Chapitre 5. Les comportements langagiers à la maison et au travail

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Dans cette section on examinera la répartition de l'ensemble de la population de langue française selon la langue parlée à la maison et, pour la population active, la langue utilisée au travail. Dans chaque cas, le recensement procure deux mesures. En ce qui a trait à la langue parlée à la maison, on distinguera celle parlée le plus souvent de celles parlées régulièrement. Il en va de même pour la langue de travail : on distinguera la langue la plus souvent utilisée des autres langues utilisées régulièrement au travail. On abordera également la dimension régionale des comportements langagiers à la maison et au travail.

La langue parlée à la maison

On observe des différences notables dans l'usage des langues au foyer entre les groupes définis par la première langue officielle parlée (PLOP) et le statut d'immigrant. Chez les natifs de PLOP français, 61 % déclarent utiliser le français le plus souvent à maison, alors que 37 % déclarent utiliser l'anglais (tableau 5.1). Une très faible proportion déclarent parler ou bien les deux langues officielles ou une langue non officielle (seule ou avec une langue officielle). Chez les immigrants de PLOP français, 48 % déclarent utiliser le français le plus souvent à la maison, 32 % déclarent l'anglais et près de 20 % déclarent au moins une langue non officielle.

Tableau 5.1 Population selon le statut d'immigrant, la première langue officielle parlée et la langue parlée le plus souvent à la maison, Canada moins le Québec

Aucune des personnes de PLOP français-anglais n'a déclaré utiliser que l'anglais ou que le français le plus souvent à la maison, ce qui s'explique par la méthode de « construction » de ce groupe de PLOP français-anglais. Chez les natifs de PLOP français-anglais, 70 % déclarent utiliser au moins une langue non officielle, alors que moins de 30 % déclarent utiliser les deux langues officielles1. Parmi les immigrants de PLOP français-anglais, la grande majorité (95 %) déclarent utiliser une langue non officielle uniquement. Les immigrants non francophones se répartissent à peu près également dans les catégories « anglais seulement » ou « langue non officielle » (sans ou avec une langue officielle).

Afin d'obtenir un portrait plus complet de l'usage du français au foyer chez les immigrants francophones, on a combiné à l'information sur la langue parlée le plus souvent à la maison celle issue de la question sur les langues parlées régulièrement à la maison que fournit le recensement depuis 2001. L'ajout de cette dimension accroît la fréquence de l'usage du français au foyer, mais ne modifie pas radicalement la tendance qui se dessinait à partir de l'information portant uniquement sur l'usage du français en tant que langue le plus souvent parlée à la maison. La différence entre les personnes de PLOP français et les personnes de PLOP français-anglais demeure importante (graphique 5.1). L'ajout des catégories du français en tant que langue parlée régulièrement à la maison a pour conséquence d'augmenter le nombre des personnes qui déclarent utiliser le français au moins régulièrement à la maison, mais dans des nombres et des proportions très inégales d'un groupe à l'autre. Tant en termes absolus que relatifs, ce sont les deux groupes des personnes de PLOP unique français (natifs et immigrants) qui croissent le plus, soit près de 146 000 (ou 17 %) dans le cas des personnes nées au Canada de PLOP français et de 9 800 (ou 16 %) dans le cas des immigrants de PLOP français. Au total, chez ces deux groupes, la proportion totale des personnes qui déclarent parler au moins régulièrement le français à la maison atteint 80 % et 73 % respectivement.

Graphique 5.1 Population selon le statut d'immigrant et la première langue officielle parlée ayant le français en tant que langue parlée le plus souvent ou régulièrement à la maison, Canada moins le Québec

L'effet de la prise en compte de l'information sur le français, langue parlée régulièrement à la maison, chez les personnes de PLOP français-anglais est moins visible. Chez les natifs de PLOP français-anglais, l'effectif des personnes qui déclarent parler au moins régulièrement à la maison s'accroît à peine (moins de 2 000 locuteurs). Chez les immigrants de PLOP français-anglais, l'augmentation est plus importante, mais le pourcentage de ceux qui déclarent utiliser le français au moins régulièrement à la maison reste faible, soit 7 %.

