Hé-coutez bien! Épisode 11 - Oui aux maisons écologiques, non aux émissions

Date de diffusion : le 22 novembre 2022

Nº de catalogue : 45-20-0003
ISSN : 2816-2269

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Graphique de climat (JPG, 1.85 Mo)

Le Canada est confronté à la fois à une crise climatique et à une crise du logement, qui sont interreliées.

Les choix que nous faisons par rapport à nos habitations — leur emplacement et le besoin d'utiliser un véhicule pour nous déplacer, leur source de chaleur et les matériaux dont elles sont construites, notamment — ont une incidence sur l'environnement.

Par ailleurs, le climat a des conséquences sur nos habitations. Lorsque des événements météorologiques violents se produisent et les endommagent, nous n'avons d'autres choix que de les reconstruire. Si par chance, elles s'en sortent indemnes, nous devons tout de même déterminer la mesure dans laquelle notre style de vie doit changer pour s'adapter aux changements climatiques.

Andrew DeFazio, Conseiller du Bureau de changement climatique à SCHL, se joint à nous pour discuter comment adopter une stratégie climatique qui tient compte de nos habitations et adapter notre stratégie de logement au climat.

Animatrice

Alexandra Bassa

Invité

Andrew DeFazio

Narration

Fawzi Hemsas

Écoutez

Hé-coutez bien! Épisode 11 - Oui aux maisons écologiques, non aux émissions - Transcription

Alexandra : Bienvenue à « Hé-coutez bien! », un balado de Statistique Canada où nous faisons la connaissance des personnes derrière les données et découvrons les histoires qu'elles révèlent. Je suis votre animatrice, Alexandra Bassa.

C'est l'automne, la saison des chandails tricotés et de la citrouille épicée. La saison au cours de laquelle il convient de se poser la question : « Jusqu'où peut-on aller dans le gigantisme en matière de foulard? » Alors que les feuilles tourbillonnent et tombent et que la température baisse, la « bataille du thermostat » commence chez nous. Chacun met en avant ses arguments pour la température de son choix, l'un expliquant que les matins sont plus durs lorsqu'on quitte la chaleur du lit pour se retrouver dans une pièce glaciale, l'autre répliquant que c'est bien la raison pour laquelle on peut porter des chandails géants et de grosses chaussettes bien épaisses.

Cependant, nous devons être conscients que le choix d'augmenter le thermostat, de bricoler nous-mêmes l'isolation des fenêtres ou d'investir dans des rénovations écologiques n'a pas seulement des conséquences sur notre budget, mais également sur le climat. Quand on parle d'un seul ménage, on peut estimer que les choix effectués auront peu de répercussions, mais il y a des millions de ménages comme nous, d'un océan à l'autre : en fait plus de 10 millions de familles ont été comptées au cours du recensement de 2021. Dans ce contexte, quelles répercussions avons-nous tous sur l'environnement et quelles incidences ont nos logements?

Nous avons rencontré un expert pour en discuter.

Andrew : Bonjour, je m'appelle Andrew DeFazio et je travaille pour la Société canadienne d'hypothèques et de logement (SCHL) à titre de conseiller au Bureau des changements climatiques de la SCHL.

Alexandra: Alors ça fait combien de temps que la SCHL a un bureau des changements climatiques et qu'elle offre le genre de travail que vous faites?

Andrew : Le Bureau des changements climatiques a été entièrement doté en personnel en 2020, à la suite de mesures délibérées prises par notre direction pour se rendre compte de l'importance du climat sur le logement et pour reconnaître que la SCHL a un rôle à jouer dans le système de logement.

C'est notre souhait que d'ici 2030, toutes les personnes au Canada aient un logement qu'elles peuvent se payer et qui répond à leurs besoins. Et avec les changements climatiques, cela devient de plus en plus crucial. Au Bureau des changements climatiques, ce que nous essayons de faire, c'est d'obtenir des résultats sur le système de logement de sorte qu'il soit en mesure d'appuyer la durabilité et la stabilité.

Alexandra : Selon le Recensement de 2021, 1 ménage sur 10 avait des besoins impérieux en matière de logement, c'est-à-dire qu'il occupait un logement inabordable, de qualité inconvenable ou de taille insuffisante, et qu'il ne n'avait pas les moyens de se payer un logement acceptable dans sa communauté.

L'un des objectifs que vous venez de mentionner vise à ce que toutes les personnes au Canada aient un logement qu'elles peuvent se payer d'ici 2030. Pourriez-vous nous parler de la différence entre le logement disponible et le logement abordable?

Andrew : Certainement. Lorsque nous voulons nous pencher sur l'abordabilité, nous devons jeter un œil sur le parc de logements déjà construits et sur le genre de retombées que cela a sur les revenus des gens de vivre dans ce parc de logements.

L'autre élément est le parc de logements dont nous avons besoin. Et on a beaucoup insisté sur le fait que nous ne disposons pas du parc de logements requis pour atteindre les niveaux d'abordabilité que nous aurions vus auparavant. Alors, lorsque nous y réfléchissons, l'un des défis principaux que le système de logement doit relever est de trouver la façon de mettre des unités sur le marché, de trouver des espaces de logement adaptés aux besoins des gens.

Nous avons mené certaines recherches sur le sujet et utilisé un grand nombre de données pour en arriver avec ce que nous croyons être le nombre d'unités qui replacera les marchés de l'habitation à un niveau que nous qualifierions d'abordable. Lorsque vous réfléchissez au système et que vous voyez ce qui se passe, si nous pensons à ce qui arrivera d'ici 2030, nous projetons qu'il y aura 2,3 millions d'unités qui seront créées. Cela chiffrerait le parc de logements à 19 millions d'unités. Cela ne suffira pas. Il en faudra plus. Il en faudra 3,5 millions de plus pour porter le nombre total d'unités de logement à 22 millions.

Et d'autres éléments qui sont importants tournent autour de l'abordabilité. C'est en fait le type de logement qui est requis. On verra toute la gamme, des maisons unifamiliales jusqu'aux locations. Et je crois qu'il est important de se concentrer sur la location. Parce que la location apporte beaucoup de facteurs intéressants qui contribuent à l'abordabilité. Elle permet aussi d'être respectueux du climat, parce que vous pouvez avoir de la densité. Alors pour nous, c'est une question de déterminer comment l'offre peut commencer à augmenter au Canada afin que nous puissions avoir plus d'équilibre et d'abordabilité pour les personnes qui vivent au Canada.

Alexandra : En 2021, 17 % des personnes vivant au Canada faisaient partie d'un ménage qui consacrait 30 % ou plus de son revenu aux frais de logement ou, autrement dit, vivaient dans un logement inabordable.

Comment la crise climatique et la crise du logement se répercutent-elles l'une sur l'autre?

Andrew : Je crois qu'il est d'abord important de comprendre que nous savons que le logement émet des gaz à effet de serre, qui créent de la pollution. Cela se produit de différentes manières. Cela se produit à travers les appareils électroménagers, la source de chauffage que vous utilisez dans votre maison, votre mode de vie au quotidien. Cela contribue aussi, quand on y pense, aux matériaux qui servent à produire votre maison. Alors, quand vous construisez votre maison, ces matériaux eux-mêmes contribuent aux émissions de gaz à effet de serre.

L'autre partie de l'équation est de réfléchir aux répercussions du climat sur la maison. Vous assisterez à des événements météorologiques violents qui créeront des défis et des enjeux pour votre maison et qui entraîneront des dommages. Vous devrez par la suite faire des rénovations, des travaux d'adaptations, de sorte que vous puissiez voir la façon dont le logement en soi contribuera aux émissions de gaz à effet de serre. Le climat aura donc des répercussions sur le logement. Et ce n'est qu'une roue qui continue de tourner.

Alexandra : Je crois que pour plusieurs personnes, depuis longtemps, nous entendons parler des changements climatiques comme étant quelque chose qui va se produire dans l'avenir. Ce sera un problème à l'avenir. C'est un problème pour nos enfants, pour nos petits-enfants. Mais ce n'est plus nécessairement le cas, non? Vous savez, nous voyons déjà les effets des changements climatiques. Quels sont les aspects des changements climatiques que les gens au Canada auraient déjà vus dans leur propre vie jusqu'à maintenant?

Andrew : Lorsque nous parlons des changements climatiques et de leurs effets, sur le logement, il y a deux concepts clés ici. Il y a le risque physique et le risque lié à la transition.

C'est plus facile de voir le risque physique. Alors, nous savons que dans le contexte du réchauffement de la planète, nous constatons une intensité accrue des tempêtes. Nous constatons des vitesses plus élevées des vents. Nous vivons des saisons sèches encore plus sèches, ce qui entraîne des feux incontrôlés. Nous observons une fonte des neiges rapide, des pluies fortes, des précipitations qui entraînent des inondations. Vous pouvez donc voir le risque physique, vous pouvez constater dans quelle mesure cela touche et peut endommager les habitations.

L'autre élément de cela, qui n'est pas aussi facile à voir et que nous commençons à vivre et que nous subirons tout autant dans l'avenir, a trait à ce qui s'appelle le risque lié à la transition. C'est le fait de constater les changements au niveau de l'économie et au niveau des modes de vie qui viendront en tentant d'avoir une plus faible empreinte carbone. Pensez par exemple aux industries qui émettent beaucoup de carbone et qui devront s'adapter. Quel genre d'incidence économiques cela aura-t-il? Pensez aux endroits où les gens veulent vivre s'ils constatent qu'il y a des régions au pays qui sont plus susceptibles de résister aux risques et aux décisions qui seront prises pour migrer vers des régions qui comportent toujours des risques, parce que nous ne sommes pas à l'abri du risque, quel que soit l'endroit au pays. Mais la probabilité de l'intensité de ces événements météorologiques auront un moindre incidence. Alors, en mettant ces deux éléments ensemble, vous pouvez voir la transition qui s'annonce, mais c'est quelque chose qui s'insinue en vous. Mais à l'avenir, c'est ce à quoi cela ressemblera, le risque lié à la transition vers une empreinte carbone plus faible.

Alexandra : Qui sont les plus vulnérables dans cette conversation? Vous savez que les Canadiens ne vont pas tous vivre cela de la même façon. Vous avez parlé de régions géographiques. Quels sont les autres éléments à prendre en considération?

Andrew : Quand nous parlons de vulnérabilité, un domaine qui est souvent négligé est le marché de la location. Et lorsque nous tentons de déterminer qui sont les locataires, ces derniers sont plus susceptibles d'être en besoins impérieux en matière de logement que les propriétaires individuels. Certaines statistiques que nous avons ici indiqueraient qu'environ 27 % des locataires sont en besoins impérieux en matière de logement. Ces personnes sont moins en contrôle d'être en mesure d'apporter les changements aux logements dans lesquels elles vivent. Ces décisions sont prises par les locateurs et les fournisseurs de logement. Mais nous ne pouvons pas perdre de vue le fait qu'il s'agit d'un groupe qui sera touché davantage par les changements climatiques, parce que les moyens de se rétablir ne sont pas là.

À la SCHL l'année dernière, nous avons eu une conférence à l'interne, à laquelle nous avons invité des personnes du secteur du logement pour parler des groupes vulnérables et des répercussions sur le climat. Parmi les personnes ayant pris la parole, il y avait une certaine Estelle Le Roux Joky. Une des choses qu'elle a dites qui m'a marqué dans mon travail et ma réflexion est que l'adaptation aux changements climatiques ne peut pas être un luxe. Nous devons évaluer le degré auquel les personnes vulnérables seront touchées là où elles vivent et en tenir compte. Nous ne pouvons pas permettre que l'efficacité énergétique et la résilience deviennent un luxe. Les groupes vulnérables ne peuvent se le permettre. Mais nous devons trouver des manières, par l'entremise du gouvernement, par l'entremise du secteur privé, de garantir que le logement sera compatible avec le climat dans l'avenir. Parce que la capacité de se rétablir, c'est beaucoup plus difficile.

Alexandra : Les locataires sont plus susceptibles que les propriétaires d'avoir des besoins impérieux en matière de logement. Selon le recensement de 2021, 20 % des ménages locataires avaient des besoins impérieux en matière de logement, par rapport à seulement 5 % des ménages propriétaires.

Où se situe le parc de logements en ce qui a trait à la résilience dans le contexte des changements climatiques?

Andrew : C'est un domaine qu'il faut explorer et comprendre davantage. Et cela renvoie à la raison pour laquelle nous avons une mission sur les données. Alors, nous avons des données sur le logement, et vous avez des données sur le climat. Mais les deux ne sont pas fusionnées.

Il est important de comprendre les répercussions du réchauffement de la planète sur les comportements et les tendances météorologiques. Pour ce faire, pour bâtir des modèles, vous devez avoir des données sur la compréhension de l'état actuel du parc de logements. En quoi consiste-t-il? Dans quelle mesure sera-t-il résilient? Vous devez ensuite avoir des données pour comprendre les répercussions des niveaux d'eau. Et en fonction des quantités de pluie, à quel moment les niveaux d'eau sortiront-ils des rivières? Atteindront-ils un point où ils auront des répercussions, genre, à des centaines de mètres des rivages? Un kilomètre? Alors c'est un domaine où nous avons l'impression qu'il y a un manque de données. Et c'est là que les données doivent jouer ce rôle pour aider à éduquer tous les intervenants dans le système à propos des risques qu'ils courent, de sorte qu'ils puissent prendre ces décisions sur la meilleure façon d'adapter le logement dans lequel ils vivent aux risques existants.

Alexandra : Quelle est l'incidence de la conception de notre environnement bâti, des maisons dans lesquelles nous vivons dans nos quartiers, des routes sur lesquelles nous conduisons, quelle est leur incidence sur les changements climatiques?

Andrew : J'aime la façon dont vous avez formulé cette question, parce qu'elle fait appel à la collectivité. Toutes ces choses ensemble forment une collectivité et l'habitation en fait partie. Alors quand vous pensez à ce que nous devons faire, nous devons réfléchir aux endroits où installer nos maisons pour permettre un mode de vie dans lequel nous pouvons produire moins de carbone. Ce qui signifie que vous dépendez moins des voitures, que vous pouvez marcher pour vous rendre à divers endroits, que vous pouvez… vous déplacer à vélo, que vous pouvez utiliser le transport en commun. Vous pouvez aussi tenir compte de la densité dans cette équation. Plus la région est dense, moins il faut utiliser d'espaces verts et qu'en soit, cela entraîne une meilleure qualité de vie, une meilleure vie communautaire, des répercussions sur la santé mentale. Pensons aussi à l'entretien et aux réparations des routes. Tout cela est réduit, et vous créez ce genre de collectivités où vous pouvez avoir l'abordabilité grâce à la densité et des logements compatibles avec le climat.

Alexandra : Résoudre la crise climatique pourrait nous obliger à revoir une partie de tout ce que nous tenons pour acquis. La pandémie de la COVID-19 nous a obligés à repenser de nombreuses hypothèses sur le travail, et de nombreuses personnes se sont retrouvées à télétravailler pour se protéger et pour protéger les autres.

Un rapport de 2021 a exploré les implications environnementales du télétravail, en demandant ce qui arriverait si tous les Canadiens qui quittés habituellement leurs maisons pour aller travailler dans des emplois pouvant être effectués à domicile, commençaient à télétravailler. Il serait fort probable que l'utilisation des transports en commun, la congestion routière et les émissions de gaz à effet de serre chuteraient. Mais de quelle ampleur serait cette baisse? Les auteurs de l'enquête ont déterminé que la baisse des déplacements quotidiens pour aller travailler et la baisse de l'utilisation des transports en commun qui en résulterait pourrait réduire les émissions de gaz à effet de serre d'environ 8,6 mégatonnes d'équivalent CO2 par an, soit 11% des émissions directes provenant des activités de transport des ménages pour 2015.

La crise climatique et la crise du logement sont à l'évidence toutes les deux très complexes. Est-il possible d'aborder ces deux enjeux de front? Ou est-ce que vous devez choisir d'avoir un logement abordable ou choisir d'avoir un climat viable, mais pas les deux?

Andrew : Vous pouvez avoir les deux. Et, c'est là qu'il faut remettre en question la pensée conventionnelle. Et je travaille à partir d'un concept dont notre agent en chef du climat, Steven Mennill, parle depuis un certain temps. Et il s'agit d'une fausse dichotomie que de prétendre que ces deux concepts s'opposent, de prétendre que l'abordabilité et le logement compatible avec le climat sont en contradiction.

Le premier point principal ici concerne la densité. Quand vous avez du logement dense, cela peut créer l'abordabilité, mais cela a aussi des effets bénéfiques sur le climat. Les gens utilisent moins la voiture. Ils peuvent avoir une empreinte carbone plus faible, parce qu'ils disposent de plus de commodités dont ils ont besoin pour vivre… il y en a partout autour de vous. Alors c'est le premier point entourant la fausse dichotomie, et la densité est le lien principal pour les deux.

Le deuxième point clé ici est de réfléchir aux coûts, mais à un moment donné dans le temps. Nous pensons souvent seulement à ce qui touche à notre porte-feuille aujourd'hui. Nous ne réfléchissons pas à l'avenir. Nous avons tendance à réfléchir à propos de la rentabilité, genre, combien de temps faudra-t-il pour rentrer dans mon argent? Mais nous réfléchissons rarement au coût du cycle de vie. Alors, réfléchissez au coût pour les gouvernements et les municipalités attribuable aux changements climatiques s'ils ne font pas des choses qui auront des répercussions positives sur le climat. Pensez au coût des soins de santé si nous vivons dans un monde où vous pourriez avoir plus de problèmes de santé en raison des changements climatiques.

Pensez au coût que vous payez aujourd'hui pour des assurances sans prendre aucune mesure pour rendre votre maison plus résiliente ou, collectivement, en tant que société, sans prendre de mesures pour stopper le réchauffement de la planète et aux répercussions que cela peut avoir sur les événements météorologiques catastrophiques. Et par conséquent, aux dommages que subiront les endroits où vous vivez.

Pensez aussi aux taux de location et à leurs répercussions éventuelles au fil du temps, en raison des changements climatiques. Et un autre élément qui, je l'espère, commence à se développer est celui de la demande. Et à mesure que les personnes deviennent plus renseignées et plus sensibilisées, elles vont commencer à exiger ces types de produits dans leurs maisons. Et cela entraîne un effet boule de neige sur ce qui commence à être produit. Alors ce que nous croyons utile aujourd'hui pourrait ne pas l'être pour la prochaine génération. Et cette génération, étant concentrée davantage sur le climat et sur sa compréhension et possédant plus d'outils et de ressources pour comprendre les répercussions qu'il aura sur leurs vies, exigera un changement dans le type d'habitation dans lequel ils vivent.

Alexandra : La prochaine génération serait-elle plus consciente de son incidence sur l'environnement? Une diffusion de 2022 a révélé que 5 % des personnes âgées de 15 à 30 ans faisaient des dons à des organisations environnementales, plus que tout autre groupe d'âge.

J'ai l'impression que les changements climatiques sont parfois un enjeu qui est simplement trop important pour qu'une seule personne ait l'impression de pouvoir y faire quelque chose et d'apporter un changement quelconque.

Y a-t-il des moyens par lesquels les gens qui nous écoutent chez eux dans leurs maisons, leurs appartements ou leurs copropriétés, où quel que soit l'endroit où ils vivent, pour qu'ils puissent faire une différence positive?

Andrew : Vous avez raison. Cela peut sembler un défi de taille et il est difficile de trouver par où commencer. Je crois que la première chose à faire est de commencer à nous renseigner sur notre environnement. Et je parle d'être renseigné à propos des types de risques… Parlons d'abord des risques physiques. Alors, sur le plan de l'endroit où vous vivez, le fait de comprendre quel type de condition météorologique aura des répercussions sur votre logement, analyser la condition de votre maison. Lorsque vous planifiez et envisagez des améliorations, parlez aux professionnels à propos de l'efficacité énergétique, des types de matériaux que vous pouvez utiliser dans votre maison.

