Chapitre 5
La dynamique du faible revenu au Canada

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Taux d'alternance au-dessus et au-dessous des seuils de faible revenu
Périodes multiples de faible revenu
Une mesure de rechange du faible revenu chronique et persistant
La durée du faible revenu
Sommaire

Début du texte

Dans les chapitres précédents, nous avons examiné les tendances du faible revenu au Canada. Nous passons maintenant à une nouvelle série de questions sur la dynamique du faible revenu. Les mêmes personnes ont-elles un faible revenu année après année, ou la composition de la population à faible revenu varie-t-elle d'une année à l'autre? Pour les personnes qui deviennent à faible revenu, combien de temps mettent-elles à s'en sortir? Le présent chapitre vise à répondre à ces questions en examinant la proportion de personnes qui ont vécu plusieurs périodes de faible revenu, les taux d'alternance au-dessus et au-dessous des seuils de faible revenu, le taux d'entrées subséquentes et les mesures de la durée et de la persistance du faible revenu selon les trois lignes de faible revenu.

Pour répondre aux questions qui précèdent, nous avons suivi les mêmes personnes au fil du temps au moyen de l'Enquête sur la dynamique du travail et du revenu (EDTR). Les données nous ont permis d'examiner la dynamique annuelle du faible revenu au Canada, ainsi que la dynamique à plus long terme sur plusieurs périodes de six ans : 1993 à 1998, 1996 à 2001, 1999 à 2004 et 2002 à 2007 et de corréler la dynamique du faible revenu et les caractéristiques individuelles et familiales clés.1

Taux d'alternance au-dessus et au-dessous des seuils de faible revenu

La dynamique du faible revenu décrit le mouvement des personnes qui entrent dans une situation de faible revenu et qui en sortent ainsi que la durée de leur période de faible revenu. La durée sous-jacente de la matrice des transitions du faible revenu peut être longue ou courte. Nous examinons d'abord la tendance des transitions d'une année à l'autre selon les seuils de faible revenu (SFR), la mesure du faible revenu (MFR) et la mesure du panier de consommation (MPC).

Le tableau 5.1 peut aider à illustrer plusieurs concepts des transitions du faible revenu. Le taux d'entrée des personnes dans une situation de faible revenu entre deux années consécutives, disons 2008 et 2009, correspond à la proportion de personnes qui sont tombées sous le seuil de faible revenu en 2009 par rapport aux personnes qui n'avaient pas un faible revenu en 2008. Ce taux est représenté par PPF->F dans le tableau 5.1. Le taux de sortie mesure la proportion des personnes qui sortent du faible revenu, disons en 2009, comme proportion des personnes qui avaient un faible revenu en 2008. Le taux de sortie est représenté par PF->PF dans le tableau. Les deux autres éléments du tableau, PF->F et PPF->PF, mesurent l'immobilité du faible revenu et la résistance au faible revenu, respectivement. Le premier représente la proportion de la population qui est restée à faible revenu les deux années, tandis que le deuxième représente la proportion de la population qui est restée hors du faible revenu les deux années.2

Tableau 5.1  Illustration de la matrice de transition du faible revenu, 2008 à 2009Tableau 5.1 Illustration de la matrice de transition du faible revenu, 2008 à 2009
Le tableau 5.2 contient nos estimations des quatre éléments des matrices de transition selon différentes lignes, de la période de 1993 à 1994 à la période de 2007 à 2009. Il montre que bien des personnes qui sont tombées dans une situation de faible revenu une année sont parvenues à s'en sortir l'année suivante. Selon le SFR, le taux de sortie au bout d'un an (ou fuite), PF->PF, fluctuait de 28 % à 40 % dans les 15 périodes de deux ans de 1993 à 2009. Selon la MFR, le taux de sortie est passé de 29 % à 38 % pendant la même période, alors que selon la MPC, pendant les huit périodes de deux ans de 2000 à 2009, il oscillait de 35 % à 42 %.