La langue utilisée au travail

L'anglais domine comme principale langue utilisée au travail à l'extérieur du Québec, même parmi les personnes dont la première langue officielle parlée est le français. L'usage de l'anglais est toutefois le plus répandu chez les immigrants non francophones, avec 90 % (tableau 5.2). Cette proportion atteint respectivement 77,5 % et 81,3 % chez les natifs et les immigrants de PLOP français-anglais. Bien que dans une moindre proportion, l'anglais est également utilisé au travail par 58 % et 63 % des natifs et immigrants de PLOP français. Chez ces deux groupes, le français arrive au deuxième rang, avec respectivement 34 % et 21 %. Chez les personnes de PLOP français-anglais et chez les immigrants non francophones, l'usage du français comme principale langue de travail reste marginal. On trouve aussi un certain nombre de personnes qui déclarent utiliser les deux langues officielles le plus souvent au travail, sauf chez les immigrants non francophones. Ainsi, 10 % des immigrants de PLOP français utilisent le français et l'anglais, contre 12 % des personnes de PLOP français-anglais nées au Canada.

Tableau 5.2 Population active selon le statut d'immigrant, la première langue officielle parlée et la langue utilisée le plus souvent au travail, Canada moins Québec

Contrairement à la langue parlée à la maison, la prise en compte de l'information sur le français, langue utilisée régulièrement au travail, accroît substantiellement le niveau d'utilisation de cette langue au travail chez les quatre groupes définis par la première langue officielle parlée (PLOP) et le statut d'immigrant (graphique 5.2). Chez la population active de PLOP français, la proportion de ceux qui déclarent utiliser au moins régulièrement le français au travail constitue plus de la moitié de l'effectif total de chaque groupe, soit 71 % et 57 % des personnes nées au Canada et des immigrants respectivement. La répartition des utilisateurs du français au travail entre ceux qui déclarent l'utiliser le plus souvent et ceux qui déclarent l'utiliser régulièrement penche en faveur des premiers, soit 41 % et 30 % dans le cas des personnes nées au Canada et 32 % et 25 % chez les immigrants de PLOP français.

Graphique 5.2 Population ayant le français en tant que langue utilisée le plus souvent ou régulièrement au travail selon le statut d'immigrant et la première langue officielle parlée, Canada moins le Québec

Chez les personnes de PLOP français-anglais, l'apport de ceux qui déclarent utiliser le français régulièrement au travail est également important et double le nombre d'utilisateurs du français en milieu de travail. Ainsi, chez les immigrants actifs de PLOP français-anglais, la proportion de ceux qui utilisent régulièrement le français au travail (13 %) est même plus élevée que ceux qui l'utilisent le plus souvent (10 %). On observe une tendance similaire chez les natifs de PLOP français-anglais : 15 % déclarent utiliser régulièrement le français au travail et 17 % le plus souvent.

Différences régionales

Parce que les communautés francophones du pays présentent des caractéristiques très diversifiées, on doit s'attendre à ce que les comportements langagiers à la maison et au travail varient en conséquence. On s'intéressera ici à l'usage du français comme langue parlée le plus souvent ou régulièrement à la maison et comme langue utilisée le plus souvent ou régulièrement au travail par les natifs et les immigrants francophones (après redistribution de la catégorie français-anglais) en 2006 dans les grandes régions du Canada et dans quelques agglomérations urbaines (RMR). On centrera l'attention sur le seul usage du français (à la maison ou au travail) sans distinguer les situations où d'autres langues sont utilisées. C'est donc dire que l'usage du français inclut l'usage simultanée du français et de l'anglais, ou du français en plus des autres langues.

L'usage du français au foyer chez les francophones nés au pays s'atténue, grosso modo, d'est en ouest (graphique 5.3). Par exemple, plus de 90 % déclarent parler le français au moins régulièrement à la maison en Atlantique (surtout au Nouveau-Brunswick), contre 50 % en Colombie-Britannique. On observe le même phénomène en ce qui a trait à l'utilisation du français au travail (graphique 5.4). Ainsi, presque 90 % des natifs de langue française déclarent utiliser le français le plus souvent au travail en Atlantique comparativement à 35 % en Alberta et en Colombie-Britannique.

Graphique 5.3a Population de langue française (après redistribution de la catégorie français et anglais) qui parle le plus souvent le français (seul ou avec une autre langue) à la maison selon le statut d'immigrant et la région

Graphique 5.3b Population de langue française (après redistribution de la catégorie français et anglais) qui parle le plus souvent le français (seul ou avec une autre langue) à la maison selon le statut d'immigrant, pour quelques régions métropolitaines de recensement

Graphique 5.4a Pourcentage de la population active de langue française (après redistribution de la catégorie français et anglais) qui utilise le plus souvent le français (seul ou avec une autre langue) au travail selon le statut d'immigrant par région