Le dernier point serait d'utiliser des outils qui peuvent contribuer à vous renseigner sur votre empreinte carbone, de sorte que vous puissiez voir de quelle façon vous contribuez aux changements climatiques. Et vous pouvez ensuite utiliser ces renseignements pour vous aider à prendre des décisions sur votre manière de contribuer à réduire les effets sur les changements climatiques.

Alexandra : En ce qui concerne les émissions de gaz à effet de serre par les ménages, environ 40 % des émissions canadiennes résultaient de la consommation et de l'utilisation de biens et de services des ménages canadiens, en 2018.

Comment faire pour commencer à réfléchir à adapter sa maison aux changements climatiques?

Andrew : C'est une grande question, mais il y a un plan à suivre pour être en mesure de le faire. La première chose est de reconnaître que chaque habitation est différente. L'âge, les technologies que l'on y trouve… Aussi, où nous sommes situés au pays, le climat touche différentes régions du pays différemment.

Alors, pour commencer, l'une des choses que je peux proposer est de faire des recherches sur les groupes qui diffusent des publications sur la façon de trouver l'efficacité énergétique et la résilience climatique.

Une organisation qui propose des documents intéressants est le Centre Intact d'adaptation au climat. Alors, si vous cherchez des manières de réduire les risques d'inondation, réduire les risques de feu incontrôlé, ils ont des publications que vous pouvez utiliser pour voir ce que vous pourriez faire dans votre maison.

Un autre endroit que vous pouvez consulter pour entreprendre votre réflexion à propos de l'efficacité énergétique et de la résilience est la subvention canadienne pour des maisons plus vertes de Ressources Naturelles Canada. Vous passez alors par un processus pour obtenir une inspection d'un guide de Ressources Naturelles qui peut vous aider à adapter votre maison. Il y a aussi une source de financement liée à cette subvention, qui s'appelle le Programme de prêts pour des maisons plus vertes, qui peut vous aider à prendre les décisions et vous aider avec le financement.

Nos produits de prêt hypothécaire et d'assurances sont d'autres produits et endroits que vous pouvez consulter pour trouver des renseignements. Nous avons un programme Eco Plus qui est conçu à l'intention des propriétaires de maison. Nous avons un produit pour les propriétaires d'immeubles résidentiels collectifs appelé APH Select. Et nous avons aussi le fonds de co-investissement de la SNL. Ce sont là des endroits où vous pouvez aller pour entreprendre votre réflexion à propos des décisions et des choix que vous pouvez faire pour rendre votre maison, votre résidence, plus compatible avec le climat.

Alexandra : En 2018, plus de 101 000 kilotonnes de CO2 produit par les ménages provenaient des carburants et des lubrifiants. Près de 60 000 kilotonnes provenaient du gaz naturel, du chauffage et d'autres émissions de sources fixes.

Et nous avons parlé un peu du rôle et de l'importance de la recherche et de bonnes données dans la lutte contre la crise des changements climatiques et la crise du logement. Quelles sont les données que nous n'avons pas? Et pourquoi cela est-il important? Pourquoi de bonnes données sont-elles importantes ici?

Andrew : Les bonnes données sont importantes pour tous les intervenants du système de logement. Et pour donner quelques exemples, elles sont importantes pour le consommateur qui souhaite acquérir une maison. Pensez aux acheteurs d'une première maison qui veulent comprendre le risque d'inondation pour cet immense investissement qu'ils vont faire. Où peuvent-ils se tourner pour trouver des renseignements sur ce risque d'inondation?

Cela commence par les producteurs et les constructeurs pour comprendre les technologies qui existent et leur avantage. Les données profitent aux acteurs sur le plan financier, pour comprendre, vous savez, quand ils vont émettre des primes d'assurance ou prêter pour comprendre le risque supplémentaire qui vient d'être ajouté dans le système en vue de les aider à prendre des décisions efficaces.

Elles profitent aussi aux gouvernements. Pour faciliter l'élaboration de politiques publiques, il faut disposer de données. Il faut comprendre autant que possible le parc de logements actuel, les nouvelles technologies pour élaborer ces stratégies afin d'avoir une empreinte carbone plus faible.

Alexandra : Avez-vous des publications qui seront diffusées prochainement à ce sujet sur lesquelles vous aimeriez attirer l'attention de notre auditoire?

Andrew : Oui, il y a deux recherches produites qui sont réellement intéressantes.

Une porte sur les solutions en matière d'assurance. Elle examine la manière dont les pays s'y prennent pour élaborer des programmes et des produits d'assurance solides. Nous savons que lorsqu'il arrive un événement catastrophique qui entraîne des répercussions dévastatrices sur le logement l'assurance joue un rôle clé. Cette étude contribuera donc à montrer ce que les autres compagnies d'assurance font pour gérer ces risques.

Une autre réalisation très intéressante est le travail que nous avons accompli avec l'industrie pour tenter de comprendre le risque climatique sur le logement. Le travail porte sur les intervenants dans le système, se penche sur le risque climatique de la même manière et en arrive à la conclusion qu'il y a un point en commun qui réunit tous les acteurs du système. Il s'agit des données de la nécessité d'avoir des données fiables pour éclairer la prise de décisions dans le but de lutter contre les changements climatiques et de s'y adapter aujourd'hui et à l'avenir.

Alexandra : Lorsque l'on cherche à prendre une décision éclairée, on en revient toujours aux données! StatCan met à disposition sur son site Web, statcan.gc.ca, de très nombreux renseignements, notamment par le biais de son Portail de statistiques sur le logement. Il est également possible d'obtenir des données sur le logement issues du Recensement de 2021, en visitant la page du recensement sur notre site Web.

Pour en revenir à la « guerre des thermostats », j'ai trouvé certaines données sur le site Web de StatCan présentant les économies d'énergie réalisables en fonction des températures; je crois que nous allons pouvoir nous appuyer sur ces renseignements, cet hiver, pour choisir une température et peut-être bien qu'un thermostat programmable se profile à l'horizon.

Vous venez d'écouter « Hé-coutez bien! » Un merci spécial à Andrew Defazio et à l'équipe de la SCHL pour leur aide dans la réalisation de cet épisode.

Vous pouvez vous abonner à cette émission à partir de n'importe lequel des sites où vous obtenez habituellement vos balados. Vous y trouverez également la version anglaise de notre émission, intitulée « Eh Sayers ». Si vous avez aimé cette émission, veuillez la noter, la commenter ou vous abonner et peut-être la partager avec un ami. Merci de nous avoir écouté!

Psst! Hé! Vous êtes à la toute fin de l'émission. Félicitations! Et, sincèrement, merci! Nous travaillons très fort pour réaliser cette émission, alors nous sommes ravis que vous l'ayez écoutée au complet. En tant que nouveau membre de notre club super secret et, hum, « entièrement réel  » des Hé-couteurs, j'aimerais vous demander un service. Tous les balados vous demandent de les noter, de les commenter ou de vous y abonner, mais écoutez-moi bien.

Nous sommes un tout nouveau balado. Il y a tout juste un an que nous avons lancé notre tout premier épisode, et nous travaillons incroyablement dur sur notre contenu. Nous essayons d'offrir à la population canadienne un moyen amusant et facile de découvrir les données produites par StatCan. Nous essayons également d'accroître la littératie des données et d'aider les gens à comprendre les forces économiques qui façonnent notre monde. Aujourd'hui, par exemple, nous nous sommes penchés sur la crise climatique et la crise du logement et sur les façons dont elles se répercutent les unes sur l'autre. Et nous pensons que c'est une question vraiment importante à laquelle les Canadiens doivent réfléchir. Vous voici arrivés à la fin de l'émission, et nous espérons que vous trouvez notre mission importante. Si c'est le cas, veuillez partager cet épisode avec une autre personne, un ami, une collègue. Soit une autre personne qui pense qu'il est bon d'en savoir un peu plus sur le monde. Merci d'avance! Nous vous en sommes très reconnaissants.
Quoiqu'il en soit, et comme d'habitude, nous vous remercions infiniment de votre écoute!

Sources 

Société canadienne d'hypothèques et de logement. 2022. « Intégrer les répercussions des changements climatiques aux modèles liés au logement et au financement de l'habitation : une analyse documentaire. » Société canadienne d'hypothèques et de logement. Recherche sur le logementIntégrer les répercussions des changements climatiques aux modèles liés au logement et au financement de l'habitation : une analyse documentaire.

Bureau d'assurance du Canada. 2022. « Ouvrir la voie à la compatibilité climatique  : divulgation et mesures relatives aux risques climatiques dans le contexte du logement au Canada.  » Bureau d'assurance du Canada. Ouvrir la voie à la compatibilité climatique :divulgation et mesures relatives aux risques climatiques dans le contexte du logement au Canada.


Statistique Canada. « Indicateurs de logement, Recensement de 2021. » Statistique Canada, 21 septembre 2022. Indicateurs de logement, Recensement de 2021.

Incidence potentielle du télétravail sur le transport en commun et les émissions de gaz à effet de serre, selon les données de 2015. 22 avril 2021. Infographie. Statistique Canada.

Un portrait des familles au Canada en 2021. 13 juillet 2022. Infographie. Statistique Canada.

Les émissions canadiennes de gaz à effet de serre attribuables aux ménages, 2018. 28 mars 2022. Infographie. Statistique Canada.

Besoins impérieux en matière de logement au Canada. 21 septembre 2022. Infographie. Statistique Canada.

Portrait des jeunes au Canada : Environnement. 7 avril 2022. Infographie. Statistique Canada.

Hé-coutez bien! Épisode 10 - Pourquoi n'avons-nous pas encore mis fin à la pauvreté?

Date de diffusion : le 17 octobre 2022

Nº de catalogue : 45-20-0003
ISSN : 2816-2269

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Graphique de pauvreté (JPG, 1.85 Mo)

À une époque, Statistique Canada ne mesurait pas la pauvreté, pas exactement en tout cas. La pauvreté est complexe et personne ne s'entendait sur la manière de la définir. Par conséquent, même si StatCan mesurait bien le faible revenu et d'autres indicateurs de l'inégalité des revenus, il ne mesurait pas la pauvreté à proprement parler. Ce fut le cas jusqu'en 2018, lorsque la mesure du panier de consommation (MPC) est devenue le seuil de pauvreté officiel du Canada. Cela signifie que le gouvernement se sert maintenant de la MPC pour effectuer le suivi de ses cibles de réduction de la pauvreté.

Quelque chose d'inattendu s'est produit au cours de la pandémie : le taux de pauvreté a diminué en 2020 – et de beaucoup. En une seule année, ce taux a diminué pratiquement autant qu'il l'avait fait au cours des quatre années précédentes.

Mais qu'est-ce qui s'est passé? Le taux de pauvreté continuera-t-il à baisser? Qu'arrivera-t-il s'il atteint zéro? Quelles seraient les répercussions sur les résultats en matière de santé? Sur les études? Sur le bonheur et le bien-être général des gens?

Existe-t-il un moment et un endroit au Canada où le taux de pauvreté a été zéro? La situation la plus proche peut avoir été l'expérimentation Mincome, qui s'est déroulée au Manitoba dans les années 1970. Beaucoup de Canadiens n'ont jamais entendu parler de cette expérimentation de revenu garanti, mais celle-ci offre un aperçu de ce à quoi pourrait ressembler l'élimination de la pauvreté.

Pour en savoir plus, nous avons discuté avec Burton Gustajtis, économiste à Statistique Canada, Evelyn Forget, professeure en économie et en sciences de la santé communautaire à l'Université du Manitoba, et Kevin Milligan, professeur en économie à la Vancouver School of Economics de l'Université de la Colombie-Britannique.

Animatrice

Mélanie Charron

Invités

Burton Gustajtis, Evelyn Forget, Kevin Milligan

Narration

Alexandra Bassa, Fawzi Hemsas, et Chris Houle

Écoutez

Hé-coutez bien! Épisode 10 - Pourquoi n'avons-nous pas encore mis fin à la pauvreté? - Transcription

(Thème)

Mélanie : Bienvenue à « Hé-Coutez bien! », un balado de Statistique Canada où nous faisons connaissance avec les personnes derrière les données et découvrons les histoires qu'elles révèlent. Je suis votre animatrice Mélanie Charron.

À une époque, Statistique Canada ne mesurait pas la pauvreté, pas exactement en tout cas. Il n'existait pas de définition unique de ce que signifiait « la pauvreté » et c'était un sujet complexe; par conséquent, même si Statistique Canada mesurait le faible revenu et d'autres indicateurs, le gouvernement devait établir une définition de la pauvreté pour que Statistique Canada puisse la mesurer. C'est ce qui s'est passé en 2018, lorsque la mesure du panier de consommation (MPC) est devenue le seuil de pauvreté officiel du Canada. C'est la mesure qu'utilise le gouvernement du Canada pour effectuer le suivi de ses cibles de réduction de la pauvreté faisant parti de l'un des objectifs de développement durable canadien d'élimination de la pauvreté.

Quelque chose d'inattendu s'est produit au cours de la pandémie : en 2020, le taux du seuil de pauvreté a diminué; et de beaucoup.

Le taux de pauvreté est passé à 6,4 %, alors qu'il était de 10,3 % en 2019; donc plus d'un tiers. En une seule année, ce taux a diminué pratiquement autant qu'il l'avait fait au cours des quatre années précédentes.

Burton : Je suis Burton Gustajtis. Je suis économiste à Statistique Canada.

En général, la mesure du panier de consommation est une mesure absolue du faible revenu. Elle se fonde sur le coût d'un panier donné de biens et de services correspondant à un niveau de vie modeste de base d'une famille de quatre personnes.

Mélanie : La MPC est donc un panier d'achat rempli des articles dont vous auriez besoin : l'alimentation, l'habillement, les chaussures, le logement, le transport et d'autres articles de première nécessité.

Burton : Chacune de ces composantes, lorsque cela est pertinent, suit des normes établies par des experts de leur domaine particulier. La composante d'alimentation, par exemple, se fonde sur des aliments couramment consommés représentant un régime nutritif. On utilise pour cela le panier de provisions nutritif national de 2019 élaboré par Santé Canada et correspondant au Guide alimentaire canadien le plus récent.

Mélanie : Les experts de Statistique Canada analyse ce qui remplit votre panier d'achats et combien il en coûte, et c'est ce qui devient alors le seuil. Si votre revenu vous permet d'acheter ce panier d'items, vous vivez au-dessus du seuil de pauvreté. À l'inverse, vous êtes sous le seuil.

Que se passe-t-il pour les personnes qui ne correspondent pas nécessairement à la structure d'une famille de quatre?

Burton : Pour les différentes tailles de familles, nous avons recours à une méthodologie d'équivalence, qui est une méthode reconnue à l'échelle internationale d'ajustement des seuils de faible revenu, ainsi que des estimations de revenu pour différentes tailles de familles.

Mélanie : Est-ce comme une équation?

Burton : Oui. On l'appelle la méthode d'équivalence par racine carrée. Au fond, l'idée est que le coût augmente pour une famille, mais à un taux décroissant. Plus la famille est nombreuse, plus le coût du panier est élevé, pas selon un taux linéaire mais à un taux décroissant.

Mélanie : Je comprends. Pour chaque personne supplémentaire, on ne double pas les chiffres.

Burton : Oui, c'est ça! Exactement. Il augmente, mais pas à un coût constant.

Mélanie : Donc, en plus de prendre en compte les différentes tailles des familles pour déterminer différentes tailles de panier, la mesure tient également compte d'une composante régionale.

Burton : Le coût de ce panier est établi dans 53 régions dans l'ensemble des provinces.

Mélanie : Le coût de certains articles peut être différent selon l'endroit où l'on vit. Le même pain, par exemple, peut avoir un prix différent selon que vous l'achetiez à Halifax, ou en région rurale de l'Alberta ou à Montréal. La MPC tient donc compte de l'endroit où vivent les gens.

Le coût du panier change-t-il en fonction de l'inflation?

Burton : Oui, en effet. Il s'agit donc d'une mesure absolue de la pauvreté. Cela signifie que le contenu du panier est une constante pour une année de référence. Notre année de référence actuelle est 2018. Il est ensuite ajusté chaque année pour tenir compte de la variation inflationniste, des changements uniquement relatifs aux prix. Le contenu du panier reste constant, mais son prix est ajusté à l'aide de l'Indice des prix à la consommation.

Mélanie : La MPC est un seuil publié annuellement. Elle fluctue selon l'inflation qui elle est calculée mensuellement. Nous avons consacré un épisode entier à l'inflation et à l'IPC en janvier dernier, intitulé « Pourquoi devriez-vous vous préoccuper de l'inflation? » Écoutez-le pour en apprendre davantage!

La mesure du panier de consommation capture-t-elle pleinement la pauvreté au Canada?

Burton : C'est une bonne question. La pauvreté est un concept complexe. Elle ne se résume pas à un faible revenu comme l'exprime la mesure du panier de consommation. Il s'agit d'une notion multidimensionnelle. Il s'agit également de l'inégalité de la répartition du revenu, de se trouver en dessous du seuil de pauvreté, de se retrouver en situation de pauvreté et d'en sortir. Cela comprend aussi l'accès à l'éducation, des emplois bien rémunérés, l'intégration sociale. Il ne s'agit donc pas seulement d'un faible revenu.

Mélanie : La mesure du panier de consommation est un excellent outil; elle est facile à comprendre, elle tient compte des différences géographiques et permet certaines variations de la taille de la famille; elle est continuellement mise à jour (ou fait l'objet d'un changement de base; qui est le terme technique) par Statistique Canada et ses partenaires d'Emploi et Développement social Canada, afin d'améliorer l'outil et d'en aborder toute éventuelle faiblesse. La mesure du panier de consommation est utile, mais n'est pas la seule façon de faire le suivi de la pauvreté. Statistique Canada dispose d'un tableau de bord de la pauvreté en ligne appelé le Carrefour des dimensions de la pauvreté proposant 12 indicateurs différents que l'on peut consulter pour dresser un tableau plus complet.

Comme je l'ai mentionné au début de l'entrevue, le taux de pauvreté affichait une tendance à la baisse avant la pandémie. De 2015 à 2019, il a diminué, passant de 14,5 % à 10,3 %, ce qui représente une différence de 4,2 points de pourcentage en quatre ans. De façon notable pour 2020, le taux de pauvreté a encore diminué pour passer à 6,4 %, alors qu'il était de 10,3 % en 2019; ce qui représente un écart de 3,9 points de pourcentage, donc plus d'un tiers. En une seule année, ce taux a diminué pratiquement autant qu'il l'avait fait au cours des quatre années précédentes.

En réponse à la pandémie et aux fermetures et restrictions mises en place pour la gérer, le gouvernement du Canada a introduit de nouvelles mesures de soutien du revenu pour les particuliers ainsi que pour les entreprises, comme la Prestation canadienne d'urgence et la Prestation canadienne d'urgence pour les étudiants.

Burton : Les répercussions de la pandémie n'ont pas été ressenties de façon égale par tout le monde et de nombreuses familles ont souffert. Alors que bon nombre de familles n'ont pas souffert d'une perte d'emploi ou de revenu, ces pertes de revenus et d'emploi ont tendu à se concentrer parmi les familles et personnes à faible revenu. Pour faire face à ces pertes d'emploi et de revenu, un certain nombre de Canadiens se sont tournés vers les mesures de soutien du revenu existantes et nouvellement mises en place. Ces programmes ont fourni un soutien du revenu d'environ 82 milliards de dollars à 8,1 millions de familles et de personnes hors famille canadiennes en 2020. Le résultat général de cela a été que le taux de pauvreté a diminué de plus du tiers en 2020. Ces diminutions ont été universelles. Elles se sont appliquées à toutes les provinces, tous les types de famille, tous les groupes démographiques, même si je tiens à souligner que les écarts se sont maintenus entre les populations à risque et celles n'étant généralement pas confrontées à un risque de pauvreté; donc, même si la pauvreté a diminué pour tout le monde, les écarts entre les populations demeurent les mêmes.