Toutefois, les tendances sous-jacentes des taux de sortie du faible revenu selon différentes lignes étaient mitigées. Au fil du temps, les taux augmentaient selon le SFR et diminuait légèrement selon la MFR, alors que selon la MPC, aucune tendance claire n'a pu être détectée, mais ces dernières années, c.à.d. de la période de 2006 à 2007 à la période de 2008 à 2009, les taux de sortie ont diminué selon les trois lignes de faible revenu, notamment selon le SFR et la MPC. Soulignons que la mesure de l'immobilité, PF->F, a évolué en sens inverse du taux de sortie. Encore une fois, aucune tendance claire ne peut être détectée, sauf celles de la période de 2006 à 2007 à la période de 2008 à 2009, où l'immobilité a augmenté selon le SFR et la MPC.

Tableau 5.2 Les matrices des transitions du faible revenu au bout d'un an, 1993 à 2009Tableau 5.2 Les matrices des transitions du faible revenu au bout d'un an, 1993 à 2009
Les taux d'entrée, PPF->F selon le SFR, la MFR et la MPC semblaient suivre une tendance à la baisse selon les trois lignes de faible revenu de la période de 1993 à 1994 à la période de 2006 à 2007. Pendant la période de 1993 à 1994, les taux d'entrée selon le SFR et la MFR dépassaient légèrement 5 %. Pendant la période de 2000 à 2001, les taux d'entrée selon les trois lignes variaient de 3 % à 4 %. En 2006-2007, ils sont tombés à leurs creux historiques respectifs. Ils ont tous commencé à augmenter légèrement par la suite. Le taux d'entrée a même atteint un sommet historique de 4,3 % selon la MPC pendant la période de 2008 à 2009. Ces variations peuvent également être observées à la figure 5.1 (graphique supérieur).

Le repli du taux d'entrée laisse supposer que la résistance au faible revenu, PPF->PF selon différentes lignes devrait avoir augmenté au fil du temps, puisque PPF->PF= 1 - PPF->F. Pendant la période de 1993 à 1994, environ 95 % des Canadiens qui n'étaient pas à faible revenu en 1993 sont restés hors du faible revenu l'année suivante, selon le SFR et la MFR. Pendant la période de 2000 à 2001, cette mesure variait de 96 % à 97 % selon les trois lignes. En 2006-2007, les mesures ont atteint leurs sommets historiques, en particulier selon le SFR et la MPC. Cependant, la dernière récession a fait baisser légèrement le taux de résistance. La figure 5.1 (graphique inférieur) trace l'évolution globale de la capacité des Canadiens de résister au faible revenu.

Figure 5.1 Entrée (graphique supérieur) et résistance (graphique inférieur) au faible revenu selon différentes lignes : période de 1993 à 1994 à période de 2008 à 2009Figure 5.1 Entrée (graphique supérieur) et résistance (graphique inférieur) au faible revenu selon différentes lignes : période de 1993 à 1994 à période de 2008 à 2009

Périodes multiples de faible revenu

La section précédente a brossé un tableau de la façon dont les Canadiens entrent en situation à faible revenu, y restent ou en sortent. Toutefois, on peut également examiner la dynamique du faible revenu en étudiant l'incidence des périodes multiples de faible revenu, aussi bien pour l'ensemble de la population que pour différents groupes de personnes. Dans les deux cas, si la proportion de personnes ayant un faible revenu sans interruption pendant une période est élevée, la persistance du faible revenu est forte. Autrement, si la proportion est faible et que bien des personnes ont un faible revenu au plus un an ou deux, le faible revenu serait caractérisé comme passager. Entre les cas extrêmes, si une personne a eu un faible revenu pendant plusieurs années, mais pas toutes les années, pendant une période donnée, la personne est habituellement considérée comme ayant un faible revenu chronique ou récurrent.

