De 2016-2017 à 2020-2021, 23 % des personnes accusées devant les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes étaient des Autochtones (membres des Premières Nations, Métis ou Inuit), bien que les Autochtones représentent 4 % de la population adulte au Canada. Les Autochtones sont surreprésentés à tous les niveaux du système de justice pénale du Canada, tant comme victimes que comme accusés.
L'article de Juristat intitulé « Disparités dans les décisions et les peines imposées entre les accusés autochtones et les accusés blancs devant les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes, 2016-2017 à 2020-2021 », publié aujourd'hui, porte sur la mesure dans laquelle les accusés autochtones et les accusés blancs d'infractions criminelles au Canada font l'objet de résultats différents devant les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes. Les facteurs liés à la surreprésentation des Autochtones sont multidimensionnels et complexes, mais cette étude met l'accent sur les différences dans la gravité des crimes. Les résultats sont ventilés selon des caractéristiques clés qui pourraient être associées à des écarts dans les résultats, dont le genre, l'âge, la région, le type d'infraction et les antécédents criminels.
Les Autochtones sont surreprésentés parmi les accusés devant les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes
De 2016-2017 à 2020-2021, les Autochtones représentaient 23 % de toutes les personnes accusées devant les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes, ce qui dépasse largement le pourcentage de la population adulte qui est autochtone (4 %). En revanche, les personnes blanches représentaient 59 % des personnes accusées devant les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes, alors qu'elles représentent environ 75 % de la population adulte.
Au total, 3 personnes autochtones accusées sur 10 (30 %) étaient des femmes, alors que cette proportion s'établissait à 21 % chez les personnes blanches accusées. Par ailleurs, la proportion de personnes âgées de 18 à 34 ans était plus élevée chez les accusés autochtones (62 %) que chez les accusés blancs (50 %).
Les accusés autochtones avaient davantage d'antécédents en matière de condamnations au criminel que les accusés blancs. Près des trois quarts (72 %) des accusés autochtones devant les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes avaient déjà fait l'objet d'une condamnation pour une infraction criminelle, par rapport à 48 % des accusés blancs. En outre, près de la moitié (48 %) des accusés autochtones avaient fait l'objet d'au moins cinq condamnations antérieures, comparativement à 25 % des accusés blancs. Il convient de noter que les accusés autochtones (27 %) se retrouvaient plus couramment devant les tribunaux que les accusés blancs (17 %) pour des affaires où une infraction contre l'administration de la justice représentait l'accusation la plus grave.
Les accusations portant sur des infractions contre l'administration de la justice peuvent comprendre, entre autres, le défaut de comparaître devant le tribunal, le manquement aux conditions de la probation, le défaut de se conformer à une ordonnance du tribunal et le fait de se trouver illégalement en liberté. Des recherches antérieures ont révélé que la plupart des affaires portées devant les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes comportant une accusation pour une infraction contre l'administration de la justice mènent à un verdict de culpabilité.
Le colonialisme, le déracinement, la marginalisation socioéconomique et culturelle ainsi que la discrimination systémique sont quelques-uns des facteurs qui ont souvent été mentionnés dans le discours public et les recherches comme des explications possibles de la surreprésentation des Autochtones dans l'ensemble du système de justice pénale. Il s'agit certes d'un important contexte à prendre en considération, mais les données de la présente étude ne se prêtent pas bien à l'examen de ces facteurs ou des répercussions des programmes pertinents et des modifications législatives au fil du temps.
Les accusés autochtones sont tout aussi susceptibles que les accusés blancs d'être reconnus coupables
Sur toute la période à l'étude (2016-2017 à 2020-2021), les accusés autochtones étaient tout aussi susceptibles d'être reconnus coupables que les accusés blancs. Dans la présente étude, le terme « déclaration de culpabilité » comprend à la fois les déclarations de culpabilité par le tribunal et les plaidoyers de culpabilité. C'est le cas pour tous les groupes d'âge et les genres ainsi que pour toutes les régions et les provinces (c.-à-d. la région de l'Atlantique, le Québec, l'Ontario, les Prairies ainsi que la Colombie-Britannique et les territoires).
Le type d'infraction semblait influer sur les décisions rendues par les tribunaux. Les déclarations de culpabilité étaient plus fréquentes chez les accusés autochtones que chez les accusés blancs lorsque l'infraction la plus grave dans l'affaire constituait un crime violent, un crime contre les biens, une infraction contre l'administration de la justice ou une autre infraction au Code criminel. En revanche, il n'y avait aucune différence entre les accusés autochtones et les accusés blancs lorsque l'infraction la plus grave dans l'affaire était un délit de la route prévu au Code criminel ou une infraction à une autre loi fédérale.
Une personne accusée est acquittée lorsqu'un juge ou un jury rend un verdict de non-culpabilité. Les affaires dans lesquelles l'accusé était autochtone étaient 62 % moins susceptibles de se solder par un acquittement que celles dans lesquelles l'accusé était blanc.
Les accusés autochtones sont beaucoup plus susceptibles de voir leur affaire se solder par un arrêt des procédures
De 2016-2017 à 2020-2021, les affaires mettant en cause un accusé autochtone étaient 72 % plus susceptibles de se solder par un arrêt des procédures que les affaires où l'accusé était blanc. L'arrêt des procédures est une ordonnance du juge ou du procureur de la Couronne qui empêche toute poursuite, de façon temporaire ou permanente. Il est important de noter que les données sur l'arrêt des procédures dans la présente étude comprennent les affaires où les accusations font l'objet d'un arrêt des procédures ou sont retirées en raison de mesures de rechange, de mesures extrajudiciaires ou d'autres programmes de déjudiciarisation. Il n'est actuellement pas possible de faire la distinction entre les diverses raisons derrière ces décisions.