Mélanie : Il est important de noter que ces variations du taux de pauvreté ont été attribuables aux soutiens gouvernementaux temporaires et on ne peut pas s'attendre à ce que ces changements soient permanents.

Nous avons entendu parler de la diminution impressionnante du taux de pauvreté et cela a fait réfléchir toute l'équipe du balado. À quoi ressemblerait le Canada si le taux de pauvreté atteignait zéro? Quelles seraient les répercussions sur les résultats en matière de santé? Sur les études? Globalement sur le bonheur et le bien-être des gens?

Cela a vraiment stimulé notre curiosité. Existe-t-il un moment et un endroit au Canada où le taux de pauvreté a été zéro? La situation la plus proche peut avoir été l'expérimentation Mincome. Nous avons voulu en savoir plus et nous avons consulté des experts.

Evelyn : Je m'appelle Evelyn Forget. Je suis professeure au Département des sciences de la santé communautaire de l'Université du Manitoba.

Mélanie : Pourriez-vous nous expliquer ce qu'a été l'expérimentation Mincome?

Evelyn : L'expérimentation Mincome a eu lieu au milieu des années 1970 au Canada, lorsque le gouvernement fédéral et les divers gouvernements provinciaux repensaient un grand nombre des programmes sociaux offerts dans le pays. Il s'agissait d'une expérimentation de revenu annuel garanti. On l'appelait alors une expérimentation de revenu annuel de base. Cela signifiait que tous les participants à l'expérimentation recevaient la promesse de bénéficier d'un certain montant d'argent convenu, s'ils n'avaient pas d'autre source de revenus. S'ils avaient une autre source de revenus, s'ils travaillaient, par exemple, et gagnaient un peu d'argent, la prestation était réduite, mais moins que proportionnellement. Ce revenu garanti agissait donc alors à la fois comme un supplément pour des travailleurs à faible revenu et comme un remplacement d'aide au revenu provinciale. Deux sites au Manitoba ont été choisis pour participer à l'expérimentation : Winnipeg et une petite ville du nom de Dauphin au Manitoba.

Mélanie : Les familles ont reçu de l'argent pendant trois ans, de 1975 à 1978, et l'un des objectifs était d'évaluer les répercussions de ce revenu annuel garanti sur le comportement de travail des bénéficiaires, afin de vérifier la théorie selon laquelle si l'on donne de l'argent à des gens, ils n'ont pas la même motivation pour travailler et ils réduisent leurs heures de travail voire abandonnent leur emploi.

Quels ont été les résultats de cette expérimentation?

Evelyn : Au cours des années 1980, plusieurs économistes de l'Université du Manitoba ont examiné les résultats du marché du travail : Derek Hum et Wayne Simpson. Ils ont découvert ce qui a été révélé par de nombreuses autres expérimentations de revenu de base et de revenu garanti : il n'y avait pas vraiment de grande répercussion sur le marché du travail; les personnes qui travaillaient avant l'expérimentation ont continué à travailler à peu de choses près. Les personnes qui ne travaillaient pas avant n'ont, en grande partie, pas commencé à travailler et n'ont pas arrêté. Donc, il n'y a pas eu de grand changement dans la participation au marché du travail du fait de l'expérimentation du revenu de base ou de l'expérimentation de revenu annuel garanti.

Mélanie : Il y a cependant eu deux exceptions notables.

Evelyn : En effet, deux groupes de personnes ont travaillé moins au cours de l'expérimentation. L'un de ces groupes était constitué de femmes vivant une première maternité. Si on réfléchit à la situation dans les années 1970. Les congés de maternité n'étaient pas ce qu'ils sont maintenant. Le congé parental d'un an n'existait pas et, la plupart du temps, les femmes avaient la garantie de quatre semaines de congé lorsqu'elles accouchaient. Un grand nombre de jeunes mères trouvaient que c'était une réponse plutôt dérisoire pour un accouchement. Je pense que, d'une manière prévisible, bon nombre de ces familles ont utilisé la prestation Mincome pour s'offrir des congés parentaux plus longs. L'autre groupe de personnes ayant moins travaillé a été, et les termes utilisés ici s'avèrent vraiment très importants... Les termes employés dans le rapport étaient « young, unattached males », c'est-à-dire, les jeunes hommes n'ayant pas formé de famille. Ils n'étaient pas mariés, ils ne vivaient pas dans une relation engagée, ils n'avaient pas d'enfants et ils travaillaient moins. Cela a semblé alimenter de nombreux préjugés que les gens avaient, de nombreuses inquiétudes que les gens avaient en matière de revenu garanti. Ce que j'ai pu faire a été de retourner pour retrouver certains des dossiers scolaires de cette période. L'un des aspects que j'ai montrés est qu'il y a eu une jolie petite bulle de taux de diplomation d'études secondaires exactement pendant l'expérimentation Mincome. Cela signifiait que les personnes qui n'auraient probablement pas terminé leurs études secondaires ont pu les terminer, parce que leurs familles ont reçu l'aide Mincome.

Mélanie : Les gens ont pensé que ces jeunes hommes faisaient ce que tout le monde craignait : utiliser l'argent à d'autres fin qu'aux besoins essentiels, mais les constats d'Evelyn suggèrent que ce qui a pu se passer en fait est que les jeunes hommes, qui auraient abandonné leurs études secondaires pour aider à soutenir leurs familles, ont en fait ainsi eu l'occasion de terminer leurs études et d'obtenir leur diplôme.

Est-ce que l'expérimentation a eu une incidence sur le type d'emploi des gens?

Evelyn : Eh bien, je n'ai pas de données explorant spécifiquement les types d'emplois qu'occupaient ces personnes. Je dispose en revanche d'un grand nombre de rapports anecdotiques de gens ayant participé à l'expérimentation. Donc, j'ai pu, par exemple, parler aux gens ayant saisi l'occasion de maintenir les activités d'une petite entreprise ou de fonder de petites entreprises. J'ai trouvé que c'était un résultat vraiment intéressant. Une femme de Dauphin à qui j'ai parlé avait ouvert une petite boutique de disques vendant des tourne-disques et des disques au cours de cette période. Elle m'a confié se souvenir de la période Mincome comme d'une période où tout le monde avait un peu d'argent dans les poches. Mais il y avait beaucoup d'histoires de personnes utilisant l'argent de Mincome pour investir dans de petites entreprises déjà existantes. Un grand nombre de personnes à Dauphin, par exemple, étaient des agriculteurs ou avaient un lien d'une manière ou d'une autre avec l'agriculture. Mincome a donc stabilisé leurs revenus et leur a permis d'investir dans du nouveau matériel pour établir leurs entreprises.

Mélanie : En termes de santé, est-ce que cela a eu une incidence sur les gens, sur le plan de la santé physique ou mentale?

Evelyn : L'une des raisons pour lesquelles je suis retournée explorer les dossiers de Mincome était de savoir si la santé des gens s'était améliorée. J'étais particulièrement intéressée par la santé mentale, mais également par tous les aspects de la santé. J'ai été très chanceuse en fait, car le Manitoba venait d'adopter l'assurance-maladie universelle juste avant le début de l'expérimentation. J'ai donc pu faire le suivi de certains participants dans les dossiers du régime d'assurance-maladie et examiner ce qui était arrivé à leur santé. J'ai donc pu comparer les personnes ayant participé à l'expérimentation avec un groupe correspondant de personnes de même âge et de même sexe vivant dans des types d'endroits similaires n'ayant pas bénéficié de ce soutien du revenu. J'ai pu montrer que les taux d'hospitalisation ont diminué de façon relativement substantielle au cours de l'expérimentation. Globalement, le taux d'hospitalisation a diminué d'environ 8,5 %. C'est un constat relativement spectaculaire; une grosse réduction des taux d'hospitalisation. Lorsque j'ai examiné les choses d'un peu plus près pour savoir pourquoi les taux d'hospitalisation avaient diminué, deux catégories se sont vraiment distinguées : d'abord les accidents et les blessures; c'est une vaste catégorie qui comprend tous les types d'admissions en soins hospitaliers de courte durée. Vous savez, les personnes ayant eu des accidents de la route, des accidents de tout genre, etc. Mais l'autre catégorie était la santé mentale. Il y a eu une grosse réduction des hospitalisations associées à la santé mentale. Cela a été l'un des gros constats, je pense, au cours de cette expérimentation; cela a été sans aucun doute un résultat intéressant pour une expérimentation de revenu garanti.

Mélanie : Y a-t-il des leçons ou des implications que nous pouvons tirer de cela?

Evelyn : Je pense que nous trouvons des résultats similaires chaque fois que nous faisons des types d'expérimentations similaires. Je pense que la santé des gens s'améliore inévitablement lorsque leur revenu augmente. Je pense que ce n'est pas une surprise. Nous le voyons dans un grand nombre de types de programmes différents. Je pense que l'un des aspects devenant très évidents pour les gens est que la pauvreté entraîne de nombreux coûts dans l'économie et la société. Si on peut faire quelque chose réduisant le taux de pauvreté, cela peut améliorer le niveau de vie non seulement des gens recevant l'argent, mais de tous les gens vivant dans une ville, tous les gens qui vivent ensemble. Je pense donc que ces points sont très positifs. Mais les constats de base, je pense, sont ce que nous voyons chaque fois : que la pauvreté représente un coût. Nous ressentons ce coût et de façon très personnelle, dans notre santé, en termes de bien-être. Si vous donnez de l'argent à des gens, ils le dépensent en majeure partie dans des choses qui améliorent leur qualité de vie et celle de leur famille. Ils investissent dans les études, ils investissent dans un meilleur logement, une meilleure alimentation. Dans un sens, cela n'est pas surprenant.

Les gens qui reçoivent de l'argent lors de périodes de leur vie où ils sont vulnérables peuvent vraiment apporter des changements qui vont influer sur leur santé, sur leur vie pendant de nombreuses années ensuite.

Mélanie : Que se passerait-il si tout le monde vivait au-dessus de ce seuil de la MPC? Est-ce que cela résoudrait le problème? Maintenant, je ne vais pas mentir, (et je veux dire par là l'équipe du balado qui ne sommes définitivement pas des experts) nous nous sommes peut-être un peu emballés avec cette idée.

Nous avons demandé à notre spécialiste de Statistique Canada ce qu'il se passerait si l'on utilisait la mesure du panier de consommation dans un contexte Mincome et il a très aimablement expliqué certains enjeux.

Burton : Il s'agit d'un outil statistique visant à servir parallèlement à un concept de revenu, du fait de l'établissement du revenu disponible, comme les ajustements de type d'occupation et du fait que, comme vous l'avez mentionné, les coûts ne sont pas définis indépendamment pour différentes tailles de familles ou structures. Elle ne peut pas être utilisée de cette façon en vue de l'admissibilité à des programmes ou de versement d'une rémunération minimale ou pour un concept de revenu de base. Il s'agit d'un excellent outil de modélisation, de mesure de la pauvreté et de répartition du revenu, mais elle ne doit pas être considérée comme un outil universel pouvant résoudre tous ces problèmes.

Mélanie : Nous avons voulu en savoir plus sur la pauvreté et sur la raison de sa complexité ainsi que pourquoi la MPC ne devrait pas être utilisée comme outil universel.

Kevin : Je suis Kevin Milligan. Je suis professeur d'économie à la Vancouver School of Economics de l'Université de la Colombie-Britannique.

Mélanie : La mesure du panier de consommation est un excellent outil de production de rapports, mais on ne pourrait pas l'utiliser pour répondre à des besoins comme la PCU.

Kevin : Simplement pour vous donner un exemple, vous savez qu'actuellement un grand nombre de transferts de revenu se fondent sur le revenu familial et le contexte familial. On peut penser à l'Allocation canadienne pour enfants, au crédit pour taxe sur les produits et services, qui réduit le revenu que les Canadiens reçoivent et ce chèque, ce dépôt direct, que bon nombre d'entre nous, vous savez, avons reçu chaque trimestre lorsque nous étions étudiants. Ces programmes se fondent sur le barème de déclaration de revenus et nous venons de déclarer nos revenus en avril 2022. Ces prestations sont toutes ajustées rapidement en juillet 2022 pour les 12 mois entre juillet 2022 et juin 2023. Donc, si vous y réfléchissez, si je perds mon emploi demain, quand sera mise à jour mon Allocation canadienne pour enfants? Quand sera mis à jour mon crédit pour TPS? Tout est fondé sur mes impôts d'avril 2023, donc en juillet 2023, mon chèque sera mis à jour; ce qui peut ne pas être idéal, si mes besoins en revenu sont plus importants dès maintenant? Ce cycle selon lequel les choses se répètent est un gros défi auquel on est confronté. Maintenant, on peut faire valoir qu'il existe peut-être des façons de faire les choses plus rapidement. Nous pourrions ne pas tenir compte des changements lors du cycle de déclaration de revenus et le faire de d'autres façons. Donc, le type de défis auxquels l'on doit faire face est la façon de transmettre en réalité les chèques aux gens en fonction de leur situation actuelle? C'est l'un des nombreux défis auxquels nous sommes confrontés.

Mélanie : La MPC ne tient pas compte de toutes les circonstances, comme la taille d'une famille. Une famille de 4 pourrait compter deux parents et deux enfants ou un parent et trois enfants. Ces deux types de familles ont des besoins très différents. Et ceci, avant même d'ajouter des spécificités tel que des besoins d'accessibilité à ce descriptif. Kevin élabore en disant ce qui suit :

Kevin : Notre système actuel est très fortement fondé sur nos besoins. Donc, si vous avez un handicap, vous avez un type de structure de revenus très différent. Et cela varie même en fonction des handicaps; cela dépend de votre contexte familial et de divers aspects de votre vie. Il existe donc toute une panoplie de programmes gouvernementaux. C'est assez complexe. Ils interagissent souvent maladroitement et ce n'est pas idéal, mais nous devons comprendre que leur raison d'être est qu'il existe une variété de besoins différents. Si nous remplacions entièrement ce panier, ces programmes d'inférence, par un programme universel, un genre de chèque général d'un type ou d'un autre ne dépendant pas des besoins individuels, si vous y réfléchissez, les gens pour qui cela serait le plus néfaste seraient ceux en ayant le plus besoin, car ce chèque universel ne tiendrait pas compte de tous les aspects de leurs besoins. Donc un gros défi dans l'approche du revenu de base est que si on essaie de veiller à ce que les gens ayant les plus gros besoins soient traités équitablement, qu'ils obtiennent le même type de transfert de revenus, on finit en fait par devoir tenir compte de tous les différents types de handicaps, toutes les situations familiales, tous les modèles de revenu et on finit en fait par recréer toute la complexité du système existant. Donc, ce que je sous-entends ici, c'est qu'il n'y a pas de solution magique parfois. Au fond, on pense au revenu comme s'il s'agissait d'une solution magique, que nous pouvons faire table rase de toute la complexité. Ce à quoi je demande à tout le monde de réfléchir est que la raison de cette complexité est que les gens ont des vies complexes. Cela ne veut pas dire que nous ne devrions pas réduire la complexité et essayer d'améliorer les choses, de faciliter les points d'accès pour les Canadiens et Canadiennes à faible revenu afin qu'ils puissent accéder aux prestations. Mais cela sous-entend qu'il n'y a pas de baguette magique ici.

Je n'entamerais cependant pas cette discussion en pensant résoudre le problème en une journée.

Mélanie : Ne vous méprenez pas. Tout ceci n'est pas une critique de la mesure du panier de consommation. C'est un outil conçu à une fin particulière, qui ne fonctionne pas toujours si on l'envisage hors contexte et qu'on l'applique à une nouvelle fin pour laquelle il n'était pas conçu. La mesure du panier de consommation est un excellent outil pour mesurer un aspect clé de la pauvreté, mais elle n'est pas une mesure parfaite pour tous les domaines où des besoins existent dans le pays. Il s'agit seulement d'un indicateur et il en existe bien d'autres.

Quels sont certains des problèmes qui surviennent lorsqu'on utilise une seule mesure pour saisir une notion aussi complexe que la pauvreté?

Mélanie : Quels sont certains des problèmes qui surviennent lorsqu'on utilise une seule mesure pour saisir une notion aussi complexe que la pauvreté?

Kevin : Les diverses mesures capturent différents aspects des choses. Une autre mesure existe appelée la mesure de faible revenu, qui examine la situation d'une famille par rapport à une famille typique, calcule le revenu familial médian au Canada, trace une ligne en fonction de cela pour effectuer des comparaisons. Cette mesure présente parfois un tableau différent, parce qu'elle compare en quelque sorte l'extrémité inférieure avec la moyenne. Ce qui est intéressant au sujet de cette mesure est que, dans les années 1990, le revenu médian d'une famille typique au Canada diminuait en fait. Cela signifiait que la mesure de faible revenu, reliée à ce revenu médian, étant en fait de plus en plus basse chaque année, de sorte qu'il était plus facile de sortir de la pauvreté. Nous avons donc assisté à une diminution des mesures de la pauvreté, des résultats en matière de pauvreté de ce fait, parce qu'il était plus facile de franchir ce seuil. Ça ne semble pourtant pas une bonne chose que le revenu de tout le monde diminue. Le faible revenu diminue à une vitesse légèrement différente de celle du revenu médian. Cela ne semble pas une bonne chose. C'est l'une des raisons pour lesquelles la mesure du panier de consommation dresse un tableau différent. Ce qui est intéressant est qu'elle ne compare pas le niveau inférieur avec le milieu. Donc, selon la situation médiane, la notion de pauvreté change. La MPC montre simplement ce dont on a besoin au Canada en 2022 pour vivre une vie acceptable et donc les gens de Statistique Canada et toutes les tables rondes et les discussions ont permis de créer le panier qui ne dépend pas de la situation du revenu médian. Elle ne fluctue pas de cette façon. Elle est donc un peu plus stable pour cet aspect et est sans doute une mesure de carence. Cela ne veut pas dire que la mesure de faible revenu n'est pas utile, mais je l'utilise simplement comme exemple. C'est une mesure utilisée dans des comparaisons de la pauvreté au niveau international, car ce qui se trouve dans un panier canadien de mesure du panier de consommation a du sens pour le Canada, mais peut-être pas pour l'Italie, ni pour le Japon. Ils auraient un panier de biens différent du fait de différentes cultures, de différentes économies. Les comparaisons internationales tendent donc à se concentrer sur quelque chose comme une mesure de faible revenu, qui compare l'extrémité inférieure avec la moyenne, car c'est quelque chose qui est plus facile à mettre en œuvre pour divers pays.

Mélanie : C'est la raison pour laquelle le Carrefour de la pauvreté de Statistique Canada présente 12 indicateurs différents. Un indicateur ne peut simplement pas dresser le tableau complet par lui-même.

J'ai l'impression d'avoir suivi une sorte de cours intensif en tant qu'analyste subalterne de politiques au cours de cet épisode.

Kevin : Exactement. C'est le type de travail que font constamment un grand nombre de gens à EDSC et au ministère des Finances pour essayer de concevoir ces systèmes de garantie de ressources et cela présente un excellent défi. C'est également très gratifiant, car lorsque l'on pense à ce que nous faisons, nous essayons aux meilleures de nos capacités d'aider des familles qui sont vraiment dans le besoin. J'utilise les enquêtes et produits de Statistique Canada pour faire le meilleur travail possible lorsque nous essayons de concevoir ces programmes; moi, à l'externe comme chercheur, et les fonctionnaires du gouvernement à l'interne. Mais oui, je pense que c'est fascinant parce que c'est si difficile. C'est un vrai défi. Si c'était facile, j'aurais fini à midi et ce serait merveilleux, mais ce sont ces défis et tenter de trouver des manières de les résoudre qui est enrichissant et un défi auquel j'aime travailler.