Les résultats basés sur les données de l'EDTR apparaissent dans le tableau 5.3. On remarque immédiatement que le faible revenu au Canada est très souvent passager. Il y a plus de gens qui ont un faible revenu pendant au moins un an sur une période de six ans qu'au cours d'une année donnée. Par exemple, de 2002 à 2007, de 20 % à 24 % des Canadiens ont eu un faible revenu pendant au moins un an selon le SFR, la MFR et la MPC, tandis qu'au cours d'une année donnée, les taux de faible revenu selon les trois lignes variaient de 9 % à 13 % pendant cette période.3 Par ailleurs, les gens étaient moins nombreux à avoir eu un faible revenu pendant plus de quatre ans ou pendant les six années dans le panel. Par exemple, selon la MPC, seulement 1,4 % des Canadiens avaient un faible revenu chaque année de 2002 à 2007. Les proportions correspondantes étaient de 2,1 % selon le SFR et de 3,5 % selon la MFR, ce qui porte à croire que le faible revenu persistant ou chronique n'était pas susceptible de toucher une grande proportion de la population canadienne.

De plus, la dynamique du faible revenu entre les groupes à haut risque variait beaucoup. Les groupes les plus touchés par le faible revenu persistant étaient les personnes non âgées hors famille et les parents seuls. Pendant la période de 1993 à 1998, de 51 % à 61 % des personnes non âgées hors famille ont eu un faible revenu pendant au moins un an selon la MFR et le SFR. Près du quart de ces personnes ont eu un faible revenu pendant les six années selon la MFR, et selon le SFR une sur trois a eu un faible revenu pendant six ans. La situation s'améliorait au fil du temps. Pendant la période de 2002 à 2007, de 13 % à 17 % des personnes non âgées hors famille ont eu un faible revenu pendant les six années selon la MPC, le SFR et la MFR, ce qui leur attribue la plus forte persistance du faible revenu par rapport aux autres groupes vulnérables.

Comme l'a documenté Richards ( 2010), l'incidence du faible revenu chez les parents seuls a considérablement diminué au cours de la dernière décennie. Après avoir examiné leur dynamique de faible revenu, nous avons constaté qu'à l'instar du groupe des personnes non âgées hors famille, les parents seuls avaient un taux élevé de faible revenu passager. La proportion de parents seuls à faible revenu pendant au moins un an de 1993 à 1998 se situait à 59 % selon le SFR et à 62 % selon la MFR. Pendant la période de 2002 à 2007, cette proportion allait de 48 % selon le SFR à 57 % selon la MFR, en passant par 53 % selon la MPC. Ces chiffres indiquent que le faible revenu passager diminuait au fil du temps pour ce groupe. Toutefois, le faible revenu passager des parents seuls était le plus élevé de tous les groupes vulnérables pendant la dernière période. En outre, les parents seuls ont également affiché un taux de faible revenu constamment élevé, devancé seulement par les personnes non âgées hors famille. De même, la persistance du faible revenu a diminué chez les parents pendant la période de 1993 à 2007, mais le repli chez ces personnes n'était pas aussi robuste que chez les personnes non âgées hors famille.

Tableau 5.3  Périodes multiples de faible revenu dans différents groupes de personnesTableau 5.3 Périodes multiples de faible revenu dans différents groupes de personnes
La proportion de personnes ayant un faible revenu pendant au moins un an était également élevée chez les immigrants récents, les personnes ayant des limitations d'activités et les Autochtones hors réserve. Pendant la période de 2002 à 2007, environ 40 % des immigrants récents et environ 30 % des personnes des deux autres groupes ont eu un faible revenu pendant au moins un an selon les différentes lignes. Malgré le faible revenu passager relativement élevé chez les immigrants récents, leur niveau de faible revenu chronique n'était pas aussi élevé que celui des parents seuls et des personnes non âgées hors famille. Les personnes ayant des limitations d'activités avaient également des taux relativement élevés de faible revenu persistant.4 De 2002 à 2007, 8,4 %, 10,9 % et 5,4 % des personnes ayant des limitations d'activités avaient un faible revenu pendant les six années selon le SFR, la MFR et la MPC respectivement. Ces taux étaient plus faibles que ceux des personnes non âgées hors famille, mais plus élevés que ceux de presque tous les autres groupes vulnérables.5

