par la victime », La violence familiale au Canada : un profil statistique, 2000, sous la direction de V. Pottie Bunge et D. Locke, produit no 85-224-X au catalogue de Statistique Canada, Ottawa.

Mihorean, K. 2005, « Tendances des actes de violence conjugale signalés par les victimes », La violence familiale au Canada : un profil statistique, 2005, sous la direction de K. AuCoin, produit no 85-224-X au catalogue de Statistique Canada, Ottawa.


Notes

  1. Adaptation de : Mihorean, K. 2005, « Tendances des actes de violence conjugale signalés par les victimes », La violence familiale au Canada : un profil statistique, 2005, sous la direction de K. AuCoin, produit no 85-224-X au catalogue de Statistique Canada, Ottawa.
  2. La prochaine Enquête sur les victimes d'actes criminels sera réalisée en 2009.
  3. Les données recueillies dans les Territoires du Nord-Ouest, au Yukon et au Nunavut dans le cadre d'un essai pilote ne font pas partie de l'analyse.
  4. Dans cette fiche de renseignements, « violence conjugale » fait référence à la violence par les conjoints actuel et antérieur.
  5. Une personne a une relation antérieure si elle a déjà été mariée  a vécu en union libre avec une personne autre que son conjoint ou partenaire actuel et elle est entrée en contact avec cette personne pendant les derniers cinq ans. La violence entre anciens partenaires peut être survenue soit durant la relation ou après la séparation, mais elle doit avoir eu lieu pendant la période de cinq ans.
  6. Selon l'ESG, les Canadiens entre 15 et 17 ans représentent moins de 1 % des personnes mariées ou vivant en union libre ou qui ont déjà été mariées ou ont déjà vécu en union libre.
  7. Comprend les femmes et les hommes qui avaient un ex-conjoint ou un ex-conjoint de fait au cours des cinq années précédant l'enquête et qui ont été en contact avec leur ex-partenaire pendant cette période.
  8. La différence entre les femmes qui ont été victimes de violence aux mains de leur conjoint actuel en 1999 et en 2004 (4 % et 3 %) n'était pas statistiquement significative.
  9. Pendant les deux cycles d'enquête, une série de questions ont été posées aux répondants qui étaient actuellement mariés ou qui vivaient en union libre, ou qui avaient déjà été mariés ou avaient vécu en union libre et qui avaient été en contact avec leur ex-partenaire au cours des cinq années précédentes. Ces questions portaient sur la violence psychologique et l'exploitation financière dont ils avaient pu être victimes au cours de ces cinq années précédant l'enquête.
  10. Lorsque l'on évalue les facteurs sociodémographiques associés au risque de violence conjugale, on doit examiner les taux de violence sur 12 mois chez les personnes qui ont un conjoint. Les caractéristiques sociodémographiques telles que l'âge, l'état matrimonial, le revenu et le niveau de scolarité peuvent évoluer pendant une période de cinq ans.
  11. Mihorean, K. 2005, « Tendances des actes de violence conjugale signalés par les victimes », Figure 1.6 « Les taux quinquennaux de signalement de la violence conjugale par les victimes sont élevés chez les Autochtones, hommes et femmes, 1999 et 2004 » , p. 20. La violence familiale au Canada : un profil statistique, 2005, sous la direction de K. AuCoin, produit  no 85-224-X au catalogue de Statistique Canada, Ottawa.
  12. Une personne qui boit souvent à l'excès fait référence à une personne qui  prenait cinq consommations ou plus en une occasion, au moins cinq fois par mois.