7 Récapitulation et conclusion

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Nous avons examiné la variabilité des gains des travailleurs au Canada au cours de la période allant de 1982 à 2000 au moyen d'une approche en grande partie non structurelle à l'aide de la banque de Données administratives longitudinales. Nous avons décomposé la variance longitudinale totale des gains entre les travailleurs et au cours du temps, pour les travailleurs échantillonnés à l'aide d'une méthode employée par Gottschalk et Moffitt (1994), en une composante permanente ou de long terme de l'inégalité entre les travailleurs et une composante de l'instabilité des gains individuels d'une année à l'autre au cours du temps. L'une des innovations méthodologiques de l'étude est que cette décomposition est appliquée à une période mobile de cinq ans d'observation des gains, afin de pouvoir analyser comment ont évolué la variance totale des gains et ses deux composantes au cours des années 1980 et des années 1990 de manière non structurelle, assez souple, sur une base annuelle. Cette approche nous permet aussi d'établir des liens avec les indicateurs macroéconomiques. Nous présentons les résultats de l'étude séparément pour les hommes et pour les femmes et pour les travailleurs de quatre groupes d'âge. L'analyse empirique s'appuie sur des méthodes graphiques ainsi que des méthodes de régression.

Plusieurs résultats importants se dégagent de l'étude. En premier lieu, la hausse générale de la variance totale des gains entre les années 1980 et les années 1990 n'a pas du tout été de nature monotone entre périodes et reflète des profils d'évolution assez différents des deux composantes. L'inégalité de long terme des gains a généralement augmenté au cours de la période de référence, tandis que l'instabilité des gains d'une année à l'autre a diminué assez régulièrement, sauf durant la récession du début des années 1990. Les variations de la variabilité totale des gains ont été dictées principalement par des variations de l'inégalité de long terme des gains. Contrairement à Moffitt et Gottschalk (2002) qui ont observé une hausse séculaire de l'inégalité permanente des gains aux États-Unis, nous constatons (pour les hommes ainsi que les femmes), comme l'illustre la figure 3, une remontée importante de la composante permanente autour de 1986 à 1995, suivie par un léger recul du début au milieu des années 1980. Nos résultats reflètent davantage de puissants effets cycliques qu'une tendance à la hausse dominante. En outre, contrairement à Moffitt et Gottschalk (2002), nous ne dégageons pas d'accroissement spectaculaire de l'instabilité des gains durant les années 80, comme l'illustre la figure 2, mais uniquement autour de 1988 à 1991, accroissement suivi en grande partie d'une baisse par après. De nouveau, nos résultats évoquent des effets cycliques plus prononcés sur l'instabilité des gains au Canada qu'aux États-Unis. Donc, comme Haider (2001), nous dégageons des profils contre-cycliques à la fois pour la composante de l'inégalité de long terme et celle de l'instabilité des gains, mais nos résultats donnent à penser que les effets cycliques sont relativement plus prononcés qu'aux États-Unis et qu'ils interviennent plus fortement par la voie des différences de gains dues à une inégalité permanente au Canada qu'aux États-Unis.

En deuxième lieu, en dehors de la période de récession du début des années 90 (durant laquelle presque toutes les mesures de la variance ont augmenté), les profils d'évolution des deux composantes de la variance ont été assez différents pour les hommes et pour les femmes. Depuis le début des années 90, l'inégalité de long terme des gains a continué d'augmenter chez les hommes, mais a diminué considérablement chez les femmes. Depuis la fin des années 80, l'instabilité de court terme des gains a diminué assez régulièrement chez les femmes, mais a manifesté un profil plus cyclique chez les hommes. Par conséquent, les tendances qui sous-tendent l'instabilité des gains ont renforcé la tendance à la hausse de l'inégalité de long terme des gains chez les hommes, mais l'ont affaiblie ou neutralisée chez les femmes. Les effets du taux de chômage sur les deux composantes de la variance se manifestent assez fortement chez les hommes, mais dans une moindre mesure chez les femmes. Ainsi, l'accroissement du chômage fait augmenter l'instabilité des gains chez les hommes, mais produit des effets beaucoup plus faibles et mixtes sur l'instabilité des gains des femmes. Par contre, les effets du taux de croissance du produit intérieur brut sur l'inégalité de long terme des gains sont plus prononcés chez les femmes que chez les hommes.

En troisième lieu les profils des deux composantes de la variance en fonction de l'âge sont presque opposés. L'inégalité de long terme des gains augmente généralement avec l'âge, du moins chez les travailleurs jeunes et au-delà, si bien qu'elle est nettement plus élevée chez les travailleurs d'âge avancé, tandis que l'instabilité des gains diminue généralement avec l'âge, du moins jusqu'à ce que les travailleurs atteignent la force de l'âge, si bien qu'elle est nettement plus élevée chez les travailleurs débutants. Le profil de la variance totale des gains reflète fondamentalement celui de l'inégalité de long terme des gains. Les déplacements au cours du temps de ces courbes en fonction de l'âge ont essentiellement accentué ces grands profils et sont plus importants pour l'inégalité de long terme des gains, particulièrement chez les hommes.

En quatrième, lieu, les taux de chômage ainsi que les taux de croissance du PIB, en tant qu'indicateurs macroéconomiques, ont des effets nets mis en évidence par la régression statistiquement significatifs sur toutes les mesures de la variance des gains. Les effets du taux de chômage sont positifs pour presque toutes les mesures de la variance, résultant en harmonie avec les attentes classiques voulant que les marchés du travail plus étroits réduisent la variance des gains, mais qu'un chômage plus important soit associé à un accroissement des différences de gains de long terme et de l'instabilité des gains de court terme. L'effet est plus prononcé chez les hommes que chez les femmes et se manifeste davantage par la voie de l'inégalité de long terme que celle de l'instabilité de court terme des gains au Canada. Selon la théorie économique classique, le taux de croissance du PIB devrait avoir des effets négatifs sur les diverses mesures de la variance, une plus forte croissance économique réduisant l'inégalité et l'instabilité des gains. Ces effets prévus s'avèrent effectivement corrects pour les femmes et pour l'instabilité des gains chez les hommes. Toutefois, les effets du taux de croissance économique sur l'inégalité de long terme des gains des hommes (et sur la variance totale des gains) s'avèrent positifs, résultat qui concorde davantage avec un ensemble d'explications procédant de la théorie de la « nouvelle économie » fondées sur la restructuration économique et l'évolution démographique. De toute évidence, la prospérité économique globale n'a pas réduit l'inégalité des gains des hommes au Canada au cours de la dernière décennie et d'autres travaux de recherche sont nécessaires pour en déterminerles raisons.