Tableau 5.4  Périodes multiples de faible revenu dans les différentes provincesTableau 5.4 Périodes multiples de faible revenu dans les différentes provinces

Tableau 5.5  Périodes multiples de faible revenu dans différentes communautésTableau 5.5 Périodes multiples de faible revenu dans différentes communautés
Les taux de faible revenu passager pour les enfants n'étaient que légèrement plus élevés que la moyenne de la population, tandis que la persistance du faible revenu chez les enfants était semblable à la moyenne de la population, en particulier dans les dernières années. Chez les personnes âgées, les taux de faible revenu passager et persistant étaient relativement faibles selon le SFR. Cependant, selon la MFR, les mesures de la nature passagère et persistante ont augmenté au fil du temps de 1993 à 2007 pour les personnes âgées, ce qui indiquait que leur revenu n'a pas augmenté aussi vite que celui de la population canadienne générale.

Le tableau 5.4 contient les résultats liés aux périodes multiples de faible revenu dans les provinces. La persistance du faible revenu a diminué considérablement en Alberta de 1993 à 2007. Dans les années 90, la proportion d'Albertains ayant eu un faible revenu pendant au moins quatre ans était très proche de la moyenne nationale. Pendant la période de 2002 à 2007, cette proportion est tombée à un niveau bien inférieur du niveau national. Le Québec a également enregistré des améliorations considérables pendant cette période. Pendant la période de 1993 à 1998, la persistance du faible revenu au Québec était presque la plus robuste de toutes les provinces, mais pendant la période plus récente, 2002 à 2007, elle a chuté à un niveau se rapprochant de la moyenne nationale. En revanche, la persistance du faible revenu en Colombie-Britannique a augmenté au fil du temps. Au début des années 1990, la proportion de résidents de la Colombie-Britannique qui ont eu un faible revenu pendant quatre ans était inférieure aux moyennes nationales selon le SFR et la MFR. Pendant la période de 2002 à 2007, la proportion de personnes ayant eu un faible revenu pendant au moins quatre ans dépassait la moyenne nationale selon les deux lignes.

Par contre, la persistance du faible revenu en Ontario était mitigée, diverses lignes de faible revenu donnant différents résultats. Selon le SFR, la persistance s'est améliorée entre les périodes de 1993 à 1998 et de 2002 à 2007, tandis que selon la MFR, la situation a semblé se détériorer entre les deux périodes. Cependant, en comparant les mesures de la persistance de la province à celles du pays, nous avons constaté que la persistance du faible revenu en Ontario était constamment au-dessous du niveau national.

Comme on pouvait s'y attendre, les variations interprovinciales faisaient écho aux fluctuations entre les plus grandes villes de ces provinces (tableau 5.5). Par exemple, la proportion de personnes à faible revenu pendant au moins quatre ans a considérablement diminué à Montréal de 1993 à 2007 selon le SFR et la MFR, et un repli est également survenu à Edmonton selon le SFR.6 En revanche, la proportion de personnes à Vancouver ayant eu un faible revenu pendant au moins quatre ans a augmenté (selon la MFR) ou est restée à un niveau relativement élevé au fil du temps (selon le SFR), tandis qu'à Toronto, certains indices portaient à croire que la persistance du faible revenu avait augmenté au fil du temps.

Une mesure de rechange du faible revenu chronique et persistant

La persistance et la récurrence du faible revenu peuvent être mesurées par le nombre d'années du faible revenu selon une période d'observation, mais les mesures comportent certaines limites. Par exemple, elles ne mesurent pas l'étendue du faible revenu. Prenons l'exemple de deux personnes. L'une a un faible revenu toutes les années, mais chaque année, son revenu n'est que légèrement au-dessous du seuil. L'autre personne a un faible revenu pendant seulement deux ans, mais chaque année, le revenu de cette personne est bien au-dessous du seuil. Les mesures utilisées à la section précédente indiqueraient que la personne a un faible revenu persistant, alors que la deuxième serait considérée comme ayant un faible revenu passager. Néanmoins, la deuxième personne pourrait devoir emprunter en fonction de ses revenus futurs pour composer avec le très faible revenu d'une année donnée et, par conséquent, elle pourrait avoir un revenu disponible moindre dans le futur. Même si son revenu n'était pas considéré comme « faible » durant ces années, elle aurait plus de chance de vivre dans des circonstances difficiles.

