Estimations expérimentales de l'exposition professionnelle potentielle à l'IA au Canada

De récents progrès en matière d'intelligence artificielle (IA), mis en évidence par le lancement de ChatGPT, ont suscité de l'enthousiasme, mais ont aussi provoqué des préoccupations à l'égard du rôle des travailleurs humains à l'avenir. Les vagues précédentes de transformation technologique, comme l'automatisation, ont surtout touché les travailleurs moins scolarisés effectuant des tâches routinières et manuelles. Toutefois, ces nouvelles transformations pourraient toucher un segment plus large de la population active, à une époque où des algorithmes très sophistiqués pouvant modéliser le langage et d'autres applications d'IA excellent de plus en plus à l'exécution de tâches non routinières et cognitives habituellement effectuées par des travailleurs très scolarisés.

La nouvelle étude de Statistique Canada intitulée «  Estimations expérimentales de l'exposition professionnelle potentielle à l'intelligence artificielle au Canada », publiée aujourd'hui, nous éclaire sur cette question. Elle présente des estimations expérimentales de l'exposition professionnelle potentielle à l'IA à laquelle font face différents groupes de travailleurs canadiens, selon les tâches qu'ils exécutent. Cette étude s'appuie sur une méthode élaborée par Pizzinelli et coll. (2023) (voir la Note aux lecteurs).

L'étude fait la distinction entre trois types de travailleurs : les personnes ayant un emploi très exposé à l'IA et qui pourraient tirer profit de cette technologie en raison de la forte complémentarité de leurs tâches avec les capacités de l'IA, les personnes ayant un emploi très exposé à l'IA et dont les tâches pourraient être remplacées par l'IA, et les personnes ayant un emploi qui n'est pas fortement exposé à l'IA.

Selon l'étude, en mai 2021, 29 % des travailleurs canadiens exerçaient un emploi très exposé à l'IA et pour lequel l'IA est hautement complémentaire. Parallèlement, 31 % des travailleurs occupaient un emploi à forte exposition à l'IA et peu complémentaire à cette technologie. Les 40 % restants exerçaient un emploi qui n'était pas très exposé à l'IA. La répartition de l'exposition professionnelle à l'IA était semblable en mai 2016.

L'étude démontre aussi que l'IA pourrait être plus susceptible de transformer les emplois de travailleurs très scolarisés que les emplois de leurs homologues moins scolarisés. Il s'agit d'un changement par rapport aux vagues antérieures de la transformation technologique, qui touchaient surtout les travailleurs moins scolarisés.

Par exemple, l'étude estime qu'en mai 2021, 50 % des travailleurs titulaires d'un baccalauréat ou d'un diplôme de niveau supérieur occupaient des emplois fortement exposés à l'IA et pour lesquels l'IA était hautement complémentaire. Ce taux est presque quatre fois supérieur au taux de 13 % observé pour les travailleurs détenant un diplôme d'études secondaires ou un niveau de scolarité inférieur. Les travailleurs titulaires d'un baccalauréat ou d'un diplôme de niveau supérieur occupaient aussi proportionnellement plus d'emplois fortement exposés à l'IA et dont les tâches pourraient être remplacées par cette technologie (36 %), comparativement aux travailleurs possédant un diplôme d'études secondaires ou un niveau de scolarité inférieur (25 %).

En résumé, 86 % des travailleurs très scolarisés occupaient des emplois fortement exposés à l'IA en mai 2021, comparativement à 38 % de leurs homologues moins scolarisés.

Il est important de noter que ces estimations expérimentales de l'exposition professionnelle à l'IA sont fondées sur un nombre limité d'applications d'IA et sur la façon dont elles interagissent avec certaines capacités humaines. L'ensemble des tâches que l'IA peut exécuter entièrement sans supervision pourrait augmenter à l'avenir grâce aux progrès technologiques. L'indice utilisé dans cette étude pourrait donc devenir moins pertinent au fil du temps. Une certaine prudence est de mise dans l'interprétation des estimations expérimentales présentées dans cette étude.

Plusieurs raisons peuvent amener les employeurs à ne pas remplacer immédiatement les humains par l'IA, même si la technologie permet de le faire. Ces raisons comprennent des facteurs financiers, juridiques et institutionnels. Par conséquent, une exposition professionnelle relativement plus élevée à l'IA ne signifie pas nécessairement un risque plus élevé de perte d'emploi.

Note aux lecteurs

L'étude intitulée « Estimations expérimentales de l'exposition professionnelle potentielle à l'intelligence artificielle au Canada » utilise l'indice d'exposition professionnelle à l'Intelligence artificielle (IA) ajusté en fonction de la complémentarité (EPIAC), proposé par Pizzinelli et coll. (2023), et l'applique aux données des recensements de la population de 2016 et de 2021. L'indice d'EPIAC est une variation de l'indice initial d'EPIA élaboré par Felten, Raj et Seamans (2021), qui mesure l'exposition professionnelle à l'IA sans tenir compte de la complémentarité potentielle de l'IA. L'indice d'EPIAC mesure la relation possible entre 52 capacités humaines et 10 applications d'IA, pondérée en fonction du degré de complexité et de l'importance de ces compétences dans une profession précise, ainsi que le potentiel de complémentarité que peut offrir l'IA à cette profession. Une profession est considérée comme ayant une exposition élevée si son indice d'EPIA dépasse l'indice d'EPIA médian pour l'ensemble des professions; autrement, elle est considérée comme ayant une exposition faible. Une profession est considérée comme ayant un potentiel élevé de complémentarité si son indice de complémentarité dépasse l'indice de complémentarité médian pour l'ensemble des professions; autrement, elle est considérée comme ayant un faible potentiel de complémentarité. Les professions ont été regroupées en trois grandes catégories d'exposition : (1) exposition élevée et faible complémentarité; (2) exposition élevée et forte complémentarité; et (3) faible exposition.

Produits

L'étude intitulée « Estimations expérimentales de l'exposition professionnelle potentielle à l'intelligence artificielle au Canada », qui fait partie de la série Direction des études analytiques : documents de recherche (11F0019M), est maintenant accessible.

Référence

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