1 Introduction

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Au cours des années 1980 et 1990, le marché canadien du travail a subi des transformations, dont l'intégration croissante à l'économie américaine et le changement des flux des échanges, l'évolution rapide de la technologie de l'information, les changements de mode et d'organisation de production, comme l'« externalisation » et les régimes de travail non standard, la fluctuation des prix des ressources naturelles et les variations prononcées des taux de change canadiens, les taux de croissance régionale très inégaux, l'intensification de la concurrence et de la vulnérabilité des travailleurs, ainsi que les influx importants d'immigrants. À l'échelle macroéconomique, la reprise a été lente après la récession du début des années 1990, le taux de chômage étant demeuré élevé jusqu'à la fin de cette décennie. Ces changements pourraient avoir eu une incidence sur la répartition des gains entre les travailleurs surle marché du travail.

Dans le présent document, nous examinons la variabilité des gains des travailleurs au Canada de 1982 à 2000 selon une approche graphique non structurelle à l'aide d'une grande banque de données administratives longitudinales représentatives. Suivant une méthode établie par Gottschalk et Moffit (1994), nous décomposons la variance totale des gains des travailleurs au cours de la période susmentionnée en une composante « permanente » ou de long terme de la variance entre les travailleurs et une composante « transitoire » ou d'instabilité des gains d'une année à l'autre au cours du temps pour certains travailleurs. La nouveauté méthodologique du présent document est que cette décomposition est appliquée à une période d'observation des gains mobile de cinq ans, afin de pouvoir examiner (graphiquement et par des méthodes de régression) comment la variation totale des gains et ses deux composantes ont évolué au cours de ces deux décennies récentes, d'une manière non structurelle, assez souple. Nous présentons les résultats séparément pourles travailleurs masculins et féminins et pour les travailleurs appartenant à quatre groupes d'âge distincts. La souplesse associée à la nature mobile de la structure de notre ensemble de données nous permet aussi d'examiner comment les composantes de la variance des gains varient en fonction des indicateurs macroéconomiques, c'est-à-dire du taux de chômage et des taux de croissance du produit intérieur brut réel, au cours de la période de référence.

Comprendre les profils des différences de long terme entre les gains des travailleurs et de l'instabilité de ces gains d'une année à l'autre présente un intérêt économique et stratégique. les différences de long terme entre les gains des travailleurs sont associées aux profils d'évolution des gains au cours de la vie et dépendent de facteurs tels que les niveaux atteints de capital humain et de compétences, la participation de long terme au marché du travail et le régime de travail, l'évolution de la composition de l'économie en termes d'industries et de professions, ainsi que l'évolution du rendement des compétences et des effets de cohorte, qui évoquent des questions de concordance entre les compétences et les emplois, d'accès à la formation et d'utilisation efficace du capital humain. Les variations d'une année à l'autre reflétant l'instabilité des gains sont dues à des facteurs plus transitoires, tels que le chômage et la restructuration des lieux de travail, les relations d'emploi non standard, l'instabilité des prix des biens primaires et l'évolution des profils de demande dans les diverses professions, ainsi que l'instabilité du rendement des entreprises. Ces variations, quant à elles, attirent davantage l'attention des décideurs sur des questions comme l'assurance sociale, l'amélioration du flux et de la qualité de l'information sur les marchés du travail et les politiques macroéconomiques. La décomposition des variations globales de l'inégalité en une source plus permanente et une source de court terme nous permet aussi de mieux interpréter et évaluer diverses explications des résultats observés.

Des analyses strictement transversales ont montré que l'inégalité des gains a augmenté significativement au Canada à la fin des années 1980 et au cours des années 1990 (Beach et Slotsve, 1996; Burbidge, Magee et Robb, 1997; Frenette, Green et Picot, 2004; Heisz, Jackson et Picot, 2002; Johnson et Kuhn, 2004; Picot, 1997; Richardson, 1997; Wolfson et Murphy, 1998). Ce phénomène est reflété à la figure 1 qui montre que la variance totale des gains des travailleurs — expliquée de manière plus formelle plus bas 1 — a effectivement augmenté au cours de cette période (l'axe horizontal représente une période d'observation mobile de cinq ans allant de l'intervalle 1982 à 1986 à l'intervalle 1996 à 2000). Cependant, notre examen d'une série chronologique mobile révèle que cet accroissement global n'était pas du tout monotone et que des profils assez différents (en dehors de la période allant de 1986 à 1990 à la période 1991 à 1995) se dégagent effectivement pour les femmes et pour les hommes. De toute évidence, les profils présentent aussi un aspect cyclique important. De surcroît, les figures 2 et 3 font ressortir que les composantes transitoire et de long terme — décrites elles aussi plus en détail plus bas — contribuent de manière assez distincte à l'accroissement de la variance totale. Les différences de gains de long terme (figure 3) ont en grande partie augmenté, surtout chez les hommes, tandis que l'instabilité des gains (figure 2) a en grande partie diminué, principalement chez les femmes participant au marché du travail. Chose intéressante, l'inégalité de long terme des gains des hommes a diminué au cours de la période de croissance des années 1980, mais a ensuite augmenté au cours de la période de croissance des années 1990. L'objectif principal du présent document est d'examiner et d'essayer d'expliquer ces profils (et les profils selon l'âge plus détaillés) d'évolution des variations des gains au Canada.

Tant du point de vue de la portée que de la méthodologie, le présent document étoffe nos travaux antérieurs. Dans Beach, Finnie et Gray (2003), nous avons établi les fondements de l'estimation de la variation des gains et du processus de décomposition, et avons montré un mouvement structurel de la mesure de la variance entre les années 1980 et les années 1990. Dans Beach, Finnie et Gray (2005), nous avons intégré une dimension régionale, ainsi qu'un mouvement temporel (1982 à 1989 comparativement à 1990 à 1997) et utilisé une analyse multivariée pour préciser les effets du cycle économique sur les mesures de la variance des gains entre les deux périodes et d'une région géographique à l'autre. Le présent document prolonge la dernière analyse du point de vue méthodologique en intégrant une mesure de moyenne mobile des gains permanents dans la méthode de décomposition de Gottschalk-Moffitt. Cela nous permet de calculer une série chronologique des composantes de la variance, donc d'analyser les variations détaillées d'une année sur l'autre de ces mesures de la variance, graphiquement, ainsi que par des méthodes de régression. Nous pouvons donc estimer directement les effets macroéconomiques, au lieu de les inférer indirectement en partant des différences interrégionales de rendement macroéconomique. La présente analyse s'étend en outre jusqu'à l'année 2000 et ajoute aux profils chronologiques la richesse supplémentaire des différences selon l'âge et le sexe.

À la section suivante, nous passons brièvement en revue la littérature pertinente. À la section 3, nous établissons le cadre analytique et à la section 4, nous décrivons l'ensemble de données employé et les principales caractéristiques des échantillons utilisés pour l'estimation. À la section 5, nous présentons les ensembles de résultats graphiques sur les profils chronologiques de l'inégalité de long terme des gains et de l'instabilité des gains d'une année à l'autre. À la section 6, nous décrivons une analyse par régression des tendances sous-jacentes et des effets macroéconomiques. Enfin, pour conclure, à la dernière section, nous passons en revue et mettons en reliefles principaux résultats.

1 . Toutes les mesures de variance sont calculées à partir du logarithme des gains ajustés pour tenir compte du cycle de vie (en milliers de dollars de 1997).