Pour contourner ce problème, nous utilisons une variante de la mesure de l'incidence du faible revenu à long terme mise au point par Rodgers et Rodgers (1993). Nous suivons Velleta (2005) pour comparer le revenu moyen après impôt (ou le revenu disponible selon la MPC) d'une famille économique (ou d'un ménage selon la MFR) sur une période ayant le seuil de faible revenu moyen correspondant. Si le revenu moyen se situe au-dessous du seuil moyen, la famille est considérée comme ayant un faible revenu persistant ou chronique.7 La catégorie de faible revenu à long terme d'une famille ou d'un ménage est alors attribuée à chaque membre. Les résultats sont présentés au tableau 5.6.

Tableau 5.6  Incidence du faible revenu à long terme, au moyen d'une mesure de la persistance de rechangeTableau 5.6 Incidence du faible revenu à long terme, au moyen d'une mesure de la persistance de rechange
Au niveau des groupes à risque, les résultats selon la mesure de rechange de la persistance cadrent avec les conclusions de la section précédente. L'incidence du faible revenu à long terme des personnes non âgées hors famille et des parents seuls a diminué de 1993 à 2007, mais au cours de la dernière période, ces deux groupes conservaient la plus forte incidence du faible revenu à long terme de tous les groupes à risque. La persistance du faible revenu chez les personnes ayant des limitations d'activités était également élevée, mais dans une moindre mesure que chez les personnes non âgées hors famille et les parents seuls. Toutefois, la persistance du faible revenu des personnes ayant des limitations d'activités demeurait deux fois plus élevée que la moyenne nationale. En outre, de 1999 à 2007, la persistance du faible revenu selon le SFR et la MFR a peu fluctué pour les personnes de ce groupe, alors que des améliorations considérables sont survenues au sein d'autres groupes vulnérables pendant cette période.

Les résultats révèlent d'abord que les améliorations de la persistance du faible revenu en Alberta et au Québec et sa détérioration en Colombie-Britannique, des tendances décrites à la section précédente, ont également été observées selon la mesure de rechange. Selon le SFR, l'incidence du faible revenu à long terme en Alberta a diminué pour passer d'environ 8 % à la première période (1993 à 1998) à 2 % à la dernière période (2002 à 2007), tandis que selon la MFR, elle a diminué d'environ 7 % à 3 %. Au Québec, l'incidence a chuté de 14 % à 6 % selon le SFR et de 13 % à 10 % selon la MFR pendant la même période. En revanche, l'incidence du faible revenu à long terme dans la province de Colombie-Britannique est restée relativement élevée ou a augmenté entre les deux périodes. Selon la MFR, l'incidence a progressé de moins de 6 % à près de 10 %, tandis que selon le SFR, elle est restée aux alentours de 8 %. Cependant, l'incidence à long terme relativement stable selon le SFR ne signifie pas que la Colombie-Britannique ne s'en soit pas plus mal tirée au fil du temps parce qu'à l'échelon national, l'incidence a fléchi et les replis dans toutes les autres provinces étaient considérablement plus marqués qu'en Colombie-Britannique.

À l'instar de la persistance du faible revenu en Ontario, la mesure de rechange a confirmé nos résultats de l'approche axée sur des périodes multiples; les tendances variaient selon diverses lignes de faible revenu. Selon le SFR, une certaine amélioration est survenue entre la première et la dernière période d'observation (1993 à 1998 par rapport à 2002 à 2007), tandis que les résultats selon la MFR semblaient suggérer une autre histoire. Néanmoins, les résultats suggéraient encore une fois que la persistance du faible revenu en Ontario était au-dessous de celle à l'échelon canadien lorsque l'approche de Rodgers et Rodgers (1993) était employée.