Mélanie : Il est difficile d'éradiquer la pauvreté, mais cela ne signifie pas que cela ne vaut pas la peine d'essayer. Le Canada dispose d'une stratégie de réduction de la pauvreté reflétant les objectifs liés au développement durable de l'ONU.

Comment l'éradication de la pauvreté pourrait-elle changer la vie d'une personne vivant dans la pauvreté?

Kevin : De deux façons. Je le formulerais en termes de disposer d'un revenu supérieur pour les personnes gagnant un faible revenu; je pense que cela changerait la situation de deux manières. L'une est, je pense, simplement la capacité d'acheter davantage de choses pouvant l'aider à maintenir son bien-être; comme une meilleure alimentation, de meilleures conditions de vie, un habillement adéquat, par exemple. L'autre aspect plus subtil, mais peut-être plus important, est lorsque l'on pense au stress que vit une famille lorsque son revenu n'est pas suffisant, lorsqu'elle ne pense pas que ses enfants puissent faire aussi bien que leurs voisins en termes de participations aux activités scolaires. Des recherches ont démontré que ce type de stress, d'avoir un budget serré, est relativement important pour le bien-être d'une personne ainsi que pour les répercussions à long terme d'une vie de pauvreté. Ce dont les gens se souviennent, s'ils ont grandi dans la pauvreté, est peut-être d'avoir eu faim certains soirs, mais plus souvent, vous savez, c'est la douleur du stress d'avoir eu un budget serré, que cela entraîne un mauvais comportement dans le ménage ou seulement de la honte et de l'embarras à l'école; ces souvenirs et les répercussions réelles de cela sont d'une certaine manière bien plus marquante que de se coucher le ventre vide.

Mélanie : Dans l'un des épisodes de la première saison, « Au bord de l'effondrement », notre invitée, Dre. Kelley, a parlé de l'incidence du stress sur les enfants. Écoutez-le pour en apprendre davantage.

Quel est le coût de ne pas faire de notre mieux pour éradiquer la pauvreté?

Evelyn : Oh, je pense que le coût de la pauvreté est immense dans ce pays. Je pense que si l'on commence à étudier cela, il n'existe pas un seul enjeu social au Canada qui ne soit pas aggravé par la pauvreté. Si l'on considère le système de soins de santé, par exemple en 2010, une étude a été menée sur les hospitalisations, par exemple. Je parle en particulier de ce que l'on appelle les conditions propices aux soins ambulatoires. Il s'agit d'hospitalisations qui surviennent parce que les personnes n'ont pas reçu de soins primaires appropriés. En étudiant ces types d'hospitalisations en particulier, les auteurs ont relevé que 30 à 40 % des hospitalisations découlaient d'un statut socioéconomique inférieur; c'est-à-dire de la pauvreté. Si vous considérez l'éducation, une grande partie du financement de l'éducation est nécessaire pour aider les enfants à suivre lorsqu'ils changent d'école. Certains enfants changent d'établissement scolaire plusieurs fois par an. Pourquoi? L'une des raisons est que les parents ne peuvent plus payer le loyer, alors ils déménagent. On observe alors ce type de mobilité dans les familles et il est alors difficile pour les enfants de suivre; et il est plus difficile pour le système éducatif de payer pour les enfants. Si vous prenez l'exemple de l'incarcération, 80 % des femmes incarcérées le sont pour des délits relatifs à la pauvreté. 80 %! Le coût de l'incarcération est immense dans ce pays. Donc, nous payons pour la pauvreté, nous payons en termes de chaque programme social auquel on peut penser. Il ne s'agit pas seulement de l'argent que nous payons en termes d'assistance sociale provinciale ou d'autres types de programmes. Il s'agit de chaque programme social mis en place pour aider les gens.

Mélanie : Et pour peut-être aborder un point crucial, juste une question à laquelle on ne peut pas répondre : comment mesure-t-on la valeur d'interrompre le cycle de pauvreté pour une famille?

Evelyn : Je pense que c'est votre question rhétorique pour terminer. Oui, en effet, je n'ai pas de réponse à cela. Je n'ai pas de réponse à cela, car je pense que c'est en définitive une question morale. C'est une question d'éthique. Vous savez, dans un sens, je pense que cela amoindrit l'importance du problème. Si je dis que j'en bénéficie, si je ne vis pas, vous savez, à proximité de gens qui ont besoin d'aide et qui n'en reçoivent pas. Nous en tirons tous un bénéfice, je pense, mais nous en bénéficions, je pense, en termes très pratiques et monétaires. Mais nous en bénéficions en particulier, je pense, d'un point de vue social plus vaste en termes de type de cohésion, de type de société au sein de laquelle nous souhaitons vivre.

Mélanie : Si l'on veut en savoir plus sur la mesure du panier de consommation et la façon dont Statistique Canada calcule la pauvreté, que devrions-nous consulter?

Burton : Le Carrefour des dimensions de la pauvreté de Statistique Canada est une excellente ressource pour accéder aux plus récents renseignements sur la mesure du panier de consommation et au travail que nous faisons pour créer les seuils de la mesure du panier de consommation pour les territoires, sur les différents indicateurs de pauvreté relevés dans le document « Une chance pour tous : la première Stratégie canadienne de réduction de la pauvreté ». Donc, je commencerais par là.

Mélanie : Vous venez d'entendre « Hé-Coutez bien! ». Merci à nos invités, Burton Gustajtis, Evelyn Forget et Kevin Milligan, de nous avoir partagé leurs expertises.

Si vous avez aimé cette émission, n'hésitez surtout pas à la noter, à la commenter et à vous y abonner à partir de votre plateforme d'écoute habituelle. Vous y trouverez également la version anglaise de notre émission, intitulée « Eh Sayers ». Merci de votre écoute! À bientôt.

Sources

« Carrefour des dimensions de la pauvreté. » 2018. Statistique Canada. Le 4 décembre, 2018. Carrefour des dimensions de la pauvreté.

Forget, Evelyn L. 2011. "The Town with No Poverty: The Health Effects of a Canadian Guaranteed Annual Income Field Experiment." (disponible en anglais seulement) Canadian Public Policy 37 (3): 283–305 The Town with No Poverty: The Health Effects of a Canadian Guaranteed Annual Income Field Experiment. (disponible en anglais seulement)

« Enquête canadienne sur le revenu, 2020. » 2022. Statistique Canada. Le 23 mars, 2022. Enquête canadienne sur le revenu, 2020

Hé-coutez bien! Épisode 9 - Sylvia Ostry : Les leçons d'une légende

Date de diffusion : le 7 octobre 2022

Nº de catalogue : 45-20-0003
ISSN : 2816-2269

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Graphique de Sylvia Ostry (PNG, 453 ko)

Graphique de Sylvia Ostry

Si c'est la première fois que vous entendez parler de Sylvia Ostry, ouvrez grand les oreilles.

Ostry a été nommée au poste de statisticienne en chef en 1972. Première et seule femme à avoir joué ce rôle au Canada, elle n'y est pas parvenue par un chemin tout tracé. Elle avait certes de l'ambition, mais elle a évolué dans une société où il n'était pas bien vu pour une femme d'avoir une carrière.

Sylvia était également juive. Malgré l'obtention d'un doctorat en économie à l'université de Cambridge, elle s'est vu refuser un poste à l'Organisation des Nations Unies en raison de son sexe. Quoi qu'il en soit, elle a connu une carrière bien remplie : elle a occupé le poste de présidente du Conseil économique du Canada, puis celui d'économiste en chef de l'OCDE. Mais nous ne nous attarderons pas à ses réalisations professionnelles. Nous parlerons plutôt de la manière dont elle a repoussé les limites pour atteindre le succès et devenir une mère et une économiste respectée. Nous verrons comment elle a fait face aux revers et à la discrimination tout en demeurant fidèle à elle-même et en faisant preuve d'une intégrité qui a fait sa renommée.

Nous soulignons le 50e anniversaire de la nomination de Sylvia Ostry au poste de statisticienne en chef. Dans cet épisode du balado « Hé-coutez bien », où vous entendez des entrevues avec ses fils Adam et Jonathan Ostry, nous sommes ravis de vous présenter cette femme remarquable et de vous donner huit conseils inspirés de sa vie.

Animatrice

Mélanie Charron

Invités

Adam Ostry, Jonathan Ostry

Narration

Chris Houle

Écoutez

Hé-coutez bien! Épisode 9 - Sylvia Ostry : Les leçons d'une légende - Transcription

(Intro)

Mélanie : Bienvenue à « Hé-Coutez bien! », un balado de Statistique Canada où nous faisons la connaissance avec les personnes derrière les données et découvrons les histoires qu'elles révèlent. Je suis votre animatrice Mélanie Charron.

En 1972, Sylvia Ostry est devenue la première statisticienne en chef de Statistique Canada, et la seule femme à occuper ce poste jusqu'à ce jour. Il y a 50 ans, le monde était un endroit différent de ce qu'il est aujourd'hui : la NASA lançait son programme de navette spatiale et Le Parrain était à l'affiche dans les salles de cinéma.

Le monde du travail évoluait et les femmes étaient de plus en plus nombreuses à travailler à l'extérieur du foyer. En 1972, 45 % des femmes âgées de 25 à 54 ans faisaient partie de la population active, c'est à dire qu'elles occupaient un emploi ou en cherchaient un1. Bien qu'aujourd'hui, un tel pourcentage puisse nous sembler relativement faible, cela représentait un énorme changement à l'époque. Une décennie plus tôt, en 1962, cette proportion n'était que de 32 %, c'est quand même une augmentation de 40 % en seulement 10 ans.

En 1952, alors que Sylvia était chargée de cours à l'Université McGill, les femmes de sa province natale, le Manitoba, obtiennent le droit d'être membres d'un jury2. En 1965, Sylvia commence à travailler comme directrice de la Division des études spéciales sur la main d'œuvre et de la consultation (3) à Statistique Canada. Alors qu'en 1964, à peine un an auparavant, les femmes obtenaient le droit d'ouvrir un compte bancaire sans la signature de leur mari (4). En 1971, l'année avant que Sylvia ne soit nommée statisticienne en chef, le Manitoba cesse de licencier les employées municipales après leur mariage (5).

Lorsque Sylvia Ostry est nommée à la tête du Conseil économique du Canada, le Globe and Mail se contente d'une annonce au bas de la cinquième page de la section féminine du journal.

Sylvia est décédée en 2020 et pour lui rendre hommage, nous revenons sur sa vie pour essayer d'en tirer quelques leçons.

Les extraits de la voix de Sylvia que vous entendrés, sont tirés d'une entrevue qu'elle a donnée à Bronwyn Bragg et Mary Breen, enregistrée en mai 2008.

Voici huit conseils inspirés de la vie de Sylvia Ostry.

(Carillon)

Mélanie : Conseil numéro un : « Mettez-vous au défi! »

Quand on pense à des gens qui ont mené des vies remarquables, il est difficile d'imaginer qui ils étaient avant de réussir.

Sylvia Ostry était d'origine modeste.

Adam : Je me nomme Adam Ostry. Je suis le fils de Sylvia Ostry. C'était une pionnière, vous savez. Sa propre mère, était une immigrante d'Angleterre et avait obtenu un diplôme de l'école normale de Winnipeg. Sa mère à elle, donc est née à Londres, dans un des quartiers ouvriers les plus emblématiques de la ville dans les années 1890, Tottenham Court road. Elle était véritablement partie de rien et la famille n'avait pas d'argent. La famille elle-même était des immigrés sans sou de la Prusse-Orientale. Donc le grand-père de ma mère provenait de Dyganz aujourd'hui Dyganz en Pologne. Il avait gagné de l'argent avant la crise de 1929, puis il l'avait tout perdu. Il n'a jamais pu véritablement se rétablir par la suite. Ma grand-mère a réussi à devenir institutrice, après avoir suivi les cours de l'école normale à Winnipeg, mais, ça s'est arrêté là. Ma mère et son frère ont été les premiers dans la famille à entreprendre des études supérieures et à obtenir des doctorats universitaires.

Mélanie : Sylvia Ostry s'est mise au défi! Elle était intelligente et travaillait dur et était fermement décidée à se dépasser pour réussir.

Dans ses propres mots.

Sylvia Ostry : Il était très difficile d'entrer à la faculté de médecine à l'Université du Manitoba. C'était une école de médecine de première classe, mais elle couvrait tout l'Ouest canadien. C'était la seule à l'époque et les femmes avaient beaucoup de mal à s'y tailler une place. Je ne me souviens plus combien avaient réussi à le faire depuis le début, pas plus d'une poignée! et comme il était plus difficile d'être juif, alors le fait d'être une femme juive me donnait vraiment le goût de relever le défi. J'avais deux amies au secondaire, très brillantes, et nous avions décidé que nous allions faire notre prémédecine et obtenir les notes les plus élevées dans l'Ouest canadien parce que nous allions nous organiser pour étudier et que nous échangerions nos notes en plus d'obtenir de l'argent et d'embaucher des spécialistes pour nous enseigner, et nous allions y aller une, deux, trois. Et j'ai dit : « S'ils nous refusent l'entrée, nous allons les poursuivre », ce qui semble très étrange pour l'époque, mais j'y tenais beaucoup, et c'est ce que nous avons fait.

Adam : Le talent et l'intelligence, l'intégrité, l'honnêteté, le travail acharné et la discipline; c'étaient les choses qu'elle respectait le plus chez les gens. Vous savez, lorsqu'elle avait l'occasion de l'employer, une de ses expressions préférées, qui qui démontrait d'où elle de la période pendant laquelle elle avait grandi dans les années 1950, était « to goof off », ce qui en anglais veut dire être paresseux! Et à chaque fois que je ne faisais pas mes devoirs ou que je ne travaillais pas, elle m'accusait d'être paresseux. Elle-même, si elle avait le choix entre se détendre et de travailler, elle choisissait invariablement de travailler.

(Carillon)

Mélanie : Conseil numéro deux : « Suivez vos passions, même – ou peut-être même surtout – si elles vous emmènent dans une direction inattendue! »

L'idée d'abandonner a toujours eu mauvaise presse. Avez-vous entendu parler du « piège des coûts irrécupérables »? Essentiellement, c'est la tendance qu'ont les gens à continuer de faire quelque chose parce qu'ils y ont investi beaucoup de temps, d'efforts et d'argent, et ce même si ça ne correspond plus à leurs besoins. Si cela semble être votre situation, peut-être aviez-vous déjà songé utiliser l'abandon stratégique? Et c'est fort probablement ce que ferait Sylvia!

Lors d'une visite auprès de son frère, qui étudiait à l'Université Queens, Sylvia s'est rendu compte, qu'elle préférerait de loin étudier les sciences sociales. Elle avait assisté à des conversations entre les étudiants sur des sujets comme l'art, la politique et l'économie, qui lui avaient semblées bien plus passionnantes que ses études en médecine, et avait donc décidé de se joindre à eux; toutefois, ça voudrait donc dire qu'il lui faudrait abandonner l'école de médecine.

Sylvia : Je me suis beaucoup ennuyée la première année parce qu'on ne parlait de rien d'autre que d'anatomie, de physiologie et de biochimie. Mais cet été-là, je suis allée voir mon frère, qui étudiait à Queens, à Kingston, où j'ai passé l'été. Je me sentais comme sur Mars. Je n'avais jamais rencontré de gens qui lisaient des livres et parlaient d'histoire, et tout ce que j'avais fait, c'était d'étudier. Je suis allée voir le doyen de la faculté de médecine et lui ai dit : « Je me sens vraiment mal, mais je trouve la faculté de médecine si ennuyeuse que je veux la quitter. » Hors de lui, il m'a crié : « C'est exactement à cause de femmes comme vous que nous n'accepterons de femmes à la faculté de médecine, et que nous avions raison de le faire. Vous vous rendez compte que vous empêchez un homme d'y entrer! » Et je lui ai dit : « Je sais, je suis désolée, mais je veux étudier autre chose. » Et il a dit : « C'est faux, vous êtes comme toutes les femmes! Vous abandonnez pour pouvoir aller vous marier. » Je lui ai répondu : « C'est faux, je vais être docteure, mais pas en médecine. » Il a rétorqué : « C'est un mensonge! » Et je suis sortie.

Jonathan : Je m'appelle Jonathan Ostry. Je suis le fils cadet de Sylvia et Bernard Ostry. Au départ, ma mère souhaitait devenir médecin. Il me semble que ce qui l'a poussée dans cette direction, c'est parce que c'était l'objectif le plus difficile, voire impossible, à atteindre, un peu comme ces gens qui souhaitent accomplir un exploit sportif, pas tellement parce que c'est leur véritable passion, mais plutôt pour le plaisir de pouvoir se dire « J'y suis arrivé! » Puis, elle s'est rendu compte, par la suite, que ce n'était vraiment pas le domaine qui l'intéressait le plus. Elle avait simplement choisi cette orientation pour la raison dont je viens de parler. En fait, c'est une très mauvaise raison pour motiver quelqu'un à faire quelque chose pour le restant de ses jours, n'est-ce pas ? C'est comme ça qu'elle a décidé qu'elle voulait se lancer dans l'économie.

Mélanie : Pour Sylvia, le plus important ce n'était pas forcément les cours qu'elle suivait ou son sujet d'étude, c'était plutôt :

Sylvia Ostry : Si je raconte cette histoire, c'est que je voulais surtout apprendre. Je suis allée à McGill, mais je ne voulais pas suivre de cours d'économie, peu m'importait la matière. Mais ce qui s'est passé, c'est qu'on m'a dit : « Suivez des cours d'économie, nous pensons que vous pouvez faire deux années. »

Jonathan: Je n'ai jamais vraiment vu ma mère comme une économiste. Bien sûr elle était économiste de formation. Mais, bon, pour moi, c'était avant tout ma mère! J'ai toujours considéré qu'elle et mon père étaient des gens qui savaient « tout sur tout ».

(Carillon)

Mélanie : Conseil numéro trois : « Refusez d'accepter les limites que d'autres vous imposent! »

Sylvia a été victime de discrimination toute sa vie. Même après l'obtention d'un doctorat, les Nations Unies lui ont refusé un emploi parce qu'elle était une femme.

Sylvia Ostry : Je voulais d'abord devenir économiste du développement, je suis allée aux Nations Unies, doctorat en poche, voir le responsable de tout cela et je lui ai dit : « J'ai toutes les compétences et j'aimerais beaucoup travailler ici ». Il m'a répondu : « Écoutez, autant vous le dire clairement, aucun gouvernement dans les pays en développement n'embauchera une femme! Vous feriez mieux de trouver une autre carrière ». C'est incroyable que les gens puissent dire de telles choses! Mais c'était honnête… et quand je suis allée à McGill… il a fallu que je m'en trouve une autre. Et comme l'économie du travail m'intéressait beaucoup, c'est à cela que j'ai travaillé.