Au cours de la même période, les affaires où l'accusé était autochtone étaient 21 % moins susceptibles de se solder par un retrait, un rejet ou une libération que celles où l'accusé était blanc. Ces dispositions mettent toutes un terme aux procédures des tribunaux de juridiction criminelle, et elles représentent des décisions discrétionnaires de la part des procureurs ou des juges.
Les accusés autochtones sont plus susceptibles de recevoir une peine d'emprisonnement
De 2016-2017 à 2020-2021, les accusés autochtones déclarés coupables étaient 45 % plus susceptibles que les accusés blancs de se voir imposer une peine d'emprisonnement. Ce taux demeurait généralement constant lorsque les données étaient ventilées selon le genre et l'âge. Parmi les accusés n'ayant pas fait l'objet de condamnations antérieures, la probabilité de se voir imposer une peine d'emprisonnement était 46 % plus élevée chez les accusés autochtones que chez les accusés blancs, mais cet écart s'amenuisait parmi les accusés qui avaient fait l'objet d'au moins cinq condamnations antérieures (20 %).
Les accusés autochtones sont plus susceptibles de recevoir une peine d'emprisonnement avec sursis
De 2016-2017 à 2020-2021, les accusés autochtones étaient 30 % plus susceptibles que les accusés blancs de se voir imposer une peine d'emprisonnement avec sursis à la suite d'une décision de culpabilité. Une peine d'emprisonnement avec sursis est une peine d'emprisonnement de moins de deux ans qui peut être purgée dans la collectivité sous des conditions strictes. Les peines d'emprisonnement avec sursis ont été introduites par le Parlement en 1996 dans le cadre de réformes des peines dans le but de réduire le recours aux peines d'emprisonnement au Canada. Les tribunaux doivent être convaincus que le fait de purger la peine dans la collectivité ne mettrait pas en danger la sécurité de celle-ci et serait conforme à l'objectif et aux principes fondamentaux de la détermination de la peine.
Les accusés autochtones sont moins susceptibles de recevoir une peine de probation ou une amende
De 2016-2017 à 2020-2021, à la suite d'une déclaration de culpabilité, les accusés autochtones étaient 16 % moins susceptibles que les accusés blancs de recevoir une peine de probation comme peine la plus sévère. Une ordonnance de probation, qui peut être d'une durée allant jusqu'à trois ans, permet à la personne de purger sa peine dans la collectivité sous certaines conditions prescrites dans l'ordonnance.
De façon similaire, de 2016-2017 à 2020-2021, les accusés autochtones étaient 24 % moins susceptibles que les accusés blancs de se voir imposer une amende comme peine la plus sévère.
Note aux lecteurs
La présente étude repose sur des données couplées de l'Enquête intégrée sur les tribunaux de juridiction criminelle (EITJC) et du questionnaire détaillé du Recensement de la population de 2016. Les renseignements sur l'identité sont tirés du Recensement de la population, car ils ne sont pas disponibles dans l'EITJC.
Les accusés autochtones sont des personnes accusées qui se sont identifiées comme membres des Premières Nations, Métis ou Inuit dans le Recensement de 2016.
Les accusés blancs sont des personnes accusées qui se sont identifiées comme n'étant ni autochtones ni membres d'un groupe de minorité visible dans le Recensement de 2016.
Les personnes dont l'affaire était réglée par les tribunaux au moment de la tenue de l'EITJC n'ont pas toutes été couplées à des répondants au questionnaire détaillé du Recensement de la population de 2016, car ce dernier couvre 25 % de la population. Pour tenir compte des personnes n'ayant pas été couplées au Recensement de 2016, des poids ont été créés pour veiller à ce que la population couplée soit représentative de toutes les personnes ayant une affaire judiciaire réglée dans l'EITJC durant la période allant de 2016-2017 à 2020-2021.
L'indice de taux relatif ajusté (ITRA) permet de mesurer la probabilité qu'un accusé autochtone fasse l'objet d'un certain résultat judiciaire par rapport à la probabilité qu'un accusé blanc fasse l'objet du même résultat, après la prise en compte de la gravité de l'infraction la plus grave dans l'affaire. La gravité est fondée sur le poids de gravité de la criminalité qui sert au calcul de l'Indice de gravité de la criminalité.
L'ITRA est une mesure relative. Par exemple, un ITRA de 0 % signifie qu'un accusé autochtone est aussi susceptible qu'un accusé blanc de connaître la même décision du tribunal. Aux fins de la présente étude, si l'écart en pourcentage était de 4 % ou moins, l'accusé autochtone et l'accusé blanc étaient considérés comme tout aussi susceptibles l'un que l'autre de faire l'objet de ce résultat. Un seuil de 4 % a été choisi pour éviter de classer les écarts mineurs de l'ITRA comme des résultats différents et pour s'assurer que la disparité des résultats cernés est significative du point de vue des politiques.
L'application des arrêts ou des retraits est déterminée par les politiques de chaque secteur de compétence. Par exemple, certains secteurs de compétence peuvent favoriser le recours à un arrêt pour mettre fin aux procédures judiciaires, tandis que d'autres peuvent favoriser le recours à un retrait.
Référence
Définitions, source de données et méthodes : numéros d'enquête 3312 et 3901.
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