La mesure de rechange offrait des renseignements plus utiles pour différentes communautés que l'approche axée sur des périodes multiples. Il est maintenant plus clair que le faible revenu persistant a diminué, parfois de façon marquée, à Edmonton, à Calgary et à Montréal de 1993 à 2007. Pour Edmonton, pendant la période de 1993 à 1998, l'incidence du faible revenu à long terme était supérieure ou très proche de la moyenne nationale de 8 % à 9 %. Pendant la période de 2002 à 2007, elle a diminué pour atteindre le niveau de 2 % à 3 %. Ce faible niveau a également été observé à Calgary, mais l'incidence du faible revenu dans cette ville était déjà au-dessous de la moyenne nationale dès la période de 1993 à 1998. L'incidence du faible revenu à long terme a également significativement diminué à Montréal. Selon le SFR, elle a fléchi, pour passer de 21 % pendant la période de 1993 à 1998 à 8 % pendant la période de 2002 à 2007, et selon la MFR, de 17 % à 9 %. Pendant la période de 1993 à 1998, Montréal avait les plus fortes incidences à long terme du faible revenu au pays, à plus du double de la moyenne nationale. Pendant la dernière période, les incidences à long terme dans cette ville se rapprochaient beaucoup plus des moyennes nationales.8
La situation à Vancouver était différente. Selon le SFR, l'incidence du faible revenu à long terme est demeurée inchangée  au cours du temps . Pendant la période de 1993 à 1998, elle s'établissait autour de 12 %. Pendant la période de 2002 à 2007, elle demeurait aux alentours de 11 %, et l'incidence selon la MFR a augmenté d'environ 5 % à 11 %. Pendant la plus récente période à l'étude, Vancouver avait une plus forte incidence du faible revenu à long terme que la plupart des grandes villes selon les trois lignes de faible revenu. La seule exception était Winnipeg, où l'incidence du faible revenu à long terme selon le SFR et la MFR était semblable à celle de Vancouver. Toutefois, selon la MPC, l'incidence à Winnipeg était plus faible que celle de Vancouver, et pendant la période de 1993 à 1998, les incidences selon le SFR et la MFR étaient considérablement plus élevées à Winnipeg qu'à Vancouver, ce qui porte à croire que le repli de la persistance du faible revenu à Winnipeg était probablement beaucoup plus fort qu'à Vancouver.

Enfin, à Toronto, bien que l'incidence du faible revenu à long terme n'ait pas été beaucoup plus élevée que celle des autres villes ces dernières années, une tendance à la détérioration semble se profiler. Pendant la période de 1993 à 1998, les incidences de Toronto selon le SFR et la MFR étaient les plus faibles des grandes villes. Ces incidences variaient au fil du temps, mais pendant la période de 2002 à 2007, elles étaient plus élevées que celles d'Edmonton et de Calgary.

La durée du faible revenu

La majorité des personnes qui sont devenues à faible revenu une année n'ont pas pu s'en sortir l'année suivante. Il faut se demander combien d'années en moyenne une personne à faible revenu resterait dans cette situation. Étant donné que chaque panel de l'EDTR observe une personne pendant au plus six ans, les estimations de la durée du faible revenu sont assujetties à la censure en amont et en aval d'une période de faible revenu. La censure en amont se produit lorsque, pendant la première année à l'étude, la personne en question avait déjà un faible revenu, et on ignore si elle avait un faible revenu dans les années précédant l'observation. La censure en aval se produit lorsqu'une personne a un faible revenu la dernière année à l'étude et que nous ne savons pas si elle continuerait d'avoir un faible revenu dans les années suivant l'observation. Par conséquent, la durée moyenne des périodes de faible revenu sous-estimera normalement la durée réelle lorsque la censure n'est pas prise en compte.9
Néanmoins, la durée estimée offre une limite plus basse pour chaque groupe, et les comparaisons de la durée des périodes entre les groupes pendant la même période et au fil des ans sont encore valides.10 Le tableau 5.7 présente la durée moyenne estimée de toutes les périodes de faible revenu (terminées ou censurées) pour chaque panel de l'EDTR. Dans l'ensemble, les périodes moyennes de faible revenu durent plus de deux ans. Selon le SFR, la durée moyenne a légèrement diminué, passant de 2,7 années en 1993 à 1998 à 2,4 années en 2002 à 2007; selon la MFR, elle est restée autour de 2,5 ans.