Adam : Ma mère a mené le bon combat, même si elle a eu des déceptions professionnelles. Dans son plan de carrière, vous savez, elle dans les années '70 elle voulait être sous-ministre des Finances, et ensuite elle voulait être nommée gouverneure de la Banque du Canada. Mais vous savez, elle faisait face aux mœurs de son temps, et puis y avait aucune chance qu'une femme soit nommée soit sous-ministre des finances soit gouverneure de la Banque du Canada. Elle en était consciente, on le lui avait dit d'ailleurs. Mais nonobstant tout ça, elle a tiré le maximum de profit de ce que les cartes lui ont offert. Vous savez, il y a une vieille expression qui dit à peu près « Il faut aller au bout du chemin qui s'offre à vous » et le fait demeure qu'elle a tiré le meilleur parti de la « donne » qui lui avait été distribuée. Avant qu'elle rentre à Ottawa, en sortant de l'université, elle avait essayé d'obtenir un poste aux Nations Unies dans le domaine du développement; et elle avait été refusée par les Nations Unies. Mais ça ne l'a pas arrêté. Elle ne s'est pas laissé abattre. Elle n'a pas abandonné lorsqu'elle s'est retrouvée face à ce qui semblait être une impasse. Elle a trouvé sa propre voie pour réussir; elle a refusé d'accepter les limites imposées par les autres et par les mœurs de son temps.

Jonathan : À l'instar des chats de la légende, elle a prouvé qu'elle aussi, en tant qu'économiste, avait neuf vies! Elle ne s'est pas contentée de passer de la médecine à l'économie. Elle a fait un doctorat à Cambridge sur un sujet qui serait considéré aujourd'hui comme plutôt incompréhensible. Sa thèse portait sur la planification économique de type soviétique dans la nouvelle Inde indépendante. Elle n'a travaillé ni sur l'économie marxiste, ni sur l'économie du développement, ni sur la planification soviétique. Elle a ensuite travaillé à l'Oxford Institute of Statistics and Economics et a également fait beaucoup d'autres choses. Elle est finalement devenue économiste du travail, avant d'être considérée comme une spécialiste du marché du travail canadien et, plus généralement, de l'ensemble des enjeux de l'économie canadienne. Elle a été présidente du Conseil économique du Canada. Elle s'est également spécialisée en matière réglementaire en microéconomie, alors qu'elle occupait le poste de sous-ministre de la Consommation et des Affaires commerciales. Elle a enfin été reconnue officiellement comme experte des échanges commerciaux internationaux, ce qui constitue un sujet totalement différent. On peut vraiment dire qu'elle a passé sa carrière à se réinventer de toutes sortes de façons. Elle avait suffisamment de confiance en elle et en ses atouts pour savoir qu'elle pouvait le faire.

(Carillon)

Mélanie : Conseil numéro quatre : « Face à un problème, essayez de voir les choses autrement! »

Avant que Sylvia n'occupe le poste de directrice de la Division des études spéciales sur la main-d'œuvre et de la consultation, Statistique Canada étudiait l'offre de main-d'œuvre, en s'intéressant au nombre d'hommes occupant un emploi et à celui de ceux qui étaient disponibles pour en occuper un.

Sylvia Ostry: J'ai adoré mon premier emploi à Statistique Canada; on appelait ça les études spéciales sur la main-d'œuvre mais c'était fort intéressant, car on me laissait joindre des questionnaires distincts à l'enquête auprès des ménages pour me permettre d'obtenir des renseignements sur toute une gamme de choses que personne d'autre n'avait et que nous produisions. Cela me permettait d'embaucher des universitaires et nous produisions des études incroyables. Alors j'adorais ce travail. C'était vraiment fascinant. Et, en fait, certaines de mes premières publications ont été très importantes aux États-Unis. Nous concevions de nouvelles façons de voir les choses, des façons de faire. Je voulais développer des mesures non seulement de l'offre, mais également de la demande.

Mélanie : Elle souhaitait aborder ce sujet sous un autre angle. Son idée était d'examiner la participation des travailleurs au marché du travail, les raisons pour lesquelles quelqu'un pouvait choisir de ne pas intégrer la population active et de ne pas trouver d'emploi, et le fait qu'une telle personne pourrait ou non souhaiter travailler dans des conditions différentes.

Les études sur la main-d'œuvre ont donné à Sylvia les ressources nécessaires pour étudier de plus près la main-d'œuvre canadienne, comme cela n'avait jamais été fait auparavant. Statistique Canada mesurait bien l'offre de main-d'œuvre depuis longtemps, mais le terme main-d'œuvre (manpower, en anglais) était pris dans un sens un peu trop littéral et n'intégrait que les hommes. Sylvia avait compris l'intérêt d'élargir les recherches, en incluant d'autres groupes dans de nouvelles mesures. Elle a réinventé la façon dont nous envisagions des concepts comme le travail et la main-d'œuvre, en élargissant l'analyse aussi bien aux hommes qu'aux femmes. Elle a étudié la présence des femmes sur le marché du travail et, plus particulièrement, la question de savoir ce qui poussait une femme à choisir ou non de travailler, ainsi que l'effet de facteurs tels que l'éducation, les revenus du mari et la présence d'enfants sur cette décision. C'était un vaste sujet et un projet ambitieux, à une époque où, selon les mots de l'économiste Joan Mc Farland, « La plupart des analyses économiques […] ignoraient complètement le rôle des femmes dans l'économie. »

Sylvia Ostry a étudié la productivité d'une personne tout au long de sa vie et la production perdue en raison de son décès prématuré ou de son départ à la retraite. Son étude portait sur la présence sur le marché du travail et sur les gains des agents économiques masculins et féminins, ce qui en faisait la première étude canadienne de ce type.

Sylvia a remis en cause un certain nombre d'acquis de l'économie traditionnelle, changeant la perspective habituelle et s'intéressant non seulement aux hommes, mais également aux femmes, accroissant ainsi notre compréhension de l'économie du travail.

(Carillon)

Mélanie : Conseil numéro cinq : « Vivez le succès selon votre propre définition! »

Sylvia Ostry elle-même était mère et elle avait aussi une carrière. Une situation qui lui valait parfois d'être jugée par les autres.

Sylvia : Eh bien… à Ottawa, on m'a dit que beaucoup de femmes étaient scandalisées et horrifiées que je travaille. Elles trouvaient cela tout simplement épouvantable. J'avais des enfants et je travaillais à temps plein. Elles ne me l'ont jamais dit, mais bien des gens m'en ont parlé. La seule fois où cela a été dit ouvertement, c'est quand on m'a nommée à l'OCDE, en 1979. On m'a raconté que l'épouse de l'ambassadeur avait dit à son mari que je n'avais pas le droit d'entrer à l'ambassade parce que je lui faisais tellement honte qu'il lui était impossible de m'accueillir. J'étais mariée, j'avais deux enfants, comment pouvais-je me retrouver dans un endroit comme l'OCDE et en être la directrice! L'économiste en chef! Et il était tout simplement scandaleux pour une femme de travailler.

Jonathan : Vous savez, lorsque ma mère a intégré l'OCDE en tant qu'économiste en chef, elle a établi un certain nombre de premières, peut-être encore plus nombreuses que lorsqu'elle est devenue statisticienne en chef, parce que, dans ce dernier cas, c'était au Canada, son pays. Il est vrai qu'on peut estimer qu'il est toujours plus facile de « s'élever » dans son propre pays. Mais, quand elle a obtenu le poste de chef économiste à l'OCDE, la plupart des gens à Paris étaient absolument incrédules. Tout d'abord, parce que, depuis toujours, ce poste était occupé par un Européen, parfois par un Canadien ou un Américain, mais vous savez, le Canada était un peu considéré comme « un coin perdu du bout du monde » et tout le monde se demandait ce que cette Canadienne venait faire à Paris. Deuxièmement, et cela a beaucoup joué, c'était un milieu assez misogyne. Je suis certain que les oreilles de ma mère ont dû siffler lorsque les gens chuchotaient dans les couloirs de l'organisation, faisant des remarques sur sa présence à ce poste : « Elle vient du Canada et c'est une femme! Elle n'est pas des nôtres! ». En plus, le fait qu'elle était juive a encore probablement contribué aux interrogations. Elle ne faisait vraiment pas « partie du club », on peut donc véritablement parler de « sortir de sa zone de comfort ».

Mélanie : Chacun décide pour soi de ce qu'est le succès. Et si vous souhaitez suivre les traces de Sylvia et définir le succès comme le fait d'élever deux enfants et d'être l'économiste en chef de l'OCDE, allez-y! Grand bien vous fasse, vous ne manquez pas de confiance en vous!

(Carillon)

Mélanie : Conseil numéro six : « Quand les préjugés ferment une porte, enfoncez-la! »

Vous connaissez peut-être l'expression « quand une porte se ferme, une autre s'ouvre ». C'est peut-être vrai. Mais il est également vrai que les préjugés ferment parfois des portes. Et quand ces portes se ferment, n'hésitez pas à les enfoncer complètement. Cette maxime pourrait s'appliquer non seulement au sens figuré, mais également au sens propre, à de nombreux moments de la vie de Sylvia.

Sylvia Ostry : Le moment le plus drôle, c'est quand Flo Byrd a tenu sa première réunion pour discuter de la commission royale sur la situation de la femme. La rencontre avait lieu dans un club très chic d'Ottawa et j'allais dîner avec elle. On m'a stoppée à l'entrée et j'ai dit : « Je suis désolée, j'ai un dîner de travail avec la sénatrice Bird. » On m'a dit : « Vous ne pouvez pas entrer par cette porte-ci. Ce n'est pas permis parce que vous êtes une femme. Vous devez entrer par la porte de côté. » J'ai donc éclaté de rire et dit : « Nous avons bien raison de tenir une réunion sur une commission royale sur la situation de la femme, et je vais m'assurer qu'on ferme cet endroit à moins que vous m'ouvriez cette porte d'entrée. »

(Carillon)

Mélanie : Conseil numéro sept : « Entourez-vous de personnes qui vous aiment et vous soutiennent! »

Comme vous le savez, les détracteurs auront toujours des reproches à formuler. Mais, inspirez-vous de la vie de Sylvia, s'entourer de gens qui vous aiment et vous appuient fait toute la différence. Pour Sylvia, cet allié c'était Bernard, son mari.

Sylvia Ostry : Mon mari était l'homme le plus extraordinaire. Je le connaissais depuis que j'avais 5 ans.

Adam : Elle n'aurait pas survécu sans mon père. Ma mère a eu la chance d'avoir mon père comme mari. Vous savez, mon père aimait ma mère, il adorait ma mère. Il aurait embrassé le sol sur lequel elle marchait, et pour toutes sortes de raisons. Ma mère n'a jamais perdu de vue à quel point son mari lui était dévoué! Et, mon frère et moi avons eu l'immense privilège d'avoir grandi et d'avoir été élevés par deux personnes qui s'aimaient autant que notre père et notre mère. Alors chacun exprime son amour pour l'autre d'une manière différente. Pour mon père par exemple, la collection de meubles et d'objets d'art de styles Art nouveau et Art déco, qu'on peut maintenant voir au Musée royal de l'Ontario à Toronto, témoigne en fait de l'amour de mon père pour ma mère. Lui-même n'était pas néces sairement spécialement intéressé par cette période mais il a bâti cette collection, parce qu'elle, elle l'était. Intellectuellement, c'était elle qui s'intéressait à la période de la république de Weimar et de l'Art déco français. Cette période la captivait sur le plan politique et elle se passionnait pour les troubles de la période des années '20 et d'30 en Europe, notamment en France et en Allemagne. Et c'est pour ça que mon père a décidé de l'entourer d'objets incarnant cette époque. C'était pour lui un moyen de lui manifester son amour. Tout au long de sa vie, ma mère n'a pris aucune grande décision quant à sa carrière sans d'abord en parler avec mon père. Quand on regarde la carrière de ma mère, je suis convaincu qu'il n'y a pas beaucoup d'autres exemples de mari renonçant volontairement à des occasions de carrière pour lui-même , afin de privilégier l'évolution professionnelle de son épouse.

Sylvia Ostry : J'avais été nommée présidente du Conseil économique et j'étais au bureau un matin quand l'adjoint du directeur général m'a téléphoné pour me dire : « Le chef du département des Affaires économiques prend sa retraite. C'est avec beaucoup d'intérêt que nous souhaiterions vous interviewer. Le directeur général aimerait savoir si vous pourriez venir à Paris. » J'étais stupéfaite et lui ai dit : « Eh bien… je pourrais vous rappeler vendredi. » C'était un mercredi, et en rentrant à la maison ce soir-là, j'ai dit à mon mari : « J'ai eu un appel fou de Paris » et le lui ai décrit en disant « Par souci de politesse, j'attendrai jusqu'à vendredi, puis je leur dirai non », et mon mari m'a dit « es-tu folle? » Je lui ai demandé : « Que veux-tu dire? » Ce à quoi il m'a répondu : « On ne t'offrira jamais un autre emploi aussi crucial que celui-là au cours de ta vie. » Il avait raison. C'était très important à l'époque. « Que veux-tu que je fasse? » lui ai-je demandé. « Je ne peux pas le faire. » Et lui de répondre : « Oui, tu le peux, tu vas y aller et je vais trouver une solution. » C'est ainsi qu'il était. Je n'en serais pas là sans lui.

(Carillon)

Mélanie : Conseil numéro huit : « Travaillez fort! »

Notre dernier conseil nous vient directement de Sylvia Ostry.

Sylvia : Il faut donner le meilleur de soi-même, faire preuve de discipline et travailler fort. Je sais que ça sent le réchauffé, mais c'est ce que j'ai fait. Je n'ai jamais pensé au pouvoir, que ce soit en cherchant un emploi ou quoi que ce soit. Je voulais simplement faire mieux que quiconque. Et j'étais déjà comme ça en première année d'école.

Adam : Sylvia Ostry était un être humain compliqué. Elle était complexe. Elle était très intelligente; elle était très douée, elle était motivée par son besoin de travailler; elle exprimait son identité par le biais de son travail et elle a consacré sa vie au travail. Elle était totalement intègre et était d'une honnêteté absolue, d'abord envers elle- même, mais elle n'en exigeait pas moins des autres, à commencer par ses enfants. En tant que mère, elle m'a appris, ou en tout cas a essayé de m'apprendre, et ce, dès mon plus jeune âge, la discipline du travail et la nécessité d'être honnête avec soi-même sur ce que qu'on peut et ne peut pas faire. Elle croyait fermement qu'il fallait essayer d'être le meilleur possible et de s'y efforcer en permanence. Elle avait toujours une expression qu'elle utilisait avec moi, chaque fois que je renonçais et que je disais que je ne pouvais pas, que j'étais tanné, que je n'y arriverais pas. Ça la contrariait énormément et elle me disait que c'est parce que je ne faisais pas suffisamment d'efforts que je ne réussissais pas. Elle employait l'expression en anglais : « Your reach should always exceed your grasp! » « Ton but doit être hors d'atteinte et rester hors d'atteinte! » Elle-même a vécu par ce crédo toute sa vie et elle a vécu en vertu de cette conviction.

Jonathan : Sylvia a consacré sa vie à améliorer le bien-être de la population canadienne. Elle était non seulement une intellectuelle de haute volée avec des compétences dans de multiples domaines, mais elle était également avide de savoir, pour l'amour du savoir. Elle s'intéressait à la façon de tirer parti des connaissances pour orienter les politiques, dans le but, au bout du compte, d'améliorer le bienêtre de la population canadienne, voire, dans un contexte plus large, de l'humanité. C'est à cet objectif qu'elle a consacré sa vie.

Adam : Ma mère était une personne qui était totalement engagée à servir son pays, à servir ces concitoyens, à servir l'État. Elle y a consacré toute sa vie. Pour elle, il n'y avait pas de vocation plus noble et elle en est une parfaite illustration. Je crois qu'on peut dire que le Canada en a été conscient. Quand elle est morte, on lui avait décerné le grade de compagnon de l'Ordre du Canada. D'ailleurs mon père est décédé également avec le grade de compagnon de l'Ordre du Canada. C'était l'un des très rares couples qui se sont vus tous les deux octroyer le le plus grade de compagnon de l'Ordre. Cependant, j'espère surtout que les gens se souviendront d'elle pour avoir contribué à faire du Canada un pays un meilleur endroit où vivre.

(Conclusion)

Mélanie : Vous venez d'entendre « Hé-Coutez bien! ». Merci aux fils de Sylvia Ostry, Adam Ostry et Jonathan Ostry, pour leur contribution spéciale à cet épisode. Merci à Joan McFarland pour son aide avec certains des concepts économiques. Notre gratitude va également aux bibliothécaires et archivistes de Statistique Canada, de Bibliothèque et Archives Canada, pour leur aide à la recherche; ainsi qu'à l'équipe des collections spéciales de la Bibliothèque de l'Université d'Ottawa, pour nous avoir permis d'inclure les extraits de l'entrevue de Bronwyn Bragg et de Mary Breen avec Sylvia Ostry.

Si vous avez aimé cette émission, n'hésitez surtout pas à nous évaluer, à la commenter et à vous y abonner à partir de votre plateforme d'écoute habituelle. Vous y trouverez également la version anglaise de notre émission, intitulée « Eh Sayers ». Merci de votre écoute! À bientôt.

Sources

« Canadian Women's History. » (en anglais seulement) 2013. AFPC RCN. Alliance de la Fonction publique du Canada. le 9 janvier 2013..

McFarland, Joan. 1976. « Economics and Women: A Critique of the Scope of Traditional Analysis and Research. » (en anglais seulement) Atlantis: Critical Studies in Gender, Culture & Social Justice 1 (2): 26-41.

Ostry, Sylvia. 2008. Sylvia Ostry Interview by Bronwyn Bragg and Mary Been. (en anglais seulement) University of Ottawa Library Archives and Special Collections.

Hé-coutez bien! Épisode 8 - Hé mec! Où est mon semi-conducteur?

Date de diffusion : le 28 avril 2022

Nº de catalogue : 45-20-0003
ISSN: 2816-2269

Plus de deux ans après s’être déclarée, la pandémie persiste, nous forçant à nous y adapter au quotidien. Nous avons pu constater que des interruptions de service, des fermetures et des retards survenaient fréquemment, que ce soit en raison des pénuries de semi-conducteurs, de mauvaises conditions météorologiques ou de changements au niveau de l’offre et de la demande. On se demande quelle est la véritable cause de ces perturbations, et en quoi consiste au juste la fameuse chaîne d’approvisionnement dont tout le monde parle? Notre invité, Benoit Carrière, économiste à Statistique Canada, discute de la chaîne d’approvisionnement, de sa nature et des raisons de son importance pour les Canadiens. Il parle aussi de l’effet d’entraînement de la chaîne d’approvisionnement sur les biens et services de consommation.

Animatrice

Mélanie Charron

Invité

Benoit Carrière, économiste, Statistique Canada

Écoutez

Hé-coutez bien! Épisode 8 - Hé mec! Où est mon semi-conducteur? - Transcription

Extraits sonores

Je vois que présentement beaucoup de PME mettent de l'emphase sur leurs chaînes d'approvisionnement...

Les gens sont plus intéressés maintenant à faire justement ce qu'on appelle de la gestion de risque...

Est-ce qu'on veut aller cent pour cent en Asie...

Est-ce qu'on est capable de s'autosuffire sur certains éléments...

Aujourd'hui, dans un prix de produit, la portion achat approvisionnement peut représenter jusqu'à 60, 70, 75, 80 % donc la maturité de la chaîne d'approvisionnement se doit d'être adressée. -Réal Julien, Radio-Canada

Mélanie : Vous êtes à l’écoute d’Hé-coutez bien, un balado de Statistique Canada où nous faisons la connaissance des personnes derrière les données et découvrons les histoires qu’elles révèlent. Je suis votre animatrice Mélanie.

Les mots « chaîne d’approvisionnement » nous les entendons de plus en plus et ils sont sur tous nos écrans! Si vous magasiniez des appareils dont les semi-conducteurs font partis des composantes et bien, vous avez peut-être dû prendre votre mal en patience pour en faire l’acquisition.

Ma collègue est récemment devenue propriétaire d'un véhicule usagé. Elle m’a raconté que pour le vendeur du concessionnaire, il était devenu si difficile de garder suffisamment de voitures en inventaire, qu'il devait maintenant chercher des véhicules d’occasion à vendre afin de répondre à la demande de ses clients. Cette anecdote illustre bien les impacts qui découlent des ralentissements des chaînes d’approvisionnement sur le modèle d’affaires de la vente de véhicules d’occasion.