Graphique 5.4b Pourcentage de la population active de langue française (après redistribution de la catégorie français et anglais) qui utilise le plus souvent le français (seul ou avec une autre langue) au travail selon le statut d'immigrant pour quelques régions métropolitaines de recensement, Canada moins le Québec

Cette caractéristique de l'usage du français est marquée par une exception chez les immigrants francophones. Contrairement à ce qu'on observe chez les natifs, le pourcentage des personnes qui parlent au moins régulièrement le français à la maison est moins élevé en Ontario que dans les deux provinces des Prairies. La différence est d'environ dix points de pourcentage en faveur de cette dernière région. La raison de ce phénomène tient notamment au fait qu'un nombre substantiel d'immigrants francophones de l'Ontario résident à Toronto2. Or, une proportion importante des francophones de Toronto ont et le français et l'anglais comme PLOP et nombre de ces derniers font peu de place au français dans leur vie quotidienne. Toronto représente donc une exception dans cette province, surtout si on la compare à Ottawa, le deuxième centre d'immigrants francophones de l'Ontario, où le nombre d'immigrants de PLOP français est supérieur au nombre d'immigrants de PLOP français-anglais. La métropole canadienne se compare davantage à Calgary et Vancouver qu'à Ottawa (où résident le quart des francophones de l'Ontario). Comme à Calgary et Vancouver, Toronto compte une importante population immigrée de PLOP français-anglais, près de deux fois supérieure au nombre de personnes ayant le français comme seule PLOP.

À Winnipeg au Manitoba, les francophones déclarent parler au moins régulièrement le français à la maison et utiliser au moins régulièrement cette langue au travail dans des proportions de 70 % et 53 % respectivement dans le cas des personnes nées au Canada et de 61 % et 51 % dans le cas des immigrants. À Toronto, ces pourcentages sont beaucoup moindres : 60 % et 52 % respectivement chez les natifs et 41 % et 38 % respectivement chez les immigrants de langue française. Les villes de Moncton et d'Ottawa affichent des pourcentages d'utilisation du français chez les natifs et les immigrants francophones nettement supérieurs aux résidents des autres villes.

En résumé, l'examen des comportements langagiers à la maison et au travail chez les immigrants francophones établis à l'extérieur du Québec montre l'existence d'une concurrence entre le français et l'anglais parlés à la maison et utilisés en milieu de travail. Chez les immigrants de PLOP français, moins de la moitié déclarent parler la langue française le plus souvent à la maison, alors que 32 % déclarent parler l'anglais et 10 % une langue non officielle. Quant aux immigrants de PLOP français-anglais, le français parlé à la maison est très peu répandu, même en tenant compte du nombre de locuteurs qui déclarent le parler à la maison sur une base régulière (plutôt que le plus souvent).

En milieu de travail, la présence de l'anglais est très répandue. Chez tous les groupes définis par la première langue officielle parlée (PLOP) et le statut d'immigrant, l'anglais domine largement comme langue le plus souvent utilisée au travail. Chez les immigrants de PLOP français, 63 % déclarent utiliser l'anglais le plus souvent au travail. Le fait d'inclure aux utilisateurs du français sur le lieu de travail ceux qui déclarent l'utiliser régulièrement accroît cependant de façon non négligeable l'effectif de la population active qui déclare l'utiliser au moins régulièrement.

Enfin, les tendances régionales indiquent que l'usage du français diminue d'est en ouest : il est le plus important en Atlantique, en particulier au Nouveau-Brunswick, demeure élevé dans le nord de l'Ontario et à Ottawa, et atteint le plus faible niveau d'utilisation à Toronto (et dans le sud de l'Ontario en général) et dans les deux provinces de l'Alberta et de la Colombie-Britannique.


Notes

  1. Que des personnes nées au Canada déclarent utiliser une langue non officielle le plus souvent à la maison témoigne d'une situation, qui suggère la présence d'unions mixtes, d'importantes communautés ethnoculturelles qui ont su se reproduire d'une génération à l'autre et d'un bassin important d'enfants d'immigrants (de deuxième génération).
  2. Toronto comptait au Recensement de 2006 53 700 immigrants francophones dont la majorité, soit 34 800, étaient de PLOP français-anglais. À Ottawa, le nombre d'immigrants francophones atteignait 23 600 en 2006, dont la majorité, contrairement à Toronto, étaient de PLOP français. Cette différence entre Toronto et Ottawa en termes de composition de la population immigrante francophone peut se généraliser entre les villes du sud (Hamilton, Windsor) et les villes du nord (Sudbury, Timmins) de l'Ontario.

 

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