Les résultats des groupes de personnes et de communautés sont plus intéressants. Le tableau 5.7 suggère que les parents seuls et les personnes non âgées hors famille étaient les deux groupes ayant de plus longues durées du faible revenu. Pendant la période de six ans de 1993 à 1998, leurs durées moyennes étaient de 4,5 ans et 4,3 ans respectivement selon le SFR, et de 4,3 ans et 3,8 ans selon la MFR. Pendant la dernière période de six ans, de 2002 à 2007, ces durées ont diminué pour s'établir à 3,6 ans et à 2,8 ans selon le SFR, et à 3,9 et à 3,6 ans selon la MFR.

À l'échelle des provinces, les résidents du Québec semblaient avoir une plus longue durée du faible revenu dans les années 90 et au début des années 2000, mais leur situation s'est améliorée au fil du temps. Ces résultats cadrent avec ceux décrits aux sections précédentes, qui montraient que les Québécois avaient une forte persistance du faible revenu dans les années 90 et que la persistance diminuait par la suite. En Colombie-Britannique, la durée du faible revenu augmentait légèrement au fil du temps, mais le niveau n'était pas plus élevé que dans plusieurs autres provinces. En Ontario, la durée moyenne augmentait légèrement au fil du temps, mais elle était généralement au-dessous de la moyenne nationale. Cependant, dans les provinces de l'Atlantique, sauf l'Île-du-Prince-Édouard, les périodes de faible revenu duraient normalement plus longtemps que le reste du pays, en particulier lorsque la MFR était utilisée. Par exemple, selon la MFR, la durée moyenne des périodes de faible revenu à Terre-Neuve-et-Labrador, en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick étaient de 3,0, 3,0 et 3,2 ans pendant la période de 2002 à 2007, la plus longue au pays.

D'une communauté à une autre, nous avons encore une fois constaté que les personnes de Montréal et de Vancouver avaient les plus longues périodes de faible revenu. La différence entre ces personnes était que la durée diminuait au fil du temps pour celles de Montréal, tandis que la durée du faible revenu pour celles de Vancouver augmentait. La durée du faible revenu à Toronto était généralement au-dessous de la moyenne nationale pendant la période de 1993 à 1998, mais au fil du temps, elle se rapprochait de la moyenne nationale ou la dépassait pendant la période de 2002 à 2007. Fait étonnant, les résidents de la ville de Winnipeg avaient une longue durée du faible revenu selon le SFR et parfois des durées relativement longues selon la MFR, et bien que la situation se soit améliorée au fil du temps, les progrès semblaient lents. La durée du faible revenu était également relativement longue à Ottawa–Gatineau avant 2000, mais elle a diminué depuis.

Tableau 5.7 Durée moyenne des périodes de faible revenu (en années)Tableau 5.7 Durée moyenne des périodes de faible revenu (en années)

Sommaire

Dans la perspective d'une année à l'autre, on observe une tendance à la baisse à long terme du taux d'entrée en situation de faible revenu selon les trois seuils et une tendance à la hausse de la résistance des Canadiens au faible revenu, mais la récession récente a donné lieu à une augmentation du taux d'entrée et à une diminution de la résistance.