Pour avoir une meilleure idée de ce qui se passe, nous avons questionné notre collègue économiste à Statistique Canada.

Mélanie : Bonjour Benoît, merci d'être avec nous pour cet épisode. Est-ce que tu pourrais te présenter s'il te plaît pour nos auditeurs?

Benoît Carrière : Mon nom est Benoît Carrière. Je suis économiste pour Statistique Canada. Je travaille pour la division des comptes et du commerce international depuis plus de dix ans. Et le rôle de mon équipe, c'est de publier à tous les mois les résultats de la balance commerciale de marchandises du Canada. Donc en gros, l'analyse des flux des exportations et des importations.

Mélanie : Lorsqu'on parle de chaîne d'approvisionnements, on parle de quoi au juste?

Benoît Carrière : La chaîne d'approvisionnement c'est un réseau de fournisseurs qui peut être vaste et même extrêmement complexe, donc des fournisseurs qui contribuent là d'une certaine façon à la fabrication d'un bien. Puis dans la chaîne d'approvisionnement, il existe aussi une sorte de synchronisation ou de coordination, là qui permet à la marchandise d'être produite de façon continue.

Donc je pourrais donner un exemple, ça pourrait peut-être aider les auditeurs. Donc supposons une compagnie québécoise qui produit un bien, puis qui a besoin de vingt types de matériaux ou de pièces pour faire l'assemblage final du bien. Supposons que cinq de ces matériaux-là proviennent du Québec, cinq proviennent de l'Ontario, cinq fournisseurs font des pièces aux États-Unis; donc, la compagnie québécoise importe de cinq fournisseurs des États-Unis. Puis, supposons qu'il y a cinq autres qui sont en Asie. Donc ces différentes compagnies-là qui fournissent à la compagnie québécoise ce dont elle a besoin pour produire le bien, ben ils représentent l’approvisionnement. Mais aussi l'approvisionnement s'applique tout autant aux fournisseurs qu'à la compagnie finale qui assemble le produit. Donc, dans notre exemple, supposons les cinq fournisseurs de pièces qui viennent des États-Unis, bah peut-être que et même assurément qu'eux-mêmes dépendent de l'approvisionnement d'un autre type de pièces qui sont produites ailleurs. Et peut-être même que ce qui est produit ailleurs, ben eux dépendent de l'extraction de matières premières d'un autre pays. Donc, dans le fond, on fait face ici à une chaîne de fournisseurs qui sont tous interdépendants puis qui représentent tous une étape importante dans l'assemblage du bien au Québec.

Puis, si on revient à notre compagnie québécoise, ben, normalement avec le temps, si elle a pu survivre dans son marché, ben, elle a assurément adopté là une logistique d'approvisionnement avec le temps, de plus en plus efficace pour recevoir les pièces au bon moment. Mais pas juste au bon moment dans l'ordre aussi! Si elle fabrique un véhicule automobile, ben, elle veut recevoir le châssis avant de recevoir le moteur. Ah donc cette efficacité-là lui a sûrement permis de faire des économies d'échelle, de diminuer ses coûts, de garder les inventaires bas et, du même fait, de peut-être diminué son prix, puis de prendre une plus grande part de marché dans l'industrie, là où elle évolue. Mais ça c'est en théorie, c'est quand tout se passe bien.

Donc, puis ce qu'on a vu aussi dans les dernières années, les 10, 20, 30 dernières années; c'est que la mondialisation a comme entraîné alors un étirement ou un allongement de la chaîne d'approvisionnement. Ce qui fait en sorte que les fabricants, ou ceux qui assemblent les produits finis; sont de plus en plus exposés à des événements qui sont totalement hors de leur contrôle.

Mélanie : Pourquoi est-ce qu'on en parle plus que jamais maintenant?

Benoît Carrière : Ben, comme je le disais, on a une chaîne d'approvisionnement, hein, c'est toutes sortes de fournisseurs qui eux, ont un rôle qui est souvent critique dans la fabrication d'un bien. Donc pour reprendre une expression québécoise si un de ces fournisseurs-là n'est pas capable d'exécuter une tâche ou d'envoyer un produit, et bien la chaîne va débarquer. Puis euh c'est sûr qu'il y a toujours des événements qui affectent la chaîne d'approvisionnement.

Par contre, dernièrement, il y a une multitude d'événements, puis on dirait que c'est pratiquement interminable, qui affectent au même moment la chaîne d'approvisionnement. Donc on peut revenir là, évidemment, au début de la pandémie lors de la première vague où il y a plusieurs entreprises spécialement dans la fabrication qui ont fermé leurs portes pendant plusieurs mois, on parle d'un deux, trois mois, donc y pas eu de production ni au niveau des des produits finis, ni au niveau des pièces et même au niveau des matières premières aussi, ça a été affecté.

Ensuite de ça, il y a une reprise de la production qui est quand même été assez lente. Évidemment, là ces entreprises là c'est des grosses entreprises puis il n'y a pas un interrupteur qui va remettre la production a « on » du jour au lendemain. C'est beaucoup plus compliqué que ça. Et pendant les premières vagues, ces compagnies-là étaient aussi affectées par des éclosions. Donc lorsqu'il y a une reprise de la production, c'est quand même été très laborieux. Et évidemment, ça l'a engendré beaucoup, beaucoup de délais au niveau de la fabrication des pièces, au niveau, euh, du transport des pièces aussi et finalement au niveau de l'assemblage, là de biens finis.

Puis pendant ce temps-là, on avait aussi des problèmes au niveau du transport. On se souviendra qu'il y a un navire qui a bloqué le canal de Suez pendant quelques semaines. Donc le canal de Suez, c'est vraiment un endroit-là névralgique pour le commerce international. Et si le Canal de Suez est fermé pendant une journée, c'est pratiquement catastrophique! Donc on peut imaginer comment un dix à quinze jours de fermeture, a pu affecter là la situation au niveau du transport de marchandises.

Il y a même eu des éclosions aussi dans des ports qui ont dû fermer. Donc, je pourrais prendre l'exemple de quelques ports en Chine. Dont un port qui est, je pense le 3e plus grand port en exportations au monde a été fermé pendant quelques semaines en Chine. Donc, ce que ça crée ça, évidemment, ça crée des files d'attente au niveau des navires. Donc, un navire qui va passer peut-être une ou deux journées en attente de décharger ou pour le chargement; y a passé quelques semaines. Donc, quand on regarde tous ces problèmes-là ça fait en sorte que les navires, pendant qu'ils sont stationnés devant le port pendant quelques semaines, ben ils ne livrent pas de la marchandise.

Y a aussi eu une baisse de la production en Chine à l'automne. Donc, en Chine pour régler des problèmes de pollution là, puis dû aussi à des problèmes d'approvisionnement de charbon, la Chine a coupé le courant dans 17 régions pendant les moments de la journée. Donc, à l'automne normalement, c'est vraiment là que les fabricants de pièces, pour des biens comme les ordinateurs, les tablettes, les téléphones cellulaires et tout ça, ils roulent à pleine capacité parce que c'est un grand moment de l'année. On a la fête aux États-Unis le Thanksgiving, au Canada aussi, ensuite de ça, on a les fêtes de Noël. Et ces entreprises-là qui fabriquent ces pièces-là roulent vraiment 24h sur 24, 7 jours sur 7. Mais, pendant l'automne et ils ne pouvaient pas travailler la nuit. Donc, la production de ces pièces a été coupée d'un tier.

En même temps, au niveau de la demande des biens, elle a fortement augmenté pendant la pandémie. Donc, on se souviendra que pendant les premières vagues, même encore maintenant, c'est vraiment les industries du service qui ont été le plus affectées. Donc, les gens qui normalement consommaient, dépensaient une partie de leurs revenus en services. Donc en restaurant ou au cinéma ou en théâtre et tout ça; et bien ils se sont mis à dépenser leur argent plus sur des biens. Il y a aussi eu des aides gouvernementales. Le taux d'intérêt était bas. Il y a des biens spécifiques qui étaient en grande demande comme les ordinateurs portables pour le travail à la maison, les tablettes ou aussi l'école à la maison, qui a contribué à l'augmentation de la demande pour ces produits-là. Donc, on a eu une année où on avait une offre qui était déficiente combinée à une forte demande des biens puis qu'est-ce que ça fait ça une offre déficiente puis une grande demande? Ça fait que les prix augmentent. Et on voit très bien dans les chiffres sur l'inflation que ces situations-là se reflètent à plusieurs niveaux pour nous aussi, évidemment les consommateurs.

Mélanie : Est-ce qu'il y a des marchandises qui sont plus impactées que d'autres? Comme par exemple, t'as parlé d'ordinateur plus tôt? Je crois qu'il y a la fameuse puce. Il y a une pénurie mondiale de puces électroniques. Qu'est-ce qui en découle de tout ça?

Benoît Carrière : Si on est des habitués là des indicateurs publiés par Statistique Canada, là, on connaît le problème relié à l'assemblage des véhicules automobiles dont la production a vraiment diminuée en 2021 dû à cette pénurie-là de la puce-là, à semi-conducteur. Donc, pourquoi les véhicules automobiles bien, si vous êtes assis récemment dans une voiture neuve, vous avez sûrement remarqué que le tableau de bord est en fait un ordinateur. Donc les véhicules maintenant y ont tellement de gadgets électroniques qui ont vraiment besoin de beaucoup de puces à semi-conducteur, donc, des « microchips » qu'on retrouve dans les ordinateurs pour assembler les véhicules.

Et ce qui est arrivé pendant les premières vagues de la pandémie, c'est que les fabricants automobiles dans le monde puis surtout en Amérique du Nord, ont annulé leurs commandes de puces de semiconducteurs auprès des fabricants de ces fameuses puces là. Les fabricants qui ne sont vraiment pas nombreux dans le monde! Il n'y en a que quelques-uns. Ils sont principalement en Asie. Et les fabricants de puces ont aussi été affectés par les mêmes choses qu'on a mentionnées. Ils ont fermé. Ils ont arrêté de produire pendant quelques mois au début de la première vague. La reprise a été difficile pour eux aussi. Puis quand ils ont repris, ben ils se sont certainement concentrés sur les commandes qu'ils avaient déjà. Et alors que les fabricants de voitures automobiles avaient annulé leurs commandes de puces à semi-conducteurs; ben ceux qui assemblent des ordinateurs, des téléphones cellulaires et des tablettes, ben eux avaient passé plus de commandes à ces compagnies-là.

Donc évidemment, les fabricants de puces se sont mis à fabriquer plus de puce pour eux. Ensuite de ça les fabricants de véhicules automobiles ont passé de nouvelles commandes. Et ça prend du temps pour ceux qui font les puces de de de changer là un petit peu leur leur mode de production pour satisfaire à la demande des fabricants de véhicules automobiles. Donc cette fameuse puce-là est devenue là un peu en pénurie spécialement pour l'industrie de la fabrication de véhicules automobiles.

Donc les conséquences de ça, c'est que les fabricants pendant toute l'année 2021, pratiquement tous les mois, ont dû réduire leur production. Donc y arrêtaient de produire pendant 1 semaine, peut-être pendant 2 semaines, peut-être plus, parce qu'il n'avait pas assez d'arrivages de ces fameuses puces à semi-conducteurs-là.

Selon le site www.auto-forecast, la production mondiale de véhicules automobiles n'a pas produit 11 millions de véhicules automobiles en 2021 dû à cet enjeu-là. Donc, 11 millions de véhicules automobiles c'est, c'est beaucoup de véhicules. Et puis au Canada, là on parle d'environ 500 000 véhicules automobiles qui n'ont pas été produits. Et ça, ça représente à peu près une diminution de 30% si on compare à 2019 qui est une année qui qui a une base comparative là plus solide.

Mélanie : Quelles sont certaines des conséquences des perturbations sur les différentes chaînes d'approvisionnement?

Benoît Carrière : On a des conséquences, des chamboulements de deux façons au niveau de l'industrie puis des employeurs mais aussi au niveau du consommateur.

Ça l'a des graves conséquences quand on y pense. Au Canada, on fabrique des véhicules automobiles et c'est un employeur majeur au Canada, spécialement en Ontario. Donc, qu'est-ce qui arrive aux travailleurs lorsque la compagnie pour laquelle tu travailles ferme à chaque mois pendant 1 semaine ou 2 ? Euh est-ce que ça créer de l'insécurité d'emploi ? Certainement. Est-ce qu'il y a des gens qui ont été mis à pied dû à ça? J'en suis persuadé.

Mais ce n'est pas juste cette industrie-là. Il y a aussi une industrie qui fabrique des pièces pour les véhicules automobiles au Canada qui envoie ça aux fabricants canadiens mais aussi aux fabricants américains; qui, eux, sont en attente. Puis ça crée des délais. Puis eux aussi ont peut-être dû, ça peut- être créé une insécurité au niveau de l'emploi de leurs employés. Peut-être même qu'ils ont fait des mises à pied également. Donc, il y a des conséquences qui sont directes certes, mais il y a toutes sortes de conséquences aussi qui sont indirectes puis que souvent, on sous-estime.

Puis ça c'est au niveau de l'industrie. C'est au niveau des travailleurs. Mais de l'autre côté, nous les consommateurs bien on est habitués à l'époque quand on voulait acheter un véhicule automobile; d'aller dans un concessionnaire et souvent on pouvait partir avec les clés, la voiture. Maintenant qu'on va chez le concessionnaire, bien on ne sort pas avec les clés on a plutôt fait un dépôt là de deux-cents, cinq-cents dollars avec la promesse qu'on va recevoir notre véhicule dans 3 ou 6 mois. Donc, c'est différent. Puis évidemment, moins de fabrication de véhicules automobiles, ça veut dire, les véhicules sont moins disponibles. Ça veut dire sont plus rares. Et ça l'a un effet encore une fois sur les prix.

Si on regarde les données de décembre sur l'indice des prix à la consommation mais ça disait que sur les 12 mois de l'année, les prix des véhicules automobiles avaient augmenté de plus de 7%. Alors que pour ce qui est des véhicules automobiles, normalement, on voit quand même une certaine stabilité dans les prix-là historiquement. Donc 7 %, c'est vraiment significatif pour 2021 au niveau de l'augmentation du prix des véhicules.

Mélanie : On a pu observer donc certaines pénuries de marchandises quand on voulait s'approvisionner quelque chose en particulier à un moment précis. Est-ce que on doit s'attendre à un certain changement dans notre façon de s'approvisionner?

Benoît Carrière : Ouais, ben en fait, euh. On le voit déjà que toute cette situation-là, a un impact sur le mode de production. Donc, lorsqu’on parlait des exemples avec notre compagnie québécoise, là on parlait qu'elle avait avec le temps, fait des gains en efficacité au niveau de la chaîne d'approvisionnement. On parlait du fait qu'elle tenait des inventaires le plus bas possible, puis ça, ça lui permet de sauver des coups au niveau de l'entreposage. Et on disait aussi qu'elle s'arrangeait pour recevoir les pièces juste au bon moment. Puis ça, c'est un mode de production qui est comme du « juste-à-temps » en anglais ils disent un « just-in-time ». Donc, c'est vraiment l'entrée et la sortie des marchandises à un moment précis dans la production qui fait en sorte qu'on est extrêmement bien coordonné avec les fournisseurs. Puis on est aussi extrêmement bien coordonné avec le client. Là ce qu'on voit, puis si on regarde les données là sur les ventes des manufacturiers, si on regarde la donnée sur les inventaires; on voit que les fabricants ont gardé beaucoup plus d'inventaires cette année qu'auparavant. Donc, on est comme dans un espèce de mouvance entre le mode de production « juste-à-temps » à un mode de production « juste-au-cas ». Donc, un « just-in-case ». Donc, les fabricants on dirait qu'ils veulent garder un inventaire suffisant pour que supposons qu'un bien, qu'ils ont besoin pour assembler leurs produits, devient soudainement non disponible; ben qu'il y en ait assez en stock, pour que ça n'interrompt pas la chaîne ou le cycle de production pour cette compagnie-là.

Mélanie : Dans quelles mesures alors ces pénuries actuelles sont-elles exceptionnelles?

Benoît Carrière : Ben si on regarde les 10, 20, 30 dernières années, c'est assez exceptionnel. Ce qui est exceptionnel, ce n'est pas nécessairement ce qui est en train d'impacter la chaîne d'approvisionnement. C'est que tous ces événements-là sont en train d'arriver au même moment! Donc c'est vraiment ça qui qui est exceptionnel selon moi.

Mélanie : Donc Benoît, qu'est-ce que vous espérez que nos auditeurs retiennent de notre conversation?

Benoît Carrière : Écoute, ce n'est pas un sujet qui est simple, on voit passer ça dans les nouvelles, puis on se demande bon, comment ça nous affecte? Mais ultimement, ça l'affecte vraiment tout le monde. Puis donc je pense que ça vaut la peine de s'intéresser à ça. Puis ça là, ça affecte nos habitudes de consommation. Ça, ça l'affecte le prix que l'on paye pour certains produits. Si on est un employé dans une industrie de fabrication, ça peut même affecter notre notre emploi. Donc, évidemment là la chaîne d'approvisionnement et les différents enjeux reliés à ça affectent vraiment tout le monde. Puis je pense que ça vaut la peine de s'y intéresser pour ces raisons-là.

Mélanie : Où pouvons-nous trouver davantage d'informations sur ce que tu nous a présenté?

Benoît Carrière : Donc, évidemment là, il y a plein d'exemples, tous les exemples que j'ai nommés, vous allez retrouver ça dans des les médias traditionnels, qui couvrent le milieu des affaires. Par contre vous allez trouver aussi vraiment beaucoup d'information sur le site de Statistique Canada, sous l'onglet du Quotidien. Le Quotidien, c'est là où on publie nos indicateurs économiques principaux, puis que vous lisiez sur les résultats de la balance commerciale ou des ventes de gros ou des ventes au détail ou des ventes des manufacturiers et évidemment de l'indice des prix à la consommation; vous allez trouver plein d'information concernant les enjeux reliés à la chaîne d'approvisionnement. Puis comment ça impact les indicateurs économiques qu'on publie.

Mélanie : Merci d'avoir accepté notre invitation Benoît. C'était vraiment une discussion très éclairante!

Benoît Carrière : Ok, mon plaisir.

Vous étiez à l’écoute d'Hé-Coutez bien! Merci à notre invité : Benoît Carrière ainsi qu'à toute l'équipe. Vous pouvez vous abonner là où vous obtenez vos balados. Vous pourrez également trouver la version anglophone appelée Eh Sayers. Vous avez aimé cet épisode? Évaluez-nous et faites-nous part de vos commentaires.

C’est le dernier épisode de notre deuxième saison, j'aimerais profiter de l’occasion pour remercier mes collègues : Janelle Bah, Sarah Messou-Ghelazzi, Alexandra Bassa, Chris Houle, Martin Charlebois et Tony Colasante pour leur soutien à la production, ainsi qu’aux experts en la matière et aux autres équipes de Statistique Canada ayant contribué au contenu. Merci à Jessie James McCutcheon et Max Zimmerman, ingénieurs de son; et à Vincenzo Germano pour la conception du logo. Et finalement, merci à Annik Lepage et à Marc Bazinet à la direction. Je suis Mélanie Charron, votre animatrice. Je vous remercie d'avoir été à l'écoute. À bientôt!

Hé-coutez bien! Épisode 7 - Consultation santé? Visite branchée!

Date de diffusion : le 7 avril 2022

Nº de catalogue : 45-20-0003
ISSN: 2816-2269

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Les soins de santé sont un privilège qui revêt une très grande importance aux yeux des Canadiens. Cela dit, les soins de santé virtuels étaient très peu courants avant la pandémie de COVID-19. Dès le début de la pandémie, en mars 2020, les Canadiens n'ont eu d'autre choix que de revoir la façon dont ils accèdent aux soins de santé. Les consultations, qui auraient normalement eu lieu dans le cabinet du médecin, se déroulaient dorénavant par téléphone ou par clavardage vidéo. Il s'est écoulé deux ans et l'on constate que la plupart des soins de santé sont maintenant offerts virtuellement. La question est de savoir si l'accès aux soins de santé virtuels va disparaître lorsque la pandémie prendra fin. Avec notre invité, docteur Yanick Beaulieu, cardiologue-intensiviste, pionnier et innovateur dans le domaine des soins virtuels, nous allons nous pencher sur ces obstacles, sur les changements que nous avons observés durant la pandémie, et sur les mesures qui sont prises pour que les soins virtuels deviennent une réalité permanente.

Animatrice

Mélanie Charron

Invité

Docteur Yanick Beaulieu, cardiologue-intensiviste, pionnier et innovateur dans le domaine des soins virtuels

Écoutez

Hé-coutez bien! Épisode 7 - Consultation santé? Visite branchée! - Transcription

Bienvenue à Hé-Coutez bien! un balado de Statistique Canada, où nous faisons la connaissance des personnes derrière les données et découvrons les histoires qu'elles révèlent. Je suis votre animatrice, Mélanie.

Et si je vous demandais à quand remonte la dernière fois où vous vous êtes rendu dans la salle d'attente du bureau de votre médecin? Pour bon nombre d'entre nous, je parie que la réponse est quelque chose comme « pas depuis mars 2020 ». Certains n'avaient peut-être jamais eu de réunion virtuelle avec leurs professionnels de la santé avant la pandémie, mais pour plusieurs, les rendez-vous médicaux en ligne sont maintenant possibles. L'on peut dire que cela a changé la donne! Plus besoin de prendre congé pour traverser la ville en métro et de s'asseoir dans une salle d'attente souvent bondée de patients.

Les soins de santé virtuels ne sont pas nouveaux, mais la COVID-19 en a certes accéléré son adoption généralisée partout au pays. Quels sont les avantages et les inconvénients des soins de santé virtuels? Est-ce que ces nouveaux accès sont là pour rester?

Mélanie : Bonjour Docteur Beaulieu. J'aimerais que vous vous présentiez pour nos auditeurs.

Dr Yanick Beaulieu : Oui, mon nom est Yannick Beaulieu. Je suis cardiologue et intensiviste à l'hôpital du Sacré-Cœur et à l'Institut de cardiologie de Montréal et je suis impliqué dans le milieu des affaires depuis une vingtaine d'années, relié à la médecine, donc entrepreneur, innovateur et clinicien.

Mélanie : Tout d'abord, dites-nous ce que sont les soins virtuels?

Dr Yanick Beaulieu : Quand on parle de médecine virtuelle, c'est l'ensemble des soins de santé qui utilise la technologie. Alors par exemple, si quelqu'un fait une prescription à distance ou le, le patient n'a qu'à se présenter à la pharmacie, la prescription est prête. Si un texto est envoyé entre une infirmière clinicienne, un médecin ensuite, le patient, bien sûr la composante de vidéoconférence en est une. Si y a du monitoring des fois les gens ont leurs signes vitaux, la tension artérielle, la saturation d'oxygène, le rythme cardiaque qui est envoyé par l'internet. Alors tout ça est donc un regroupement de soins qu'on appelle virtuel, qui est très globale, très important en termes de de de de sa versatilité. Alors c'est important de voir ça dans l'ensemble et non juste de penser à la vidéoconférence traditionnelle.

Mélanie : Quel est l'impact de la COVID-19 sur les soins virtuels actuellement?

Dr Yanick Beaulieu : En fait, dans le contexte de la COVID-19, c'est évident que les soins virtuels ont pris un chemin un peu différent de celui sur lequel le la, la technologie et l'implantation évoluaient. Tant mieux d'un sens mais ce qui est bien important de comprendre, c'est qu'il y a beaucoup, beaucoup de différences dans la façon dont les soins virtuels ont été implémentés, non seulement à travers le monde, mais ne serait-ce que au Canada. Alors par exemple avant la pandémie, si on regarde le Canada au complet, il y avait moins de 5% euh, et même moins 2% dans beaucoup de cas des consultations qui étaient faites en virtuel alors que le potentiel est très grand. Quand on regarde les statistiques pour ce qui est des rendez-vous de suivi entre un patient et son professionnel qu'il connait déjà, donc pour pouvoir avoir des nouvelles, soit un nouveau problème ou un suivi d'un patient connu; la littérature démontre bien qu'environ 70% de ces sessions-là peuvent être faites en virtuel. Des places comme l'Ontario et la Colombie-Britannique étaient en avance où il y avait des réseaux plus déployés qu'ailleurs. Et donc, même s'il y avait beaucoup de vouloir, il y avait beaucoup de choses qui étaient longues à s'installer, que ce soit le côté de la facturation pour les médecins, la mise en place dans les cliniques, la partie technologique de l'internet. Alors quand la COVID-19 est arrivée, il est arrivé un besoin immédiat de passer d'une implantation qui était longue et un peu douloureuse dans certains cas, à une implantation presque immédiate. Alors, il y a eu bien sûr une résurgence et une adoption rapide pour le mieux. Bien sûr, il y a des choses qui se font jamais en virtuel. Mais pour ce qui ce fait, l'adoption est montée à presque 80%. Mais dès que la COVID-19 a commencé à fléchir un peu avant, ce qui se passe maintenant, il y a eu tout de suite un retour rapide à beaucoup moins de téléconsultations, de sorte que quand on regardait des statistiques récentes dans beaucoup de cas, on était revenu a du 5, 8% de consultations virtuelles. Alors donc, il y a eu clairement une adoption importante mais le problème a été que cette adoption-là ne s'est pas faite avec une implantation solide. C'est très bien ce qui a été fait mais il y a encore beaucoup de travail à faire pour pérenniser l'implantation des soins virtuels.

Mélanie : Est-ce qu'il y a des idées préconçues, tant de la part du personnel médical que de la population, au sujet des soins de santé virtuels que vous aimeriez adresser?

Dr Yanick Beaulieu : En fait, quand on parle de soins de santé virtuels, il y a plusieurs idées préconçues qui étaient qui, qui étaient clairement là, qui sont de moins en moins là; qui ont été déjà un peu adressées. Premièrement, il y avait des soignants qui se disaient : « Ahhh en virtuel là…c'est pas pareil » ou même des patients qui disaient : « Moi je veux pas faire ça à distance, je vais le faire en présentiel » et d'autres surtout les catégories plus jeunes qui disaient : « Pourquoi je me déplacerais? Je peux le faire en virtuel ! » Alors il y en a que c'est assez évident pour eux que le virtuel avaient leur place mais beaucoup d'autres qui disaient autant du côté patient que du côté soignant : « Non, ça ne sera pas pareil ». Alors je pense qu'une des premières idées préconçues, c'était que la médecine virtuelle pouvait pas, disons, livrer une qualité de soins adéquate. Beaucoup d'études, même en pré pandémie, ont démontré que c'était pas le cas. Un point très très, très important là que je tiens à clarifier sur les soins virtuels, c'est que l'optimisation de l'utilisation des soins virtuels est dans un cadre de médecine hybride. Qu'est-ce que ça veut dire? Ça veut dire que faut qu'un patient ait quand même son médecin et qu'il aille souvent une fois par année, par 2 ans, peu importe une façon d'avoir un accès ou y'a un examen de prise de poids tout ça mais que par la suite la relation thérapeutique peut se poursuivre beaucoup beaucoup en virtuel. Alors il y a plein de problèmes, assez simple dermatologique, infection urinaire et tout qui peuvent facilement se répondre par une personne qui ne connaît pas le patient. Mais quand on entre dans des contextes plus chroniques de maladie plus sévère, tout ce que la télémédecine a fait, c'est décaler la prise en charge du vrai problème et qui, ultimement, eu un mauvais impact sur le patient. La plus grosse idée préconçue qui était : «On n'aura pas la même qualité de médecine » et tout ça, je pense qu'on est dépassé ça parce que les gens savent ce qui est indiqué ou pas indiqué en virtuel fait que c'est important de suivre ça. Et que dès que quelqu'un ait pas sûr, que là ça se fasse en présentiel. Et là, c'est là que l'efficacité puis la sécurité est préservée.

De nombreux Canadiens n'ont pas de fournisseur de soins de santé régulier. En 2020, 14 % des Canadiens de 12 ans et plus ont déclaré ne pas avoir de fournisseur de soins de santé régulier. Ce nombre est encore plus élevé chez les 18 à 34 ans, soit environ 1 personne sur 4.

Mélanie : Selon vous, est ce que les soins virtuels aident à contrer cet enjeu?

Dr Yanick Beaulieu : Oui, parce qu'effectivement c'est un groupe de personnes qui, souvent bon, un : ce sont des grands consommateurs de technologies, personne va à la banque maintenant, tout se fait à distance et donc quand on jase avec ces populations-là, une des premières questions c'est : ' Peux-tu le faire à distance? ' et donc clairement de pouvoir offrir ce mode-là de soins, peut, de façon significative, augmenter l'accès aux soins. Et un bel exemple de ça, c'est les soins pour la santé mentale. Tout dépendamment des problèmes, ils ne veulent pas nécessairement se présenter à un rendez-vous, dès que tu leur offres l'option virtuelle, il y a une adoption du suivi des soins qui est beaucoup plus grand. Et ça, ça l'a été remarqué avant et pendant la pandémie. Alors clairement, je pense que les soins virtuels peut être une façon d'augmenter l'accès aux soins et la consommation des soins de santé par ce groupe d'âge-là.

En 2018, 5,3 millions de personnes au Canada ont déclaré avoir eu besoin d'aide relativement à leur santé mentale au cours de l'année précédente. Juste un peu plus de la moitié d'entre eux estimaient que leurs besoins étaient entièrement satisfaits.

Mélanie : Comment est-ce que les soins de santé virtuels pourraient aider à répondre aux besoins en santé mentale de la population?

Dr Yanick Beaulieu : Quand on regarde les 20 dernières années, et même plus, parce que faut garder en tête que la télémédecine existe depuis 30 à 40 ans. Alors pour certaines personnes ça l'air d'être très nouveau, mais c'est pas le cas du tout. C'est juste que ça a été long à s'implanter, la technologie a évoluée à la vitesse grand V. Les soins pour la santé mentale sont idéales. Pourquoi? Parce que dans la majorité des cas, un examen physique n'est pas nécessaire. Et donc de pouvoir établir un contact avec le patient à distance, que ce soit un enfant, un adolescent, un adulte; la télémédecine s'y prête très bien. Et dans certains cas, s'y prête même mieux. Parce que certains patients peuvent être un peu plus instables et tout, ne veulent pas se déplacer, ça peut être des des phobies d'être dans le public ou y'a toutes sortes de raisons et les soins de santé virtuels se prêtent mieux et augmentent l'adoption au traitement. Donc, les soins de santé mentale sont clairement un un aspect de la télémédecine qui qui gagne à être déployé non seulement pour des traitements mais aussi pour le support aux familles et pour que les intervenants aient un meilleur accès à tout le réseau de soins. Et donc c'est c'est vraiment quelque chose qui je pense, sera pérennisé de façon significative.

20 % des personnes ayant des besoins en santé mentale non satisfaits ont déclaré que des problèmes linguistiques et l'indisponibilité de l'aide constituaient un obstacle d'accès aux soins.

Mélanie : Avez-vous vécu un événement où les soins virtuels ont pu atténuer une barrière linguistique ou auraient pu permettre de le faire?

Dr Yanick Beaulieu : En fait, en termes de de barrière linguistique, la partie de la médecine virtuelle change pas énormément la donne, sauf en fait deux choses. On a souvent des gens qui sont unilingues. Ils vont souvent venir à l'hôpital avec quelqu'un, un proche avec qui on fait l'histoire. Mais disons que la personne est hospitalisée, par la suite, il faut communiquer avec la personne. Alors ça l'aidera pas beaucoup dans la communication directe quoi que des fois on se sert de Google translate mais là où ça aide, c'est pour pouvoir communiquer avec la famille disons le fils est à la maison, on fait une session en virtuel en présence du patient, la personne peut voir son proche, le médecin fait une traduction automatique et tout le monde est un peu rassuré que la bonne information est véhiculée. Alors que, entre autres dans le temps de la COVID vous pouvez vous imaginer aux soins intensifs, surtout dans des contextes de décès imminent et tout, où les familles ne peuvent pas venir à l'hôpital, maintenant on a des tablettes partout et non seulement dans le contexte linguistique mais de pouvoir faire cette communication-là fréquente, ça rassure tout le monde et les gens ont la bonne information. Une implantation plus large des soins virtuels aide à pouvoir mieux communiquer et à ultimement mieux traiter le patient et informé mieux la famille.

Si vous avez une vitesse de téléchargement de 50 mégabits par seconde ou plus, votre Internet permet la prise en charge de plusieurs utilisateurs à la fois, la diffusion de vidéos d'ultra-haute définition alors que plus d'un appareil est connecté, ou le téléchargement rapide d'un film de haute définition. En 2020, selon l'Enquête canadienne sur l'utilisation d'Internet, parmi les répondants qui connaissaient la vitesse de connexion annoncée, 72 % utilisaient cette vitesse plus rapide. Mais un écart géographique subsiste entre ceux qui vivaient à l'intérieur ou à l'extérieur des régions métropolitaines de recensement et agglomérations de recensement. Québec, Montréal, Ottawa, Gatineau, ou Vancouver en sont quelques exemples. Un peu plus des trois quarts des répondants vivant dans ces régions utilisaient cette vitesse plus rapide, comparativement à moins de la moitié de ceux vivant à l'extérieur de ces régions. SOURCE : Accès à Internet au Canada, 2020.

Mélanie : Pourriez-vous nous dresser le portrait actuel de l'accès aux soins virtuels?

Dr Yanick Beaulieu : En fait, quand on regarde l'accès aux soins virtuels, bon première chose, il est évident que même si en 2021 l'accès technologique, technologique étant d'avoir l'appareil, que ce soit iPad, un ordinateur, un téléphone intelligent; en général pour la majorité de la population, c'est pas la restriction à l'accès, mais c'est quand même un des points importants. L'autre partie c'est l'internet. Alors même si on sait qu'une grande partie des foyers canadiens et des gens ont accès à l'internet, il demeure quand même un pourcentage non négligeable que y'a beaucoup de monde qui ont pas encore accès à l'internet haute vitesse qui permet une connexion adéquate pour faire des soins virtuels de de qualité acceptable disons. Donc, il y a une inégalité parce que y a des gens qui n'ont pas la bonne technologie, le bon internet ou qui ne sont pas à l'aise avec la technologie qui n'auront pas accès à ça ou moins accès. Donc le plus important là-dedans pour diminuer cette inégalité-là, c'est ce que l'on appelle en en bon français le onboarding. Quand une clinique veut faire des soins virtuels avec un patient, il doit y avoir un processus pour pouvoir introduire la personne avec des questions-réponses, et ça, c'est une des choses qui manque encore. Ça prend des ressources, du temps et c'est ça qui qui rapidement s'est un peu installé pendant la pandémie mais qu'il va falloir que ce soit solidifié pour pouvoir diminuer les inégalités et que l'accès soit le plus universel possible.

Dr Beaulieu a raison. L'équité d'accès est toujours un enjeu. Par exemple, en 2016, les personnes âgées de 65 ans et plus étaient le groupe le plus susceptible d'avoir eu des contacts avec un médecin au cours des 12 mois précédant l'enquête. Cependant, les aînés en tant que groupe avaient des opinions plus négatives sur les avantages de la technologie et étaient moins susceptibles d'en être les utilisateurs. En 2016, c'était 97,2 % des Canadiens âgés de 15 à 64 ans qui utilisaient internet par rapport à 68 % des aînés.

Mélanie : Quels sont les obstacles qui pourraient mettre en péril une adoption permanente des soins virtuels?

Dr Yanick Beaulieu : En fait, il y en a plusieurs. Je pense un point qui est très important pour la population à toujours garder en tête, c'est que malgré tous les avancements qu'on a faits, l'implantation de la télémédecine demeure, pas partout, mais dans beaucoup de cas, assez fragile. Alors il y a des centres qui implantaient déjà bien la télémédecine où ça l'a juste été un boost pis ils sont encore plus avancés pis ça roule vraiment bien. Mais dans beaucoup de contextes, le problème qu'on a vu, c'était les ressources. Alors si tu veux développer un programme de télémédecine disons dans une clinique de médecine de famille, ben ça prend des ressources, ça prend quelqu'un qui va être capable de dire, ben je m'occupe de pouvoir créer les profils, communiquer avec les patients c'est la gestion du changement. Alors ces ressources-là, ben il faut qu'elles soient ajoutées, faut qu'elles soient déployées. On a vu dans la pandémie au tout début, il y a beaucoup de ressources qui ont été mises là-dessus et quand les choses ont commencé à aller mieux des centres hospitaliers disaient : « on se fait enlever les ressources qu'on s'était faites donner! » et le programme ne peut pas survivre par magie. Dans les défis, c'est de mettre les bonnes ressources. Ensuite côté technologique, même si c'est quand même beaucoup mieux, ça demeure que dans beaucoup d'hôpitaux, la bande passante est mauvaise. Les médecins veulent faire de la télémédecine mais l'internet n'y est pas. Il y a le la composante technologique intra-hospitalière quand les médecins veulent se connecter et il y a toute la composante aussi de la facturation. Alors si un médecin passe 2 jours sur sur 5 à faire de la télémédecine, ben il faut qu'il y ait une façon d'être rémunéré ni plus ni moins, mais adéquatement. Il y a maintenant le Conseil numérique qui va sortir, qui sont des soins virtuels entre médecins. Pour qu'au lieu que t'attende six mois pour voir, par exemple un cardiologue, ben le médecin de famille pourra parler par conseil numérique et avoir une opinion très très rapide. Et ça y aura des codes de facturation et tout. Fait que ça avance, ça avance mais y'a plusieurs enjeux pour lesquels il ne faut pas faut pas lâcher la balle pour que toutes ces points-là soient adressées pour pérenniser et augmenter l'adoption. Parce que sinon si une partie de la chaîne n'est pas bien adaptée, ça peut être un obstacle à un déploiement qui se fait avec succès.

Le Canada continue d'avoir un système de santé axé sur les soins-hospitaliers pour les personnes qui sont en fin de vie, malgré leur préférence de mourir dans leur communauté ou d'autres milieux comme dans les maisons de fin de vie. En 2020, 55 % des décès au Canada ont eu lieu dans un hôpital.

Mélanie : Les soins de santé virtuels ont-ils leur place dans les unités de soins palliatifs?

Dr Yanick Beaulieu : Donc, les soins de santé virtuels dans le contexte des soins palliatifs ont tout à fait leur place. Et en fait, si je peux vous donner un petit exemple, alors dans la dernière compagnie que j'avais mis sur pied en télémédecine dès 2012 pour augmenter l'accès aux soins, la supervision à distance, la télémédecine, euh bien avant la pandémie, on a commencé à travailler avec des associations de soins palliatifs dans le grand Montréal pour différents volets. Un des volets était clairement d'améliorer l'accès entre autres, si quelqu'un est en fin de vie, les familles, les proches sont souvent confrontés à des situations où le proche, qui est en fin de vie, est inconfortable, a de la douleur et c'est important de ne pas avoir à attendre trois jours ou d'avoir à aller à l'urgence ou autre pour ces genres de situations-là. Fait que les soins virtuels se prêtaient très bien à ça. Alors on a travaillé donc avec plusieurs associations de soins palliatifs régionales pour déployer à leurs aidants. Donc beaucoup des infirmiers infirmières qui eux déployaient avec les familles pour pouvoir par vidéoconférence ou simplement par texto, amener une composante de soins virtuels. Alors clairement, l'utilisation des soins virtuels peut avoir une grosse différence pour les patients qui sont en soins palliatifs.