Les données du panel de six ans nous permettent d'examiner les transitions du faible revenu sur une plus longue période. Les données suggèrent qu'une proportion significative du faible revenu est de nature passagère au Canada. Le tiers des personnes qui sont devenues à faible revenu se sont sorties de cette situation l'année suivante. Néanmoins, plus de 20 % des Canadiens ont eu un faible revenu à un moment donné pendant une période de six ans, mais très peu d'entre eux ont eu un faible revenu pendant les six années. Cela dit, plusieurs groupes de personnes ont eu un faible revenu plus persistant que d'autres, notamment les parents seuls et les personnes non âgées hors famille et, dans une moindre mesure, les personnes ayant des limitations d'activités. Bien que la persistance de leur faible revenu ait diminué, ces groupes étaient les plus susceptibles d'avoir un faible revenu, et une fois à faible revenu, ils resteraient dans cette situation le plus longtemps.

La persistance du faible revenu a considérablement diminué en Alberta et au Québec, ainsi que dans les grandes villes de ces deux provinces au cours des dernières années. En Alberta en général, et à Edmonton et Calgary en particulier, le faible revenu persistant s'est fait rare. Toutefois, la situation s'est détériorée en Colombie-Britannique, mais la durée du faible revenu ne semblait pas particulièrement longue, tandis qu'en Ontario et à Toronto en particulier, même si la persistance du faible revenu était généralement égale ou inférieure à la moyenne nationale, les données portaient à croire que la situation s'est détériorée au fil du temps. Des périodes de faible revenu relativement longues ont été relevées à Terre-Neuve-et-Labrador, en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick, ainsi que dans la ville de Winnipeg.


Nota

1. Une source de rechange qui permettrait d'étudier des périodes plus longues que six ans est la banque de Données administratives longitudinales (DAL), qui est composée d'un échantillon aléatoire de 20 % de dossiers de l'impôt sur le revenu des Canadiens. La taille de l'échantillon est énorme et vise une période beaucoup plus longue que l'EDTR. Cependant, la DAL a peu de caractéristiques individuelles, et comme la famille de recensement est l'unité de base de l'observation pour la DAL, aucun des trois seuils de faible revenu (Seuils de faible revenu (SFR), Mesure du faible revenu (MFR) ou Mesure du panier de consommation (MPC)) que nous employons ne s'applique à la DAL. Toutefois, il n'est pas impossible d'intégrer un seuil de MFR à la base de données pour étudier la dynamique du faible revenu. À titre d'exemple, voir Finnie et Sweetman (2003). Nous laissons cette question pour les recherches à venir.

2. Notons que PF-> F + PF->PF = 1 et PPF->F + PPF->PF = 1.

3. Voir le tableau 2.1 pour les taux de faible revenu d'une année donnée pendant cette période.

4. La définition des personnes ayant des limitations d'activités a changé en 1999.

5. En raison de la petite taille des échantillons, les proportions du faible revenu pendant les six années pour les immigrants récents (selon les trois seuils) et pour les Autochtones hors réserve (selon le SFR) n'ont pas été présentées. Cependant, elles n'étaient pas aussi élevées que pour les autres groupes.

6. Les proportions pour Edmonton et Calgary ont également diminué, mais hélas, les échantillons pour ces villes étaient petits, et il était difficile d'évaluer les variations avec précision.

7. Cette version simplifiée de l'incidence du faible revenu à long terme suppose essentiellement que le taux d'actualisation pour le revenu futur est de 0.

8. Cependant, dans le panel incomplet de l'Enquête sur la dynamique du travail et du revenu, de 2005 à 2009, l'incidence du faible revenu à long terme a augmenté encore une fois à Montréal et, dans une moindre mesure, à Toronto et à Calgary, tandis qu'elle à diminué à Vancouver.

9. De plus, il se pourrait que plus la période fût longue, plus la probabilité était faible que le faible revenu prenne fin à la prochaine période.

10. Les comparaisons pour le même groupe au fil du temps pourraient être problématiques lorsque les circonstances économiques sont différentes entre les périodes, par exemple, si une récession survient pendant une période, alors qu'une période d'expansion a lieu dans l'autre. Dans le premier cas, une période de faible revenu peut durer plus longtemps, tandis que dans le premier cas, elle peut durer moins longtemps.

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