Mélanie : Pourriez-vous nous parler du succès d'une intervention qui n'aurait pas pu réussir sans l'usage des soins virtuels?

Dr Yanick Beaulieu : En fait, euh une chose très intéressante qui moi, m'intéresse ça fait 20 ans que je suis impliqué non seulement dans la partie clinique médicale avec les patients, mais dans la partie d'enseignement et d'éducation. Qui, dans les 10 dernières années, je l'avais redirigée pour pour tout ce qui est en support à distance pour mieux aider à faire des techniques, des procédures, une de ceux-là est l'échographie. Mais ça s'applique donc dans plein d'autres choses. C'est par exemple des diabétiques, des patients qui ont eu des interventions, qui retournent à la maison et qui ont des plaies complexes. Et pour s'occuper d'une plaie complexe, ça prend quelqu'un qui a une expertise. Alors il y a des programmes qui ont été développées au Québec où des infirmières expertes se connectent en virtuel avec des infirmières qui sont très bonnes, mais qui n'ont pas l'expérience de soins de plaies. Et donc l'infirmière à distance peut voir la plaie, peut interagir pour pointer vers les structures, mentionner quoi faire. Et ça évite au patient de se déplacer. Parce qu'il y a soit le service où l'infirmière va à la maison pour les patients avec mobilité réduite, avec tout le kit de télémédecine; ou le patient se déplace dans un centre local, tout près de chez lui ou chez elle, et l'infirmière à distance peut donner des soins qui peuvent prendre 5 minutes, un support mais qui peut tout changer. Parce que si ce support-là n'est pas approprié, le patient peut avoir besoin d'être hospitalisé, faire une grosse infection et tout. Et quand on pense qu'un soin de plaie par année peut coûter entre 9 et 10,000 dollars par patient et qu'il y a des centaines de milliers de patients par année qui ont des soins de plaies complexes, si on optimise ce processus-là, non seulement on aide le patient, mais on diminue de beaucoup le coût des soins.

Mélanie : Lorsque nous pensons aux soins virtuels, on peut se limiter à penser à un rendez-vous téléphonique avec notre médecin, par exemple. Mais si nous élargissons notre vision, quel serait le portrait d'une approche virtuelle ambitieuse?

Dr Yanick Beaulieu : Prenons un peu le séjour d'un patient qui arrive, qui a besoin de voir son médecin qui va sur Internet, clique sur un bouton pour se trouver un rendez-vous, cédule son rendez-vous, reçoit sa confirmation, le patient prend son rendez-vous mais pas en en réel, en virtuel. C'est l'heure de son rendez-vous; se connecte soit au travail soit à la maison; voit son médecin ou son pharmacien ou sa physiothérapeute parce que ça c'est un point important, que les soins virtuels, c'est toute l'équipe de soins. Alors le patient fait sa session et euh disons qu'il a besoin d'avoir une consultation avec travailleur social ou ergothérapeute; que cette prise de rendez-vous là soit aussi prise en virtuel pour peut-être l'évaluation initiale suivie plus tard, une prescription doit être faite. Le médecin la fait en numérique; le patient peut passer à la pharmacie la chercher. Et donc, c'est un petit scénario, mais que dans la vie de tous les jours, une fois que cette boucle-là du virtuel sera vraiment bien implémentée, ça c'est quelque chose qui peut vraiment faire une grande différence. Ce que je viens de décrire là, c'est pas du tout de la science-fiction, il y a beaucoup de places qui donnent ce genre de service-là. Mais c'est pas encore largement disponible. Ce le sera, c'est des choses simples qui vont pouvoir amener toute l'importance pis l'impacte que la médecine virtuelle peut avoir.

Mélanie : Quelle est votre vision sur ce que les soins virtuels pourraient devenir?

Dr Yanick Beaulieu : En fait ma vision sur ce que les soins virtuels pourraient devenir elle est très très simple parce que même si en virtuel on peut faire beaucoup de choses je travaille encore avec des choses où tu sais, tu te mets des lunettes de réalité virtuelle ou réalité augmentée mais pour moi c'est à la base tout, tout ce qu'on a présentement là qui existe et qui fonctionne très bien : les plateformes de rendez-vous, la pharmacie à distance, les soins virtuels, les textos, les conseils numériques; bien pour moi la vision du futur c'est tout simplement d'implémenter ça de façon adéquate. Alors on n'a pas besoin de chercher des technologies davantage funky là, même s'il y en a pis que ça peut-être super intéressant. De pouvoir travailler sur l'implémentation des différentes étapes qui amènent à ce que ce soit solide et pérenne. Pour moi, c'est ça la vision du présent et du futur pour que dans les cinq prochaines années, je veux pas dire dix, parce que c'est beaucoup trop loin; mais que ce soit bien implémenté pour moi, c'est si on est capable de se rendre là, ça sera déjà une très grosse étape pour ce déploiement avec succès de la médecine virtuelle.

Mélanie : Eh bien, c'est tout pour notre discussion docteur Beaulieu. Je vous remercie beaucoup, c'était très intéressant. Vos réponses étaient très complètes, alors on continue d'avoir espoir pour la suite.

Dr Yanick Beaulieu : Merci. Il faut effectivement garder espoir. On a de belles choses en avant de nous, faut juste pas lâcher.

Vous étiez à l'écoute de Hé-Coutez bien. Merci à notre invité docteur Yannick Beaulieu ainsi qu'à toute l'équipe! Vous pouvez vous abonner à cette émission là où vous obtenez vos balados. Vous pourrez également trouver la version anglophone appelée Eh Sayers. Vous avez aimé cet épisode? Allez l'évaluer, la commenter et vous abonner! Merci de nous avoir écouté et à la prochaine!

Encore une chose! Si vous avez aimé entendre les histoires qui se cachent derrière les chiffres dans le cadre de notre balado, vous pouvez avoir accès à encore plus de contenu en téléchargeant notre toute nouvelle application mobile, StatsCAN. Accédez aux plus récentes publications et soyez informé de la diffusion de nouveaux renseignements qui correspondent à vos intérêts, comme l'agriculture, l'alimentation, la santé ou la science et la technologie. Vous pouvez télécharger gratuitement l'application StatsCAN à partir des boutiques d'applications d'Apple et de Google. Jetez-y un coup d'œil!

Document d'information : Recensement de la population de 2021

Aperçu du recensement

  • Le recensement est mené tous les cinq ans.
  • Le Recensement de 2021 a été le 23e recensement national du Canada.
  • L'année 2021 a marqué le 355e anniversaire du premier recensement.
  • Le questionnaire abrégé (2A) a été reçu par 75 % des ménages canadiens et portait sur les sujets suivants : l'âge, le sexe à la naissance, le genre, les liens entre les membres du ménage, l'état matrimonial, la langue et le service militaire canadien.
  • Le questionnaire détaillé (2A-L) a été reçu par 25 % des ménages canadiens et portait sur les sujets susmentionnés ainsi que sur les activités de la vie quotidienne, les renseignements socioculturels, la mobilité, l'éducation et l'activité sur le marché du travail.

Participation au recensement

  • Comme pour les années précédentes, la participation au Recensement de 2021 était obligatoire. Tous les résidents du Canada étaient légalement tenus de remplir le questionnaire du recensement, conformément aux dispositions de la Loi sur la statistique.

Diffusions principales du Recensement de 2021

  • À compter du 9 février 2022, il y aura sept diffusions « thématiques » principales soulignant les données du Recensement de la population de 2021. Ces diffusions sont publiées dans Le Quotidien, le bulletin de diffusion officielle des données de Statistique Canada, et elles proposent des produits de données, des produits analytiques et des produits de référence.
  • Le 27 avril 2022, Statistique Canada a publié le deuxième ensemble de résultats du Recensement de 2021. Cette diffusion portait sur l'évolution du portrait démographique du Canada et comprenait, pour la toute première fois, des données sur la diversité de genre de notre population. Des questions supplémentaires sur le sexe à la naissance et le genre ont été ajoutées au Recensement de 2021 pour permettre à plus de personnes au Canada d'être mieux représentées. Des données sur les différents types de logements au Canada ont également été publiées.
  • La prochaine diffusion, prévue pour le 13 juillet 2022, dressera le portrait des familles et des ménages canadiens et fournira des renseignements sur l'expérience militaire passée et actuelle et sur le profil du revenu des Canadiens et des Canadiennes. Beaucoup d'autres histoires sont à venir :
    • 27 août
      • diversité linguistique et utilisation du français et de l'anglais au Canada;
    • 21 septembre
      • Premières Nations, Métis et Inuits au Canada;
      • portrait du logement au Canada;
    • 26 octobre
      • portrait de la citoyenneté et de l'immigration au Canada;
      • composition ethnoculturelle et religieuse de la population;
      • mobilité et migration.
  • La dernière diffusion sur la scolarité, la population active et l'instruction dans la langue officielle minoritaire aura lieu le 30 novembre 2022. À la suite des sept diffusions principales, d'autres diffusions portant sur de nouvelles analyses et de nouveaux produits suivront (dates à déterminer).

Pourquoi Statistique Canada mène-t-il un recensement?

  • Le recensement brosse un portrait des personnes au Canada et des lieux où elles vivent.
  • Le recensement fournit des renseignements de grande qualité qui sont utilisés par tous les ordres de gouvernement, les entreprises et divers organismes de services sociaux et organismes communautaires.
  • Les données du recensement servent à gérer les programmes gouvernementaux et à planifier les garderies, les écoles, les hôpitaux, le logement, la formation axée sur les compétences pour l'emploi, le transport public et les services d'urgence.
  • Le recensement est également mené afin de satisfaire aux exigences de la loi. Les chiffres de population qui proviennent du recensement sont utilisés pour recalculer les estimations de la population, qui à leur tour servent à déterminer la représentation au Parlement, à calculer les paiements de transfert entre les différents ordres de gouvernement et à appuyer divers programmes gouvernementaux partout au pays.
  • Les données du recensement sont essentielles pendant la pandémie de COVID-19 puisqu'elles sont utilisées à des fins de préparation aux situations d'urgence et d'intervention d'urgence. Tous les ordres de gouvernements ont besoin des données du recensement à l'échelle locale sur la population, l'âge, le revenu et le logement pour déterminer les personnes qui sont les plus vulnérables à la crise sanitaire et économique en cours. En outre, la répartition des vaccins a été effectuée selon le nombre d'habitants, au moyen des données du recensement.
  • Les données du recensement nous aideront à mieux comprendre les répercussions de la pandémie sur les différents groupes de population et les différentes collectivités, ainsi que l'évolution de ces derniers depuis le précédent recensement mené en 2016. En outre, les données recueillies dans le cadre du Recensement de 2021 éclaireront bon nombre de décisions stratégiques en matière d'économie et de santé qui devront être prises par tous les ordres de gouvernement au cours des mois et des années à venir, au moment où la population canadienne continue de subir les répercussions de la pandémie.

Comment Statistique Canada a-t-il mené le recensement?

  • Statistique Canada s'est adapté à la réalité de la pandémie de COVID-19 pour mener un recensement de façon sécuritaire, ce qui a permis aux Canadiens et aux Canadiennes de raconter leur histoire et de fournir des renseignements essentiels sur leur pays et leurs collectivités.
  • Les procédures de collecte dans le cadre du recensement ont été repensées afin de garantir la sécurité des répondants et du personnel du recensement en limitant le nombre de contacts nécessaires pour participer à cet important exercice.
  • Tous les ménages ont été encouragés à remplir le questionnaire en ligne afin de respecter l'approche sans contact de la collecte des données du recensement.
  • Aucun employé du recensement de Statistique Canada n'a été autorisé à visiter les logements collectifs institutionnels (comme les résidences pour personnes âgées et les établissements de soins de longue durée) ou à y entrer.

Langues et autres formats

  • Les questions du Recensement de 2021 étaient disponibles en 25 langues (13 langues autochtones et 12 langues immigrantes), en plus du français et de l'anglais. Le questionnaire du recensement était, quant à lui, disponible uniquement en français et en anglais et devait être rempli dans l'une de ces deux langues.
  • Des documents tels que des questionnaires en gros caractères ainsi que les versions en braille, en vidéo et en audio des questions pouvaient être obtenus sur demande en communiquant avec l'Assistance téléphonique du recensement.

Contenu du recensement

  • Statistique Canada a entrepris un processus rigoureux de consultation, de mise à l'essai, d'examen et d'approbation afin d'assurer que les questions figurant dans le Recensement de 2021 répondent aux demandes de renseignements clés.
  • Le contenu proposé par Statistique Canada a été soumis au Cabinet, et les questions du Recensement de 2021 ont été prescrites par décret du conseil, comme l'exige la Loi sur la statistique.
  • Le questionnaire abrégé (2A) du Recensement de la population de 2021 comportait jusqu'à 17 questions sur des sujets comme l'âge, le sexe à la naissance, le genre, les liens entre les membres du ménage, l'état matrimonial, la langue et le service militaire canadien.
  • Le questionnaire détaillé (2A-L) du Recensement de la population de 2021 contenait les mêmes questions que celles du questionnaire abrégé en plus des questions nouvelles ou modifiées sur les origines ethniques ou culturelles, la religion, la citoyenneté et l'immigration, les Premières Nations, les Métis et les Inuits, le travail et le logement. Les changements apportés aux questions sont décrits dans les feuillets d'information propres à chaque sujet, et sont disponibles sur le site Web de Statistique Canada.

Taux de réponse

Les taux de réponse de la collecte à l'échelle nationale pour le Recensement de la population se chiffrent comme suit :

Les taux de réponse de la collecte en ligne à l'échelle nationale pour le Recensement de la population se chiffrent comme suit :

Veuillez consulter le site Web de l'organisme pour obtenir une ventilation détaillée (par région et par type) des Taux de réponse de la collecte du Recensement de la population de 2021.

Statistique Canada et Mila s’associent pour faire progresser l’intelligence artificielle et l’apprentissage automatique éthique

Le 3 mai 2022

Statistique Canada est fier d’annoncer un nouveau partenariat avec Mila, le plus important institut de recherche universitaire au monde dans le domaine de l’apprentissage profond. En se joignant à la communauté diversifiée de Mila, Statistique Canada pourra accéder à un plus vaste écosystème d’intelligence artificielle et à une boîte à outil de partenariat, ce qui permettra à l’organisme d’accélérer ses recherches en matière d’intelligence artificielle et d’apprentissage automatique.

« La science des données est une discipline d’équipe, et ce partenariat nous permet d’enrichir collectivement les connaissances de nos équipes respectives dans ces domaines de recherche cruciaux », indique le statisticien en chef du Canada, Anil Arora. « En tant que chef de file respecté dans le domaine de la science des données, Statistique Canada travaille à des projets de pointe en matière d’intelligence artificielle et d’apprentissage automatique. Ce nouveau partenariat appuie notre engagement en matière de modernisation alors que nous continuons de chercher des éléments susceptibles d’être améliorés. Il nous aide aussi à conserver notre rôle de chef de file mondial en matière de statistiques officielle et d’offrir de meilleurs services aux Canadiens et aux Canadiennes. »

Mila est une organisation à but non lucratif reconnue mondialement pour ses importantes contributions au domaine de l’apprentissage profond, en particulier dans les domaines de la modélisation du langage, de la traduction automatique, de la reconnaissance d’objets et des modèles générateurs. Établir des relations avec la communauté de 900 chercheurs de Mila permettra à Statistique Canada d’être exposé aux points de vue d’une variété de pairs et de collaborer avec des communautés de pratique aux idées semblables. Cela donnera aussi accès à Statistique Canada à un bassin de plus en plus important de talent au Canada et à l’étranger.

« Ce partenariat entre Mila et Statistique Canada constitue une occasion intéressante de combiner nos expertises et de relever certains défis précis en matière d’apprentissage automatique et d’intelligence artificielle », affirme Stéphane Létourneau, vice-président exécutif à Mila. « La communauté de recherche de Mila œuvre quotidiennement à la démocratisation de l’apprentissage automatique et au développement responsable de l’intelligence artificielle. Nous sommes ravis de poursuivre nos efforts avec notre nouveau partenaire. »

Anil Arora a jouté que ce partenariat permettra à Statistique Canada d’avoir un accès direct à experts émergeants dans le domaine. « Le fait de pouvoir tirer parti de cette expertise, de collaborer à des projets et de découvrir les travaux que mène la prochaine génération de chercheurs et chercheuses de pointe en intelligence artificielle et en apprentissage automatique grâce à ce partenariat représente un atout formidable pour l’organisme. »

Coordonnées

Relations avec les médias
Statistique Canada
statcan.mediahotline-ligneinfomedias.statcan@statcan.gc.ca

Relations avec les médias
Mila
medias@mila.quebec

Statistique Canada tiendra une conférence de presse pour présenter les données du recensement de 2021 sur la transformation démographique du Canada

Avis aux médias

Le 31 mars 2022, Ottawa (Ontario)

Le 27 avril 2022, Statistique Canada publiera le deuxième ensemble de résultats tirés du Recensement de 2021. Cette diffusion portera sur la transformation démographique du Canada. De plus, pour la toute première fois, des données sur la diversité de genre des personnes au Canada seront diffusées. Des questions supplémentaires sur le sexe à la naissance et le genre ont été ajoutées au Recensement de 2021 afin de permettre à un plus grand nombre de Canadiens et Canadiennes d'être mieux représentés. Des données sur l'âge et les différents types de logements au Canada seront également publiées.

Les données seront diffusées dans Le Quotidien de Statistique Canada, à 8 h 30, heure de l'Est, le 27 avril 2022. Des renseignements sur les diffusions ultérieures de 2022 sont disponibles à Planification de la diffusion des données du Recensement de 2021 — Plans de diffusion.

Les représentants de Statistique Canada tiendront une conférence de presse pour présenter les résultats d’ordre général sur le pays, les provinces et les territoires dans le cadre de la deuxième diffusion du Recensement de 2021. Les participants seront disponibles pour répondre aux questions des médias à la suite de leurs allocutions.

Le 27 avril et les jours qui suivent, Statistique Canada accordera également des entrevues au sujet de cette diffusion de données du Recensement de 2021. Les membres des médias sont invités à présenter leurs demandes d'entrevue et/ou de totalisations personnalisées à la Ligne info-médias, et ce, avant la date de diffusion.

Date

Le 27 avril 2022

Heure

De 9 h 30 à 10 h 30 (HAE)

Lieu

La conférence de presse se tiendra en mode virtuel.

La participation à la partie questions et réponses de cet événement est réservée aux membres accrédités de la Tribune de la presse parlementaire canadienne. Les médias qui ne sont pas membres de la Tribune de la presse peuvent contacter pressres2@parl.gc.ca pour demander un accès temporaire. Une ligne de téléconférence est également disponible pour les médias qui souhaitent suivre l'événement en mode écoute :

Numéros d'appel (en mode écoute seulement) :
Local : 613-954-9003
Sans frais : 1-866-206-0153
Code d'accès : 7501902#

Coordonnées :

Relations avec les médias
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Recensement de 2021& : Sexe à la naissance et genre - un portrait global

Vidéo -Recensement de 2021 : Sexe à la naissance et genre - un portrait global

Cette vidéo présente certains renseignements sur la nouvelle question sur le genre comprise dans le Recensement de 2021 et sur l'ajout de la précision « à la naissance » à la question sur le sexe. Elle souligne l'importance de ces modifications qui permettent d'accroître l'inclusivité des données et qui bénéficient à tous les individus au Canada.